XXIV – Micmac présidentiel
Avertissement : Vous l’aviez compris, ceci n’est qu’un
roman, une fiction, une « pure construction intellectuelle », sortie tout droit
de l’imaginaire de son auteur.
Toute ressemblance avec des personnages, des lieux, des
actions, des situations ayant existé ou existant par ailleurs dans la voie
lactée (et autres galaxies), y compris sur la planète Terre, y est donc
purement, totalement et parfaitement fortuite !
Nous ne sommes pas très nombreux à savoir pourquoi le Président Makarond se
rend dans l’océan Indien pour une « tournée » difficile qu’aucune
nécessité, diplomatique, politique ou sociale l’obligeait à faire, au
contraire.
Quand le chef de l’État arrive à l’orée de sa troisième étape, il en dit
que, « le gouvernement est engagé tout entier avec les élus »
pour « apporter des solutions concrètes ». Son arrivée dans l’île
provoque tout de même un appel à la grève générale, lancé pour jeudi.
Mais il en dit en réponse que « sur la vie chère, il n’y pas de
recette miracle ».
« Pendant longtemps, on a répondu en mettant des aides. Il en faut
parfois, mais ça marche mieux quand on crée plus d’emplois et qu’on crée plus
de concurrence pour faire baisser les prix (…) de l’agro-alimentaire à
la grande distribution en passant par le bâtiment, l’import-export »,
aura-t-il ajouté en début de soirée. Non sans appeler à « aider les
chefs d’entreprise de tous les secteurs de La Réunion à travailler davantage
avec la région et s’inscrire pleinement dans l’océan Indien »
Il était attendu aux abords de l’aéroport Roland Garros par une centaine
de personnes répondant à l’ensemble des syndicats réunionnais qui espèrent
mobiliser pour dénoncer « la situation sociale de La Réunion ».
Aux jets de bouteilles et de pierres par des manifestants, les forces de l’ordre
ont répondu par des tirs de gaz lacrymogènes, selon des sources concordantes.
Malgré des appels au blocage diffusés sur les réseaux sociaux, les « Gilets-jaunes »
contactés par l’AFP ont déclaré qu’ils n’avaient « pas l’intention d’aller
au contact ou à l’affrontement avec les forces de l’ordre ».
Le coût de la vie pour un budget moyen de ménage réunionnais est majoré de
7,1 % par rapport à la métropole, selon l’Insee, alors que le revenu médian
réunionnais est inférieur de 30 % au niveau national.
Après une inflation record en 2018 (+ 1,8 %), les prix augmentent toujours
en 2019 (+ 0,6 % depuis le début de l’année).
« On comptait nos sous avant les ‘‘gilets jaunes’’, on les compte
encore plus maintenant ».
Une des réponses évoquées par le chef de l’État est la mise en place d’un
dispositif « Choose La Réunion » (« Choisissez La Réunion »),
forum économique en présence d’une cinquantaine de grands investisseurs
français et étrangers, destiné à renforcer l’attractivité du territoire et « projeter
les acteurs économiques réunionnais » vers les régions voisines, l’Afrique
australe et le sous-continent indien.
« Nous avons un rôle à jouer, nous avons un dialogue stratégique à
jouer, nous avons des partenaires avec lesquels nous voulons travailler encore
davantage », aura martelé le président de la République dans son
discours d’arrivée, en rappelant que « la France doit prendre
conscience – évidemment ici à La Réunion, mais dans tout le territoire – de
cette réalité, de cette chance que nous avons ».
Au cours de son séjour, accompagné notamment par les ministres de l’Économie,
du Travail et de l’Agriculture, il rencontrera des demandeurs d’emploi dans une
mission locale de Saint-Paul, s’entretiendra avec des participants aux
nouvelles « représentations citoyennes » mises en place après la
crise des « Gilets-jaunes », et même pique-niquer (un « Pei »
mettant en valeur les produits locaux) avec des représentants des filières de
la production agricole locale à Petite-Île (dans le sud).
« J’aurai des messages très forts sur l’agriculture et l’emploi »,
a assuré le chef de l’État.
Et puis comme il aime parfois à le faire, il a effectué une visite
surprise dans un quartier rénové de Saint-Denis où, délaissant le parcours
prévu, il aura répondu longuement à des Réunionnais parfois en grandes
difficultés.
Ils n’ont pas hésité à lui demander des comptes, entre scepticisme,
plaintes et parfois une pointe d’agressivité.
« Y’a pas de travail, Monsieur. Comment on fait avec 790 euros par
mois ? » lui a demandé une femme.
« Je suis au chômage, je suis au bout », lui a lancé une
autre, au bord des larmes, et le chef de l’État a demandé au préfet d’examiner
son dossier.
Plusieurs l’ont accusé de venir chercher des voix : « Mais je
ne suis candidat à rien ! », a rétorqué le président.
« Qu’avez-vous dans votre besace pour nous, j’ai traversé la rue,
il n’y a rien », s’est désolé un jeune, en allusion à la petite phrase
du chef de l’État l’an dernier.
« Éducation, formation », lui a répondu Makarond.
Et il a dévoilé en fin de journée un plan pour l’emploi et la formation, d’un
total de 700 millions d’euros sur 3 ans.
Notamment, le dispositif des emplois francs qui octroie une prime aux
employeurs de chômeurs sera étendu à toute l’île, le cumul du RSA et d’emploi à
temps partiel autorisé et l’État maintiendra 12.000 emplois aidés par an.
De plus, le versement du RSA, jusqu’ici à la charge du département, sera à
partir de 2020 payé par l’État, comme à Mayotte et en Guyane.
Ces aides s’ajouteront à l’exonération des charges patronales allant jusqu’à
deux fois le montant du SMIC dans certains secteurs (agroalimentaire,
agriculture, tourisme...), une mesure pour l’outre-mer votée dans la nuit par l’Assemblée,
à sa demande.
Comme dit Paul, « ça ne lui coûte pas cher de paraître
généreux : ce n’est pas lui qui paye ! »
Ces annonces n’ont toutefois pas suffi à éviter des heurts jeudi soir dans
la commune du Port entre une centaine de jeunes et des forces de l’ordre.
Près de 500 personnes s’étaient rassemblées auparavant à Saint-Denis en
réponse à l’appel de l’intersyndicale à manifester, selon des chiffres de la
police cités par l’Élysée. Mais l’appel à la grève générale pour dénoncer la
situation sociale n’a pas été suivi.
Il aura aussi rencontré une cinquantaine de participants à des « représentations
citoyennes » mises en place dans le sillage de la crise qui a secoué l’île
en 2018.
Rapportant « une aggravation de la situation depuis un an »,
un « Gilet-jaune » a estimé que « le problème de la vie
chère, on pourra le régler s’il y a les revenus qui suivent ».
Face à eux, Makarond a dit ne pas penser « que la solution puisse
être dans la baisse des prix de X produits », soulignant vouloir « donner
la possibilité aux citoyens d’avoir un droit d’alerte, en quelque sorte une
plateforme de signalement ».
Côté emploi, « la réponse qu’on a eue pendant des décennies, c’est
de dépenser de l’argent public. Vous avez un problème ? Venez, emploi public.
On donnait du Doliprane pour un mal profond. Il faut passer aux antibiotiques »,
a-t-il lancé, en prônant une politique pour des emplois durables et plus de
concurrence.
Une délégation intersyndicale n’a pas été reçue, chacune des deux parties
se renvoyant la responsabilité de cet échec.
Et puis son voyage s’est terminé par un « petit crochet » que la
presse, se voulant « outrée », aura qualifié de « touristique ».
Car l’itinéraire retour du chef de l’État interroge. Le média réunionnais « zinfos974 »
rapporte que l’avion présidentiel n’a pas rejoint directement la métropole et a
fait un détour par le sud pour observer le Piton de la Fournaise, le célèbre
volcan de l'île…
Selon la presse locale, Makarond aurait donc utilisé l’avion présidentiel
pour son plaisir des yeux !
Une information sur laquelle s’est penché Libération via sa rubrique Checknews,
dont la spécialité est de vérifier la véracité des infos publiées.
En utilisant le site Flight Aware, qui permet de suivre le trajet des vols
aériens, le journaliste chargé de l’enquête a pu établir qu’« un vol
opéré par le Commandement du transport aérien militaire français (Cotam) a
décollé vendredi 25 octobre (jour où il a quitté l’île) à 18 h 05 heure
locale de Saint-Denis à La Réunion et atterri le lendemain à 3 h 10 à Orly ».
Or, contrairement aux avions de ligne qui font le trajet La Réunion-Paris,
ce vol n’a pas mis directement le cap au Nord mais a pris la direction du Sud
de l’île.
Là, il a fait une boucle autour du piton de la Fournaise, comme on peut le
constater dans le GIF présenté par Libération dans son article.
À noter que le volcan réunionnais est justement entré en éruption vendredi
en début d’après-midi, un peu avant le décollage de l’avion présidentiel.
Un incroyable spectacle de la nature impossible à manquer ?
Offert à qui ?
Contacté par Checknews, l’Élysée a confirmé que « l’avion
présidentiel avec le président à son bord », a bien fait un détour par
le Piton de la Fournaise pour profiter de la vue.
A-t-il utilisé son avion pour un détour de tourisme à La Réunion ?
Voilà une fake-new bien enterrée vivante !
Je peux en témoigner parce que ça ne s’est pas du tout passé comme ça !
De la belle technique de désinformation : on fait un geste inhabituel
avec l’avion des ministres qui pourrait prêter à la critique, que l’on confirme
« officiellement » quitte à prendre un risque (bien théorique) de « polémique
politicienne », pour n’avoir pas à confirmer un « écart » bien
plus secret.
Car c’est plus vicieux que ça.
Le Président Makarond n’était pas à bord… C’était l’avion dédié aux
ministres, à la presse et aux invités présidentiels.
Il faut préciser aussi que (j’ai vérifié par la suite), les deux Airbus de
la présidence de la République mobilisés pour la visite du Président dans l’Océan
indien ont déposé le chef de l’État, ses ministres, son équipe et la presse
nationale, à La Réunion mercredi 23 octobre 2019.
Puis ils sont aussitôt repartis vers... l’île Maurice où ils stationnaient
depuis dans l’attente du vol de retour vers Paris...
Un seul est revenu à La Réunion ce vendredi 25 octobre pour récupérer les
ministres, les équipes et la presse nationale, qui partira immédiatement après
le pique-nique à Grande Anse, dernière étape de sa visite présidentielle au sud
de l’île.
D’abord, pourquoi ces Airbus sont-ils parqués sur « l’île sœur »
plutôt qu’à La Réunion ?
Pour payer moins cher ? Mystère pour mes confrères de la presse qui se
sont interrogés...
Aussitôt arrivés, aussitôt repartis. Les deux avions de la présidence, à
peine posés sur le tarmac de l’aéroport Roland-Garros, sont repartis vers l’île
Maurice, où ils attendaient sagement depuis mercredi, me rapportera un
journaliste de mes connaissances.
C’est « Imaz Press Réunion » qui a été alerté par des
Réunionnais qui, arrivés à Maurice, ont remarqué que les deux appareils
présidentiels stationnaient sur le tarmac de l’aéroport international de
Maurice Sir Seewoosagur Ramgoolam, à Plaisance.
Un des avions est revenu à La Réunion le vendredi 25 octobre pour
récupérer l’équipe présidentielle, les ministres et ramener les journalistes
nationaux après le pique-nique repartant directement vers l’aéroport
Roland-Garros.
Dans le jargon aérien, on dit d’un avion qui reste sur le tarmac qu’il « fait
du béton ».
En ce qui concerne les vols commerciaux, cela coûte cher, les taxes étant
très lourdes. Dans le cas du Président, il y a fort à parier qu’un avion, même
pour une visite présidentielle, doit payer pour pouvoir rester sans voler dans
un aéroport en attendant le retour de ses passagers.
Et dans ce cas, les deux Airbus « font du béton » à Maurice.
Pour payer moins cher ?
Non, pas du tout !
Si les journalistes sont bien rentrés par le vol qui a fait un détour
« touristique » par le piton en éruption, le second est resté
sagement à Plaisance en attendant le retour présidentiel, hors les radars des
journalistes et des « accompagnants ».
Rappelons-nous d’ailleurs les mots prononcés lors de son allocution
télévisée ce jeudi 24 octobre, au cours d’une interview à deux voix. Sur la
question du chantier de la Nouvelle Route du Littoral et des roches manquantes
(une route qui passe au-dessus de la mer le long de la côte), où le chef de l’État
a estimé qu’il fallait prioriser les matériaux locaux et qu’importer des roches
de Maurice était « fou d’un point de vue environnemental ».
Personne ne pensait pas que laisser ses avions à Maurice faisait partie du
programme...
Et pourtant son périple a été simple…
Le Président aura embarqué dans l’A320 affrété par Paul qui stationnait à
l’aéroport de Pierrefonds, posé justement à proximité de Grande-Anse dans
le sud de l’île et c’est l’A330 « présidentiel » réservé aux
journalistes, et repéré par les Réunionnais qui a fait un détour par le sud de
l’île.
L’A320 sera aller jusqu’aux Chagos, distantes d’environ 2.400 km pour se
poser dans un souffle sur la piste toute neuve orientée Ouest-Est avec une
large partie construite sur la lagune : on a l’impression d’atterrir sur
l’eau, de loin une toute petite bande de béton, pourtant assez large.
Il est reparti dans la nuit pour l’aéroport international de Maurice Sir
Seewoosagur Ramgoolam à l’Île Maurice, rejoindre l’A330 « officiel »,
celui équipé d’une douche, d’une couchette, d’instruments de contre-mesure et du
dispositif de déclenchement du feu nucléaire avec ses 60 places assises, par le
Président Krazoski (et surnommé depuis le « Carlita-one »), pour
arriver à Vélizy vers 10 heures 30, en toute discrétion et repartir stationner
à Roissy-Charles-de-Gaulle, son lieu de parking habituel, une fois son illustre
passager et sa petite équipe débarqués…
Voilà pour le « micmac » de la dernière étape du voyage
présidentiel dans l’océan Indien.
Entre-temps, il aura passé une partie de la nuit avec les équipes de Paul,
dont je faisais partie, qui lui a fait faire le « tour du
propriétaire » accompagné, de moi-même naturellement – ma seconde
rencontre avec le chef de l’état – et de Gustave pour notre partie (plus les
équipes et ingénieurs qui étaient au repos à ce moment-là – il faisait nuit – qui
souhaitaient en serrer cinq au Président français), de ses « G-men »,
gendarmes et officiers d’état-major pour le Président, ainsi que
l’incontournable « conseiller » que nous avions croisé à Cabourg en
juin dernier.
Ni plus ni moins…
Et heureusement qu’il faisait nuit, parce que le lagon est moche sous la
lumière diurne malgré ses plantations de palmiers et cocotiers de diverses tailles
et espèces et l’éclairage artificiel qui les met un peu en valeur.
270 pages – 12,30 €
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