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Oui, entrez, entrez, dans le « Blog » de « l’Incroyable Ignoble Infreequentable » ! Vous y découvrirez un univers parfaitement irréel, décrit par petites touches quotidiennes d’un nouvel art : le « pointillisme littéraire » sur Internet. Certes, pour être « I-Cube », il écrit dans un style vague, maîtrisant mal l’orthographe et les règles grammaticales. Son vocabulaire y est pauvre et ses pointes « d’esprit » parfaitement quelconques. Ses « convictions » y sont tout autant approximatives, changeantes… et sans intérêt : Il ne concoure à aucun prix littéraire, aucun éloge, aucune reconnaissance ! Soyez sûr que le monde qu’il évoque au fil des jours n’est que purement imaginaire. Les noms de lieu ou de bipède et autres « sobriquets éventuels » ne désignent absolument personne en particulier. Toute ressemblance avec des personnages, des lieux, des actions, des situations ayant existé ou existant par ailleurs dans la voie lactée (et autres galaxies) y est donc purement et totalement fortuite ! En guise d’avertissement à tous « les mauvais esprits » et autres grincheux, on peut affirmer, sans pouvoir se tromper aucunement, que tout rapprochement des personnages qui sont dépeints dans ce « blog », avec tel ou tel personnage réel ou ayant existé sur la planète « Terre », par exemple, ne peut qu’être hasardeux et ne saurait que dénoncer et démontrer la véritable intention de nuire de l’auteur de ce rapprochement ou mise en parallèle ! Ces « grincheux » là seront SEULS à en assumer l’éventuelle responsabilité devant leurs contemporains…

samedi 11 mars 2023

L’arrêt blanco…

 
Un « classique » du droit positif…
 
Qui n’est d’ailleurs pas « techniquement » un arrêt, pour être une décision du Tribunal des conflits (or, seules les Cours rendent des arrêts au nom du peuple) date du 8 février 1873. L’aube de la troisième République, il y a 150 ans de ça…
C’est un « classique », puisque tous les étudiants en droit auront planché sur le sujet, durant des générations et des générations… au moins en « Gauloisie-juridique ».
Je vous livre cette courte décision « fondamentale » que je vous avais promise :
 
Tribunal des conflits, du 8 février 1873, 00012, publié au recueil Lebon
Tribunal des conflits ― N° 00012
Rapporteur, M. Mercier
Rapporteur public, M. David
 
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
 
Vu l'exploit introductif d'instance, du 24 janvier 1872, par lequel Jean Y... a fait assigner, devant le tribunal civil de Bordeaux, l'Etat, en la personne du préfet de la Gironde, Adolphe Z..., Henri X..., Pierre Monet et Jean A..., employés à la manufacture des tabacs, à Bordeaux, pour, attendu que, le 3 novembre 1871, sa fille Agnès Y..., âgée de cinq ans et demi, passait sur la voie publique devant l'entrepôt des tabacs, lorsqu'un wagon poussé de l'intérieur par les employés susnommés, la renversa et lui passa sur la cuisse, dont elle a dû subir l'amputation ; que cet accident est imputable à la faute desdits employés, s'ouïr condamner, solidairement, lesdits employés comme co-auteurs de l'accident et l'Etat comme civilement responsable du fait de ses employés, à lui payer la somme de 40,000 francs à titre d'indemnité ;
Vu le déclinatoire proposé par le préfet de la Gironde, le 29 avril 1872 ;
Vu le jugement rendu, le 17 juillet 1872, par le tribunal civil de Bordeaux, qui rejette le déclinatoire et retient la connaissance de la cause, tant à l'encontre de l'Etat qu'à l'encontre des employés susnommés ;
Vu l'arrêté de conflit pris par le préfet de la Gironde, le 22 du même mois, revendiquant pour l'autorité administrative la connaissance de l'action en responsabilité intentée par Y... contre l'Etat, et motivé : 1° sur la nécessité d'apprécier la part de responsabilité incombant aux agents de l'Etat selon les règles variables dans chaque branche des services publics ; 2° sur l'interdiction pour les tribunaux ordinaires de connaître des demandes tendant à constituer l'Etat débiteur, ainsi qu'il résulte des lois des 22 décembre 1789, 18 juillet, 8 août 1790, du décret du 26 septembre 1793 et de l'arrêté du Directoire du 2 germinal an 5 ; Vu le jugement du tribunal civil de Bordeaux, en date du 24 juillet 1872, qui surseoit à statuer sur la demande ;
Vu les lois des 16-24 août 1790 et du 16 fructidor an 3 ;
Vu l'ordonnance du 1er juin 1828 et la loi du 24 mai 1872 ;
 
Considérant que l'action intentée par le sieur Y... contre le préfet du département de la Gironde, représentant l'Etat, a pour objet de faire déclarer l'Etat civilement responsable, par application des articles 1382, 1383 et 1384 du Code civil, du dommage résultant de la blessure que sa fille aurait éprouvée par le fait d'ouvriers employés par l'administration des tabacs ;
 
Considérant que la responsabilité, qui peut incomber à l'Etat, pour les dommages causés aux particuliers par le fait des personnes qu'il emploie dans le service public, ne peut être régie par les principes qui sont établis dans le Code civil, pour les rapports de particulier à particulier ;
Que cette responsabilité n'est ni générale, ni absolue ; qu'elle a ses règles spéciales qui varient suivant les besoins du service et la nécessité de concilier les droits de l'Etat avec les droits privés ;
Que, dès lors, aux termes des lois ci-dessus visées, l'autorité administrative est seule compétente pour en connaître ;
 
DECIDE : Article 1er : L'arrêté de conflit en date du 22 juillet 1872 est confirmé.
Article 2 : Sont considérés comme non avenus, en ce qui concerne l'Etat, l'exploit introductif d'instance du 24 janvier 1872 et le jugement du tribunal civil de Bordeaux du 17 juillet de la même année.
Article 3 : Transmission de la décision au garde des sceaux pour l'exécution.
 
Parc conséquent, selon un mythe républicain le mal nommé « arrêt Blanco » (l’arrêt du Conseil d’État arrivera le 8 mai 1974) marque la naissance d’un véritable droit administratif, autonome des règles du droit commun.
Cette décision du Tribunal des conflits pose ainsi les bases de la compétence de la juridiction administrative et institue aussi un autre mythe, celui d’un droit administratif forgé exclusivement par la jurisprudence du Conseil d’État.
 
Petit rappel des faits : Le 3 novembre 1871, Agnès Blanco (en réalité Ignassia Blanco), une fillette âgée de 5 ans, est renversée et grièvement blessée par un wagonnet poussé par quatre ouvriers. Elle sera amputée d’une jambe. Le wagonnet appartient à la manufacture des tabacs de Bordeaux, exploitée en régie par l’État. Le 24 janvier 1872, le père d’Agnès Blanco dépose un recours en responsabilité civile pour des dommages et intérêts sur le fondement du célèbre article 1382 du Code civil (aujourd’hui 1240), devant le tribunal de Bordeaux. Il voulait engager la responsabilité de l’État afin que celui-ci, sur le fondement des articles précités, le dédommage pour les dommages causés à sa fille résultant directement de l’activité d’un service public.
 
Or, en raison du principe établi dans les lois des 16 et 24 août 1790 et de celui du décret du 28 septembre 1873, le juge judiciaire ne pouvait troubler de quelque manière que ce soit l’activité administrative (article 13 de la loi précitée).
À cet égard et en vertu de la théorie de l’État débiteur le juge judiciaire ne pouvait donc prendre une quelconque sanction pécuniaire à l’égard de l’État.
Dès lors, le préfet de la Gironde demandera au tribunal civil de Bordeaux de décliner sa compétence au profit du juge administratif, ce qu’il refusa de faire.
Face à ce conflit de compétence positive, le préfet adressera un déclinatoire de compétence devant le Tribunal des conflits, institution remise à jour par la loi du 24 mai 1872 (loi qui conférait au Conseil d’État son indépendance).
Le Tribunal des conflits eu donc à trancher ce conflit de compétence.
 
La question était alors fort simple. Pour reprendre les mots du commissaire du gouvernement David : « Quelle est, des deux autorités administrative ou judiciaire, celle qui a compétence générale pour connaître des actions en dommages-intérêts contre l’État ? »
Le Tribunal des conflits commence très logiquement par rappeler dans sa décision la thèse de l’État débiteur avec « l’interdiction pour les tribunaux ordinaires de connaître des demandes tendant à constituer l’État débiteur ».
Puis, le Tribunal des conflits affirme : « La responsabilité, qui peut incomber à l’État, pour les dommages causés aux particuliers par le fait des personnes qu’il emploie dans le service public, ne peut être régie par les principes qui sont établis dans le Code civil, pour les rapports de particulier à particulier ».
 
On voit déjà se mettre en place un raisonnement affirmant la spécificité du droit administratif comme ne pouvant pas être soumis aux règles de responsabilité du droit commun : Le constat d’un « schisme »…
Enfin, le Tribunal conclut : « Cette responsabilité n’est ni générale, ni absolue ; qu’elle a ses règles spéciales qui varient suivant les besoins du service et la nécessité de concilier les droits de l’État avec les droits privés ».
 
Dès lors, la juridiction administrative est compétente pour engager la responsabilité administrative de l’État en raison d’une faute commise lors de l’activité d’un service public.
Le Tribunal des conflits consacre ainsi le principe de la liaison de la compétence et du fond. Et le Conseil d’État rendra donc sa décision le 8 mai 1874 condamnant l’État à verser à Agnès Blanco une indemnité annuelle et viagère de 500 francs (à compter du jour de l’accident), dont elle bénéficiera jusqu’à son décès.
 
La portée de cette décision est considérable. Du moins, si elle est considérable, ce n’est pas tant en raison du contenu de la décision en elle-même que des interprétations doctrinales qui l’ont suivi.
Au fond, la décision Blanco ne fait qu’affirmer une seule chose : Poser une « non applicabilité de principe du droit administratif », mais en aucun cas l’autonomie du droit administratif.
Ainsi, à chaque fois qu’une situation semble relever du droit administratif et qu’un texte n’indique pas expressément la compétence du juge administratif, alors elle peut ne pas être soumise au droit privé.
Mais ce n’est ni un principe ni une obligation.
 
En effet, Blanco se trouve enserré autour des décisions affirmant la compétence du juge judiciaire pour connaître de la responsabilité de l’État quand ce dernier n’agit plus en tant que personne publique (Cf. TC, 11 janvier 1873, Joannon, Recueil Lebon, 1873, p. 20 ou encore, TC, 8 février 1873, Bransiet, Recueil Lebon, 1873, p. 70).
Cette décision se place d’ailleurs dans le sillage des décisions Rothschild (1855) et Dekeister (1861), issues des périodes non-républicaines.
De plus, la décision est très succincte.
Elle marque pourtant en quelque sorte le renouveau du droit administratif.
Du moins c’est ainsi que la doctrine la présente habituellement. Or, cette décision marque en réalité et seulement le commencement de l’élaboration d’un nouveau critère pour déterminer la compétence de la juridiction administrative.
 
Et ici, plusieurs écoles vont s’affronter.
En premier lieu, pour certains grands professeurs de droit administratif, ce qui fondera la compétence de la juridiction administrative est le critère de la puissance publique, dont le grand juriste Maurice Hauriou sera le chef de file. Selon cette première approche : « L’administration a le double pouvoir d’imposer aux administrés des obligations et de recourir à la force matérielle pour les faire exécuter ; les règles juridiques qui définissent le cadre dans lequel elle est habilitée à se mouvoir, les conditions dans lesquelles elle peut faire usage de ses prérogatives, ― ont de ce fait une nature et une portée irréductibles à celles des règles de droit commun ».
L’arrêt Blanco permettra à cette école de quitter son empirisme traditionnel pour donner une formulation théorique claire à ce critère. En effet, par les conclusions du commissaire David, cet arrêt vise comme critère celui de la puissance publique.
Dès lors que l’État agit comme « puissance publique », la juridiction administrative est compétente.
Simple, mais pas complet…
 
Car cette approche fut très critiquée notamment en créant une division factice et préjudiciable entre l’autorité et la gestion. Le nouveau critère du service public, emmené par Léon Duguit et Gaston Jèze, donnera une nouvelle assise au droit administratif.
Selon ce courant le service public est défini comme « l’ensemble des activités qui doivent être réglées et assurées par les gouvernants en raison de leur importance sociétale ».
Plus nuancé…
 
Il ne s’agira pas ici de revenir sur les problèmes inhérents aux définitions du service public, « texture ouverte » par nature, selon Hart. Mais il s’agira de voir comment ce second courant dit du « service public » a donné de nouveaux fondements au droit administratif.
Ici, « l’attention se déplace des moyens d’action détenus par l’administration aux finalités de son institution. C’est dans la seule mesure où elle est au service du public et agit dans le sens de l’intérêt général, que l’administration est soumise à des règles exorbitantes du droit commun, dont le contenu et la portée ne peuvent être correctement appréciées que par un juge spécialisé » selon l’analyse de J. Chevalier.
 
Abandonnant la théorie du critère de la gestion publique propre au commissaire David, les partisans du critère du service public s’appuieront postérieurement sur la jurisprudence du Conseil d’État avec les arrêts Terrier (1903), Feutry (1908) et Thérond (1910).
Cependant, l’idée d’affirmer que le critère du service public représente le seul et unique critère du droit administratif se révélera également être une illusion.
En effet, la jurisprudence administrative n’utilisera ce critère que pour les transferts de compétence aux collectivités locales mais non pour le reste.
Ensuite, le Tribunal des conflits y apportera le coup de grâce en reconnaissant (même si le Conseil d’État l’avait fait en 1920) la possibilité d’une gestion privée des services publics, les fameux services publics industriels et commerciaux (TC, 22 janvier 1921, affaire Bac d’Eloka).
Mais parler des disjonctions, entrecroisements et prolongements des différentes doctrines nous conduirait trop loin : Il fallait suivre les cours du Doyen Vedel (et s’en rappeler intégralement, en ce qui me concerne…)
J’en ai compris qu’aujourd’hui encore, on ne trouve pas de critère théorique unique pour fonder la compétence du juge administratif, mais seulement un paquet de décisions qui forme un corpus qui couvre maintenant à peu près toutes les situations…
Depuis 150 ans, on a eu de la « matière ».
 
Au fond, si cette décision est mythique c’est surtout en raison des écrits doctrinaux qui l’ont suivi.
En reniant avec sa tradition pré-républicaine, sous la IIIème République encore naissante, la doctrine administrative veut affirmer un droit administratif nouveau et républicain.
Il faut pour ce faire trouver de nouveau fondements pour notamment justifier l’essor de l’État dans les activités privées.
La décision Blanco sera redécouverte par les théoriciens du droit public qui, jusque-là, l’ignoraient complètement : Ainsi que ce soit Maurice Hauriou en 1897 ou Édouard Lafférière en 1887, ils ne citent pas la décision dans leurs différents ouvrages théoriques…
 
On assiste alors vers les années 1910 à une « restructuration du passé » par la création d’un mythe idéologique, fondant ainsi la spécificité du droit administratif.
En effet, en écartant l’application d’un Code civil qui revêt pourtant une certaine aura, les théoriciens du droit marquent un affranchissement à l’égard de la doctrine civiliste.
Ce mythe est encore aujourd’hui très tenace en raison de son évocation dans le GAJA (Les Grands Arrêts de la Jurisprudence Administrative) ou dans les différents cours de droit administratif de deuxième année. Mais comme tout mythe, il a évidemment une utilité : Celle d’affirmer la prégnance d’un droit administratif prétorien bâti par la seule force du Conseil d’État.
 
Cette idée d’un droit prétorien a ainsi permis la création, par le Conseil d’État, de l’ensemble des différentes catégories du droit administratif, du service public administratif aux travaux publics en passant par les collaborateurs occasionnels du service public etc.
En se fondant sur ce mythe, le Conseil d’État a élaboré des principes généraux du droit (valeur supra-décrétale et infra-législative) voire a pu dégager un principe fondamental reconnu par lois de la République, qui forment notre quotidien de juristes.
Finalement, cette décision montre également la difficulté pour la doctrine de systématiser des jurisprudences aux travers de critères et concepts uniques, invitant alors à une théorie analytique du droit en procédant à des efforts sérieux de clarification et de définition, pour rendre compte, de la manière la plus réaliste possible, du travail d’interprétation des juges.
 
Et en matière fiscale, je ne vous raconte pas les contorsions quand l’impôt est traité globalement par les tribunaux administratifs et les successions par les tribunaux civils !
On retrouve parfois la même difficulté dans les contentieux de sécurité sociale et le droit du travail…
D’ailleurs, souvent, la Cour de Cassation restait « en avance » sur le Conseil d’État qui galopait derrière elle pour tenter d’établir une « homogénéité » du droit : Tranquille pour un « optimisateur-fiscal » qui savait donc avant tout le monde comment les affaires pouvaient être traitées devant le juge de l’impôt dans un avenir proche…
Avant que souvent le législateur, dans « son immense sagesse », ne viennent bousculer les jurisprudences des uns et des autres, généralement en les légitimant « ex-post » !
 
Vous voilà toutes et tous plus savants ce jour, et
Vous souhaitant, à toutes et tous, un excellent week-end !
 
I3
 
Pour mémoire (n’en déplaise à « Poux-tine ») : « LE PRÉSENT BILLET A ENCORE ÉTÉ RÉDIGÉ PAR UNE PERSONNE « NON RUSSE » ET MIS EN LIGNE PAR UN MÉDIA DE MASSE « NON RUSSE », REMPLISSANT DONC LES FONCTIONS D’UN AGENT « NON RUSSE » !

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