Histoire de voisinage…
Dans cette affaire, le propriétaire d’un entrepôt
avait procédé à la surélévation d’un mur en bordure de sa propriété et l’avait ensuite
utilisé comme mur extérieur d’un nouveau bâtiment avec des ouvertures.
Pas content, la propriétaire voisine faisait valoir
que le mur était mitoyen !
Peut-être que ça lui cachait la lumière du soleil
quelques heures par jour où qu’elle pensait ne plus pouvoir poser nue sur son
gazon les jours de « bonnes chaleurs » à cause desdites ouvertures…
Vous savez naturellement comment on reconnaît un mur « mitoyen »
d’un mur « privatif » ?
Il s’agit seulement de savoir dans quel lot, de quel
côté, descend l’eau de pluie !
Encore faut-il prévoir qu’il pleuve.
Et le problème existe quand il n’y a pas de pente
avérée au sommet du mur.
Ce n’est pas tant que la dame-mécontente souhaitait
faire démolir la construction, mais plutôt d’obtenir l’indemnisation de son « préjudice ».
Et la cour d’appel territorialement compétente avait
accédé à sa demande en considérant que la surélévation du mur mitoyen ainsi
réalisée, empiétait pour moitié sur sa propriété…
Son voisin, pas trop satisfait (il a probablement participé
seul au financement des travaux de surélévation, semble-t-il), poussé par ses
avocats, se pourvoit en cassation.
Cour de cassation, troisième chambre civile
Audience publique du jeudi 6 septembre 2018
N° de pourvoi : 17-19430
Non publié au bulletin
M. Chauvin (président), président.
SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, SCP
Rousseau et Tapie, avocat(s).
REPUBLIQUE
FRANCAISE
AU NOM DU
PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a
rendu l’arrêt suivant :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 9
mars 2017), que Mme Y… est propriétaire d’une maison voisine de celle de M. X…
; que celui-ci a procédé à la surélévation d’un mur en bordure de son fonds, et
y a pratiqué des ouvertures ; que, soutenant que le mur était mitoyen et que
les ouvertures pratiquées ne répondaient pas aux prescriptions de l’article 676
du code civil, Mme X… a demandé la suppression des ouvertures et l’indemnisation
de divers préjudices ;
Sur les premier et troisième moyens, ci-après annexés
:
Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une
décision de rejet spécialement motivé sur ces moyens qui ne sont manifestement
pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le deuxième moyen :
Vu l’article 658 du code civil ;
Attendu que tout propriétaire peut faire exhausser le
mur mitoyen ;
Attendu que, pour condamner M. X… à payer à Mme Y… une
certaine somme au titre du préjudice subi, l’arrêt retient que le mur surélevé
par M. X… empiète pour moitié sur la propriété de Mme Y… ;
Qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte
susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a condamné
M. X… à payer à Mme Y… une somme de 853 euros, l’arrêt rendu le 9 mars 2017,
entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en
conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se
trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la
cour d’appel d’Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne Mme Y… aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette
les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près
la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en
marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième
chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six
septembre deux mille dix-huit.
Ainsi la Cour de cassation, en cassant l’arrêt, aura
rappelé aux juges de la cour d’appel d’Aix leur cours de droit civil des biens :
Le principe reste que tout propriétaire peut faire surélever un mur mitoyen.
C’est comme ça que c’est marqué dans le code civil :
Le copropriétaire d’un mur mitoyen peut procéder à sa surélévation de manière privative,
sous réserve de supporter le coût de sa réalisation et de son entretien.
Et comme punition d’avoir pu oublier leur première année de droit, c’est la même cour d’appel qui
devra détruire la décision de leurs collègues incompétents, et le sieur X…
aura gagné 853 euros dans l’affaire.
En revanche, je ne vous raconte pas les honoraires
décaissés par les deux parties à cette occasion…
Un beau métier, avocat au conseil !
Et peut-être – mais on ne saura pas – Madame Y… pourra
probablement s’allonger langoureusement sur sa pelouse, les jours de soleil
seulement, après avoir fait boucher les ouvertures dudit-mur !
Ce qu’elle ne sait pas, c’est qu’un voyeur pourra
quand même se rincer la pupille en grimpant sur le mur (ou le toit) depuis chez
son voisin…
Personnellement, je trouve regrettable qu’on mobilise avec
autant de « légèreté » des juristes « hyper-plus-plus »
pour 853 euros.
Mais c’est la Loi qui doit s’appliquer dans toute sa « dureté » !
Bonne fin de week-end à toutes et à toutes !
I3
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