Parce que votre vol est annulé…
Vous prenez donc le bateau et devenir piéton ne vous
amuse pas pour vos vacances en « Corsica-Bella-Tchi-Tchi »
programmées depuis Noël dernier. Il faut dire que l’Île-de-beauté, ça grimpe de
col en col…
Et qu’entre le plantage de Hertz et les difficultés d’approvisionnement
en véhicules neufs de ses concurrents (confinés sur le continent), que ce soit
à Bastia, Ajaccio ou Calvi, les voitures de location sont plutôt rares cet été.
Du coup, vous vous rabattez sur l’achat d’une auto pas
toute neuve, qui tiendra bien les 1.000 km que vous compter parcourir durant le
mois d’estive avant que de la revendre en fin de séjour à celui à qui vous l’avez
achetée : Le contrôle technique est « OK » et la couleur plait à
Madame…
Pourquoi se gêner ?
Un kilométrage important, une certaine ancienneté (11
ans) lors de sa vente ne vous rebute pas.
Mais trois jours après l’achat (et un détour par les
plages de la région), l’inconvénient de votre acquisition apparaît : Elle
présente des pannes multiples (malgré le contrôle technique n’ayant absolument
pas indiqué les désordres à venir).
Vous avez alors la mauvaise idée de demander la
nullité de la vente, la restitution du prix et le remboursement des réparations
devant les tribunaux.
En invoquant que le vendeur est tenu de garantir le
véhicule sur les vices qui ne sont pas connus, d'autant que les défauts apparus
concernent les conditions de sécurité (système de freinage… et en montagne, c’est
important le freinage ! Moâ, c’était la boîte de vitesse : Pas facile
de démarrer en côte en seconde et de passer en force la quatrième en sautant la
troisième en montagne avec un embrayage « aléatoire »…).
Vous expliquez que le véhicule s’avérant dangereux, vous
ne l’auriez pas acheté si vous aviez eu connaissance de ces défauts, ou vous l’auriez
acquis à un prix nettement inférieur (radin que vous êtes…).
Bref, des vacances de m…
Et des années plus tard, vous vous retrouvez avec une
épave sur les bras et devant la Cour de cassation.
Cour de cassation, première chambre civile
Audience publique du mercredi 20 mai 2020
N° de pourvoi : 19-14297
Mme Batut (président), président
SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le
Guerer, SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat(s)
REPUBLIQUE
FRANCAISE
AU NOM DU
PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu
l’arrêt suivant :
M. E… A…, domicilié […], a formé le pourvoi n° G
19-14.297 contre l’arrêt rendu le 24 janvier 2019 par la cour d’appel de Nîmes
(1ère chambre civile), dans le litige l’opposant à M. O… G… V…,
domicilié chez M. Y… L…, […], défendeur à la cassation.
Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, le
moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Dazzan, conseiller référendaire,
les observations de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de M. A…, de la SCP
Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de M. G… V…,
après débats en l’audience publique du 10 mars 2020 où étaient présentes Mme
Batut, président, Mme Dazzan, conseiller référendaire rapporteur, Mme Kamara,
conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation,
composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré
conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Nîmes, 24 janvier 2019), le
25 août 2014, M. A… (l’acheteur) a acquis de M. G… V… (le vendeur), un véhicule
d’occasion présentant une ancienneté de onze années et un compteur mentionnant
337.882 kilomètres, en l’état d’un contrôle technique réalisé le jour même à l’initiative
du vendeur. À la suite de dysfonctionnements survenus dès le 28 août suivant,
et après avoir fait procéder à un nouveau contrôle technique à cette date, puis
à une expertise amiable contradictoire le 26 janvier 2015, l’acheteur a assigné
le vendeur en résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices
cachés, en restitution du prix de vente et en remboursement de certaines
réparations.
Examen du moyen
Énoncé du moyen
2. L’acheteur fait grief à l’arrêt de rejeter l’ensemble
de ses demandes, alors :
« 1°/ que le vendeur est tenu de la garantie à raison
des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel
on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l’acheteur ne l’aurait
pas acquise, on n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus ;
qu’ayant relevé que moins de trois jours après la vente du véhicule automobile
d’occasion, outre un nouveau contrôle technique le demandeur produisait un
ordre de réparation du même jour émanant d’un garage agréé Toyota mentionnant «
Batteries qui fuient de l’acide, batterie gauche non fixée, feux stop qui ne
fonctionnent pas, soufflets de cardan déchirés, dysfonctionnement ABS, corps
étranger capteur », que l’analyse technique a retenu que « le diagnostic
approfondi pour le problème de freinage réalisé par Toyota a révélé que la
défaillance du système de freinage est liée à une oxydation importante. Les
défauts affectent des organes de freinage, de suspension et de direction. En l’état,
ce dernier ne peut pas être utilisé dans des conditions normales de sécurité »,
que l’expert concluait que « l’ensemble des désordres est antérieur à la vente
et aurait dû être indiqué sur le contrôle technique établi le jour de la vente
le 25 août 2014. Ces dommages empêchent d’utiliser le véhicule dans des
conditions normales de sécurité. Pour notre part, le véhicule est dangereux et
ne doit pas être utilisé dans cet état », et précisait que les omissions du
contrôleur technique du 25 août 2014, ont trompé le demandeur sur l’état réel
du véhicule, puis retenu qu’il est établi par l’expert que les défauts
affectant le véhicule étaient antérieurs à la vente et non apparents, la cour d’appel
qui ajoute que l’expert ne se prononce pas sur l’origine des désordres, et qu’en
l’absence de tout élément établissant que les désordres constatés provenaient d’une
usure anormale du véhicule, l’acquéreur est défaillant dans la preuve des vices
allégués, n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et
elle a violé les articles 1641 et suivants du code civil ;
2°/ que le vendeur est tenu de la garantie à raison
des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel
on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l’acheteur ne l’aurait
pas acquise, on n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus ;
qu’ayant relevé que l’analyse technique a retenu que « le diagnostic approfondi
pour le problème de freinage réalisé par Toyota a révélé que la défaillance du
système de freinage est liée à une oxydation importante. Les défauts affectent
des organes de freinage, de suspension et de direction. En l’état, ce dernier
ne peut pas être utilisé dans des conditions normales de sécurité », que l’expert
concluait que « l’ensemble des désordres est antérieur à la vente et aurait dû
être indiqué sur le contrôle technique établi le jour de la vente le 25 août
2014. Ces dommages empêchent d’utiliser le véhicule dans des conditions
normales de sécurité. Pour notre part, le véhicule est dangereux et ne doit pas
être utilisé dans cet état » et précisait que les omissions du contrôleur
technique du 25 août 2014, ont trompé le demandeur sur l’état réel du véhicule,
pour en déduire qu’il est établi par l’expert que les défauts affectant le
véhicule étaient antérieurs à la vente et non apparents, la cour d’appel qui
ajoute que l’expert ne se prononce pas sur l’origine des désordres, et qu’en l’absence
de tout élément établissant que les désordres constatés provenaient d’une usure
anormale du véhicule, l’acquéreur est défaillant dans la preuve des vices
allégués alors qu’il est établi que le véhicule objet de la vente avait une
ancienneté de onze ans et un kilométrage de 337.882 kilomètres, quand de tels
faits étaient inopérants au regard des conclusions de l’expert déconseillant l’utilisation
du véhicule, qu’il qualifie de dangereux, la cour d’appel a violé les articles
1641 et suivants du code civil. »
Réponse de la Cour
3. Appréciant souverainement la valeur et la portée
des éléments de preuve qui lui étaient soumis, après avoir relevé la
défaillance de l’acheteur dans la preuve des vices allégués ainsi que l’absence
d’éléments établissant que les désordres constatés par l’expert seraient dus à
une usure anormale du véhicule, la cour d’appel a pu en déduire que, compte
tenu du kilométrage et de l’ancienneté du véhicule à laquelle l’acheteur devait
normalement s’attendre, la garantie des vices cachés n’était pas due.
4. Le moyen ne peut donc être accueilli.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. A… aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure
civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première
chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt
mai deux mille vingt.
Franchement, l’air de rien, 30.700 km/an (2.500 km
tous les mois) pour une « Totoya » de 11 ans, c’est pas mal… Mes « tas-de-boue-à-roulettes »
ne tiennent pas autant de temps, ou alors j’ai tout changé par petits-bouts au
fil des mois pour leur faire dépasser les 100.000 km.
J’en ai eu deux comme ça, et encore : La
première, une R5, le compteur était bloqué… L’indicateur de vitesse aussi :
Je respectais les limitations de vitesse au bruit et au vent !
C’était devenue « titine-amphibie » depuis
le jour où, passant dans une flaque d’eau, j’en ai eu jusqu’aux genoux :
Le plancher était crevé par la rouille et avait fait « écope » !
Là, les juridictions du pays remettent l’acheteur à sa
place : Il aurait dû se méfier.
Mais c’est plus astucieux que ça : Elles énoncent
que l’acheteur ne rapporte pas la preuve d’une usure anormale du véhicule…
Les défaillances constatées par un second contrôle
technique concernent pourtant les organes de sécurité, mais l’acquéreur doit s’attendre
à de tels défauts puisque le véhicule automobile n’était pas vraiment très récent.
Et à l’occasion, la Cour de cassation rappelle que
lorsque l’on achète un véhicule qui présente une certaine ancienneté, on peut s’attendre
à des désordres. Il faut prouver que les défauts constatés font état d’une
usure exceptionnelle, sinon la garantie des vices cachés ne s’applique pas.
D’ailleurs, on ne peut pas parler de vices cachés
lorsque le véhicule est ancien et que l’usure est « normale ».
J’avoue que ce que je ne comprends pas très bien dans
cette affaire, c’est à quoi sert le contrôle technique qui, je vous le
rappelle, est obligatoire tous les deux ans après la 4ème année de
la première immatriculation.
Je pensais, parce qu’on nous avait présenté la mesure
comme ça, que ça devait permettre de retirer des routes des « épaves
ambulantes »…
Bé que nenni, viens-je de constater !
Bref, cette histoire-là ne s’est pas passée en « Corsica-Bella-Tchi-Tchi »
mais chez les « pizunti ». Il n’empêche, ce n’est pas une raison de
mettre en péril votre vie (et celles d’autrui) en achetant des épaves :
Pensez à louer, sûr que ça vous reviendra moins cher et vous évitera de
déranger des juristes « Bac +++++ » en plein confinement !
Bonne continuation de week-end à toutes et à tous !
I3
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