Arrêt du mercredi 8 juillet 2020, pourvoi n° 18-20961
C’est l’histoire d’un mek, normal, qui perd un peu de son jus au fond
d’une dame.
Il se trouve que Madame est féconde et fécondée à l’issue des
« secousses exquises » qu’elle a pu avoir avec Monsieur :
C’était une époque où la « PMA pour tous » n’existait pas dans le corpus
législatif, alors on faisait encore des gamins de façon « archaïque ».
Mais ça, c’était avant…
Plus tard, la mère de l’enfant mineur engage une procédure en
reconnaissance de paternité et elle demande une expertise génétique au juge qui
l’ordonne.
On ne sait pas pourquoi, mais le père présumé refuse de se soumettre à cette
expertise au motif légal que selon lui, l’action en recherche de paternité
devait être exercée par la mère dans un certain délai et pour cette raison
désormais prescrit à l’époque, et il saisit la cour d’appel pour statuer sur la
validité de l’action.
Et puis lui estime qu’il y a là, de ce fait, un motif légitime pour ne pas
se rendre aux convocations de l’expert puisque la Cour n’a pas encore rendu sa
décision.
Bing, ça ne loupe pas, il se fait ramasser et se retrouve avec sur les
bras un gamin dont rien ne justifie, scientifiquement, qu’il est le sien.
Cour de cassation, 1ère chambre civile
Audience publique du mercredi 8 juillet 2020
N° de pourvoi : 18-20961
Mme Batut (président), président
SCP Le Bret-Desaché, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt
suivant :
Arrêt n° 424 F-P+B
Pourvoi n° F 18-20.961
M. P… R…, domicilié […] , a formé le pourvoi n° F 18-20.961
contre l’arrêt rendu le 8 juin 2018 par la cour d’appel de Reims (1ère
chambre civile, section II), et un pourvoi additionnel contre l’arrêt rendu le
24 octobre 2014 par la même cour d’appel, dans le litige l’opposant à Mme B… Z…,
prise en qualité de représentante légale de M…, domiciliée […] , défenderesse à
la cassation.
Le demandeur invoque, à l’appui du pourvoi principal et du
pourvoi additionnel, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Acquaviva, conseiller, les observations
de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. R…, de la SCP Le Bret-Desaché,
avocat de Mme Z…, après débats en l’audience publique du 26 mai 2020 où étaient
présents Mme Batut, président, M. Acquaviva, conseiller rapporteur, Mme Auroy,
conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée
des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à
la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon les arrêts attaqués (Reims, 24 octobre 2014 et 8
juin 2018), M… Z… est né le […] de Mme Z… sans filiation paternelle déclarée.
2. Par acte du 22 juin 2011, celle-ci, agissant en qualité
de représentante légale du mineur, a assigné M. R… en recherche de paternité.
Examen des moyens
Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, et sur
le troisième moyen, ci-après annexés
3. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de
procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement
motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la
cassation.
Sur le premier moyen
Énoncé du moyen
4. M. R… fait grief à l’arrêt du 24 octobre 2014 de déclarer
recevable l’action en recherche de paternité, alors « que selon l’article 20-IV
de l'ordonnance du 4 juillet 2005, seules les actions prévues par les articles
327 et 329 du code civil peuvent être exercées sans que puisse être opposée la
forclusion tirée de la loi ancienne ; que l’ancien article 340-4 du code civil
prévoyait que l’action en recherche de paternité naturelle ne pouvait être
exercée par la mère que dans un délai de deux ans suivant la naissance de
l'enfant ; qu’en l’espèce, il ressort de la procédure que Mme Z… a attendu le
22 juin 2011, soit plus de huit ans après la naissance de son fils, le […],
pour agir en recherche de paternité contre M. R… sur le fondement de l’article
328 nouveau du code civil ; qu’en affirmant que la forclusion tirée de la loi
ancienne n’est pas opposable à cette action, peu important que l’article 20-IV
ne vise pas l’article 328 du code civil, la cour d’appel a violé les articles
20-IV de l’ordonnance du 4 juillet 2005, 328 nouveau du code civil et 340-4
ancien du même code. »
Réponse de la Cour
5. Il résulte des articles 327 et 328 du code civil, d’une
part, que l’action en recherche de paternité est réservée à l’enfant, d’autre
part, que pendant la minorité de celui-ci, le parent à l’égard duquel la
filiation est établie a seul qualité pour exercer l’action en recherche de
paternité. Il en résulte que l’article 20, IV, de l’ordonnance n° 2005-759 du 4
juillet 2005, qui prévoit, au titre des dispositions transitoires, que l’action
prévue par l’article 327 du code civil peut être exercée sans que puisse être
opposée la forclusion de deux ans tirée de la loi ancienne, dès lors qu’à la
date d'entrée en vigueur de cette ordonnance, le 1er juillet 2006,
la prescription de dix ans prévue par l’article 321 du même code n’est pas
acquise, s’applique lorsque l’action est exercée par le représentant légal de l’enfant
mineur sur le fondement de l’article 328 du code civil.
6. Après avoir énoncé à bon droit que l’article 20, IV, de l’ordonnance
n° 2005-759 du 4 juillet 2005 est applicable à toutes les actions en recherche
de paternité intentées postérieurement au 1er juillet 2006, qu’elles
soient exercées par la mère pendant la minorité de l’enfant ou par l’enfant
lui-même devenu majeur et relevé que l’action en recherche de paternité avait
été engagée par la mère de l’enfant, en qualité de représentante légale de ce
dernier, postérieurement à l’entrée en vigueur de ces dispositions et dans le
délai de 10 ans requis par l’article 321 du code civil, la cour d’appel en a
exactement déduit que celle-ci était recevable.
7. Le moyen n’est donc pas fondé.
Sur la deuxième et la troisième branches du deuxième moyen
Énoncé du moyen
8. M. R… fait grief à l’arrêt du 8 juin 2018 de le déclarer père
de M…, alors :
« 1°/ que l’expertise biologique est de droit en matière de
filiation, sauf s’il existe un motif légitime de ne pas y procéder ; que
constitue un motif légitime de refuser de se soumettre à l’expertise biologique
judiciairement ordonnée, la circonstance que la question de la recevabilité de
l’action intentée contre soi n’a pas été définitivement tranchée ; que, dans
ses conclusions, M. R… faisait valoir que la recevabilité de l’action de Mme Z…
n’étant pas purgée, il avait refusé de se soumettre à l’examen comparé des
sangs ordonné par le juge ; qu’en retenant, par motifs adoptés, que M. R… ne
disposait d’aucun motif légitime pour s’opposer à la réalisation de l'expertise
ADN et que son refus constituait un indice de ce qu’il avait connaissance de sa
paternité, la cour d’appel a violé l'article 310-3 du code civil ;
2°/ que le droit à un procès équitable implique que le
défendeur à une action en recherche de paternité puisse refuser de se soumettre
à l’expertise biologique judiciairement ordonnée tant que la question de la
recevabilité de l’action intentée contre lui n’a pas été définitivement
tranchée, sans que le juge puisse déduire de ce refus la preuve de sa paternité
; que, dans ses conclusions, M. R… faisait valoir que la recevabilité de l’action
de Mme Z… n’étant pas purgée, il avait refusé de se soumettre à l’examen
comparé des sangs ordonné par le juge ; qu’en retenant, par motifs adoptés, que
M. R… ne disposait d’aucun motif légitime pour s’opposer à la réalisation de l’expertise
ADN et que son refus constituait un indice de ce qu’il avait connaissance de sa
paternité, la cour d’appel a violé l’article 6, § 1, de la Convention de
sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. »
Réponse de la Cour
9. Selon l’article 310-3 du code civil, l’expertise
biologique est de droit en matière de filiation, sauf s’il existe un motif
légitime de ne pas y procéder.
10. L’absence de décision irrévocable sur la recevabilité d’une
action en recherche de paternité ne peut constituer un motif légitime, même au
regard du droit au procès équitable, pour refuser de se soumettre à une
expertise biologique ordonnée à l’occasion de cette action par le tribunal, s’agissant
d’une mesure qui, destinée à lever les incertitudes d’un enfant sur ses
origines, doit être exécutée avec célérité.
11. Après avoir, par motifs propres et adoptés, retenu que l’action
était recevable et relevé que M. R… avait volontairement mis en échec l’expertise
génétique ordonnée par le tribunal en faisant le choix de ne pas déférer aux
convocations qui lui avaient été adressées, en vertu de la décision ordonnant l’expertise,
laquelle était exécutoire, la cour d’appel a décidé, à bon droit, que ce
dernier ne disposait d’aucun motif légitime pour s’opposer à la réalisation de
l’expertise génétique et qu’il se déduisait de son refus de s’y soumettre un
indice supplémentaire de sa paternité.
12. Le moyen n’est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. R… aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile,
rejette la demande formée par M. R… et le condamne à payer à Mme Z… la somme de
3.000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première
chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit
juillet deux mille vingt.
Bref, Monsieur R… à l’issue de cet arrêt se retrouve donc avec un bambin
sur les bras, dont rien ne prouve vraiment qu’il soit le sien, au motif qu’il
ne dispose d’aucun motif légitime pour s’opposer à la réalisation d’une
expertise génétique excipant la seule forclusion de l’action en recherche de
paternité antérieur à la loi de 2005.
Dès lors le juge peut déduire à bon droit que son refus est un indice de
sa paternité.
Un indice seulement : L’erreur de droit de Monsieur R….
Il aurait dû s’y soumettre, comme moâ si j’avais été appelé à l’instance,
ça aurait réglé le problème immédiatement…
Plusieurs conclusions « appétissantes » à cette occasion : La
Cour de cassation rappelle que si l’action en recherche de paternité appartient
à l’enfant, elle peut être exercée durant sa minorité par sa mère, ça on
savait.
Elle précise également que l’expertise génétique est de droit en matière
de filiation sauf motif légitime de la refuser.
Et pour elle, le fait que la Cour d’appel n’ait pas encore rendu sa
décision définitive sur la recevabilité de l’action en recherche de paternité
ne peut constituer un motif légitime, même au regard du droit au procès
équitable.
Le juge du fond est alors libre de valablement en déduire un indice de
paternité, du fait de refuser de se soumettre à une analyse ADN.
Admettons.
Mais admettons que postérieurement au refus d’examen, l’action soit jugée
irrecevable alors même que la paternité est prouvée par comparaison des ADN, il
se passe quoi ?
Et puis pour mieux en rire, et si ce n’est pas Monsieur R… le père
biologique, mais son frère, ou un tiers (l’oncle, le grand-père du môme, le
facteur), on fait quoi au juste ?
Parce qu’un « indice », ce n’est pas une preuve, loin de là,
même quand on n’est pas dans le domaine pénal…
Le pôvre gamin, il va se retrouver avec plusieurs pères successifs qu’il
va en devenir cinglé, à mon sens.
Car admettons que postérieurement Monsieur R… intente une action en
dénégation de paternité et qu’il en apporte les preuves scientifiques, on fait
quoi des 3.000 € versés indûment à Madame Z… ?
Et puis alors encore plus rigolo, l’hypothèse du gamin, dont les
conventions internationales (et le droit interne qui en découle) reconnaissent
son droit à connaître ses origines biologiques, est le résultat d’une PMA,
qu’est-ce qui se passe ?
Plus drôle, il a la « possession d’état », à savoir un père de
substitution alpagué par Madame Z… postérieurement à sa conception qui l’élève
comme s’il s’agissait de son propre gamin, on fait quoi avec ces
dispositifs légaux qu’il déclenche une fois sa majorité acquise ?
Et si son père biologique était le pompier de service donneur de
« jus », voire un criminel prisonnier volontaire pour raccourcir sa
peine…
Terrible ce droit de la famille et de la parentalité
« post-moderne » où même la mère légale peut ne pas être la mère
biologique avec la GPA ou le don d’ovule…
Mais admettons que ce soit la vraie « volonté du législateur »
(dans sa très grande sagesse qui lui fait adopter des mesures parfois
contradictoires), ça restera au juge du droit d’arbitrer les priorités en
fonction des cas qui lui sont soumis : La Cour de cassation ne fait jamais
qu’appliquer la loi, rien que la loi, mais toute la loi qui lui est soumise.
Et là, il n’y a pas de critique à lui faire : Madame Batut fait ça
avec un talent certain, pas de doute.
Même quand on y perd un peu de son jus au fond d’une Dame…
Et puis cette affaire-là n’est-elle pas une confirmation de cette histoire « obscure » de l’affaire du Père de « Zaza » (même cause, même effet) la fille de la « garde-des-sots » de « Bling-bling », un proche du Président de l’époque, condamné à verser une pension de 2.500 € de rente à « Rachida-Mimi » ?
Et puis cette affaire-là n’est-elle pas une confirmation de cette histoire « obscure » de l’affaire du Père de « Zaza » (même cause, même effet) la fille de la « garde-des-sots » de « Bling-bling », un proche du Président de l’époque, condamné à verser une pension de 2.500 € de rente à « Rachida-Mimi » ?
Souvenez-vous, « Zaza », à peine née, est
présentée au palais de l’Élysée au moment où « Carlita » donne
naissance à « Giuletta » et la presse s’emballe : On parle même
de faire faire un test ADN au frérot de « Bling-bling », des fois que…
Bon week-end à toutes et à tous !
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