VII - Étape en l’usine de Glasgow
Avertissement : Vous l’aviez compris, ceci n’est qu’un
roman, une fiction, une « pure construction intellectuelle », sortie tout droit
de l’imaginaire de son auteur.
Toute ressemblance avec des personnages, des lieux, des
actions, des situations ayant existé ou existant par ailleurs dans la voie
lactée (et autres galaxies), y compris sur la planète Terre, y est donc
purement, totalement et parfaitement fortuite !
Il m’en dira tout juste, dans l’hélicoptère qui nous ramène en matinée,
que la lady aurait vraiment bien travaillé mais qu’il reste beaucoup de points
à régler.
« C’est conforme au cahier des charges. Ses croquis de
« finition » sont alléchants même s’il reste encore beaucoup de
détails qui pour l’heure sont sans solution. Au surplus, il y a le souci des
programmations. »
Je crois comprendre que pour ce qui est de faire bouger « ses
machines », ça a l’air convenable.
« En revanche pour ce qui est des logiciels comportementaux, elle
reste bien trop basique. Il va vraiment falloir que je recrute et c’est là,
comme prévu, que vont commencer les ennuis avec les « hostiles ». »
Ah, c’était donc ça !
Le lendemain matin après un copieux « breakfast », l’hélicoptère
refait un aller et retour.
Le breakfast, chez les anglais, et même les écossais, c’est gargantuesque.
Je me régale de pancakes moelleux, de tranches fines de lard grillé, d’œufs
brouillés, de fromages blancs, de flans à la vanille et de crème anglaise.
J’opte pour une bassine de jus d’orange pressée, parce que leur café est
immonde. Et comme le thé m’aura laissé un mauvais souvenir hier soir, je ne
retente pas l’expérience.
Lady Margareth nous salue et nous partons pour un vol sans histoire, la
météo un peu plus calmée que la veille.
Paul en profite pour me narrer l’histoire des sœurs McShiant et la façon
dont il les a rencontrées.
« En fait Lady Catherin, chez qui on va pour lui rende hommage,
est une copine de Lady Joan. Je vous rappelle, Alexis, que cette dernière je la
croise il y a quelques années pour récupérer les fonds détournés par le
président Thieriment qu’il avait cantonné dans un trust anglais dont le gérant
était le premier mari de Lady Joan.[1] »
C’est marqué comme ça dans un bouquin que je n’ai toujours pas reçu… Il
est pourtant payé depuis belle lurette.
« Sir Thornner décède de sa belle mort et son épouse reprend
l’activité de son cabinet des Lloyds. Je la croise donc nécessairement pour
qu’elle me remette les fonds que je récupère au nom de la République.
Mais à ce moment-là, elle gère aussi des participations dans
les affaires de McShiant et tout le monde se demande ce que fait le lord dans
les grottes de son château. Même les services secrets de sa Majesté. Et comme
il est pair d’Angleterre, ils y vont à reculons : c’est moi qu’ils
chargent d’aller jeter un œil. »
En fait, le vieux lord essaye de mettre au point sa machine surnuméraire,
à énergie libre que Paul aura un temps stocké dans les locaux de
Kremlin-Bicêtre et qui depuis est parquée dans « le bunker » de
Normandie, comme j’ai pu le constater.
« Je suis invité au mariage du fils de Lady Catherin et je me fais
inviter jusqu’au château dont on vient par Lord McShiant. Lui-même est en
cheville avec la fondation Risle et ses implants et prothèses, mais je ne le
saurai que plus tard. »
Le monde serait-il décidément si petit ?
« Ceci dit, je fais la visite des installations de Glasgow (qui
se situent en périphérie excentrée de la ville où l’on va se poser directement
en hélicoptère). C’est alors une distillerie de whisky déjà ancienne et une
usine de traitement de surface posée en face. On y imprime et fabrique
désormais des puces électroniques pour les industries informatiques et de la
connectique.
Un peu plus tard, je conviens d’un deal à l’occasion de la
succession de Lord McShiant : je porte une partie des parts de la
distillerie jusqu’à leur cession à un major des spiritueux et je rachète le
stock de vieux whisky. C’est la naissance de « Prestige Spirit » au
Kremlin-Bicêtre. »
Ainsi, c’est comme ça que « la boutique » de Loïc serait née…
Je m’étonne.
« J’avais un peu d’argent disponible et j’ai juste fait fructifier
mes avoirs. Notez que le fisc m’en a piqué la moitié à cette occasion[2]… »
Ah voilà, je comprends mieux sa phobie fiscale l’empêchant d’épouser
Florence, la mère de ses gamins[3] !
« Notez, il en est resté un peu pour financer « Château sur
Cher » et les travaux de Normandie. »
« Ceci dit, il reste l’usine de puces que les sœurs ont gardé et
que l’on va visiter. Et j’ai gardé une profonde affection pour ces trois femmes-là.
Florence n’était pas encore dans mon circuit, à cette époque-là. »
Et pour quelles raisons particulières, si ce n’est pas indiscret ?
« J’ai mis enceinte Lady Joan. Mais elle n’a pas pu garder le
gamin. En revanche, elle en aura profité pour se marier à un vieux lord ruiné qui
cherchait un héritier qu’il n’avait pas pu avoir. Il ne l’aura jamais eu,
finalement. »
Triste…
« Non, trop vieux et trop grincheux : elle lui en apportait
un tout fait et ce n’est même pas un mariage d’argent parce qu’il était complétement
ruiné par des mafieux amerloques. Et puis lui aussi est mort… C’est une
croqueuse d’homme : deux fois veuve !
Elle et Lady Catherin sont des femmes qui apprécient le côté
sensuel de la luxure : il faut dire qu’elles sont douées pour ça.
Des femmes fontaines ! Elles en disent que c’est leur
« petit club »… »
Des femmes-fontaines ?… J’aurai décidément tout entendu ce jour-là !
Je ne savais même pas que ça pouvait exister :
« mouiller », d’accord, jusqu’à être détrempée je sais ce que c’est !
Mais il m’explique que « fontaine », ça voulait dire de véritables
« éjaculations » de cyprine, par jets successifs et continus, que je n’imaginais
même pas jusque-là que ça pouvait exister et que je reprenne l’opus
« Mains invisibles – tome II »[4]
pour le mettre « sous presse » !
Il y en a qui sont extraordinaires, tout de même…
Émerge alors une idée : « Si je comprends, nos
« circuits » en perfide Albion, c’est juste « à nous les petites
anglaises », pour vous ? »
Il ne comprend pas tout de suite l’allusion… semble-t-il.
« Qu’est-ce que vous allez imaginer, Alexis ! Je vous raconte
le passé, là. On y fait aussi des affaires et moi je suis rangé des
voitures ! J’ai assez contribué au « bonheur des dames » comme
ça !… »
Il ne le dit pas, mais je fais le rapprochement avec son attitude pour le
moins « distante » avec moi.
Ce n’est pas que je sois une « fille canon », type
« Bimbo » ou top-model, etc. mais depuis quelques mois je
m’interroge, je l’ai déjà confessé…
D’autant qu’il m’aura affirmé que je ne suis pas sa fille, même si je n’en
ai pas encore, à ce moment-là, la preuve formelle, je veux dire biologique.
« Il n’empêche, je les ai sorties de la mouise à cette époque-là,
parce que le fisc britannique est aussi vorace que le français quand il s’agit
de se payer sur les cadavres… »
La belle image que voilà, dois-je dire…
« Bref, on va la saluer et on rentre. Vous, vous retournez à vos
interviews, à tous ces bouquins futurs à me fournir et moi je repars au
Chagos : il y a encore du travail. Il faut que je finisse la piste d’avion
pour recevoir le président Makarond… »
Je suis déjà au courant de ce projet qui peine à prendre forme,
semble-t-il, je veux dire la piste d’avion…
Sauf à savoir les talents « particuliers » cachés de lady
Catherin, cette femme ne paye pas de mine : aucun charme apparent, une
touffe de poils hirsute sur la tête, un visage quelconque, pas vraiment de
formes féminines évidentes, hors les os du bassin qui sont larges ce qui lui
aplatit les fesses qu’elle a… désespérément plates, tout comme sa poitrine.
Jamais on ne soupçonnerait qu’elle ait « des talents » au lit !
Peu importe, entre deux bises, elle me fait quand même l’honneur de
visiter son « usine à puce » au pas de charge, non sans s’interrompre
pour donner de la voix sur un ou deux ateliers au passage : l’œil de la
« boss » !
Ici la fabrication des masques, là les chaines d’assemblage, plus
l’atelier d’encapsulage : ils font surtout des puces « Rfid »,
de celles qui s’identifient toutes seules quand elles passent devant un
détecteur.
Il parait que désormais on en consomme des centaines de millions pour en
mettre sur tous les produits qui circulent à travers la planète et jusque dans
les étiquettes de vos vêtements !
Paul ne lui parle même pas des travaux de sa sœur lady Margareth, pas plus
du « Gel Birgit », la woman-in-black à l’origine de ses voyages
temporels (je suis à l’époque aussi en train de « mettre en forme »
« Mains invisibles – tome II » que je découvre)[5],
en revanche, il lui suggère de monter une brasserie pour se remettre à faire de
la bière !
Ou d’investir dans de nouvelles machines à imprimer ses puces :
« Avec le Brexit, il va y avoir une demande plus importante et
probablement prioritaire. »
Elle n’a plus le matériel ni les locaux et pas vraiment d’argent à
investir, mais lui insiste : il peut lui faire un prêt.
Et nous repartons après la série de bises amicales d’au revoir.
Et dans l’avion qui nous ramène à Londres, nous poursuivons.
« Mais quelle idée de lui faire faire de la bière en ce pays qui
en a déjà plein ! »
C’est si facile à faire et je la vois bien de monter un petit commerce
pour la distraire me répondra Paul…
« Mais j’avoue qu’avec la redéfinition des priorités industrielles
des britanniques, d’un côté avec le Brexit, de l’autre avec la crise de la
grippe chinoise à venir, de nouvelles lignes de production de puce serait plus
judicieux : les anglais feront tout pour sauver leur Guinness, pourtant
brassée à Dublin, dans l’UE… »
Admettons.
« Le plus urgent, c’est de préparer la suite : notre prochain
départ pour les Canaries, tant que c’est encore possible. »
Ah oui, comme ça, sans visa ni vaccination ?
« Pas besoin, c’est dans la zone euro et l’espace Schengen ! »
Ce n’est pourtant pas si loin que ça du continent africain et toutes ses
maladies endémiques, si je ne me trompe pas.
« Il faut que je vous précise pour que vous me le retraciez.
Vous le savez, votre déclaration à la brigade de gendarmerie
de votre canton à propos de l’incendie de Notre-Dame de Paris aura au moins eu pour
conséquence de vous faire rencontrer la Proc’ Trois-Dom… »
Oui, je sais puisque c’est comme ça que j’ai pu aussi rencontrer le
contrôleur général Scorff, passé jusque-là sous « mon radar
personnel », avec la bénédiction de Paul lui-même et quelques autres…
« Que vous imaginez bien qu’elle en a fait un rapport qui est
remonté très haut dans la hiérarchie du renseignement dans le cadre de
l’enquête sur cet incendie… »
Je sais déjà ça aussi puisque Gustave Morthe-de-l’Argentière m’aura tancée
sur mes activités « obscures » sinon marginales à celles de la CISA
et que le président Makarond aura fait un détour pour visionner ces étranges
images piratées…
« Oui, je suis au courant pour Gustave. Il s’inquiète vraiment pour
vous et votre santé. C’est un soldat qui prend soin de la santé de ses troupes,
comme n’importe quel bon officier…
Ce n’est pas tout. Les services enquêtent sur moi et sur
lui, et à part la CISA, il ne leur est pas très utile, mais… Je vous avais également
averti que le président Makarond viendrait aux Chagos dans le courant du mois d’octobre
prochain. Sur mon invitation. Que j’ai lancé le mois dernier ».
Si mes souvenirs restent bons de cette soirée-là, il n’avait pas encore
dit oui.
« Vous l’avez peut-être deviné, il me doit une fière chandelle et
lui – et sa femme aussi, d’ailleurs – s’en souvient très bien. Mais jusque-là,
il n’avait pas pu me mettre la main dessus… et pour se faire, il a même prévu
de me promouvoir au grade d’Officier de la Légion d’honneur sur ses quotas du
14 juillet. »
Je sais déjà.
C’est quoi, à propos, cette histoire de « fière
chandelle » ?
« Ah, je vois que vous n’êtes pas encore parvenu à lire tout ce
qu’aura inventé mon biographe, l’autre, l’officieux, I-Cube !
Eh bien, pour éclairer votre lanterne, en juillet 2017, il a
été victime d’un attentat qui aurait dû mal tourner si je n’avais pas été là[6]. »
C’est-à-dire ?
« Un cuistot des cuisines de l’Élysée s’était radicalisé en douce
et l’attendait pour lui faire la peau dans ses appartements après avoir ligoté
sa femme pour répondre à l’appel de djihadistes lancé deux mois avant… Mais je
l’ai abattu sans autre forme de procès : légitime défense.
Que ça les a quand même traumatisés, tous les deux.
Depuis, tout le quartier est protégé comme un fortin, il y a
eu de la mutation en cascade et même le CIMA de l’époque a été viré ! »
Ah oui, je me souviens de cet épisode-là de l’actualité des premiers mois
du quinquennat…
[1] Cf.
« Les enquêtes de Charlotte », épisode « Opération
Juliette-Siéra », aux éditions Book envol.
[2] Cf.
« Les enquêtes de Charlotte », épisode « Au nom du père »,
à paraître aux éditions I3
[3] Cf.
« Les enquêtes de Charlotte », épisode « Sur les traces de Charlotte »,
aux éditions I3
[4] Cf.
« Les enquêtes de Charlotte », épisode « Mains Invisibles – tome
II », aux éditions I3
[5] Cf.
« Les enquêtes de Charlotte », épisode « Mains invisibles – tome
II », aux éditions I3
[6] Cf.
« Les enquêtes de Charlotte », épisode « Ultime récit -
suite », à paraître aux éditions I3
270 pages – 12,30 €
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