Pensez donc à couper votre moteur !
Cass. crim., 23 janv. 2018, n° 17-83.077
RÉPUBLIQUE
FRANÇAISE
AU NOM DU
PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice
à PARIS, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le
pourvoi formé par :
— M. Z Y,
contre le jugement de la juridiction de proximité de VIENNE, en date
du 10 avril 2017, qui, pour usage d’un téléphone tenu en main par le conducteur
d’un véhicule en circulation, l’a condamné à 135 euros d’amende ;
La COUR, statuant après débats en l’audience publique
du 12 décembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l’article
567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M.
Talabardon, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme X ;
Sur le rapport
de M. le conseiller référendaire TALABARDON et les conclusions de M. l’avocat général
DESPORTES ;
Vu le mémoire personnel produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation
de l’article R. 412-6-1 du code de la route ;
Attendu qu’il résulte du jugement attaqué et des pièces
de procédure que M. Y a été contrôlé alors qu’il faisait usage d’un téléphone
en étant assis au volant de son véhicule, qui stationnait sur la file de droite
d’un rond-point avec les feux de détresse allumés ; qu’un procès-verbal de
renseignement judiciaire, établi à la demande de l’officier du ministère public,
ajoute que le moteur était en état de marche ; que, poursuivi devant la juridiction de proximité du chef d’usage d’un
téléphone tenu en main par le conducteur d’un véhicule en circulation, M. Y a
sollicité sa relaxe en soutenant que son véhicule n’était pas en circulation,
dès lors qu’il se trouvait à l’arrêt, moteur éteint ;
Attendu que, pour écarter cette argumentation et
entrer en voie de condamnation, le jugement relève que le prévenu a été
contrôlé, faisant usage de son téléphone au volant de son véhicule, alors que
celui-ci se trouvait en stationnement sur une voie de circulation ; que les
juges ajoutent que les éléments versés aux
débats par l’intéressé ne permettent pas d’établir le bien-fondé de ses
allégations, selon lesquelles le moteur était coupé ; qu’ils en déduisent que
le véhicule, bien qu’arrêté momentanément, devait être considéré comme étant en
circulation ;
Attendu qu’en l’état de ces énonciations, déduites de
son appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, la juridiction de proximité a justifié sa
décision ;
Qu’en effet, doit être regardé comme étant toujours en
circulation, au sens et pour l’application de l’article R. 412-6-1 du code de
la route, le véhicule momentanément arrêté sur une voie de circulation pour
une cause autre qu’un événement de force majeure ;
D’où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que
le jugement est régulier en la forme ;
REJETTE le
pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre
criminelle, et prononcé par le président le vingt-trois janvier deux mille
dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le
président, le rapporteur et le greffier
de chambre.
En foi de quoi, téléphoner en restant assis devant son
volant, c’est interdit même à l’arrêt !
Pensez-y.
Téléphoner en roulant, ça l’est encore plus… Monsieur « ZY »
semblait ne pas l’ignorer. On l’appelle, il s’est donc arrêté, a rangé son
véhicule correctement, allumé ses warning et se pensait « dans la loi ».
Pas de chance, une patrouille passe et le verbalise,
parce que son moteur n’était pas arrêté.
Vous me direz, il aurait été arrêté, sauf « force
majeure », il aurait été verbalisé pour stationnement gênant, voire
dangereux (un rond-point, ça n’a que des tournants à l’effectif, aucune ligne
droâte).
Poursuivi devant la juridiction de proximité pour
usage d’un « téléphone tenu en main » (avec les pieds, c’est plus
acrobatiques) par le conducteur d’un véhicule « en circulation », le
conducteur sollicitait la relaxe au motif que son véhicule n’était justement pas
« en circulation » pour être à l’arrêt.
Erreur : Son argumentation n’a pas été suivie par
les juges.
Pour la Cour de cassation en effet, un véhicule
momentanément arrêté sur une voie de circulation pour une cause autre qu’un
événement de force majeure doit être considéré comme étant toujours « en
circulation » au sens du code de la route. En conséquence, le conducteur d’un
tel véhicule qui fait usage d’un téléphone tenu en main commet une infraction.
Logique : La Cour de cassation avait déjà jugé qu’un
véhicule arrêté à un feu rouge devait être considéré comme en circulation, ce
qui interdisait l’usage d'un téléphone tenu en main par son conducteur.
Bon, la prochaine fois, si vous n’avez pas les moyens
de vous payer un « kit-main-libre » (ou faire comme moi, de vous faire accompagner par une
« charmante secrétaire-bilingue » qui prend vos appels), descendez
donc de votre véhicule (même s’il pleut), couper le contact (pour éviter le « car-jacking »,
clés en poche) et si les motards de la brigade locale rappliquent, sortez donc votre
9 mm (ou le 11.43 de service) de derrière la ceinture et dégommer un de vos
pneus d’un tir bien ajusté…
(Attention au recul de l’arme et pensez à verrouiller le
cran de sécurité ensuite).
Peut-être vous verra-t-on alors d’un œil bienveillant
et à tout le moins empreint d’un profond respect…
Certes, vous risquez quelques emmerdements facétieux,
mais quitte à en avoir, autant que ça vaille la peine.
Bonne fin de journée à toutes et à tous !
I3
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