La Cotisation Sociale sur les Produits Manufacturés
(CSPM)
Un commentateur (« JP2 ») assidu m’a demandé
une « synthèse » relative à la CSPM à transmettre à quelques amis « sérieux »,
il y a quelques mois de ça.
Je la lui ai faite en juillet dernier.
Je vous la livre :
1. La fiscalité française est immensément
« riche » et… complexe. On comptait près de 1.200 impôts, taxes,
droits et redevances il y a encore quelques années répartis dans divers codes
(et pas seulement le CGI ou le LPF). Et au moins autant de « niches »
(dites « dépenses fiscales »), exonérations, dispenses, abattements,
« hors du champ d’application », exemptions, régimes particuliers,
etc.
De plus, les seules harmonisations européennes
concernent les droits de douanes (perçus par l’Europe) et, au moins quant aux
assiettes, la TVA, assiette, exonérations, exemptions hors les « hors du
champ d’applications ». Qui reste « dispersée » quant aux taux
applicables (taux normal, taux réduit, taux super-réduits, taux parking, taux
ultra-marins, taux zéro).
Tous ces droits et taxes visent à réaliser une
« neutralité fiscale » dans l’espace économique européen.
(Hors la taxe « GAFAM », d’invention
récente, qui reste une exception à étendre).
Une neutralité fiscale dont on est encore loin dans la
mesure où existe toujours quantité de « taxes à la production » voire
« à la détention » (qui est encore plus affligeante pour être
« punitive ») et de « droits de circulation » qui pèsent
sur les activités.
2. En matière « d’autorité fiscale », les
États sont contraints de percevoir des recettes pour exécuter des dépenses au
profit de tous (ou de quelques-uns), selon les objectifs poursuivis : il
est par exemple constant que la puissance publique ne peut pas tout financer et
que parfois, il vaut mieux s’abstenir d’une recette pour favoriser tel ou tel
développement en créant un régime fiscal « favorable » pour telle ou
telle dépense jugée indispensable…
Inversement, la puissance publique est capable de
« surtaxer » telle ou telle dépense : ces deux volets
s’appellent la « fiscalité comportementale » !
3. Toutefois, toute cette ribambelle d’impositions ne
repose jamais que sur la capacité des citoyens à les financer. Quel que soit le
redevable d’un impôt, d’une taxe, d’un droit, d’une redevance, d’un
prélèvement, c’est toujours le citoyen qui finalement l’assume : mettez
une taxe sur le « pet des vaches » (même due par des entreprises au
titre de l’IS) pour les empêcher d’émettre du méthane, elles ne la paieront
jamais !
En revanche, le consommateur final de « la
vache », la retrouvera dans le prix du lait, du beurre, de la crème et
même du steak…
4. Par ailleurs, le financement des systèmes de santé
sont tout autant complexes dans l’espace communautaire. Son poids en France
représente à peu près l’équivalent du poids fiscal, mais d’assurance (contre un
risque de santé), les prélèvements sociaux financent des « missions »
qui n’ont parfois plus rien d’assuranciel. Et c’est autant de
« nouveautés » à la charge des citoyens (qui les supportent et en
bénéficient, exclusivement et au premier euro). D’où l’invention spécifique de
la CSG et de la CRDS, un « cas à part », un impôt « à vocation
sociale ».
Toutefois l’harmonisation européenne est en marche, au
moins quant aux règles d’assujettissement (lieu de résidence) avec quelques
exceptions comme celui des frontaliers et des travailleurs (provisoirement) détachés.
Il reste néanmoins des exceptions (le régime des
diplomates, celui de quelques salariés des GIEE, comme par exemple Eutelsat)
mais elles sont voulues par les gouvernements.
5. Globalement, on taxe finalement, à l’intérieur des
frontières de « souveraineté » (et depuis l’antiquité), les
personnes, les entreprises ou les choses (et services) : c’est une
commodité de fonctionnement. Il est plus facile de s’adresser à 3 millions
d’entrepreneurs qu’à 44 millions d’électeurs même si c’est finalement le
citoyen qui supporte l’intégralité du « prélèvement obligatoire »…
Tout le reste en découle (et jusqu’aux exercices de
taxinomie).
6. Ceci dit, notre pays a un problème général de
« compétitivité » : ses entreprises ne font pas le poids face à
des productions de biens (et services) contre ses concurrents, parfois
européens, mais le plus souvent hors UE.
Deux types de raisons : le poids de la fiscalité
dite « de production » ou « à la détention » (CVAE,
CFE, des milliers de taxes comme la taxe sur les farines, l’équarrissage, les
huiles alimentaires, les accises, les droits de circulation, et on en passe des
centaines et des centaines…) et celui des « charges sociales » prises
d’une façon générale.
Quand on importe un produit fabriqué à l’étranger, on
importe également les charges sociales et les impôts dudit pays étranger et là,
nous ne sommes pas « à égalité » !
Quand on exporte nos productions nationales, on
exporte forcément toutes nos charges sociales et toute notre fiscalité, hors la
TVA (exonération export), et là encore, nous ne sommes pas « à égalité ».
D’où probablement nos déficits de balance commerciale
depuis plusieurs décennies.
Mais tant qu’on peut payer, c’est qu’il reste des
ressources…
6. La solution « logique » serait de
supprimer tous ces prélèvements obligatoires pour rendre plus performantes nos
entreprises.
Sauf que ce n’est pas possible : ce serait la
faillite assurée de notre État et de son système social et de droit &
justice tout entier, celui qui nous permet de vivre, de travailler, de
produire, de consommer, d’épargner et d’assurer un équilibre social et
juridique cohérent avec nous-mêmes et nos engagements internationaux (tout le
corpus juridique et diplomatique) qui font notre pays, sa culture et son
Histoire.
Pourtant, il y aurait des solutions elles-mêmes
cohérentes avec nos engagements.
C’est, notamment le cas de la « CSPM ».
1 – Principes
1.1 – Interdiction
de la mise en place de « droits de douane » spécifiques
7. Un « droit de douane » spécifique sur nos
importations, c’est la solution proposée par les
« souverainistes » : on reprend notre « souveraineté »
frontalière et on décide sur notre territoire de ce qui est le meilleur pour
lui et ses résidents. Solution de facilité et « populiste »…
Ce n’est possible que si on renonce à nos engagements
internationaux, validés souvent par référendum et dans tous les cas par la loi
votée. Ce qui suppose de nouvelles lois, de nouveaux référendums et une
« insécurité juridique » qui menacerait nos institutions (nos
entreprises et la vie juridique et économique de nos concitoyens) sans pour
autant redonner un coup d’accélérateur à la « vie sociale » de nos
institutions.
8. Rappelons à ce sujet que ce n’est pas impossible,
mais que si la France a réussi il y a deux siècles de ça, c’est parce qu’elle a
aboli les « droits de douanes intérieurs » (taxes, péages, pontages
et Cie) les repoussant aux frontières de l’empire (éphémère) alors en
construction : c’était l’époque « universaliste » de la Révolution
qui s’est étendue jusqu’à l’époque de l’empire « colonial ». Avec
« les Lumières », on apportait nos codes et lois et notre fiscalité…
9. Rappelons également les « troubles du commerce
international » (un des débouchés importants, pour au moins un quart de
l’activité de nos entreprises et de leurs salariés, donc du financement de nos
régimes sociaux et d’une partie de nos recettes fiscales) quand le Président
américain joue sa partie de poker personnelle avec les fameux « droits de
douane » ;
Rappelons que la première décision du gouvernement
Britannique du moment en période de « Brexit » est justement d’abolir
les droits de douane… d’entrée sur le territoire de la Couronne, hors quelques
secteurs à protéger (l’agriculture… seulement si les citoyens britanniques peuvent
payer cher pour se nourrir…).
Notez enfin que dans les droits de douane il n’y a pas
que les droits d’importation, mais aussi les droits d’exportation et surtout les
droits de douane « qualitatifs », autrement dit le respect des normes
applicables sur le « marché commun » (point de discussion « houleux »
dans le CETA, le TAFTA et avec les MERCUSUR, avec les industriels asiatiques,
aux avancées aléatoires : l’objectif étant de protéger les consommateurs
européens, il s’agit donc d’imposer nos normes « CEE » partout dans
le monde, comme on le fait très bien en matière de sécurité sociale qui est
recopiée dès que possible…)
10. La solution douanière ne semble pas la mieux
adaptée dans un monde « intriqué » pour redonner de la compétitivité
à nos acteurs économiques nationaux, loin de là, où tout le monde a besoin de
tout le monde (cf. trois ans d’effort à prévoir pour pouvoir produire du
Paracétamol exclusivement pro domo… C’est dire !)
De toute façon, d’une manière ou d’une autre, ce sera
le consommateur français qui devra en assumer les surcoûts.
Les tenants de cette solution en espèrent une
« relocalisation » dont les entreprises et leurs salariés seraient
les premiers bénéficiaires.
C’est oublier que quand on n’est pas compétitif, on ne
le redevient pas comme « par magie » en excluant les « premiers
de cordée » et ça ne financera jamais nos dépenses sociales que par un
lointain ricochet.
Il y a mieux à faire.
1.2 – Jouer de la
TVA.
11. C’est la solution absurde : par essence elle
est neutre et ne s’exporte pas (il ne manquerait plus que ça en termes de
compétitivité…).
Et quand elle est assise sur un produit importé, elle
reste nationale (moyennant une faible redevance intra-européenne, pour gérer
les transferts au sein de l’Union).
12. La « TVA sociale », pour financer
justement nos régimes de protection sociale, est une ânerie : c’est juste
une façon d’en prendre un peu plus dans la poche de tout le monde pour en
remettre un peu soit aux seuls « travailleurs », soit aux régimes
sociaux, soit encore un mix des deux.
Au total, ce sont les résidents qui payeront et jamais
personne d’autre.
1.3 – Les impôts
et taxes à la production et à la détention
13. On peut imaginer de les réduire ou de les
supprimer (ce qui semble être en cours, à la marge seulement).
Mais c’est toute la fiscalité locale qu’il faudrait
réformer. Or, rappelez-vous que rien que le cadastre aura mis 40 ans à se
mettre en place pour pouvoir supprimer les taxes « portes &
fenêtres » et plus tard la patente.
Les régimes politiques ont eu le temps de changer 5
fois…
Car il a fallu envisager le financement de la
fiscalité locale pour aborder la Révolution industrielle dans des conditions
acceptables comparées à la fiscalité Britannique d’alors.
14. Dans la même veine, on peut imaginer de réduire
les financements de nos systèmes de protection sociale, voire l’étatiser comme
ça se fait par ailleurs et jusqu’au sein de l’UE.
En remarquant que la simple réforme des retraites (de
seulement le régime général alors que les régimes complémentaires fonctionnent)
pose tellement de problèmes qu’elle n’a pas survécu à la récente « crise
sanitaire » (pour l’heure).
15. Conséquemment, il nous faut inventer autre chose,
qui ne soit ni un droit de douane (pour des raisons juridiques), ni une TVA (car
elle est neutre), ni une « taxe à la production » ou « à la
détention » (que nous sommes les seuls à supporter tant que notre balance
commerciale sera déficitaire), ni même un impôt surcomplémentaire (je suis même
partisan de les abaisser et de ne faire payer que les « revenus
décaissés » avec la mise en place d’un vrai « bouclier fiscal »,
mais c’est un autre sujet…) qui « vole » aux uns pour
« donner » aux autres.
16. Ce sera donc un « cotisation sociale »,
puisqu’il s’agit de combler les déficits de nos régimes sociaux, ceux qui
profitent à tous les résidents.
2 – La CSPM
17. Pour favoriser nos entreprises, donc les assiettes
fiscales et sociales, redonner en même temps du pouvoir d’achat à nos
populations éreintées par le fardeau des prélèvements obligatoires (sans même
parler de l’endettement, public, et ceux des entreprises et des ménages), il
faut faire du « Canada-Dry » : un droit supplémentaire qui n’en
est pas vraiment un puisqu’il est « ciblé ».
Mais pas n’importe comment.
2.1 – Le principe
18. Tout d’abord, on respecte notre constitution où il
est affirmé que tout le monde est égal devant la loi.
Ce sera donc « tout le monde » qui opère
dans nos frontières politiques.
Et on « punit » le chiffre d’affaires des
entreprises (elles sont moins nombreuses que les citoyens et soumises à
beaucoup plus de contrôles étroits).
Mais on « discrimine » astucieusement : comme
le choix final reste entre les mains des consommateurs, leurs clients, quel que
soit le circuit de distribution d’un produit (ou d’un service), si on veut
« discriminer », il faut une large assiette avec un taux dissuasif et
de nombreuses et larges exonérations (dispenses et/ou « hors du champ
d’application »).
19. Mais on en exonère totalement les
« agents » qui respectent le critère à suivre, sans abattement, ni
dégrèvement pour ceux qui ne le respectent pas, sauf à avoir un temps d’adaptation
indispensable pour « refabriquer » des circuits de production de biens
(et de services) qui vont redonner de l’emploi aux citoyens : une première
année au taux zéro (ou 5 %), puis 10 % la seconde année (fiscale), puis 20 % la
troisième année et enfin 30 % à partir de la quatrième année (ou cinquième si
la première est au taux 0 %).
Au-delà, les simulations montrent que des taux
supérieurs peuvent être contreproductifs et détruire de l’emploi (mais ça reste
à préciser).
Ce qui serait l’inverse de l’objectif recherché…
Réfléchissez : un prix de vente majoré de 30 %
par rapport à un « exonéré » qui propose la même chose, ce n’est pas
rien.
Le seuil de 5 % est déjà « psychologique »
et devient « discriminant » dans l’acte d’achat du consommateur, en
deçà, c’est « insensible ».
20. Il s’agit d’une formule qui fonctionne comme
l’ancêtre de la TVA : une TCA sans déduction-amont (celle payée par
l’acheteur) qui ne pourrait pas la déduire au moment de la vente (comme le
supporte déjà le consommateur final puisqu’il est « non-assujetti »).
Or, l’un des aspects mortifères des TCA, l’absence de
déduction amont, non seulement les Services savent faire, mais ça s’accumule au
fil du réseau de distribution. Et favorisait les « circuits courts »
(d’où l’idée lumineuse d’Edouard Leclerc et de quelques autres, de se faire
livrer directement par l’industriel sur le lieu de point de vente ouvert au
public, sans intermédiaire, qui aura fait le succès de la « distribution à
la française »).
Naturellement, les TCA étaient déductibles du résultat
net imposable : il y a lieu de redouter une perte de matière taxable à
l’IS, largement compensée dans un premier temps, mais de provoquer à terme la
fermeture de très nombreux « revendeurs » qui n’auraient pas su
s’adapter.
21. Il y a surtout que nos « importateurs »
et leurs correspondants étrangers devront réagir.
L’objectif étant de rester ferme et d’étendre le
processus à l’ensemble de nos partenaires européens puis au monde entier.
Jusqu’à ce que le dispositif s’épuise au fil du temps
et ne représente plus qu’une recette marginale (après relocalisation complète).
Entre temps, le pays pourrait retrouver ses équilibres
financiers naturels ainsi que celui de nos régimes sociaux : la création
des postes de travail pro domo engendrée par la formule doit en principe
refaire des cotisations sociales supplémentaires, réduire le chômage et les
importations, et augmenter les assiettes imposables sur les revenus du travail,
mais tout autant les résultats des entreprises « patriotes » redevenues
plus compétitives.
Et comme la TVA (une invention française que l’on doit
à Maurice Lauré et à mon professeur de TVA J-P. Kauffmann) est une arme
puissante qui représente presque plus que tous les autres impôts et taxes
réunis, elle sera elle aussi probablement reprise à travers le monde.
2.2 – Le mécanisme de la CSPM et ses paradoxes
22. Toutes les entreprises qui opèrent sur le
territoire sont soumises à la CSPM. Du boulanger au vendeur d’avions et de
canons. Tout produit (ou service) importé est le fait d’entreprises (ou
particuliers) étrangères, devant dédouaner sous la responsabilité in solidum
d’un établissement fixe ou d’un correspondant habilité : c’est déjà dans
la loi commune.
Mais en sont exonérées toutes celles qui détiennent le
label « Origine France Garantie » (remanié).
Celui-ci est délivré par une entité indépendant créé
en 2011 (http://www.originefrancegarantie.fr/)
23. Plusieurs critères doivent être respectés pour son
obtention :
-
La
fabrication, le montage ou l'assemblage doivent être effectués en France.
-
La
moitié, au moins, de la valeur du produit doit venir d’un travail réalisé en
France.
-
La
matière première ou le produit agricole majoritairement employé dans la
fabrication doit provenir de France.
24. Pour notre projet, l’important, c’est le
« critère de 50 % » dans la « création de valeur ajoutée »
qui ne peut qu’être le fait de « salariés français », sis sur le
territoire, critère qui est facilement vérifiable et contrôlable par les
services fiscaux du pays à partir des liasses fiscales, des bulletins de
recoupements, des données des douanes et des factures (sur site).
D’ailleurs, il est même contrôlé par les directions du
travail quand l’entreprise possède un accord de participation, puisque la
formule légale reste « P = 1/2 B x (S/VA) – 5 % de CP ».
« S/VA », salaires sur valeur-ajoutée, est
une autre façon d’appréhender ledit ratio de 50 %...
25. Actuellement, si elles en éprouvent l'utilité, ce
« label de certification » peut être demandé par les entreprises à
l’association Pro France. La démarche est payante (de mille à plusieurs
milliers d’euros en fonction de la taille et des ressources de l’entreprise en
cours de certification ainsi que du nombre de produits à identifier) et prend
plusieurs mois pour être délivré : Trop long, trop complexe…
Dans les faits, un organisme certificateur réalise un
audit au sein des entreprises demandeuses et pointe les différents critères en
rapport avec l’utilisation de la marque, car c’est la marque et ses
fabrications qui seront certifiées, pas l’entreprise…
Il est en effet courant qu’une société commercialise à
la fois ses fabrications françaises et d’autres qu’elle conçoit à l’étranger…
Par conséquent, le mécanisme est excellent, sauf qu’il
n’est pas suffisant…
Merci pour ce récapitulatif que je découvre aujourd'hui....
RépondreSupprimerAh ?
SupprimerVous n'aviez pas reçu mon courriel du mois de juillet ?
Voilà qui m''étonne...
Et j'en suis bien désolé.
Il y a une suite demain (pour ne former qu'un tout)
Bien à vous !
I-Cube