« Poucette… »
C’est un « très vieux post »
que je reprends aujourd’hui.
D’abord parce que vous serez peu
nombreux à la lire (manif’-unitaire et « Black-Bloc » obligent), coincés
que vous serez l’oreille collée à votre radio l’esprit happé par les
news déversées sur vos smartphones pour suivre les « débordements »
au plus près ;
Ensuite parce que vos « auto-rités »
s’inquiètent pour votre santé (elles ne veulent que votre bonheur même malgré
vous…) quand vous ne décollez plus votre regard de votre « mini-écran »
portatif, câblés au reste du monde (devenu « petit-village ») et
marchez d’un bon pas vers votre destin et les obstacles qui s’y trouvent,
notamment sur les « passages piétons », par exemple ;
Enfin, j’imagine que les « urbains »
sont les mêmes partout, à London ou à « Paris-sur-la-plage », quand
chacun dans son métro, son bus, son tramway, son train de banlieue a le visage
(et le regard) plongé sur son écran à lire et répondre à ses textos, indifférent
à son immédiat.
Des « sombies », vous êtes
devenus des « zombies » des zones urbaines, scotchés par vos engins
(petite merveille de technologie…) qui tiennent dans la main et vous relie à la
« globalosphère »…
On n’arrête pas le progrès.
Car vous n’en avez pas jamais assez, vous, de tous ces tohu-bohus que nous imposent l’actualité et notre personnel politique aux abois, incapable de réduire la fracture sociale, la dégringolade économique, la faillite publique, le déferlement de lois liberticides qui s’abattent sur le bas-peuple comme la vérole sur le bas-clergé, de tous ces « déclinistes » qui sont autant d’oiseaux de mauvais augure, colportant (comme je le fais aussi parfois) les cataclysmes à venir ?
Car vous n’en avez pas jamais assez, vous, de tous ces tohu-bohus que nous imposent l’actualité et notre personnel politique aux abois, incapable de réduire la fracture sociale, la dégringolade économique, la faillite publique, le déferlement de lois liberticides qui s’abattent sur le bas-peuple comme la vérole sur le bas-clergé, de tous ces « déclinistes » qui sont autant d’oiseaux de mauvais augure, colportant (comme je le fais aussi parfois) les cataclysmes à venir ?
Moi si !
Et « Poucette » est
rafraîchissante.
Et Ô combien lucide…
Un petit grand-livre plein de
fulgurances et d’espoirs.
C’est Michel Serres, historien, philosophe, prof octogénaire encore actif qu’on ne présente plus, vibrionnant académicien, futur héros des internautes, nous propose de réhabiliter le présent et ses mutations qui en a fait mention une première fois, il y a déjà bien longtemps, et crée le personnage de « Petite Poucette ».
C’est Michel Serres, historien, philosophe, prof octogénaire encore actif qu’on ne présente plus, vibrionnant académicien, futur héros des internautes, nous propose de réhabiliter le présent et ses mutations qui en a fait mention une première fois, il y a déjà bien longtemps, et crée le personnage de « Petite Poucette ».
C’est la jeune fille qui tapote ses
mails et SMS sur son Smartphone qu’elle ne quitte jamais depuis ses un an.
« Petite Poucette »
représente la nouvelle humanité.
Le début son livre donne la liste impressionnante des mutations qui ont eu lieu depuis les années 1970 « sans que nous nous en apercevions ».
Le début son livre donne la liste impressionnante des mutations qui ont eu lieu depuis les années 1970 « sans que nous nous en apercevions ».
Nous habitions encore les campagnes,
nous peuplons les villes.
Le monde était vide, avec 7 milliards d’humains,
il est plein : En un siècle, l’humanité a doublé deux fois !
Dans la même période, l'espérance de
vie a triplé.
Langues, religions, cultures se
croisent, le multiculturalisme est de règle.
Intervalle unique dans l'histoire
occidentale : Déjà soixante-dix ans sans guerre !
On se mariait il y a un siècle pour dix
à quinze ans de vie commune, aujourd'hui c’est pour soixante-cinq ans compte
tenu de l’espérance de vie.
L’âge moyen du premier enfant a reculé
de quinze ans.
Les antalgiques et anesthésiques ont
fait reculer la souffrance, la mort est adoucie par des soins palliatifs.
« Religieuse
ou laïque, toute morale se résumait en des exercices destinés à supporter la
douleur inévitable et quotidienne : Maladie, famine et cruauté du monde. »
D’où, sans doute, ladite crise morale
de notre civilisation.
On mettait 36 heures non-stop
épuisantes pour aller de Paris au village (en
« Corsica-Bella-Tchi-tchi »), aujourd’hui, c’est plié en une matinée.
Une semaine pour arriver à New-York, le
temps d’un film et d’une collation pour voir les côtes du nouveau-monde à
travers un hublot…
« On » marchait (presque)
déjà sur la Lune, des robots analysent le sol de Mars.
On ne craignait pas le calendrier
Maya ; désormais, c’est du passé.
Il y avait 50 % d’agriculteurs à la fin
de la guerre et ils ne sont plus que 1 %.
« On est passé, en moins de cinquante ans, dans un nouveau monde. »
Et j’en passe, de ces constats, car
l’essentiel est ailleurs.
Il est dans nos têtes !
Il est dans nos têtes !
D’après l’auteur, nous vivons LA
troisième mutation fondamentale.
L’invention de l'écriture a permis de
ne plus apprendre par cœur la tradition orale.
L’imprimerie a permis d’écouter
Montaigne et de se consacrer à avoir une tête bien faite plutôt que bien
pleine.
Aujourd’hui, Internet et les NITC nées
dans les années 80 mettent tous les savoirs à disposition de tous, en
permanence et où que l’on soit.
Que ça aille de la proximité de votre bus
à attraper à la définition d’un mot obscure…
Michel Serres résumait : « Le but de l’enseignement était de
transmettre les savoirs ? Eh bien voilà, c’est fait ! »
On peut, on doit, passer à autre chose.
Ce « tout est dans les ordinateurs » modifie radicalement nos
comportements : Je confirme de mon côté !
L’élève n'écoute plus le prof qui ne
lui dispense qu’un savoir accessible ailleurs et qui n’est qu’un savoir parmi d’autres.
Le décideur est remis en cause par les
décidés, aussi bien informés que lui, sinon collectivement mieux.
Tout le monde veut parler, une nouvelle
demande politique, énorme, se lève.
« Les gens comme moi, nés d’avant l’ordinateur, nous travaillons AVEC
lui. Nous sommes en dehors de l’ordinateur. « Petite Poucette »,
elle, vit DANS l’ordinateur. Pour elle, l’ordinateur n’est pas un outil, mais
fait partie de ses conditions de vie. Elle est sur Facebook, les réseaux
sociaux, son téléphone est branché avec elle… »
Elle dort avec.
« L’autre jour, un de mes petits-fils vient chez moi en deux-roues, et il
était en panne. Il démonte son engin et me dit : « Regarde… ». Il
avait une pièce qu’il ne savait pas où remettre. Il m’a demandé mon téléphone
portable et, hop, il a trouvé la solution à son problème… Il vit dedans. »
« C’est vrai aussi de mes étudiants à Stanford, à qui j’ai fait corriger
mon livre, c’est vrai aussi des patients à l’hôpital…
Regardez
les conséquences : Quand j’étais jeune, par exemple, on n’aurait jamais demandé
à un chirurgien après une opération ce qu’il avait fait dans votre ventre.
Aujourd’hui, n'importe quel patient, s’il a « un pet de travers »,
tape « pet de travers » sur son ordinateur avant d’aller voir le
toubib. Et il va pouvoir en parler avec son médecin.
Cela
change tout.
Dans
Petite Poucette, j'appelle ça « la présomption de compétence » qui s’est
renversée. Avant, le toubib, l’avocat, l’enseignant, avaient une « présomption
d’incompétence » à l’égard de ceux auxquels ils s’adressaient. Aujourd’hui,
si j’entre dans un amphi pour faire un cours sur la cacahuète, je sais qu’il y
a certains étudiants qui ont tapé « cacahuète » sur Wikipédia la
veille, et donc je dois faire cours en fonction de ça. »
J’abonde à titre personnel : Il va
y avoir 20 ans de ça, quand je fournissais mon cours de fiscalité sur les bancs
de la fac à des « Bac++++ », ils savaient déjà tout, parfois mieux
que moi.
Mais ils venaient tout de même : À
moi de remettre de l’ordre, « de la hiérarchie », dans leurs
connaissances (déjà acquises),, de les rendre cohérentes avec des thèmes et
sujets connexes.
Et là, il y avait du travail…
« Petite Poucette arrive à présent sur le marché du travail. Il y a des
instits, des profs, Petites Poucettes d’aujourd'hui, et cette vague est en
train de construire le nouveau monde. »
Et alors ? Alors commence la nouvelle
humanité.
C’est l’intuition forte de son livre : Le changement du
support-message (écriture, livre, Internet) conduit à un changement des
cervelles.
L’enjeu n’est plus le savoir, il est
accessible, mais d’inventer comment s’en servir.
Nous entrons enfin dans « l’ère de
l’intelligence », de l’invention en disait-il.
Personnellement, je n’en suis pas bien
sûr : On fait plutôt des générations de crétins, sûrs qu’une
intelligence-artificiel va les aider à ne pas faire de konnerie.
Ils se trompent probablement tous :
Je l’ai déjà dit par ailleurs, j’ai fait mettre en place un programme IBM dans
une des boutiques que j’ai eue à « gérer » au mieux, qui préparait
des achats.
L’algorithme (sous Unix et IBM 400)
était puissant à l’époque. Mais il fallait valider, parce qu’il faisait 2 % d’erreur
comme n’importe quelle intelligence naturelle !
En revanche, pour les détecter, c’était
franchement chronophage, là où ça devait soulager le travail du laborieux qui
validait…
La clarté de la connaissance compte
moins que la vitesse et le « concept », la raison cartésienne du général,
parfois moins que le concret singulier.
Demain, avec les imprimantes en 3D, le
self-kit-made deviendra une telle réalité quotidienne que des pans entiers de
l’économie artisanale (premier employeur du pays) disparaîtront.
Et dire qu’après avoir appris à
démonter et remonter une montre, un jouet, une assiette cassée, mon premier
« kit » a été de monter un ordinateur ancêtre des PC (« Heath-kit H8 ») au lycée et de
le programmer pour jouer aux échecs… (et me laisser gagner !)
Aujourd’hui, c’est devenu naturel, on
fait ses courses alimentaires (vestimentaires, son ameublement, sa voiture, ses
voyages) depuis le fond de sa cuisine, on boursicote même sur la table de la
salle à manger.
Avec la 4G (et les tablettes pour
moi : J’ai des doigts trop gros !) c’est direct depuis un banc-public
installé là parce qu’il y a du soleil ce jour-là, qu’on fera « ses
affaires ».
« Mon gardien » à même réussi
à publier deux titres à ses heures perdues sans même n’avoir jamais eu à se
déplacer ou se servir d’une machine à écrire Japy (celle avec ruban…).
« Gam-gam » (et beaucoup d’autres)
font des tubes avec des « boites-à-rythmes » (et des paroles niaises sans
aucun sens…)
Dans son bouquin, Serres clame que
tout va radicalement changer. « Le
travail, les entreprises, la santé, le droit et la politique, bref l'ensemble
de nos institutions. »
C’est le cas, toujours plus précisément.
Les lieux d'habitation par exemple,
définissaient notre appartenance, la politique se référait à la cité. C’est
fini ! Sur la Toile, l’appartenance devient fluctuante et les Nations sont en
voie de disparition (n’en déplaisent aux « nationalistes »)
« Quelle
chance ! » se réjouit au passage le philosophe. « Les nations, combien de millions de morts ? », demande-t-il en
référence aux XIXème et XXème siècles.
150, telle est son évaluation !
C’est une vraie bouffée de magie, celle
du « monde d’après » que la finance et de la politique internationale
nous construisent par ailleurs sans même le savoir (ni l’imaginer).
Restent quelques « incontournables »
géopolitiques à maîtriser encore, toutefois…
La fin de l’ère du savoir, désormais à
portée de main, ouvre, d’après lui, le temps « d’une nouvelle humanité » et d’un monde qui change
entièrement, qui change de nature sans qu’on ne le perçoive clairement
Comment s’y retrouver ?
Quelles politiques recommander ?
Le philosophe donne seulement quelques
intuitions : L’importance des données (un cinquième pouvoir ? Et un nouveau « droit
de l’homme » à inventer qui lui donne propriété de ses données propres). C’est
en cours ;
L’importance des codes d’accès (le
code, c’est l’homme ? Nous entrons dans une « civilisation de l’accès »).
La Chine expérimente le « déni d’accès » pour ses citoyens jugés
irrespectueux des autorités, les pirates informatiques vous plombent des
serveurs avec des trolls ;
L’importance de la pensée « procédurale
», comme quand on avance lorsqu’on écrit des algorithmes.
Des intuitions qui ne sont pas si
absurdes, puisque nous y sommes déjà.
Même si Internet reste un monde et un
outil de libertés, justement.
Principal message : « Allez-y ! » « Ne regrettez pas le monde d’hier ! »
Celui qui vient, qui est déjà là, est
ouvert, imprévisible, il prône la liberté et l’individualisme. Tout est à réinventer.
On était assez loin de Hessel et de son
« Indignez-vous ! ».
Avec le recul, les Podemos, les Nuits
debout, les Gilets jaunes, la poussée des « nationalismes », entre
cette vision du « Allez-y » et celle d’Hessel, on ne se bataille plus
pour ou contre : La dette publique enfle sans limite mais on s’étripe encore
pour savoir si la flèche de Notre-Dame doit ou non être à l’identique de celle
conçue par Viollet-Le-Duc !
Des broutilles.
Bon premier mai à toutes et tous…
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