Nos amis britanniques repassent aux urnes.
La troisième fois en cinq ans pour leurs législatives…
Moment important de la vie démocratique d’un pays mais
qui risque de se retrouver à nouveau ingouvernable.
Vous me direz que depuis le référendum de juin 2016, il
ne l’est plus vraiment : Ça ne changera pas grand-chose.
Et pourtant…
D’abord, le 29 novembre dernier, un attentat revendiqué
par l’État islamique est venu endeuiller la capitale britannique et bouleverser
une campagne législative déjà très perturbée et incertaine : Les leaders
des partis en compétition ont marqué une pause et ont salué le courage
indéniable de « ces héros de l’ombre » qui ont maîtrisé l’assaillant.
Un sondage BMG réalisé avant cet attentat, mais paru le
lendemain 30 novembre dans « The Independent », faisait état d’une remontée
significative du parti travailliste dans les intentions de vote des électeurs :
+ 5 points, portant leur score à 33 %, et réduisant ainsi l’écart avec les
conservateurs de « BoJo », qui eux-mêmes perdraient 2 points, soit 39
% d’intentions de votes.
Attention, les experts de la vie parlementaire d’Outre-Manche
évaluent à 6 % l’écart nécessaire à l’obtention d’une majorité parlementaire
conséquente et dotée d’une légitimité incontestable : On y est presque.
En-deçà et compte tenu du vote uninominal à un seule
tour et ses « aléas » intrinsèques, le risque est donc grand de retrouver,
à l’issue du scrutin du 12 décembre un parlement dépourvu de majorité claire –
le « hung parliament », disent les Britanniques – et donc un gouvernement
incapable d’œuvrer utilement.
D’autant qu’on sein même de ces formations, le flou
est entretenu autour des fractures internes entre les trois types de Brexit
possible : « Soft-Brexit », « hard-Brexit » et « no-deal ».
Voire un second référendum.
Le premier est exclu, plus personne ne le défend
vraiment (sortie avec un accord douanier « profond », même si on y
reviendra par la force des choses d’ici 2024), le second référendum paraît hors
de portée. Reste l’option « BoJo » et son « deal » dont le
principe a été adopté, donc exit l’hypothèse d’un « no-deal ».
Quoique…
Car pour Bruxelles, le scénario rêvé à Bruxelles
serait une sortie des urnes qui légitimerait une majorité claire, quelle qu’elle
soit, permettant d’avancer et de travailler à l’avenir des relations.
Dans le cas contraire, le 31 janvier au soir, il y
aura divorce sans accord et un nouveau round de négociations pour mettre fin au
boxon qui va suivre.
Toutefois, les deux principaux candidats au poste de
Premier ministre étant tellement fragilisés dans leur propre camp qu’il me
semble que l’on court après une chimère : Le risque est que rien ne soit
réglé après cette élection faute de majorité claire soutenant son premier
ministre.
En effet, si le leader du Labour, « Jerem-Corps-bine »,
devait l'emporter, il lui faudrait alors sortir de son ambiguïté sur les
relations entre le Royaume-Uni et l’Union européenne. Impossible, pour le
moment, de connaître sa propre position sur le Brexit, tellement il entretient
le flou, lui qui a réussi le tour de force de promettre un nouveau référendum,
tout en expliquant qu’il adopterait alors « une position neutre » : « Afin
que je puisse mettre en œuvre de manière crédible le résultat et rassembler nos
communautés et notre pays plutôt que de poursuivre un débat sans fin sur l’UE
et le Brexit », aura-t-il déclaré un brin jésuite lors d’un débat sur la
BBC.
De son côté, « BoJo » est fortement contesté au sein
de son propre parti, notamment par les ex-députés Tories. Certains, comme « Domine-hic-Grève »,
ancien attorney general, vont même jusqu’à dire que « le Brexit est le pire
épisode d’automutilation que ce pays s’est infligé en temps de paix ».
Ces opposants sont des farouches partisans d’un
nouveau référendum.
Si « BoJo », dit aussi « Teflon », veut
réussir son Brexit au 31 janvier 2020, comme il s'y est engagé (après avoir
renoncé à aller mourir de honte dans un caniveau le 31 octobre dernier), il lui
faudrait donc une indiscutable majorité parlementaire.
Et son inquiétude est palpable au regard de sa prise
de position sur le durcissement des mesures sécuritaires envers les infractions
terroristes.
Avoir rappelé aux urnes les citoyens britanniques,
dans une pure logique politique, alors que le climat social, sécuritaire,
économique est largement instable, voire anxiogène, relève d’un pari hautement risqué
pour le Premier ministre sortant.
Mais il devrait passer le cap… une fois de plus.
En fait, depuis le coup d’envoi de la campagne, l’heure
est à nouveau aux idéologies et aux passions plutôt qu’au pragmatisme, qui
faisait tout le charme de la vie publique d’Outre-Manche. Jamais depuis la «
mère des batailles » de 1979 entre « Maggy » et « Calle-à-Ganne »,
le résultat de ces législatives n’aura autant pesé sur la destinée d’un pays
traumatisé par les divisions sur le Brexit.
Rappelons que les élections à la Chambre des communes
se tiennent au scrutin uninominal majoritaire à un tour. Dans chacune des 650
circonscriptions d’Angleterre du pays de Galles, d’Écosse et d’Irlande du Nord,
le candidat recueillant le plus de voix devient député, même s’il est
minoritaire dans les urnes.
Ce système favorise traditionnellement les deux grands
partis, conservateur et travailliste, au détriment des petites formations, en
raison de la prévalence du « vote utile » au cours de l’unique premier tour. Un
« truc » qu’on ne connait pas en « Gauloisie-positive ».
Et le parti qui détient la majorité absolue à la
Chambre basse est appelé par la reine à former un gouvernement.
Or, « BoJo » manque de légitimité puisqu’il n’a
pas été élu par le peuple, mais choisi par la seule « base conservatrice »
de quelques dizaines de milliers d’adhérents à jour de leur cotisation, et ne
dispose même pas de majorité parlementaire.
Aussi, le chef du gouvernement poursuit une stratégie
duale : D’un côté, « BoJo » affirme pouvoir réaliser le Brexit. Et pour ce
faire, il compte sur l’accord de sortie négocié avec Bruxelles qui a été adopté,
avec des pincettes et « par principe », en première lecture par l’assemblée
sortante. À ses yeux, ce positionnement doit écarter la menace sur sa droite du
nouveau parti populiste Brexit de « Nid-d’Aigle-Barrage », dont il a
refusé l’offre d’alliance.
Signe encourageant, le président de cette formation
nationaliste a jeté l’éponge, après avoir échoué à sept reprises dans le passé
à se faire élire à la Chambre des communes et renonce cette fois-ci à « affaiblir »
les Tories en présentant des candidats…
Un peu comme si « Marinella-tchi-tchi »
renonçait pour faire de la place aux « Républicains-démocrates »
pour abattre « Jupiter » alors que depuis « Mythe-errant »
elle a toujours fait la courte-échelle aux « soces » avec des
triangulaires.
Vous connaissez le résultat…
Le message du locataire-précaire du 10 Downing Street
est catégorique : S’il est élu avec une confortable majorité, le Royaume-Uni
sortira de l’Union européenne au 31 janvier 2020, la nouvelle date butoir
offerte par les Vingt-Sept.
Pour l’emporter, il compte sur le débauchage d’électeurs
travaillistes des Midlands, du nord de l’Angleterre et du pays de Galles qui
ont plébiscité le départ de l’Union européenne.
De tels gains doivent compenser les pertes attendues
dans les zones où les proeuropéens « remainers » sont largement majoritaires, à
savoir Londres, les villes étudiantes anglaises et l’Écosse. Le tenant du titre
s’efforce également de courtiser l’électorat féminin rebuté par sa rhétorique
guerrière et sa vulgate machiste, même si ce n’est pas gagné…
À l'appui de ce plan, le Premier ministre s’est engagé
à lâcher les cordons de la bourse au profit des régions déshéritées en mal de
reconversion industrielle. La promesse d’une hausse substantielle des dépenses
publiques doit être financée par l’emprunt en profitant de l’excellente note
financière du Royaume-Uni (AA, comme celle de la « Gauloisie-impériale »),
malgré le maelstrom du Brexit tout en profitant des taux actuellement bas.
Peut-être même qu’il fera gagner de l’argent si les
taux restent négatifs…
Son challengeur travailliste poursuit lui une
stratégie inverse de celle de « BoJo ». Il parle le moins possible du
Brexit. En effet, la position travailliste, qui consiste à négocier un nouvel
accord avec l’UE, avec maintien du Royaume-Uni dans l’union douanière (soft
brexit) soumis ensuite à un second référendum, est très mal accueillie par les
modérés proeuropéens, en particulier les jeunes et par les « brexiters »
de tous poils.
Ses seules interventions sur le sujet dénoncent les
tentatives américaines visant à libéraliser le marché du service national de
santé britannique en l’ouvrant aux fabricants de médicaments d’outre-Atlantique
(ce qui reste fédérateur : Ils y tiennent à leurs « soins gratuits »
pour tous, même s’il est plus facile de se faire soigner en « Gauloisie-sanitaire »)
et à faciliter l’exportation au Royaume-Uni de produits alimentaires bas de
gamme : Le fameux « fabuleux accord » promis par « McDo-Trompe ».
C’est que l’immixtion du ricain dans la vie policée du
marigot politique est sévèrement critiqué par « Corps-Bine », et
finalement joue assez bien en faveur de ce dernier dans la mesure où le
président des États-Unis est honni (à juste titre ?) par une majorité de l’opinion.
La campagne du Labour est en fait centrée sur la
justice sociale et l’environnement. Les travaillistes comptent sur un programme
radical d’une ampleur jamais vue depuis 1945 pour l’emporter : L’instauration
de la semaine de travail de quatre jours (c’est du « Maggy-Tâte-Cher »
qui avait imposé les temps partiels dans la fonction publique), les
renationalisations, les investissements massifs dans la santé, l’éducation et
les infrastructures, ainsi que l’extension des pouvoirs des syndicats qui donnent
des sueurs froides à la City.
Leur leader espère que cette générosité permettra d’occulter
son impopularité personnelle record, sa tiédeur dans le combat contre l’antisémitisme
et l’entrisme de l’extrême-gôche dans son propre parti.
La prudence budgétaire du New Labour de « Tonio-Blaire »
est ainsi jetée aux orties, ce qui fait dire à ce dernier, « Corbyn, c'est
un leadership de protestation, pas de gouvernement ».
En revanche, si demain « on rase gratis »,
le financement reste pour le moins flou puisqu’il s’est engagé à ne pas
augmenter ni les impôts, ni les cotisations sociales, affirmant que seuls « les
riches » paieront l’addition.
Les « riches » chez lui ce n’est pas 4.000 €/mois
comme pour « Tagada-à-la-fraise-des-bois », mais carrément 94.000
£/an…
On est dans un autre monde, n’est-ce pas.
Si le Brexit sème la discorde au sein du Labour, le
programme des libéraux-démocrates (centristes) a le bénéfice de la clarté : Le
maintien dans l’Union européenne. Reste que la percée de la troisième force se
heurte non seulement au système électoral, mais aussi à la difficulté de créer
une large coalition avec les formations sur la même ligne en raison de la
position ambiguë du Labour sur le Brexit.
Et puis les britanniques en ont ras-le-chapeau-melon
de cette affaire de Brexit : Eux sont sur la ligne bruxelloise. On sort ou
on reste, mais on prend une décision rapidement, désormais.
Et on l’applique : Tant pis pour l’avenir, il
peut attendre.
Ceci dit, ces prochains développements sont à mettre
en perspective avec mon
post du 7 octobre dernier sur le sujet.
Je me suis seulement planté sur un détail : Le
possible coup de force de « BoJo » sur ses propres institutions.
C’était une alternative pour ne pas « mourir de
honte au fond d’un fossé » et il a dû le lire avant de prendre une voie
divergente : Faire le pari d’avoir une majorité confortable pour se
maintenir dans son fauteuil pour 5 ans : La soupe est bonne.
C’est sûr que pour un « imperator » mégalo
comme lui, c’est alléchant.
Les britanniques ? Des joueurs/parieurs, vous
avais-je dit !
Et lui en est un archétype…
Ceci dit, il devrait se rappeler de la « dissolution
à sec » de « Juppette » en 1997. Où la « Chie-raquie »
avait perdu sa majorité – sanction des grèves de 1995 sur les retraites en « Gauloisie-impériale »
– qui avait forcé « le Chi » à cohabiter avec « Tonton-Yoyo »
durant 5 ans. C’est long 5 ans et le « Socialisme-triomphant » des « forces
de progrès » en a profité pour s’effondrer jusqu’à accoucher de « Tagada-à-la-fraise-des-bois »
15 ans plus tard.
Deux décennies de perdues pour le pays. Ça plus l’ère « mythe-errandienne »,
et vous vous retrouver à pédaler dans les rues aujourd’hui pour sauver « les
acquis sociaux » en lambeaux d’une minorité de privilégiés.
Car pour « BoJo », la réussite de ses
élections tient dans le vote Irlandais (du nord).
La question n’est toujours pas réglée pour eux qui ne
veulent pas ni d’une frontière terrestre, ni d’une frontière maritime d’avec la
« mère-patrie », tout en ne voulant pas non plus rester dans l’UE
(qui a tant réussi à leurs cousins papistes-du-sud)…
Et aucun des leaders travaillistes et conservateurs n’aborde
vraiment le problème, encore moins ne propose de solution innovante…
Ce qui promet des réveils difficiles : Les
problèmes restent entiers, y compris autour de la question écossaise (et de
Gibraltar).
Autrement dit, je ne change pas trop mes pronostics,
sauf à présumer désormais que « BoJo » pourrait prendre un bail
quinquennal au 10 Downing Street.
De toute façon, c’est la moins pire des solutions pour
mes amis britanniques.
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