IX - Brégançon 2019
Avertissement : Vous l’aviez compris, ceci n’est qu’un
roman, une fiction, une « pure construction intellectuelle », sortie tout droit
de l’imaginaire de son auteur.
Toute ressemblance avec des personnages, des lieux, des
actions, des situations ayant existé ou existant par ailleurs dans la voie
lactée (et autres galaxies), y compris sur la planète Terre, y est donc
purement, totalement et parfaitement fortuite !
Le Président Francis Landau s’est vite senti prisonnier entre ces
vieux murs, tel qu’il se refuse à rénover pour éviter une dégringolade supplémentaire
dans les sondages.
Des vacances qui n’en sont pas, où les photographes vous épient et qui
nécessitent l’intervention quotidienne d’hommes-grenouilles pour sécuriser les
alentours, lorsqu’il souhaite y tremper un orteil : le but ? Dénicher d’éventuelles
mines…
« Quand vous vous baignez, vous vous dites que le coût du bain est
élevé ! » reconnaîtra-t-il.
C’est la raison pour laquelle Makarond fait installer une piscine
« en haut des marches » : pour faire l’économie du peloton de
plongeurs de combat détaché de Toulon…
Et l’année dernière il y aura reçu la première ministre britannique pour
s’entretenir des négociations sur le Brexit.
En 2019, Makarond souhaite « réinventer une architecture de sécurité et
de confiance » entre l’Union européenne et la Russie.
C’est le résultat des longues cogitations du cabinet présidentiel…
Une rencontre au fort de Brégançon en sera-t-elle la première pierre ?
Elle s’est en tout cas déroulée dans un format singulier : la conférence de
presse a eu lieu dans la foulée de l’arrivée du Russe, avant la discussion
entre les deux chefs d’État. Signe qu’il ne fallait pas s’attendre à de grandes
avancées lors de cette rencontre à cinq jours du G7 de Biarritz…
À l’arrivée, comme pour leur précédente sortie en duo à Versailles fin mai
2017, quelques micros avancés et beaucoup de surplace et de cynisme assumé.
Bref, un jeu de questions-réponses plutôt rythmé, mâtiné de piques et de
regards, de ceux qui en disent long sur le chemin à parcourir avant de parler
de « normalisation ».
Loin du « reset » rêvé par le Président d’une relance des relations
franco-russes, telle qu’il l’avait pu se l’imaginer après son entretien avec
Paul au mois de juin.
C’était d’ailleurs le thème des réunions préparatoires du début du mois.
J’y étais (partiellement et virtuellement), je peux en témoigner…
Car à travers la webcam de Gustave planquée en boutonnière et de ce qu’il
a pu en rapporter par la suite, je peux dire que les deux présidents ont fait
assaut d’amabilités dans ce décor idyllique du fort varois. Mais derrière
l’apparente cordialité, ils se sont offert une vive passe d’armes sur divers
sujets.
Le vrombissement des hélicoptères supplante le chant des cigales. Il est
17 heures quand Vladimir Poutine se présente au Fort de Brégançon, bouquet de
fleurs à la main. Emmanuel et Brigitte l’attendent dans la cour.
Sourires, bises et poignées de main chaleureuses…
Si ce n’étaient ces hôtes et leur invité si particulier, le lieu ou l’imposant
dispositif de sécurité (frégate au large, barrages filtrants sur la route), on
pourrait croire que l’on assiste à des retrouvailles entre amis.
Inhabituel sourire aux lèvres, le président russe félicite les Makarond
pour « leur teint superbe », et s’extasie : « It’s a beautiful place!
»
Le clou, c’est la vue sur mer à 360 degrés et le président la lui réserve
pour l’entretien bilatéral confidentiel : un tour du fort, entre pins, lauriers
roses et oliviers, avec escale au belvédère, avant un dîner dans le jardin,
préparé par un chef local de haute réputation : la météo est idéale.
Les moustiques un peu moins…
Et pour cadeau, une édition originale (dédicacée par l’auteur) des «
Nouvelles moscovites » de Tourgueniev !
Azur méditerranéen et dossiers chauds (Ukraine, Syrie, Iran, Libye…) pour
horizon, les deux présidents s’installent alors pour la conférence de presse
dès après l’arrivée du russe et de sa délégation. Depuis un élégant fauteuil de
jardin, Makarond poursuit son opération séduction, lui qui entend « réarrimer
la Russie à l’Europe » : « Nous croyons à l’Europe qui va de Lisbonne à
Vladivostok. »
Une référence à de Gaulle, qui la voyait s’étendre « de l’Atlantique à
l’Oural ».
Rien d’anodin à cela.
Les politologues confirment que le chef de l’État entend bien se placer en
médiateur, au centre de la scène internationale, et surtout en chef de file de
l’Europe, profitant de l’affaiblissement de ses autres leaders à Londres ou à
Berlin.
À l’heure où le multilatéralisme semble vouloir voler en éclat, le
Français rêve de proposer rien de moins qu’« une nouvelle géopolitique »,
analyse-t-on !
En cette chaude fin de journée estivale, à la veille du G7 de Biarritz
dont la Russie est exclue, l’onguent passe par une promesse : se rendre à
Moscou le 9 mai 2020 pour les commémorations de la victoire soviétique sur l’Allemagne
nazie, boudées par les Occidentaux depuis l’annexion de la Crimée à la Russie
en 2014.
Et le retour de la dépouille d’un général napoléonien proposé par le russe
en « monnaie d’échange »…
Il y aura même ces mots aux allures de main tendue : « La Russie est
dans le libéralisme politique. »
Impossible alors de déceler, sur son visage, le sentiment de Poutine, face
à cette affirmation pour le moins inattendue ! En tout cas, je n’y suis
pas parvenue, Gustave ayant changé de position à ce moment-là.
Mais très vite et devant les journalistes, inévitablement la question sur les
arrestations massives et les interpellations violentes de manifestants lors des
mobilisations (du jamais-vu depuis 2011) à Moscou, qui dénoncent l’exclusion de
candidats indépendants des élections locales du 8 septembre, est tombée.
Alors que certains experts dressent un parallèle avec la fin de la
pérestroïka, qui vit basculer le pouvoir soviétique, Poutine évacue : « Les
citoyens ont le droit de manifester en paix et les autorités doivent veiller à
cela, mais les manifestants n’ont pas le droit d’enfreindre la loi et
d’affronter les forces de l’ordre. Tous ceux qui sont responsables de ce
désordre devront assumer leurs actes. »
Et l’homme fort du Kremlin d’en profiter pour tacler Makarond : « Il
n’y a pas qu’en Russie qu’il y a des problèmes de ce type. Ce n’est pas très
commode de le dire là, mais il y a eu des manifestations de gilets jaunes ici. Il
y a eu plusieurs dizaines de personnes blessées et aussi des policiers blessés.
Et onze personnes sont mortes. Nous ne voulons pas que ça arrive en Russie.
»
Un passage que la traductrice omet de mentionner, au contraire des agences
de presse russes…
Son hôte de Brégançon encaisse et réplique que « tous les gilets jaunes
» peuvent se présenter « aux élections ». D’ailleurs certains l’ont fait
aux européennes.
Avant d’enfoncer le clou : « Quand on a contracté des traités, on les
respecte. La France a toujours respecté sa Constitution, ses droits et le
Conseil de l’Europe, tous les citoyens peuvent saisir la CEDH. »
Une façon aigre-douce de rappeler à Poutine que la Russie a été privée de
Conseil de l’Europe après l’annexion de la Crimée en 2014.
Qu’elle a réintégré en juin, notamment grâce à l’appui de Paris…
Mais en le disant, Makarond n’aura cette fois pas adressé un seul regard à
son invité. Quant à Poutine, il a habilement repris la parole, s’offrant ainsi
le dernier mot.
Derrière la « chaleur » d’une rencontre, un duel au soleil…
Kiev ! C’est la crise qui a provoqué l’exclusion de la Russie des
réunions du G8. En 2014, Moscou annexait la Crimée et soutient depuis les
séparatistes dans l’Est de l’Ukraine.
Cinq ans plus tard, le conflit s’enlise encore, toujours pas soldé.
Le président français pense qu’une ouverture est désormais possible sur ce
sujet, présenté comme un « préalable » à d’autres négociations.
Ses espoirs reposent sur l’élection en avril d’un nouveau chef de l’État
ukrainien, Volodymyr Zelensky, qui a fait des gestes vers Moscou.
« Les choix du président Zelensky sont un vrai changement pour la situation
», a analysé Makarond, saluant son « courage » : « Une opportunité se
présente de mettre fin à un conflit qui dure depuis cinq ans. »
Sauf que c’est un « mauvais cheval » en dira plus tard Paul de
Bréveuil. « Il est entouré d’amateurs pas très au fait des questions
internationales et ne fait rien pour réduire la corruption endémique de la
République, qui est pourtant une de ses promesses électorales.
Remarquez, les promesses n’engagent jamais que ceux qui y
croient…
Pour lui, en bon autocrate qu’il va devenir par la force des
choses, ce qui compte c’est Kiev. Et c’est « un peu court »… »
Resté « un clown », un amuseur télégénique ?
Vladimir Poutine aura confirmé des échanges réguliers avec son homologue
de Kiev, évoquant lui son « optimisme prudent », et promis d’en informer
son hôte français.
Pour concrétiser ces discussions, Makarond propose alors la tenue d’« un
sommet en format Normandie (Russie, Ukraine, Allemagne, France) dans les
prochaines semaines » qui ne se tiendra pas dans l’immédiat.
Tout en avertissant qu’il n’y aurait un intérêt à réunir les chefs d’État
et de gouvernement que « si quelque chose de tangible peut être acté ».
Or, l’invité russe semble être sur la même ligne : du concret, sinon rien !
Et le statu quo, notamment sur l’exclusion de la Russie du G8, n’a
pas l’air de l’incommoder outre mesure…
Interrogé sur son souhait de le réintégrer, Poutine a esquivé, louant le
G20, « beaucoup plus important » que feu le G8.
En ce qui concerne la Syrie, depuis sa première rencontre controversée à
Versailles avec Poutine, Makarond avait affiché sa volonté de se démarquer de
la politique de son prédécesseur en engageant le dialogue avec Moscou sur le
dossier syrien.
Mais deux ans plus tard, l’échange sur la Syrie entre les deux chefs
d’État à Brégançon reflète une fois de plus des divergences fondamentales et profondes
qui persistent.
Alors qu’une nouvelle offensive venait de se produire le lundi matin dans
la région d’Idlib, le président français a exhorté le régime de Damas et son
allié russe à respecter le cessez-le-feu décrété dans la province du Nord-ouest
du pays.
« Il est impérieux – nous y tenons beaucoup et nous aurons l’occasion
d’en parler – que le cessez-le-feu décidé et acté à Sotchi soit vraiment
respecté », a-t-il déclaré en référence à l’accord conclu entre la Turquie
et la Russie en septembre 2018.
Car « des enfants sont tués ».
Réponse du russe : « Nous soutenons les efforts de l’armée
syrienne pour éliminer les menaces terroristes à Idlib », a répliqué
Poutine en invoquant notamment les attaques des rebelles syriens contre la base
aérienne russe de Hmeimim, sur la côte syrienne.
Face à l’implication militaire massive et à l’investissement politique
majeur de la Russie en Syrie, les arguments humanitaires de la France, absente
du terrain, ne pouvaient de toute façon guère impressionner le président russe.
Et puis la presse aura été dispersée : il n’y avait rien à attendre
d’une conférence qui s’est tenue avant la phase des échanges.
C’est que les chancelleries ne sont pas parvenues à tracer les contours
d’une déclaration commune.
Gustave est resté pour assister au fameux dîner des chefs d’État, servi
avec un petit clin d’œil à la Russie, réalisé par le Chef triplement étoilé au
Michelin à l’hôtel Cheval Blanc de St-Tropez, Arnaud Donckele.
Un menu qui risque de vous mettre l’eau à la bouche : le repas a
débuté par une soupe de tomate glacée avec un sorbet noir de Crimée, suivie d’une
entrée à base d’artichauts.
Le plat principal était composé de veau accompagné de pommes de terre fondantes,
tomates et un jarret confit avec des olives et des éclats d’anchois fumés.
Le dessert était au chocolat, framboise et bergamote.
« Au retour des assiettes il n’y avait plus rien donc pour moi
c’était un gros soulagement de voir que les assiettes étaient vraiment
franchement raclées, grattées et même saucées avec du pain », confiera
le Chef étoilé. « Je trouve ça plutôt sympa », ajoutera-t-il.
« Avant de partir, on était alignés. Le Président a amené le
Président Poutine à saluer toutes les équipes qui ont été extrêmement touchées
et partiront avec un souvenir immuable », racontera-t-il.
C’est vrai que c’était fameux confiera notre Amiral : « je
n’ai pas souvent eu l’occasion d’un repas « triplement étoilé » malgré
mes émoluments habituels, mais c’est autant un plaisir des pupilles que des
papilles ».
Nettement mieux que son ordinaire quotidien…
En revanche, il n’a pas bien suivi les conversations entre les deux chefs
d’État : les autres convives faisaient du bruit et ils étaient placés côte-à-côte,
une interprète assise derrière eux entre les deux.
« Moi, j’étais en face, un peu trop en décalé. »
Néanmoins, il est certain que le russe aura prononcé les mots
« Notre-Dame-de-Paris », en français, alors qu’il parle
habituellement en russe ou en anglais. Mais dans ces deux langues, un nom
propre se dit dans la langue d’origine dudit lieu.
Makarond aura plongé son regard dans son assiette de desserts et le russe
n’aura pas insisté.
Ils se sont regardés, le regard du russe se plantant dans les yeux de son
homologue : ils sont tous les deux de taille relativement modeste et
l’écartement de leurs yeux reste similaire.
Makarond aura répondu sans un mot, en fixant son voisin et, sans un mot, à
esquisser un sourire avant de finir son assiette.
Rien de plus !
« Et après, ils auront évoqué l’opération Lynx, sous l’égide de
l’Otan, dans laquelle la France participe activement, qui positionne des avions
de chasse en protection des États Baltes… »
Et probablement des exercices en préparation pour 2020.
Tout ça pour ça ?
« Mais c’est impeccable, au contraire » se sera exclamé
Paul de Bréveuil, alias « Charlotte », à propos de cet épisode.
Comment ça ?
« Ça veut dire que le russe se pose lui aussi des questions
auxquelles il n’a pas eu de réponse. Sauf celle de comprendre que Makarond en
sait finalement beaucoup plus qu’il ne le laisse paraître…
Je vais finir par l’apprécier, ce Président-là ! Et peut-être ont-ils réaborder ce point-là en
aparté avant de se séparer. »
On n’en sait rien…
« J’avais pourtant cru que vous ne le teniez pas en odeur de
sainteté… »
Il ne faut pas seulement croire, il faut savoir : « Non, je
ne l’apprécie pas du tout. Il est illégitime pour avoir été très mal élu avec à
peine 17 % du corps électoral derrière lui.
De plus il s’est entouré de guignols depuis le début et sa
majorité parlementaire reste le doigt sur la couture à passer son temps à se
faire rabrouer par toute une clique qui aura mangé à tous les râteliers et
elle va finir par se déliter !
Elle est belle la « nouvelle société » qui reproduit
les erreurs de « l’ancien-monde » alors qu’il avait été promis
l’inverse dans la vague de l’époque du dégagisme !
On retrouve les mêmes ou leurs clones… »
Vu comme ça, effectivement…
Je lui rétorque : « Selon votre formule, les promesses
n’engagent que ceux qui y croient. »
« Ce qui fait 60 millions de cocus tout de même ! »
Pas tant que ça, « puisqu’ils n’étaient que 17 % à les croire… »
Eh bien non, le plus important aura été finalement, et comme prévu par
Paul, l’aparté qu’aura eu Gustave avec un homologue de la marine russe.
Je n’ai pas pu tout capter, mais notre CEO en aura
fait un résumé complétant ce que j’ai pu en percevoir
270 pages – 12,30 €
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