Bienvenue !

Oui, entrez, entrez, dans le « Blog » de « l’Incroyable Ignoble Infreequentable » ! Vous y découvrirez un univers parfaitement irréel, décrit par petites touches quotidiennes d’un nouvel art : le « pointillisme littéraire » sur Internet. Certes, pour être « I-Cube », il écrit dans un style vague, maîtrisant mal l’orthographe et les règles grammaticales. Son vocabulaire y est pauvre et ses pointes « d’esprit » parfaitement quelconques. Ses « convictions » y sont tout autant approximatives, changeantes… et sans intérêt : Il ne concoure à aucun prix littéraire, aucun éloge, aucune reconnaissance ! Soyez sûr que le monde qu’il évoque au fil des jours n’est que purement imaginaire. Les noms de lieu ou de bipède et autres « sobriquets éventuels » ne désignent absolument personne en particulier. Toute ressemblance avec des personnages, des lieux, des actions, des situations ayant existé ou existant par ailleurs dans la voie lactée (et autres galaxies) y est donc purement et totalement fortuite ! En guise d’avertissement à tous « les mauvais esprits » et autres grincheux, on peut affirmer, sans pouvoir se tromper aucunement, que tout rapprochement des personnages qui sont dépeints dans ce « blog », avec tel ou tel personnage réel ou ayant existé sur la planète « Terre », par exemple, ne peut qu’être hasardeux et ne saurait que dénoncer et démontrer la véritable intention de nuire de l’auteur de ce rapprochement ou mise en parallèle ! Ces « grincheux » là seront SEULS à en assumer l’éventuelle responsabilité devant leurs contemporains…

dimanche 31 mai 2020

La nouvelle a fait l’effet d’une bombe…

Même moi-même, j’ai été consulté sur le sujet !
 
Je ne suis pourtant pas un « spécialiste » reconnu…
Un univers parallèle détecté en Antarctique !
Non mais tu rigoles ?
Non. Si !
Que bien entendu, j’en rigole lourdement, notamment parce qu’à l’occasion du prochain volume des « Enquêtes de Charlotte » (« Dans le sillage de Charlotte »), il est un passage qui traite justement de l’impossibilité, dans le monde réel, des « univers parallèles ».
Je cite (dans sa version actuelle que je relis et corrige) :
 
« Et c’est là qu’on rejoint Christin et les voyages sur la flèche du temps dont vous avez pu faire l’expérience[1]. Sur ce point, George Lucas a fait l’impasse et même Christin s’est un peu emmêlé les pinceaux puisqu’à un moment, la naissance de Galaxity est avortée en raison de la disparition du moment déclencheur de « l’âge noir » datant, dès les premiers épisodes de 1986.
Et pour s’en sortir, il invente des univers parallèles.
Or, on ne sait pas s’ils existent, ni de quoi ils sont faits.
(…)
Ça devient un peu trop compliqué pour moi. Je quémande des précisions.
« Il faut que vous compreniez que tout ce qui existe autour de nous a au moins une dimension. Du plus petit élément physique au plus vaste, comme tout l’univers dans son ensemble, celui qui nous entoure. Sans dimension, on ne peut pas avoir de réalité physique.
Or, ces « dimensions » sont obligées de se « refermer » sur elle-même pour exister, ce qui implique que le temps, qui n’a qu’une seule dimension, doit se « refermer » sur lui-même pour exister également. »
Ce qui veut dire ?
« Le paradoxe, c’est qu’on parle de « flèche du temps », alors qu’elle n’a qu’une seule dimension. C’est d’ailleurs probablement le seul « objet » de la physique qui n’a qu’une seule dimension. Tous les autres en ont au moins deux ou trois et parfois, pour quelques-uns probablement plus d’une dizaine.
On sait que la flèche du temps a eu un début, mais on ne sait pas si elle a une fin. Probablement pas si le temps se referme pour exister. Quoique… »
Je ne comprends toujours pas : ça me dépasse totalement.
« Je ne suis pas assez clair ? »
Alors là, oui, pas de doute !
« On peut imaginer, et les mathématiques nous l’autorisent, qu’il y a une infinité de « bulles » qui se referment sur elles-mêmes. Celles qui forment les atomes dont nous sommes faits, pas de doute. Mais aussi celles qui formeraient un « univers parallèle » entier. Or, non seulement on ne sait pas où le trouver, mais on ne sait pas non plus sur quelle flèche du temps il se situe.
Dès lors, la notion d’univers parallèle est stérile, elle ne débouche sur rien et aucun lien ne peut être opérationnel avec le nôtre : Christin se trompe et avec lui tous les auteurs de science-fiction qui usent et abusent de cette « innovation littéraire » dont on ne trouve pas de trace jusque dans notre monde.
C’est juste une hypothèse mathématique qui repose sur des postulats indémontrables. »
 
Il en est d’autres, des postulats : et sauf si je me trompe, un postulat ne se démontre justement jamais ! Je pense à celui qui dit que deux droites sont dites parallèles si elles sont dans le même plan et n’ont aucun point commun… (je n’en connais pas beaucoup d’autres !)
« Bien sûr, mais la plupart s’observent… ou sont seulement des définitions commodes. Or, pour des « objets » qui se referment sur eux-mêmes pour exister, nous n’observons pas d’univers parallèles. »
Par définition, non puisqu’ils ne se croisent pas ?
« C’est donc une hypothèse commode. Non, je pensais que vous pensiez, comme ces auteurs, que ces « univers parallèles » sont inclus dans le nôtre pour pouvoir « communiquer » comme il est prévu par la littérature spéculative.
Ce sont ceux-là que nous ne pouvons pas observer… »
Ce qui n’est pas une preuve : « On les découvrira peut-être un jour ! »
« Mais alors ils ne sont plus parallèles mais sécants : ils sont dedans avec la même flèche du temps… »
Contradictoire, effectivement.
Paul aura décidément toujours le dernier mot.
Je change donc de sujet… »
 
En bref, ça « marche » dans les équations mathématiques (au prix de quelques « acrobaties imaginaires »), mais pas dans nos instruments de mesure et d’observation.
Pourtant on nous rapporte que cette découverte a été réalisée en 2016 par une équipe de scientifiques, en Antarctique justement, et qu’elle a refait surface ces derniers jours dans des médias du monde entier.
La « preuve » de l’existence d’un univers parallèle au nôtre, tient dans des anomalies qui ne pourraient s’expliquer que par un temps qui défilerait à l’envers !
Cette histoire infiniment séduisante, digne des meilleurs scénarios de science-fiction, des médias du monde entier l’ont relayée ces derniers jours.
Très clairement, un « voyage » sur la flèche du temps est probablement possible. Il est d’ailleurs indispensable pour une navigation intra-galactique dans des conditions opérationnelles à peu près praticables.
Mais au prix d’une dépense d’énergie fabuleuse.
 
Pour faire simple, depuis Einstein, on sait que plus un objet approche de la vitesse limite et indépassable de la lumière, plus il acquiert de la masse (jusqu’à s’effondrer dans un « trou noir ») et plus la flèche du temps se ralentit (le paradoxe des frères jumeaux de Langevin) et ses dimensions originelles se réduisent.
Les ondes n’ont pas de masse – pas plus que la lumière – et c’est pour cette raison qu’elles se déplacent à la vitesse de la lumière sans déformer l’espace qu’elles traversent.
Et les mathématiques peuvent, sans problème, manipuler l’infini et « théoriquement » se retrouver avec des valeurs négatives de masse et même de vitesse… sur le papier.
Or qui dit une vitesse négative, dit nécessairement un « temps négatif » (qui s’écoule à l’envers de ce qu’on connaît pour nous faire vieillir outrageusement) voire même des masses « négatives » qui au lieu de s’attirer mutuellement selon l’inverse de la racine carré de leur distance, se repousseraient selon la même loi de l’inverse des carrés.
Ce qui peut devenir violent…
 
Le reste, ça relève de la fable. Et à son origine, il y a un projet très sérieux baptisé Anita (pour Antarctic Impulsive Transient Antenna), financé en partie par la Nasa.
En effet, à plusieurs reprises depuis 2006, un ballon bardé d’antennes radio a survolé l’Antarctique à la recherche de particules venant de très loin dans l’espace et pouvant renseigner sur l’origine de rayons cosmiques.
Pourquoi au-dessus du continent blanc ? Parce que pour détecter ces particules à très haute énergie, les chercheurs s’intéressent aux ondes radio émises lors de leurs interactions à la surface de la Terre et, seuls des matières comme le sel ou la glace sont suffisamment transparentes pour que l’on puisse les percevoir.
Or, en scrutant leurs données, les scientifiques ont constaté des choses bizarres : À de très rares occasions, les rayons cosmiques semblaient non pas se refléter dans la glace mais surgir de la glace, comme s’ils ne venaient pas d’un endroit éloigné de l’espace mais de la Terre elle-même.
Dès lors, les chercheurs du projet Anita ont tenté de comprendre ce qui apparaissait comme des « anomalies » et ont publié leurs premières observations en 2016.
 
C’est aussi à partir de là que les choses ont commencé à leur « échapper ».
L’étrange découverte a en effet titillé de nombreux autres scientifiques. En mai 2018, l’équipe de Luis A. Anchordoqui, de l’Université de New York, a postulé que les « événements d’Anita » seraient la « preuve » de l’existence d’un « univers symétrique ».
Son raisonnement ? Les particules en question n’ayant pas pu selon eux « traverser » la Terre, si elles semblent en surgir, c’est parce qu’elles remontent… le temps, et évoluent donc dans un univers parallèle.
Une hypothèse qui a été détaillée en avril 2020 dans New Scientist, une revue britannique pour le moins réputée.
Et c’est de manière pas toujours scrupuleuse que l’information a été reprise dimanche de la semaine précédente par le tabloïd britannique Daily Star, puis dans les jours qui ont suivi par d’autres titres à fortes audiences de part et d’autre de l’Atlantique (New York Post, The Sun, Daily Mail...), y compris en « Gauloisie-déconfinée ».
 
Ils en disent qu’à l’origine de cette observation, « qui pourrait révolutionner la science et notre perception de l’univers » (moi, j’aime bien l’emploi du conditionnel…), il y a le physicien Peter Gorham, spécialiste des particules expérimentales à l’université d’Hawaii qui est en charge de l’expérience baptisée Antarctic Impulsive Transient Antenna (Anita) où un ballon équipé d’un détecteur traque les rayons cosmiques qui frappent en permanence notre planète, une région où l’absence d’ondes radio est susceptible de ne pas parasiter la détection de ces rayons.
Mais durant des vols en 2006 et 2014, Anita a observé un phénomène bien différent : Une « fontaine de particules » de haute énergie, autrement dit à une émission de rayons cosmiques de bas en haut et non de haut en bas : « Ce que nous avons vu est quelque chose qui ressemblait à un rayon cosmique, comme on les observe dans le reflet de la calotte glaciaire, mais il n’a pas été réfléchi. C’était comme si le rayon cosmique était sorti de la glace elle-même » nous rapporte-t-on.
 
Dans un premier temps, cette anomalie a été balayée d’un revers de manche. Puis, il a été suggéré que les particules avaient traversé la planète pour ressortir par le Pôle sud mais cette possibilité ne concerne que les neutrinos de basse énergie.
Les particules de haute énergie détectées par Anita n’auraient pas pu effectuer ce voyage par le centre de la Terre.
Aucune explication issue de la physique traditionnelle n’a donc permis d’élucider, pour l’heure, ce mystère.
Une fois l’impossible écarté, il n’est resté que l’improbable : Ces particules ne se déplaceraient pas à l’envers dans l’espace mais dans le temps !
Une simple « formulation mathématique »…
Et la seule hypothèse scientifique qui permet de rendre compte de cette inversion est celle d’un univers parallèle né en même temps que le nôtre au moment du Big Bang, un monde miroir où le fleuve du temps s’écoule en sens inverse…
Certes, la possibilité d’une erreur d’Anita est infime mais les scientifiques se refusent encore à l’écarter définitivement. Si bien, résume Ibrahim Safa, l’un des chercheurs engagés dans ce projet, qu’il ne reste que deux solutions à l’énigme : « La plus excitante, l’existence d’un univers parallèle, et la plus désolante, un simple bug. »
 
Voyant ses travaux mal interprétés, Peter Gorham, le responsable d’Anita, a mis alors les choses au clair : « Toute cette histoire d’univers parallèle n’a pas été inventée par nous, mais d’une manière ou d’une autre, nous y avons été associés », a-t-il déploré jeudi de la semaine dernière sur le site de l’Université de Hawaï, où il enseigne la physique.
« Un journaliste s’est trompé, l’a lié à nous et il a malheureusement fait boule de neige. En fait, nous n’avions rien à voir avec le développement de l’idée d’un univers parallèle. »
 
Cité le vendredi suivant par le site ScienceAlert, Peter Gorham décrit la démarche adoptée par son équipe : « Nous avons rencontré un petit nombre d’anomalies dans nos données, et une fois que nous avons épuisé toutes les explications possibles dans le modèle standard de la physique, c’est seulement alors qu’il est temps d’examiner d’autres idées qui repoussent ces limites – nous ne sommes vraiment pas encore, certainement pas, au point où des univers parallèles sont nécessaires ! »
 
En effet, les astrophysiciens savent que certaines particules, les neutrinos, interagissent très peu avec la matière. Ceux qui nous proviennent du Soleil sont ainsi capables de traverser notre planète sans laisser de traces. Ce qui les étonne, c’est qu’il en soit de même avec des particules à très haute énergie venues de loin.
« À ces niveaux d’énergie incroyables, les neutrinos sont comme des taureaux dans un magasin de porcelaine – ils deviennent beaucoup plus susceptibles d’interagir avec les particules de la Terre », expliquait même le professeur Alex Pizzuto, de l’Université de Wisconsin-Madison, dans un billet de blog en janvier dernier.
Pour que quelques-unes de ces particules soient passées au travers de la planète, il faudrait donc que celle-ci en ait été « bombardée ».
Par exemple, par une étoile qui explose, type supernova, comme l’a suggéré l’équipe d’Anita. Mais cette idée n’est pas corroborée par les expériences de l’observatoire IceCube, qui s’intéresse également aux neutrinos en Antarctique et pour lequel travaille Alex Pizzuto.
Du coup, les deux équipes sont d’accord sur un point : Si l’anomalie n’est pas due à un problème de détection, l’explication pourrait défier le modèle standard de la physique des particules…
 
Interrogé par Le Parisien, Fabian Schüssler, astrophysicien au Centre d’énergie atomique (CEA), défend une autre hypothèse mise en avant dans un article scientifique l’an dernier : La forme des couches de glace pourrait avoir eu une incidence sur la détection des signaux.
Ce qui est le plus probable.
Il suggère d’aller sonder la calotte aux endroits précis où se sont produites les anomalies. Ce qui permettrait peut-être de lever le mystère…
Sans avoir à chambouler toutes les connaissances acquises et vérifiées depuis près d’un siècle.
 
Bref, « petite validation » par la bande des dires de Paul de Bréveuil, alias « Charlotte » dans le prochain « roman » qui retrace ses pérégrinations entre août et décembre 2019.
Ça méritait ce petit-billet de mise au point, pas plus.
 
Bonne fin de week-end (prolongé) à toutes et à tous !
 
I3



[1] Cf. « Les enquêtes de Charlotte », épisode « Alex cherche Charlotte », aux éditions I3

samedi 30 mai 2020

Le Conseil Constitutionnel ne chôme pas

Hadopi anticonstitutionnel !
 
Il aura tranché ce mercredi 20 mai 2020 : La loi qui donnait à la HADOPI le pouvoir d’identifier les personnes partageant des œuvres sur Internet a été déclarée contraire à la Constitution !
Depuis le temps qu’on se le présumait contre vents & marées…
 
C’était une des questions prioritaires de constitutionnalité (QPC, le « truc » inventé par « Bling-Bling ») qui avait été posée au Conseil Constitutionnel le 12 février 2020.  Le Conseil Constitutionnel y a répondu, en déclarant inconstitutionnelle la loi qui donnait à la HADOPI des pouvoirs d’identification.
En effet le Conseil a considéré que pour pouvoir lever l’anonymat de l’internaute surveillé la HADOPI devra en référé à la justice avant toute action.
Or, ce pouvoir, aussi appelé « riposte graduée », c’est justement la raison d’être de la HADOPI.
Et son budget est de 10 M€ pour vous pourchasser…
 
Rappelons que ce dispositif de « riposte graduée » permettait à l’entité l’envoi d’avertissements à l’adresse d’internautes suspectés de télécharger illégalement des contenus protégés par des droits d’auteur : C’était et ça reste « voler le créateur ».
Bref, le dispositif devait permettre de lutter contre le piratage d’œuvres originales.
Si plusieurs avertissements étaient envoyés à la même personne, le dossier pouvait alors être transmis à la justice.
Sans ce dispositif la HADOPI est désarmée (sauf à passer devant le juge préalablement).
 
Décision n° 2020-841 QPC du 20 mai 2020
 
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 13 février 2020 par le Conseil d'État (décision n° 433539 du 12 février 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour les associations La Quadrature du Net, French Data Network, Franciliens.Net et la Fédération des fournisseurs d’accès à internet associatifs par Me Alexis Fitzjean Ó Cobhthaigh, avocat au barreau de Paris. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-841 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des trois derniers alinéas de l’article L. 331-21 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2009-669 du 12 juin 2009 favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet.
 
Au vu des textes suivants :
•la Constitution ;
•l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
•la loi organique n° 2020-365 du 30 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 ;
•le code de la propriété intellectuelle ;
•la loi n° 2009-669 du 12 juin 2009 favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet ;
•les décisions du Conseil constitutionnel nos 2009-580 du 10 juin 2009 et 2015-715 DC du 5 août 2015 ;
•le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;
 
Au vu des pièces suivantes :
•les observations présentées pour les associations requérantes par Me Fitzjean Ó Cobhthaigh, enregistrées le 9 mars 2020 ;
•les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le même jour ;
•les autres pièces produites et jointes au dossier ;
 
Après avoir entendu Me Fitzjean Ó Cobhthaigh pour les associations requérantes et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l’audience publique du 12 mai 2020 ;
 
Au vu de la note en délibéré présentée pour les associations requérantes par Me Fitzjean Ó Cobhthaigh, enregistrée le 13 mai 2020 ;
 
Et après avoir entendu le rapporteur ;
 
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :
 
1. L’article L. 331-21 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction résultant de la loi du 12 juin 2009 mentionnée ci-dessus, précise les pouvoirs des agents de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet, pour l’exercice de ses missions. Ses trois derniers alinéas prévoient : « Ils peuvent, pour les nécessités de la procédure, obtenir tous documents, quel qu’en soit le support, y compris les données conservées et traitées par les opérateurs de communications électroniques en application de l’article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques et les prestataires mentionnés aux 1 et 2 du I de l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique.
« Ils peuvent également obtenir copie des documents mentionnés à l’alinéa précédent.
« Ils peuvent, notamment, obtenir des opérateurs de communications électroniques l’identité, l’adresse postale, l’adresse électronique et les coordonnées téléphoniques de l’abonné dont l’accès à des services de communication au public en ligne a été utilisé à des fins de reproduction, de représentation, de mise à disposition ou de communication au public d’œuvres ou d’objets protégés sans l’autorisation des titulaires des droits prévus aux livres Ier et II lorsqu’elle est requise ».
 
2. Les associations requérantes estiment que ces dispositions méconnaissent le droit au respect de la vie privée, la protection des données à caractère personnel et le secret des correspondances. Elles leur reprochent, en effet, d’autoriser les agents de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet à se faire communiquer tous documents, quel qu’en soit le support, y compris les données de connexion, sans limiter le champ de ces documents ni prévoir suffisamment de garanties.
 
- Sur la recevabilité :
 
3. Selon les dispositions combinées du troisième alinéa de l’article 23-2 et du troisième alinéa de l’article 23-5 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 mentionnée ci-dessus, le Conseil constitutionnel ne peut être saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à une disposition qu’il a déjà déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une de ses décisions, sauf changement des circonstances.
 
4. Dans sa décision du 10 juin 2009 mentionnée ci-dessus, le Conseil constitutionnel a spécialement examiné les trois derniers alinéas de l’article L. 331-21 du code de la propriété intellectuelle, dans la même rédaction que celle contestée par les associations requérantes. Il a déclaré ces dispositions conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif de cette décision.
 
5. Toutefois, depuis cette déclaration de conformité, le Conseil constitutionnel a jugé contraires au droit au respect de la vie privée, dans sa décision du 5 août 2015 mentionnée ci-dessus, des dispositions instaurant un droit de communication des données de connexion au profit des agents de l’Autorité de la concurrence analogue à celui prévu par les dispositions contestées. Cette décision constitue un changement des circonstances justifiant le réexamen des dispositions contestées.
 
- Sur le fond :
 
6. En vertu de l’article 34 de la Constitution, il appartient au législateur de fixer les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques. Il incombe au législateur d’assurer la conciliation entre, d’une part, l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de la propriété intellectuelle et, d’autre part, l’exercice des droits et des libertés constitutionnellement garantis. Au nombre de ces derniers figure le droit au respect de la vie privée protégé par les articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.
 
7. En vertu de l’article L. 336-3 du code de la propriété intellectuelle, le titulaire d’un accès à des services de communication au public en ligne a l’obligation de veiller à ce que cet accès ne fasse pas l’objet d’une utilisation à des fins de reproduction, de représentation, de mise à disposition ou de communication au public d’œuvres ou d’objets protégés par un droit d’auteur ou par un droit voisin, sans l’autorisation des titulaires de ses droits, lorsqu’elle est requise. Au sein de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet, la commission de protection des droits est chargée, lorsqu’elle est saisie d’un manquement à cette obligation, de prendre les mesures destinées à en assurer le respect. Il s’agit, conformément à l’article L. 331-25 du même code, d’adresser aux auteurs des manquements à l’obligation précitée une recommandation leur rappelant le contenu de cette obligation, leur enjoignant de la respecter et leur indiquant les sanctions encourues à défaut.
 
. En ce qui concerne le droit de communication portant sur certaines informations d’identification des abonnés :
 
8. À l'exception du mot « notamment », les dispositions du dernier alinéa de l’article L. 331-21 du code de la propriété intellectuelle confèrent aux agents de la Haute autorité le droit d’obtenir communication, par les opérateurs de communication électronique, de l’identité, de l’adresse postale, de l’adresse électronique et des coordonnées téléphoniques de l’abonné dont l’accès à des services de communication au public en ligne a été utilisé en violation de l’obligation énoncée à l’article L. 336-3.
 
9. En premier lieu, en adoptant ces dispositions, le législateur a entendu renforcer la lutte contre les pratiques de contrefaçon sur internet, qui répond à l’objectif de sauvegarde de la propriété intellectuelle.
 
10. En deuxième lieu, ce droit de communication, qui n’est pas assorti d’un pouvoir d’exécution forcée, n’est ouvert qu'aux agents publics de la Haute autorité, dûment habilités et assermentés, qui sont soumis, dans l’utilisation de ces données, au secret professionnel.
 
11. En dernier lieu, d’une part, le champ des informations en cause se limite à l’identité et aux coordonnées électroniques, téléphoniques et postales des auteurs des manquements à l’obligation énoncée à l'article L. 336-3. D’autre part, ces informations sont nécessaires pour que leur soit adressée la recommandation mentionnée au paragraphe 7. Elles présentent donc un lien direct avec l’objet de la procédure mise en œuvre par la commission de protection des droits.
 
12. Il résulte de ce qui précède que le législateur a assorti le droit de communication contesté de garanties propres à assurer, entre le respect de la vie privée et l’objectif de sauvegarde de la propriété intellectuelle, une conciliation qui n’est pas manifestement déséquilibrée.
 
13. À l’exception du mot « notamment », le dernier alinéa de l’article L. 331-21 du code de la propriété intellectuelle, qui ne méconnaît pas non plus le secret des correspondances, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, est conforme à la Constitution.
 
. En ce qui concerne le droit de communication portant sur tous documents et les données de connexion :
 
14. Les troisième et quatrième alinéas de l’article L. 331-21 du code de la propriété intellectuelle et le mot « notamment » figurant au cinquième alinéa du même article confèrent aux agents de la Haute autorité le droit d’obtenir communication et copie de tous documents, quel qu’en soit le support, y compris les données de connexion détenues par les opérateurs de communication électronique.
 
15. L’exercice de ce droit répond aux mêmes fins et garanties que celles énoncées aux paragraphes 9 et 10. En outre, le troisième alinéa de l’article L. 331-21 subordonne son exercice aux nécessités de la procédure mise en œuvre par la commission de protection des droits.
 
16. Toutefois, d’une part, en faisant porter le droit de communication sur « tous documents, quel qu’en soit le support » et en ne précisant pas les personnes auprès desquelles il est susceptible de s’exercer, le législateur n’a ni limité le champ d’exercice de ce droit de communication ni garanti que les documents en faisant l’objet présentent un lien direct avec le manquement à l’obligation énoncée à l’article L. 336-3 du code de la propriété intellectuelle, qui justifie la procédure mise en œuvre par la commission de protection des droits.
 
17. D’autre part, ce droit de communication peut également s’exercer sur toutes les données de connexion détenues par les opérateurs de communication électronique. Or, compte tenu de leur nature et des traitements dont elles peuvent faire l’objet, de telles données fournissent sur les personnes en cause des informations nombreuses et précises, particulièrement attentatoires à leur vie privée. Elles ne présentent pas non plus nécessairement de lien direct avec le manquement à l’obligation énoncée à l’article L. 336-3.
 
18. Il résulte de ce qui précède que, dans ces conditions, le législateur n’a pas entouré la procédure prévue par les dispositions contestées de garanties propres à assurer une conciliation qui ne soit pas manifestement déséquilibrée entre le droit au respect de la vie privée et l’objectif de sauvegarde de la propriété intellectuelle.
 
19. Par conséquent, et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur l’autre grief, les troisième et quatrième alinéas de l’article L. 331-21 du code de la propriété intellectuelle ainsi que le mot « notamment » figurant au dernier alinéa du même article doivent être déclarés contraires à la Constitution.
 
- Sur les effets de la déclaration d’inconstitutionnalité :
 
20. Selon le deuxième alinéa de l’article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l’article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d’une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d’être remis en cause ». En principe, la déclaration d’inconstitutionnalité doit bénéficier à l’auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel. Cependant, les dispositions de l’article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l’abrogation et de reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l’intervention de cette déclaration. Ces mêmes dispositions réservent également au Conseil constitutionnel le pouvoir de s’opposer à l’engagement de la responsabilité de l’État du fait des dispositions déclarées inconstitutionnelles ou d’en déterminer les conditions ou limites particulières.
 
21. En l’espèce, l’abrogation immédiate des dispositions déclarées contraires à la Constitution entraînerait des conséquences manifestement excessives. Par suite, il y a lieu de reporter au 31 décembre 2020 la date de l’abrogation des dispositions contestées.
 
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
Article 1er. - Les troisième et quatrième alinéas de l’article L. 331-21 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2009-669 du 12 juin 2009 favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet, ainsi que le mot « notamment » figurant au cinquième et dernier alinéa du même article sont contraires à la Constitution.
 
Article 2. - La déclaration d’inconstitutionnalité de l’article 1er prend effet dans les conditions fixées au paragraphe 21 de cette décision.
 
Article 3. - Le reste du dernier alinéa de l’article L. 331-21 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction résultant de la même loi, est conforme à la Constitution.
 
Article 4. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.
 
Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 20 mai 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT.
 
Rendu public le 20 mai 2020.
 
En bref, on ne badine pas avec la protection de vos données et vie privée, et pour cause d’abus du mot « notamment » et quelques dispositions levant le secret des communications portant sur la vie privée (et les correspondances, le code des PTT), la loi est vidée de son sens : On ne devrait plus recevoir de « riposte graduée » si on télécharge illégalement des œuvres protégées par les droits d’auteur, mais directement une citation à comparaître…
Seulement à partir du 1er janvier prochain !
Juste le temps pour le législateur d’examiner, « dans sa très grande sagesse », un nouveau dispositif constitutionnellement acceptable.
Ce qui ne vous empêche pas de vous abonner sur des sites « légaux » de téléchargement ou de « capter » le wifi d’un hôtel situé à proximité de votre ordinateur…
 
Mais on peut aussi et désormais se poser la question de l’utilité de la HADOPI.
Sans son bras armé, la haute autorité aura désormais un champ extrêmement limité. Sa procédure deviendra plus lourde et ses résultats seront encore moins bons.
Un constat qui remet en doute son utilité et surtout son coût : En effet le budget de l’HADOPI est de dix millions d’euros par an, une fortune en comparaison à ses résultats.
Quant à la possible fusion de la HADOPI et du CSA, elle devrait donc revenir sur le devant de la scène.
Si cette fusion a été envisagée, on ne sait encore rien de ses prérogatives, de son budget, ni même de son plan pour lutter contre le piratage.
 
Pour la bonne forme, si ça vous amuse, je rappelle que les textes de ce blog sont « libre de tous droits ». J’ai toujours considéré qu’Internet était gratuit.
D’ailleurs, ils sont eux-mêmes tous inspirés par d’autres textes de libre accès : Je n’ai aucune imagination pour en créer des valables…
Naturellement, libre de consultation, mais pas d’exploitation commerciale.
Je me la réserve et j’ai même chargé mon « Gardien » et lui seul d’en faire ce que bon il lui semblait.
Logique, quoi.
 
Bonne lecture à toutes et tous (en vous précisant qu’une décision d’une juridiction quelconque de ce pays [qui est aussi le mien] appartient au domaine public dès lors qu’elle est régulièrement publiée par l’autorité compétente) et bon week-end.
 
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