La poursuite
du voyage.
Avertissement
:
Vous l’aviez compris, ceci n’est qu’un roman, une fiction, une « pure
construction intellectuelle », sortie tout droit de l’imaginaire de son auteur.
Toute ressemblance avec des personnages,
des lieux, des actions, des situations ayant existé ou existant par ailleurs
dans la voie lactée (et autres galaxies), y compris sur la planète Terre, y est
donc purement, totalement et parfaitement fortuite !
Par acquis de conscience, il continue de scruter tous
les horizons. On ne sait jamais, les « pierres » peuvent revenir.
Peut-être même que les cargos chargés de Krabitz arriveront à saturer l’espace,
comme au cinquième saut en bordure de la galaxie de départ.
Avec les maigres ressources de son petit générateur
quantique, il décide de se rapprocher de la sonde qui aura été larguée avant la
disparition du vaisseau.
Il n’a pas le souvenir d’avoir fait la manœuvre, mais
qui sait…
Avec quelques efforts, il finit par la repérer et
navigue à petite allure dessus et là, surprise, aucun moyen que les cargos de
Krabitz ne parviennent jamais en cet endroit reculé : la partie en charge
de retourner sur la balise précédente est toujours bien accrochée à la sonde.
Elle a été larguée, mais par retournée à son envoyeur,
la bouée 94. Moment de sombre désespoir en vue : même les Krabitz ne
peuvent pas venir jusqu’à lui !
Il ne sera pas possible de retourner au point de départ,
d’expliquer le problème au « Gouverneur », de s’emparer du
vaisseau « second » de la légion pour poursuivre l’exil des
Krabitz…
Foutu et bien foutu !
Radicalement foutu : il ne verra jamais grandir
ses gamins. Il ne vieillira plus très longtemps, désormais…
Quand tout d’un coup, alors qu’il somnole, les alarmes
retentissent : les « agresseurs » sont-ils de retour ?
Panique !
Avec le peu d’énergie qu’il a encore en réservoir, la
lutte prochaine sera largement déséquilibrée. Même pas sûr que le champ de
protection puisse fonctionner très longtemps.
Et la première fois, il avait été utile compte tenu du
dégagement d’assauts de rayonnement ionisant qu’il avait encaissé et qui avait
tant secoué sa barge. Sans, il n’aurait eu d’autre issu que de fuir. Vers où,
vers quoi au juste ?
Non, apparaît à proximité de la bouée restée inerte la
seconde partie d’une des sondes, puis quelques instants plus tard, pas très
loin, le vaisseau de la légion piloté par Axel, alors que tombe des
haut-parleurs sa voix en même temps que se précise la position des deux
appareils détectés !
Pour une surprise, c’est une sacrée surprise !
Ça alors…
Au fil de leur rapprochement, la conversation devient
plus fluide :
« – Mais
t’étais où ?
– J’ai
mis à l’abri le vaisseau…
– Un 96ème
saut ?
– Oui !
– Mais
avec quelle réserve d’énergie ? »
Avec ce qui restait. Un petit saut, pas grand-chose,
puisque la machine s’était rapidement mise en rideau faute d’énergie.
Nouvelle alerte d’intrusion : des
« agresseurs » sont détectés à quelques 33 minutes-lumière de
distance, venant d’un axe nouveau.
Ce n’est pas possible, ils ont un détecteur de masse
super-sensible ceux-là. Probablement comme ceux qui équipent le vaisseau de la
légion.
« – Paul, vous
embarquez le plus vite possible. Je récupère la sonde 95 et la balise 96 et on
décampe !
– Je vote
pour. »
Refaire un gymkhana pour repousser l’assaut des « courgettes »
avec une autre barge, c’est l’autre option.
Mais c’est nettement plus intelligent de
« sauter » l’étape 95, d’aller se réfugier au « 96 » et de
n’envoyer vers la « balise 94 » que la dernière sonde. Si la zone est
sûre, au moins les Krabitz n’auront pas à se faire massacrer par
les « pierreux-agressifs » qui infestent le secteur.
« Pas pour
rien que nous sommes des « Homos-Plus ». Plus évolué, plus amélioré,
plus intelligent, plus augmenté ! »
Mais oui, c’est cela…
On ne va pas contrarier la main salvatrice tendue,
n’est-ce pas, en pense Paul.
« – Tu
aurais pu avoir l’idée avant mon largage…
– Mieux
vaut tard que jamais », ou quelle que chose comme ça.
C’est la quatrième fois qu’il fait la manœuvre de
rapprochement. Les barges de secours
sont conçues pour évacuer. Pas pour servir de liaisons. Même si la
programmation reste utile pour la manœuvre.
Qui consiste à s’approcher à vitesse réduite du
vaisseau. Comme il ne s’agit pas d’user du réacteur de propulsion orienté vers
le vaisseau pour ralentir afin d’éviter d’abîmer son revêtement inerte, il faut
donc ralentir la barge en exécutant des embardées en spirale grâce aux moteurs
auxiliaires d’attitude, roulis, tangage, lacet… et se débrouiller pour stopper
à distance zéro, vitesse zéro devant l’ouverture béante de départ.
Il y aurait bien l’ouverture prévue justement pour les
« liaisons », en tête et en queue de vaisseau, le débarquement des
personnels et matériels, l’embarquement des mêmes et de l’avitaillement, mais
la barge n’est pas du tout adaptée et ça la rendrait inutilisable pour son
usage premier.
Alors c’est un peu sportif pour la remettre dans son
logement de départ, d’autant que les « courgettes » approchent et
qu’il s’agit de ne pas traîner dans le coin.
Ça se passe et c’est avec soulagement que Paul revient
dans la sphère d’habitation pour se faire griller sauvagement un steak,
probablement de soja lyophilisé, arrosé d’un excellent bordeaux. Il a la dalle,
marre des rations de survie indigeste de la barge !
Et il déboule dans le poste de commandement pour
superviser le départ vers la bouée 96 pour un 98ème saut, avec en
soute la sonde 95 qui sera balancée plus tard vers l’étape 94 : tout
rentre dans l’ordre, mais quelle histoire.
Au point « vrai 95 », l’étape est un peu
longue, mais sûre, sans « agresseur ». Il s’agit de refaire tous
« les niveaux » dans tous les compartiments du vaisseau qui aura été
rudement sollicité durant cette bataille improbable contre des créatures encore
plus improbables.
Pour se jeter vers le « vrai 96 ».
Ils ont fait les quatre cinquième de ce parcours
invraisemblable, la plupart du temps sur les crêtes de gravitation qui
zigzaguent entre les vallées gravitationnelles où se regroupent matière et
galaxies entières.
Et plus ils avancent, plus la cible de faible
température grandit, remplissant au fur et à mesure un cône devenu bien visible
d’un noir presqu’absolu, car il persiste encore quelques formations galactiques
regroupées en amas de loin en loin.
Les cartes du cosmos se complètent en des amas
parfaitement inconnus.
Toujours la présence des galaxies les plus jeunes, qui
datent de quelques 13 milliards d’année-lumière et quelques pour les plus lointaines,
qu’on peut encore détecter par endroits là où ils font halte. Mais elles
commencent à ne plus être également réparties dans le cosmos. Vers le 111ème
saut, c’est clair, le cosmos devient asymétrique.
Soit on arrive à sa « vraie frontière »,
celle du « début-du-début », la limite physique de la période
d’inflation qui a suivi immédiatement la création de la singularité originelle,
bien avant que l’univers ne se refroidissent assez par son expansion pour
laisser surgir la lumière, soit on se rapproche d’un phénomène destructif, une
sorte de gouffre « mange-matière », « mange-lumière », un
gigantesque univers de trous noirs qui barrent l’horizon et absorbe toute l’énergie,
qui entoure finalement le monde entier de la matière et de la lumière, ce qui
pourrait alors expliquer qu’au fil du temps et des mesures, l’expansion de
l’univers visible semble s’accélérer.
Au choix.
Mais c’est certain, c’est là que vont les Krabitz. Et
ce qui est dingue, c’est qu’ils aient eu besoin de l’espèce Homo, dans ses
versions Sapiens, Plus, Ultra, peu importe, pour les y emmener alors qu’ils
auraient pu y être posés dès l’origine…
Il y a comme quelques incohérences originelles dans le
procédé.
À moins que…
À moins que ce soit le processus préféré dès l’origine.
Ni Paul ni Axel ne savent…
Totalement prodigieux.
Comment la petite troupe de Krabitz qui arrive dans
leur sillage pourra-t-elle faire face ?
C’est largement improbable compte tenu de la taille du
cône qui s’élargit au fil de leur avancée.
À moins d’un miracle inexplicable.
En attendant, la moisson des données cartographiques
en devient lui aussi prodigieux. Quelle distance ont-ils parcouru depuis leur
départ ?
2, 10, 20, 100 ou 1.000 fois plus grand que l’univers
visible ? Impossible à dire.
Combien de siècles, de millénaires, de milliers ou de
millions de millénaires se sont écoulés depuis leur départ dans le « temps-vrai »
?
À leur allure d’escargot, ça doit dépasser
l’entendement.
Et pourtant quoi ? Au compteur de Paul, à peine
quelques mois, une paire d’années terrestre se sont écoulés : sa montre et
son calendrier artisanal en témoignent, évidemment.
D’autant qui sait qu’il n’est pas éternel, qu’il
vieillit, plutôt pas très bien avec des « petites-douleurs »
jusque-là inconnues et ce n’est pas bon pour son moral.
S’il arrive à sa destination en deux ans et demi, il
en mettra autant pour revenir à son point de départ.
S’il revient : il ne sait pas ce qui l’attend,
même s’il a pu prendre connaissance de sa nécrologie qui ne dit pas la même
chose, et envisage tout et n’importe quoi, ce qui anime ses discussions avec
Axel : ils philosophent…
Car une des difficultés reste de retrouver les balises
déposées en chemin.
Axel lui explique que cette technique de navigation a
été abandonnée il y a bien des générations par les vaisseaux de la Légion et
les flottes commerciales, scientifiques et touristiques au profit d’un balisage
permanent des menaces qui parsèment les routes de l’espace dans une galaxie
donnée.
Parce qu’elle n’est valable que pour des parcours
relativement courts et rapides. Une balise, ça dérive dans le cosmos une fois
qu’elle est lâchée.
Et justement, ça dérive avec la menace qu’elle
signale, un peu comme un phare en mer posé sur un écueil.
« – Si vous
attendez trop longtemps, elle n’est plus là où on l’a posée.
– Tu la
perds ?
– Non,
les détecteurs de navigation la retrouve. Ce n’est pas ça le problème. Le problème
ce sont les objets qui circulent eux aussi dans le cosmos et qui ne sont pas
connus.
Comme vous
l’avez vu à plusieurs reprises, nous avons été arrêtés la plupart du temps sur
notre parcours par la présence de matière non détectée au départ. Qu’à chaque
fois, nous en avons profité pour remettre à niveau le vaisseau et refaire les
pleins d’énergie. Et encore, comme notre navigation n’était pas très précise,
nous on visait « au plus loin », sur les crêtes apparentes de
gravitation.
Mais vous
aurez noté que plusieurs fois, on est allé probablement plus loin, et plus
d’une fois on a dû reprendre la route à peu près dans la même direction. Alors
quand un convoi vous suit sans délai, pas de souci. À condition de lui indiquer
la route à suivre et les coordonnées des balises. C’est le rôle des sondes
qu’on renvoie à chaque étape.
Mais au
retour, où seront-elles, nos balises ?
– Tu veux
dire qu’elles auront pu dériver de telle sorte qu’on les perde où qu’elles nous
fassent croiser des obstacles qui n’étaient pas présents sur la route à l’aller.
– Plus on
attend, plus elles dérivent invariablement. Mais bon, il n’y a pas à
s’inquiéter outre mesure. C’est un modèle adapté à nos besoins et nos
détecteurs le sont tout autant. On les retrouvera, même les premières.
Moi, ce
qui m’inquiète, c’est la seconde hypothèse : un obstacle qui n’était pas
présent à l’aller, une fois dans la galaxie de départ.
– Oh bé
moi ça ne m’inquiète pas trop », crane alors Paul qui a confiance dans les
détecteurs du bord chargé de déspiner le neutronium.
Ah bon et pourquoi ça ?
« – Tu l’as
toujours prétendu : tu es plus intelligente que moi, tu trouveras bien une
solution.
–
Prétendu et démontré. Rappelez-vous de l’étape 95 ! Où vous vous êtes
comporté comme un imbécile, un primaire, propre à votre espèce. Aller en
découdre, il n’y a que ça qui compte pour vous ! »
s’enflamme-t-elle.
« – Tu peux
parler toi et ta légion qui s’apprêtait à génocider une espèce inconnue des
herboristes de ton espèce. Nul, oui !
– Il y
avait probablement des raisons que j’ignore. Si une telle opération a été
décidée, il fallait bien l’exécuter. C’est le rôle de la Légion, qui fait la
police dans le cosmos. Et il y a du travail avec tous ces pirates,
contrebandiers, trafiquants et autres voyous de l’espace.
–
Admettons. Un ordre, ça ne se discute pas, même quand ils sont stupides. J’ai
déjà payé de ma personne pour le savoir et à plusieurs reprises.
De toute
façon, que tu l’exécutes ou non après c’est toujours le bordel. Alors autant
choisir celui qu’on préfère…
– J’en
suis d’accord. Non, là ce qui m’inquiète, c’est que si nous avons le matériel
qu’il faut pour nous éviter les obstacles et savoir les détecter avec une marge
de manœuvre assez large, je ne sais pas bien si nous allons pouvoir récupérer
toutes nos sondes…
– Et
alors ? Quelle importance ? Il suffit d’en reprendre assez n’importe
où pour fermer définitivement le passage. Personne d’autre ne pourra nous
suivre à la trace. C’est dans notre mission.
– Ça je
sais. Ce n’est pas ce qui m’inquiète.
– Alors
quoi ?
– Si on
en loupe une, le vaisseau va poursuivre sa route jusqu’à épuisement ou
l’approche d’un nouvel obstacle.
– Pas de
problème. On saute à la suivante si l’une est dépassée.
– Et oui
et on fait comment pour savoir dans quelle direction ?
– On a
navigué à peu près tout droit…
– Non pas du tout. En
zigzag et en trois dimensions. Si on se perd, on ne saura jamais dans quelle
direction retrouver notre chemin… »
Ah oui, vu comme ça… inquiétant, effectivement !
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Ah oui, vu comme ça… inquiétant, effectivement !
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