30 – Les effrondistes
Avertissement : Vous l’aviez compris, ceci n’est qu’un
roman, une fiction, une « pure construction intellectuelle », du pur jus de
neurone garanti 100 % bio, sortie tout droit de l’imaginaire de son auteur.
Toute ressemblance avec des personnages, des lieux, des
actions, des situations ayant existé ou existant par ailleurs dans la voie
lactée (et autres galaxies), y compris sur la planète Terre, y est donc
purement, totalement et parfaitement fortuite !
Avec sa fille, il a acheté il y a treize ans une
longère près de Rennes datant du XIXème siècle. Pour faire son
choix, il avait une liste de critères. Il lui fallait de l’eau, une mare, un
ruisseau, un puits, et la récupération de la pluie dans des bidons de 1.000
litres.
Il lui fallait aussi du bois pour se chauffer : il a
3 hectares de forêt.
Et il lui fallait ne pas être trop proche de la
ville, parce que les citadins iront saccager ce qu’il y a autour.
Il a des chevaux pour la traction animale car, selon
lui, en 2035, il n’y aura plus de pétrole et des panneaux photovoltaïques.
Il en dit que si ça s’effondre, avec qui vous allez
survivre ?
Avec vos voisins. Or les gars, autour de lui, sont
des paysans. Ils font du maïs, ont des vaches laitières. Et il a créé de bons
rapports avec tous.
« Tout seul, vous tenez trois jours. » Pour lui,
c’est donc à l'échelle d’une bio-région que l’on peut survivre.
Mais il admet ne pas être entendu, et c’est
précisément pour cela que l’effondrement va arriver.
Pour s’en sortir, il faudrait une économie de guerre
comme à Londres, en 1941.
Du coup il est pour le rationnement de l’essence, des
vivres, des vêtements, et pour le contrôle des naissances.
Sauf que, reconnaît-il, il n’y a pas d’exemples dans
l’Histoire où une économie de guerre a été adoptée avant la guerre.
Les gens ne l’acceptent tout simplement pas !
Il se trouve qu’en France, l’étude d’un possible
effondrement de la civilisation « thermo-industrielle » est justement initiée
par « l’Institut Momentum » qui postule l’effondrement comme « le
processus irréversible à l’issue duquel les besoins de base, eau, alimentation,
logement, habillement, énergie, etc. ne sont plus fournis à un coût raisonnable
à une majorité de la population par des services encadrés par la loi ».
La collapsologie ainsi nommée s’inscrit dans l’idée
que l’homme altère son environnement durablement, et propage le concept
d’urgence écologique, lié notamment au réchauffement climatique et à
l’effondrement de la biodiversité alors même que l’effondrement de la
civilisation industrielle pourrait provenir de la conjonction de différentes
crises : crise environnementale, mais aussi crise énergétique, économique,
géopolitique, démocratique, etc.
Il faut préciser que bien que certaines critiques
réfutent son caractère scientifique, l’étude des risques d’effondrement
civilisationnel est qualifiée de « champ de recherche intégré » par un
collectif de chercheurs rassemblé autour d’une équipe de l’Université de
Cambridge dédiée à l’étude et l’atténuation des risques d’extinction de
l’humanité.
En effet, dès 1972, le rapport Meadows, intitulé
« The Limits of Growth », réalisé par des chercheurs du MIT et
commandé par le « Club de Rome », alerte des risques d’une croissance
démographique et économique exponentielle sur une planète aux ressources
limitées.
Un rapport qui aura marqué plusieurs générations…
De ce qu’en comprend et en savait déjà Alexis, la
collapsologie s’appuie ainsi sur des études de prospective et également sur
l’étude de état des tendances mondiales et régionales dans le domaine
environnemental, social et économique, comme les rapports du GIEC, de l’IPBES
ou du Global Environment Outlook périodiquement publiés par la division de
l’alerte rapide et de l’évaluation du PNUE de l’ONU…
Elle s’appuie aussi sur de nombreux travaux
scientifiques ainsi que sur diverses études, telles que « A safe operating
space for humanity » et « Approaching a state shift in Earth’s biosphere »,
publiées dans Nature en 2009 et 2012, « The trajectory of the Anthropocene :
The Great Acceleration » publiée en 2015 dans The Anthropocene Review, ou encore
« Trajectories of the Earth System in the Anthropocene » publiée en 2018 dans
les Comptes-rendus de l’Académie nationale des sciences des États-Unis
d’Amérique.
Certains scientifiques y estiment qu’un effondrement
systémique global est probable si rien n’est mis place pour l’éviter où
l’effondrement de la « civilisation thermo-industrielle » et peut
être considéré soit comme un processus qui s’étalerait sur plusieurs années ou
plusieurs décennies, soit comme le résultat final de ce processus qui accumule
les dysfonctionnements dans la gestion de la finitude des ressources.
Néanmoins, Paul fera toucher du doigt à Alexis,
qu’aussi convaincant que puisse être les « collapsologues » et autres
« effondristes », pour sonder l’avenir, s’il leur est en effet
possible de faire appel à des modèles mathématiques et informatiques donnant
un vernis scientifique à leurs prévisions qui peut convaincre les moins
bien informés, elles ne permettent toutefois pas de prédire l’avenir avec
certitude donnant seulement des indications sur le comportement et l’évolution
des systèmes et des sociétés.
Ainsi même les projections établies par le modèle du
« Club de Rome » en 1972 évoquaient le début d’un possible
effondrement vers 2030 dans l’hypothèse d’un « Business as usual ».
En plus des projections établies par des modèles
mathématiques, la collapsologie sonde le futur à l’aide de scénarios à l’instar
de ceux formulés par les spécialistes de la prospective.
Dans ce contexte, de nombreux collapsologues
considèrent que l’effondrement de la civilisation industrielle est inévitable,
notamment en raison de l’épuisement des ressources naturelles, mais qu’il
subsisterait une inconnue : les délais qui nous séparent des crises à venir.
Cochet balaye ses critiques et affirme que
l’effondrement est « possible dès 2020, probable en 2025, certain vers 2030 ».
Il estime ainsi qu’il « n’y aura plus de voiture en
2040. Il y aura quelques calèches, avec des chevaux, oui. Il n’y aura plus de
voiture, il n’y aura plus d’avions. Le mode de transport du futur, c’est le
cheval ! ».
D’autres estiment que « l’effondrement de la
civilisation thermo-industrielle est une évolution géographiquement hétérogène
qui a déjà commencé, mais n’a pas encore atteint sa phase la plus critique, et
qui se prolongera pendant une durée indéterminée.
C’est à la fois lointain et proche, lent et rapide,
graduel et brutal.
Cela ne concerne pas seulement les événements
naturels, mais aussi, et surtout, des chocs politiques, économiques et sociaux,
ainsi que des événements d’ordre psychologique comme des basculements de
conscience collective. »
En bref, les prophètes de malheurs ne sont même pas
d’accord entre eux.
Paul critiquera ces thèses plus tard auprès d’Alexis.
« Tout repose sur l’idée que la population
mondiale ira croissante, de façon géométrique, en une véritable explosion et
que chaque citoyen du monde luttera pour bénéficier des mêmes modes de
consommation, notamment des matières premières et des ressources naturelles de
la planète, que le monde occidental.
Là, effectivement, les « courbes
se croisent rapidement !
Et puis, la récente crise pandémique,
la guerre sans agression en Europe orientale et ses risques d’embrasement
mondial renforcent cette idée avec des mesures comme « l’horloge de
l’apocalypse » qui avance régulièrement et rapidement, ou l’évolution du
« jour du dépassement » qui avance toujours plus tôt dans l’année », un calcul fait
tous les ans par le Global Footprint Network.
Pour être plus précis, le Gobal Footprint Network,
fondé en 2003, est un « think tank » indépendant basé à Oakland, en
Californie, mais a également des bureaux à Bruxelles et à Genève.
Ce réseau regroupe plus de 70 organisations
partenaires, y compris le WWF International, la Banque Sarasin, le Groupe
Pictet, la New Economics Foundation, le cabinet de conseil britannique Best
Foot Forward et l’initiative d’Abu Dhabi Global Environmental Data, par
exemple.
Et conclue régulièrement que l’activité humaine
consomme 1,75 fois les ressources annuelles offertes par la planète, tous les
ans…
« Effrayant, non ? » réagira
Alexis.
« La mesure est contestable. Bien sûr que
quand on puise dans les gisements de pétrole, ils ne se renouvellent pas au
même rythme, loin de là ! On ne fait qu’exploiter les stocks existants.
Mais on accélère les substitutions. Ça va demander du temps, mais techniquement
on sait faire.
Toutefois, si la population mondiale
double tous les dix ans et si tout le monde veut consommer autant d’énergie que
le citoyen américain moyen, clairement, on n’y arrivera pas. Or… »
Paul laisse ses mots en suspension dans l’éther…
avant de reprendre.
« Il n’est évidemment pas question de faire
une guerre mondiale pour détruire un maximum de prétentieux, naturellement, ni
d’imposer une limitation drastique des naissances.
On a vu ce que ça donne en Chine avec
la politique de l’enfant unique : ils n’ont plus assez de bras pour faire
tourner l’économie et donner à manger à leurs vieux.
Non, il est un autre phénomène qui est
complètement passé sous silence : la transition démographique ! »
C’est quoi encore, ça ?
« La transition démographique est le
processus historique par lequel une population passe d’un régime démographique
caractérisé par un taux de mortalité et un taux de natalité élevés à un nouveau
régime caractérisé par un taux de mortalité puis un taux de natalité faibles.
Or, ce type d’évolution a été observé à
partir de la fin du XVIIIème siècle en France et au Royaume Uni,
puis dans l’ensemble des autres pays au cours des trois siècles suivants. C’est
une composante de la modernisation ou du développement socio-économique.
Ce processus historique aboutit à
l’octuplement de la population mondiale de 1800 à 2022 et à son décuplement
prévu de 1800 à 2050. Et il s’explique principalement par le développement
sanitaire et socio-éducatif.
Il contribue à expliquer le
développement économique et se nourrit de celui-ci, pourrait-on résumer !
D’ailleurs, il se confirme : les
indices d’un futur « baby crash » se multiplient. Des enquêtes sur les
intentions de fécondité des couples ont été menées dans plusieurs pays avec des
résultats convergents.
Les gens entendent souvent reporter le
moment où ils feront des bébés.
En Italie, 37 % des couples ont reporté
leurs projets d’enfants et 21 % l’ont abandonné.
En France, au printemps dernier, 51 %
des Français avaient aussi décidé de remettre à plus tard leurs « projets
bébé ». 17 % y avaient renoncé.
À l'échelle mondiale, le recul de la
natalité aura atteint 10 à 15 % en 2020 et 2021 ».
Sauf qu’après quelques recherches, Alexis constatera
que si la transition socio-démographique rapide favorise généralement le
progrès économique dans les pays en voie de développement, les migrations
internationales globalement jouent relativement un rôle plus faible après 1960.
La transition de la fécondité est plus tardive dans
certaines régions comme l’Afrique sub-saharienne, même si elle est présente
partout. Et le vieillissement post-transitionnel concerne désormais les deux
tiers de la population mondiale.
Historiquement, les premiers démographes qui ont
travaillé sur cette évolution des populations des pays européens et
nord-américains l’ont fait dans les années trente puis à la sortie de la
guerre, battant en brèche les thèses malthusiennes.
Les scénarios apocalyptiques dessinés sur une
hypothétique pénurie des ressources engendre la frayeur inaugurée par Thomas
Malthus et n’a cessé de faire des émules parmi les héritiers du courant de
pensée dérivé de son nom : le malthusianisme.
En 1798, Malthus publie son célèbre ouvrage sur la
population. Il craignait que la démographie ne progresse plus rapidement que la
production de nourriture et promettait à son pays, le Royaume-Uni, des famines
à répétition.
D’ailleurs, dans un vieil article publié en 1997, le
magazine britannique The Economist revenait sur une série de prédictions
apocalyptiques écologistes qui se sont toutes révélées fausses.
En 1865, rappelle l’hebdomadaire, dans The coal
question, « William Stanley Jevons évoque une pénurie de charbon au
Royaume-Uni. Là encore, il s’est trompé. Quelques décennies plus tard,
l’administration américaine s’inquiétait d’une pénurie de pétrole susceptible
de survenir au début du XXème siècle. Ce comique de répétition n’a
cessé d’être entretenu jusqu’à aujourd’hui. À ceci près que les mouvements
écologistes se désolent désormais de la trop grande abondance et de la trop
grande accessibilité des énergies fossiles » rapportent quelques
contradicteurs !
Alexis retrouvera qu’en 1968, le biologiste Paul
Ehrlich publiait son best-seller intitulé « The Population Bomb » qui
s’inquiétait des famines que connaîtrait l’humanité dans les années
soixante-dix en raison de la surpopulation qu’il identifiait, ainsi que la
pression sur les ressources et la nourriture qu’elle induirait.
Toutes ces prévisions se sont révélées fausses :
l’humanité n’a aujourd’hui jamais été aussi proche de l’objectif d’éradiquer la
sous-alimentation. Celle-ci frappait un humain sur deux au sortir de la Seconde
Guerre mondiale et ne concernait plus que 10,9 % de l’humanité en 2017.
Dans son célèbre rapport publié en 1972, le
très scientifique « Club de Rome » alertait lui aussi sur les
dangers de la croissance de la population et de la pression induite sur les
ressources naturelles. Il publiait notamment un tableau censé anticiper les
pénuries de certains matériaux et en disait que « les réserves mondiales
connues de chrome sont d’environ 775 millions de tonnes métriques, parmi
lesquelles environ 1,85 million de tonnes métriques sont exploitées
annuellement à l’heure actuelle. Ainsi, au taux d’utilisation actuel, les
réserves connues dureraient environ 420 ans.
La consommation mondiale réelle de chrome augmente
cependant de 2,6 % par année. Les lignes courbes (…) montrent comment ce taux
de croissance, s’il continue, épuisera le stock de ressources (…) en seulement
95 ans. »
Fort heureusement, aucune pénurie n’est à signaler 35
ans après la publication de ce rapport…
Pour mémoire (n’en déplaise à « Poux-tine ») : « LE PRÉSENT
BILLET A ENCORE ÉTÉ RÉDIGÉ PAR UNE PERSONNE « NON RUSSE » ET MIS EN LIGNE PAR
UN MÉDIA DE MASSE « NON RUSSE », REMPLISSANT DONC LES FONCTIONS D’UN AGENT «
NON RUSSE » !
Éditions I3
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