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Oui, entrez, entrez, dans le « Blog » de « l’Incroyable Ignoble Infreequentable » ! Vous y découvrirez un univers parfaitement irréel, décrit par petites touches quotidiennes d’un nouvel art : le « pointillisme littéraire » sur Internet. Certes, pour être « I-Cube », il écrit dans un style vague, maîtrisant mal l’orthographe et les règles grammaticales. Son vocabulaire y est pauvre et ses pointes « d’esprit » parfaitement quelconques. Ses « convictions » y sont tout autant approximatives, changeantes… et sans intérêt : Il ne concoure à aucun prix littéraire, aucun éloge, aucune reconnaissance ! Soyez sûr que le monde qu’il évoque au fil des jours n’est que purement imaginaire. Les noms de lieu ou de bipède et autres « sobriquets éventuels » ne désignent absolument personne en particulier. Toute ressemblance avec des personnages, des lieux, des actions, des situations ayant existé ou existant par ailleurs dans la voie lactée (et autres galaxies) y est donc purement et totalement fortuite ! En guise d’avertissement à tous « les mauvais esprits » et autres grincheux, on peut affirmer, sans pouvoir se tromper aucunement, que tout rapprochement des personnages qui sont dépeints dans ce « blog », avec tel ou tel personnage réel ou ayant existé sur la planète « Terre », par exemple, ne peut qu’être hasardeux et ne saurait que dénoncer et démontrer la véritable intention de nuire de l’auteur de ce rapprochement ou mise en parallèle ! Ces « grincheux » là seront SEULS à en assumer l’éventuelle responsabilité devant leurs contemporains…

samedi 3 juillet 2021

L’exceptio veritatis

Ou la présomption d’imputation d’un fait précis
 
Un arrêt assez drôle autour d’un délit de presse net de l’éviction de la gardienne d’un immeuble d’habitation.
Mais un arrêt intéressant, dans la mesure où il est décidé qu’en raison de la règle du respect des droits de la défense implique de considérer que le prévenu qui a offert de prouver la vérité des faits diffamatoires qu’on lui reproche reste recevable à soutenir, lors des débats au fond, que les propos poursuivis ne renferment pas l’imputation ou l’allégation d’un fait précis, susceptible de faire l’objet d’un débat sur la preuve de sa vérité.
 
Le 3 juillet 2018, « Transe-3-région Île-de-Gauloisie » diffuse un reportage dans son édition du 19/20 sur l’acquisition d’un logement dans le XVIIème arrondissement de « Paris-sur-la-plage » par la société Financière Saint-James, mise en cause pour avoir licencié les trois gardiennes d’immeubles et avoir récupéré les loges.
La directrice de la publication et la société « Transe-Télévisions », celle qui est civilement responsable, furent citées à comparaître devant le tribunal correctionnel du chef de diffamation publique envers un particulier à la requête de la société pour les propos suivants : « Mais d’abord des gardiennes d’immeubles et leurs enfants bientôt jetés à la rue, ça se passe dans le XVIIème arrondissement. Les trois femmes ont été licenciées par le nouveau propriétaire des lieux qui veut récupérer les loges à son profit » et « elle et sa famille seront à la rue après l’été ».
La prévenue fut condamnée puis, en appel, la Cour de Versailles débouta la société Financière Saint-James de ses demandes, en écartant notamment la qualification de diffamation pour la phrase « elle et sa famille seront à la rue après l’été » en raison de l’imprécision des faits visés.
 
Dans son pourvoi, la société demanderesse soutenait que la Cour d’appel avait violé l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 (qui définit la diffamation comme « toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé ») en écartant la qualification de diffamation après avoir constaté que la prévenue avait notifié une offre de preuve de la vérité des faits et en n’interprétant pas le second passage au regard du premier.
 
Arrêt n° 609 du 26 mai 2021 (20-80.884) -
 
Cour de cassation - Chambre criminelle
 
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
 
Président : M. Soulard
Rapporteur : Mme de Lamarzelle, conseiller référendaire
Avocat général : M. Desportes, premier avocat général
Avocat(s) : SCP Sevaux et Mathonnet - SCP Piwnica et Molinié
 
Demandeur(s) : Société Financière Saint-James
Défendeur(s) : Mme [H] [O] épouse [C] et la société France télévisions
 
Faits et procédure
1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Mme [O], épouse [C], et la société France télévisions, prises respectivement en leur qualité de directrice de la publication et de civilement responsable, ont été citées à comparaître devant le tribunal correctionnel du chef de diffamation publique envers un particulier à la requête de la société Financière Saint-James, à raison des propos suivants diffusés le 3 juillet 2018 dans l’édition 19/20 région Ile-de-France du journal de France 3 : « mais d’abord des gardiennes d’immeubles et leurs enfants bientôt jetés à la rue, ça se passe dans le 17ème arrondissement. Les trois femmes ont été licenciées par le nouveau propriétaire des lieux qui veut récupérer les loges à son profit » et « elle et sa famille seront à la rue après l’été ».
3. Le tribunal correctionnel a déclaré la prévenue coupable et il l’a condamnée.
4. L’ensemble des parties a interjeté appel de la décision.
 
Examen des moyens
 
Sur le premier moyen
5. Il n’est pas de nature à permettre l’admission du pourvoi au sens de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale.
 
Sur le second moyen
Énoncé du moyen
6. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a débouté la société Financière Saint-James de l’ensemble de ses demandes alors :
«  1°/ que constitue une diffamation toute allégation ou imputation qui se présente sous la forme d’une articulation précise de faits de nature à être, sans difficulté, l’objet d’une preuve et d’un débat contradictoire ; qu’en retenant « s’agissant du second passage extrait de la voix off du reportage "elle et sa famille seront à la rue après l’été" » que « l’expression est trop imprécise pour constituer une diffamation, laquelle se définit comme une imputation d’un fait précis à une personne déterminée et susceptible, sans difficulté, d’un débat probatoire  », cependant que ce passage, qui visait le fait, pour un propriétaire, d’expulser de son logement de fonction la gardienne d’un immeuble et sa famille, imputait un fait dont la preuve pouvait être rapportée et faire l’objet d’un débat contradictoire, la cour d’appel a méconnu le sens et la portée de l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 ;
2°/ qu’en matière de diffamation, le prévenu qui a spontanément offert, dans les conditions précisées par l’article 55 de la loi du 29 juillet 1881, de faire la preuve de la vérité des faits diffamatoires, ne peut ensuite soutenir que les termes ou expressions incriminées ne seraient pas diffamatoires faute de contenir l’imputation d’un fait précis susceptible de preuve ; qu’ayant constaté que la prévenue avait notifié une offre de preuve, en écartant la qualification de diffamation au regard d’une prétendue imprécision des faits visés, la cour d’appel a violé l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 ;
3°/ que les propos incriminés ne doivent pas être pris isolément mais être interprétés les uns par rapport aux autres ; qu’en retenant que les propos « elle et sa famille seront à la rue après l’été » énoncés au cours du reportage ne présentaient pas de caractère diffamatoire cependant qu’il résulte des propres constatations de l’arrêt que la société Financière Saint-James était, par ce reportage, « mise en cause pour avoir licencié trois gardiennes d’immeuble et avoir récupéré les loges » ainsi que du simple rapprochement de ces propos avec ceux également poursuivis et par lesquels le reportage avait été lancé au cours du journal télévisé « Mais d’abord des gardiennes d’immeubles et leurs enfants bientôt jetés à la rue, ça se passe dans le 17ème arrondissement. Les trois femmes ont été licenciées par le nouveau propriétaire des lieux qui veut récupérer les loges à son profit » une imputation faite au nouveau propriétaire des lieux d’expulser brutalement des gardiennes d’immeuble de leurs logements dans le seul but de pouvoir revendre ces derniers, faits autant précis que contraires à l’honneur et la considération, la cour d’appel a méconnu le sens et la portée de l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 ;
4°/ qu’ayant constaté que « le 3 juillet 2019, France 3 région Ile-de-France diffusait un reportage dans son édition du 19/20 sur l’acquisition d’un logement dans le 17ème arrondissement de Paris par la société Financière Saint-James, mise en cause pour avoir licencié les trois gardiennes d’immeubles et avoir récupéré les loges », en retenant que les propos tenus au cours de ce reportage « elle et sa famille seront à la rue après l’été  » ne visaient pas une personne déterminée, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881. »
 
Réponse de la Cour
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche
7. La Cour de cassation a jugé que le prévenu qui a, conformément à l’article 55 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, signifié une offre de preuve de la vérité des faits ne saurait ensuite soutenir que les termes ou expressions incriminés ne seraient pas diffamatoires faute de contenir l’imputation d’un fait précis.
8. Elle a, en revanche, admis que le prévenu qui a signifié une offre de preuve conserve la faculté de soutenir que les propos ou écrits incriminés ne portent pas atteinte à l’honneur ou à la considération de la partie civile.
9. Elle exige cependant des juges qu’ils apprécient en toute circonstance le sens et la portée des propos incriminés, y compris au regard d’éléments extrinsèques à ceux-ci, afin de déterminer s’ils caractérisent la diffamation poursuivie.
10. Or, c’est seulement dans les dix jours de la signification de la citation que le prévenu doit, s’il veut être admis à prouver la vérité des faits diffamatoires, conformément à l’article 35 de la loi précitée, procéder dans les formes prévues par l’article 55 de ladite loi, à défaut de quoi il est déchu du droit d’administrer cette preuve.
11. Cette offre de preuve constitue un moyen de défense subsidiaire à celui consistant à contester que les propos incriminés contiennent l’imputation d’un fait précis attentatoire à l’honneur ou à la considération de la partie civile, mais qui doit cependant être proposé dans le bref délai précité à compter de la délivrance de l’acte de poursuite et avant que ne s’ouvrent les débats.
12. Le respect des droits de la défense conduit, en conséquence, à admettre que, quoiqu’ayant considéré, pour les besoins de ce moyen de défense subsidiaire, que les propos poursuivis renferment l’imputation ou l’allégation d’un fait précis, susceptible d’un débat sur la preuve de sa vérité, le prévenu puisse ensuite librement, devant le tribunal, soutenir à titre principal que tel n’est pas le cas et ainsi participer au débat au terme duquel les juges ont d’office la charge de prononcer sur ce point.
13. Il doit donc désormais être jugé que le prévenu qui a offert de prouver la vérité des faits diffamatoires conformément aux articles 35 et 55 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse reste recevable à soutenir, lors des débats au fond, que les propos poursuivis ne renferment pas l’imputation ou l’allégation d’un fait précis, susceptible de faire l’objet d’un débat sur la preuve de sa vérité.
14. Il en résulte que, saisis de l’argumentation de la prévenue qui, après avoir fait délivrer une offre de preuve, soutenait notamment que le second propos poursuivi était trop lapidaire pour contenir l’imputation d’un fait précis, les juges, qui devaient en tout état de cause apprécier le sens et la portée dudit propos afin de déterminer s’il caractérisait ou non la diffamation poursuivie, n’avaient pas à la déclarer irrecevable.
15. Le grief doit être écarté.
 
Mais sur le moyen pris en ses autres branches
Vu l’article 593 du code de procédure pénale :
16. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties. L’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
17. Pour débouter la partie civile de ses demandes, l’arrêt attaqué retient que l’expression « elle et sa famille seront à la rue après l’été » est trop imprécise pour constituer une diffamation laquelle se définit comme une imputation d’un fait précis, à une personne déterminée et susceptible, sans difficulté, d’un débat contradictoire.
18. En se déterminant ainsi, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision.
19. Il revient en effet aux juges d’apprécier le caractère diffamatoire des propos poursuivis en se fondant sur toutes les circonstances, même extrinsèques au passage concerné.
20. Il résulte des mentions de l’arrêt que le reportage litigieux était relatif à l’acquisition de locaux par la société Financière Saint-James, de sorte que la cour d’appel aurait dû mieux rechercher, y compris au regard des éléments extrinsèques au passage incriminé, à l’exception des propos tenus en direct par la présentatrice dont il a été jugé qu’ils ne peuvent être imputés à la directrice de la publication, si celui-ci contenait l’imputation d’un fait précis et apprécier, le cas échéant, son caractère contraire à l’honneur ou à la considération.
21. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.
 
Portée et conséquences de la cassation
22. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions ayant débouté la partie civile de ses demandes au titre de la formule « elle et sa famille seront à la rue après l’été ». Les autres dispositions seront donc maintenues.
 
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Versailles en date du 7 janvier 2020, mais en ses seules dispositions ayant débouté la partie civile de ses demandes du chef de diffamation à raison de la formule « elle et sa famille seront à la rue après l’été », toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu’il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Versailles autrement composée à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
DIT n’y avoir lieu à application de l’article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement annulé.
 
Par conséquent, sur la preuve de la vérité des faits (exceptio veritatis), fait justificatif spécial prévu par l’article 35 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, la chambre criminelle rappelle la nature de ce moyen de défense « subsidiaire à celui consistant à contester que les propos incriminés contiennent l’imputation d’un fait précis attentatoire à l’honneur ou à la considération de la partie civile », qui doit être présenté dans les dix jours de la délivrance de l’acte de poursuite, en application de l’article 55 de la même loi sur la presse, et avant que ne s’ouvrent les débats.
 
La Cour de cassation jugeait classiquement qu’un prévenu ayant signifié une offre de preuve de la vérité ne pouvait plus soutenir que les propos litigieux ne contenaient l’imputation d’aucun fait précis susceptible de preuve ; elle permettait en revanche dans la même hypothèse que puisse être démontrée, au moment des débats au fond, l’absence d’atteinte à l’honneur ou à la considération.
Là, par cet arrêt, la chambre criminelle énonce une solution nouvelle, impliquée par un meilleur respect des droits de la défense et assurant une meilleure cohérence de la jurisprudence, aux termes de laquelle « le prévenu qui a offert de prouver la vérité des faits diffamatoires conformément aux articles 35 et 55 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse reste recevable à soutenir, lors des débats au fond, que les propos poursuivis ne renferment pas l’imputation ou l’allégation d’un fait précis, susceptible de faire l’objet d’un débat sur la preuve de sa vérité ».
Ainsi, en l’espèce, les juges, à qui il incombait d’apprécier le sens et la portée du propos dénoncé, n’avaient pas à déclarer irrecevable l’argumentation de la prévenue qui invoquait le caractère trop lapidaire pour être diffamatoire du second propos poursuivi (donc l’absence d’imputation d’un fait précis) après avoir proposé une offre de preuve fondée sur « l’exceptio veritatis », de sorte que le grief soulevé par la société demanderesse est jugé irrecevable.
 
En revanche, la chambre criminelle estime que les mêmes juges auraient dû « apprécier le caractère diffamatoire des propos poursuivis en se fondant sur toutes les circonstances, même extrinsèques au passage concerné ».
En matière de presse, il appartient en effet aux juges du fond de relever toutes les circonstances extrinsèques qui donnent une portée injurieuse ou diffamatoire aux propos poursuivis et qui sont de nature à révéler leur véritable sens.
Ainsi, s’agissant d’un reportage relatif à l’acquisition de locaux par la société demanderesse, la cour d’appel « aurait dû mieux rechercher, y compris au regard des éléments extrinsèques au passage incriminé […], si celui-ci contenait l’imputation d’un fait précis et apprécier, le cas échéant, son caractère contraire à l’honneur ou à la considération ».
 
La chambre criminelle casse l’arrêt pour insuffisance de motifs et renvoie l’affaire à la cour de Versailles autrement composée.
Bref encore une histoire de cornecul dans les beaux-quartiers qui se termine par une petite leçon de droit parfaitement correcte au regard de la loi en vigueur…
Ça valait bien la peine d’en faire mention sur ce « piti-blog ».
 
Bon week-end (déconfiné) à toutes et à tous !
 
I3
 

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