§.2 – De l’impôt égalitaire à l’impôt solidaire
La révolution industrielle a donné naissance à des injustices fiscales et plus
l’industrialisation s’étend, plus il y a d’ouvriers et plus leur pression s’accentue.
Conscients de leur force et de leur poids mais aussi de leurs conditions de vie misérables, la « classe » ouvrière peut agir par la grève, l’émeute, la politique (extension du suffrage universel) et ainsi, conquérir des améliorations pas à pas (augmentation des salaires, réglementation de la durée et des conditions de travail, protection-maladie, retraite…).
Dans cet ensemble de revendications concrètes, la réforme fiscale trouve
sa place.
Il ne s’agit pas de corriger les inégalités sociales par l’impôt mais simplement de rétablir la proportionnalité de la charge fiscale.
On prend conscience que les classes populaires sont finalement plus fortement imposées par rapport aux classes plus aisées.
Grâce aux contributions plus importantes des catégories favorisées, on peut détaxer la nourriture et financer des dépenses sociales profitant au plus grand nombre.
Il n’y a pas vraiment eu d’oppositions à cette volonté, la bourgeoisie
redoute des bouleversements sociaux et doit probablement penser que le meilleur
moyen de conserver un ensemble d’entreprises libres, capables d’assurer une
production de plus en plus abondante, est de répartir cette production de façon
plus équitable.
C’est ainsi que petit à petit, on s’achemine vers un recours à des impôts sur le capital ou sur le revenu à caractère progressif, pour compenser les inégalités dues aux contributions indirectes.
Le cadre favorable à l’avènement de ce type d’impôts ne se met en place que dans le dernier tiers du XIXème siècle.
A - L’impôt sur le revenu
À partir de 1870, la quasi-totalité des pays européens est dotée d’un régime parlementaire et du suffrage universel.
En France, dès le début du XXème siècle, on constate l’avancée des partis socialistes avec le glissement progressif à gauche de l’Assemblée Nationale.
Cette tendance a pour conséquence de poser le problème de l’impôt sur le revenu.
L’idée de progressivité est pourtant ancienne mais la frilosité des
gouvernements et surtout les échanges encore trop faibles (entraînant l’impossibilité
de connaître les revenus exacts des contribuables de chaque profession) ont
empêché sa mise en place jusque-là.
Au début XVIIIème, déjà en France, Vauban avait soumis à l’Assemblée
un projet visant à décomposer les revenus en grandes catégories et adopter pour
chacune le procédé d’imposition le plus commode et le plus sûr :
-
Système d’impôts «
cédulaires » permettant d’adapter le mode d’assiette et de perception à la
nature de chaque impôt.
Mais on se rend vite compte que s’il est aisé de connaître les revenus
précis de certaines catégories (domestiques, fonctionnaires…), pour d’autres le
revenu présumé est très approximatif, pour ne pas dire totalement inconnu
(procureurs, avocats…).
Vauban lui-même concède que le procédé n’est assuré que là où il y avait transaction de revenu net.
-
C’est sur ce principe que
le Royaume-Uni fonda « l’income tax », premier impôt sur le revenu européen
qui, dans un premier temps, servi de modèle aux autres pays.
De même qu’il est facile de saisir les produits fabriqués avant leur
distribution, encore rassemblés dans l’usine ou les entrepôts, il y a tout
avantage à saisir le revenu avant qu’il n’atteigne son bénéficiaire, là où on
le distribue (au siège de la société qui va répartir les dividendes, au bureau
qui établit les feuilles de paie…).
C’était le motif du premier projet de loi de Joseph Caillaux (1907), alors
ministre des finances de Clemenceau (radical).
Ce projet fait éclater la supériorité du système de « l’income tax » de perception à la source : « L’impôt est prélevé à la source même du revenu et l’administration, de façon presque invisible, pour ainsi dire à l’insu du contribuable, revendique sa part, au moment même où le revenu apparaît ».
« L’income tax » sépare nettement l’assiette de chaque type d’impôt
(travail, capital) : Tel pourcentage prélevé sur la partie du revenu provient
du travail cumulé avec un pourcentage différent prélevé sur la partie du revenu
issue du capital.
Mais ce mécanisme est très discriminatoire et après les premiers éloges décernés à « l’income tax », on se penche sur les difficultés techniques et les maladresses de ce prélèvement malgré sa commodité de perception.
De nombreux débats ont lieu en France :
- Celui qui dispose d’un capital et de ses fruits et qui y ajoute un traitement devra-t-il être imposé sur ce salaire comme un ouvrier qui n’a que lui pour survivre ?
-
Ne faut-il pas opérer une
distinction dans l’imposition des profits, entre l’artisan travaillant avec
quelques ouvriers et tenant la plus grande partie de ses ressources de son
propre travail et l’industriel ayant engagé des fonds dans une grosse affaire ?
Pour pallier ces problèmes, il faut donc introduire une progressivité.
Pour cela on a besoin de tenir compte du revenu global de chaque contribuable,
ce qui est impossible en prélevant l’impôt lors de la création du revenu.
On peut introduire une petite dose de progressivité à chaque source de
revenu considérée isolément, baisser les tarifs pour les premières tranches
mais sans aller plus loin car on risque de surtaxer celui dont le seul revenu
est le profit par rapport à celui qui cumule les recettes de différentes
sources : Le même homme peut être propriétaire foncier (procurant une rente),
possesseur d’un portefeuille de valeurs mobilières (profit spéculatif) et
membre d’un conseil d’administration (salaire).
En réponse à ce type de problème, les Anglais ont complété « l’income tax
» originel par un deuxième impôt portant sur le revenu global mais seulement
quand ce dernier est relativement élevé.
En premier lieu, c’est le système adopté par la France, pas tout de suite,
mais à l’époque de l’entre-deux guerres, solution viable mais complexe ;
complexité qui aboutit à distinguer perception à la source et sources d’information
: En rassemblant toutes les informations des banques, sociétés, employeurs,
voire les autres payeurs, le fisc peut connaître plus facilement le revenu
global de chaque contribuable.
On s’est donc d’abord orienté vers un impôt unique sur le revenu reposant sur des informations prélevées à la source (système déjà expérimenté sur les quelques contribuables aisés soumis à l’imposition du revenu global).
Finalement, la loi du 15 juillet 1914 crée l’impôt général et progressif
sur le revenu fondé sur le principe de la déclaration et non plus des « signes
extérieurs de richesse », qui pourtant restera dès les années trente une autre
source d’imposition complémentaire et qui subsiste toujours de nos jours comme
système de détermination forfaitaire d’un revenu imposable.
Le système entre lentement en vigueur à partir de 1917, en pleine guerre et, quelques années après, devient l’élément central de notre système actuel.
Conscients de leur force et de leur poids mais aussi de leurs conditions de vie misérables, la « classe » ouvrière peut agir par la grève, l’émeute, la politique (extension du suffrage universel) et ainsi, conquérir des améliorations pas à pas (augmentation des salaires, réglementation de la durée et des conditions de travail, protection-maladie, retraite…).
Il ne s’agit pas de corriger les inégalités sociales par l’impôt mais simplement de rétablir la proportionnalité de la charge fiscale.
On prend conscience que les classes populaires sont finalement plus fortement imposées par rapport aux classes plus aisées.
Grâce aux contributions plus importantes des catégories favorisées, on peut détaxer la nourriture et financer des dépenses sociales profitant au plus grand nombre.
C’est ainsi que petit à petit, on s’achemine vers un recours à des impôts sur le capital ou sur le revenu à caractère progressif, pour compenser les inégalités dues aux contributions indirectes.
Le cadre favorable à l’avènement de ce type d’impôts ne se met en place que dans le dernier tiers du XIXème siècle.
A - L’impôt sur le revenu
À partir de 1870, la quasi-totalité des pays européens est dotée d’un régime parlementaire et du suffrage universel.
En France, dès le début du XXème siècle, on constate l’avancée des partis socialistes avec le glissement progressif à gauche de l’Assemblée Nationale.
Cette tendance a pour conséquence de poser le problème de l’impôt sur le revenu.
Vauban lui-même concède que le procédé n’est assuré que là où il y avait transaction de revenu net.
Ce projet fait éclater la supériorité du système de « l’income tax » de perception à la source : « L’impôt est prélevé à la source même du revenu et l’administration, de façon presque invisible, pour ainsi dire à l’insu du contribuable, revendique sa part, au moment même où le revenu apparaît ».
Mais ce mécanisme est très discriminatoire et après les premiers éloges décernés à « l’income tax », on se penche sur les difficultés techniques et les maladresses de ce prélèvement malgré sa commodité de perception.
De nombreux débats ont lieu en France :
- Celui qui dispose d’un capital et de ses fruits et qui y ajoute un traitement devra-t-il être imposé sur ce salaire comme un ouvrier qui n’a que lui pour survivre ?
On s’est donc d’abord orienté vers un impôt unique sur le revenu reposant sur des informations prélevées à la source (système déjà expérimenté sur les quelques contribuables aisés soumis à l’imposition du revenu global).
Le système entre lentement en vigueur à partir de 1917, en pleine guerre et, quelques années après, devient l’élément central de notre système actuel.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire