Iran, USA et Arabie saoudite : La guerre du pétrole.
Les faits, tout d’abord : Fin juin, on apprenait que 4 navires avaient
été attaqués en mer d’Oman, à proximité du Golfe Persique.
Un mois plus tard, on s’interrogeait sur les suites à
donner à propos de cette attaque d’un drone d’observation US par l’Iran.
Depuis dimanche dernier, une nouvelle étape aura été franchie avec
l’attaque « aux drones » du plus grand site de raffinement du monde qui
en ressort passablement détérioré.
Et immédiatement, le prix du baril s’est envolé, comme jamais depuis 1991
(Guerre Irak/Koweït, racontée ici) !
Si on se demande à qui profite le crime, pas de doute, ce sont aux « marchés ».
En tout cas pas le consommateur final qui va encore se faire racketter
sans même pouvoir ramener sa mauvaise humeur…
Ceci dit, on vous avait promis un été chaud : il l’a été, mais au
mois de juillet seulement, et pas sur le front diplomatique mais heureusement seulement
sur le front climatique.
Quoiqu’avec les « twists » invraisemblables du président
américain, faisant et défaisant les cours de bourses, on s’est demandé jusqu’où
il pouvait aller quand il a proposé de racheter le Groenland. Et comme il n’a
fait aucune proposition sérieuse pour la « Corsica-Bella-Tchi-Tchi »,
on a tous compris que ce jour-là il n’avait pas « sa dose » ou avait
fumé la moquette de la Maison blanche enroulée dans les rideaux.
Il n’empêche, avec la dernière attaque, celle-ci revendiquée par la
rébellion houthie, justement tenant les bords de la mer d’Oman avec d’autres,
on entre de nouveau en domaine « terra incognita » !
Rappelons que les rebelles yéménites houthis, pratiquent un islam zaïdite
– certes chiite, tenu pour « hérétique » par ce sunnisme majoritaire en islam,
mais distinct des deux autres écoles du chiisme que sont ismaéliens (Aga-Khan)
et duodécimains (l’Iran) –, ceux qui revendiquent le bombardement par drones
interposés des installations pétrolières saoudiennes, ont réduit en quelques
minutes de moitié la production d’un royaume représentant à lui seul 5 % de la
production mondiale.
Que je me dis que finalement, nos économies mondiales sont bien fragiles
si seulement 19 impacts peuvent faire autant de dégâts et avoir de telles
conséquences…
Très logiquement, Riyad et Washington accusent Téhéran d’être à la
manœuvre. S’il n’est un secret pour personne que l’Arabie saoudite soutient
ouvertement le gouvernement yéménite « légal », il en est un autre voulant que
l’Iran fasse de même, plus discrètement mais de façon constante depuis 5 ans,
de la rébellion houthie.
Pour autant, on peut se demander si ces rebelles obéissent aveuglément au
régime de l’ayatollah Khamenei ?
Probablement que non. Ou pas plus que le Hezbollah libanais ou le Hamas
palestinien : Le soutien, à la fois militaire et financier, peut évidemment
influer tout en n’étant pas forcément donneur d’ordres pour autant.
En effet, les Libanais chiites du Hezbollah sont aussi arabes, alors que
les Iraniens sont perses. Et ils ont en principe du mal à se supporter.
Quant aux Palestiniens du Hamas, ils sont non seulement arabes, mais avant
tout sunnites. Et ils ont aussi autant du mal à se supporter.
De plus, ce jeu d’échecs obéit aussi à des objectifs politiques. Pour
résumer ce que chacun sait, si Riyad et Téhéran se disputent la légitimité
religieuse des Lieux saints (La Mecque au premier chef), les Arabes sunnites
s’inquiètent surtout de la mise en place d’un axe perso-chiite qui irait de
Téhéran à Beyrouth tout en passant par Bagdad et Damas, le tout avec un accès à
l’arme nucléaire…
En d’autres temps, les USA auraient eu tôt fait de verser dans la
politique de la canonnière tant le lobby anti-iranien était jusque-là puissant
à la Maison-Blanche, en tout cas jusqu’à l’éviction de John Bolton.
Mais, tout d’abord, le gaz de schiste américain, qui permet à Washington
d’espérer en finir d’avec sa dépendance pétrolière vis-à-vis de la dynastie
saoudienne, malgré le pacte du Quincy datant de 1945 et scellant
l’approvisionnement énergétique des USA par le royaume saoudien contre la
protection militaire de ce dernier, il est désormais moins impérieux pour
l’économie américaine.
Et depuis, le centre de gravité névralgique s’est déplacé ailleurs, vers
l’océan Pacifique, montée en puissance chinoise oblige ce qui rebat les cartes…
Donc, très logiquement « McDo-Trompe » tempère.
Ce qui entraîne une certaine panique jusqu’à Riyad (débutée avec l’affaire
« Tamagotchi »
à Istanbul).
Explications : Même si l’américain a donné un os à ronger à ses
puissants alliés sionistes, généralement issus du parti républicain, en
transférant l’ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem – mesure ne prêtant
guère à conséquence –, il l’a mauvaise, à en croire le 20 Minutes du 13
septembre dernier, quand ayant récemment appris que les services secrets
israéliens avaient mis la Maison-Blanche sur écoute : « Je n’y crois
pas. Je ne pense pas que les Israéliens nous espionnent. (…) Tout est
possible, mais je n’y crois pas », affirme-t-il de manière fort
diplomatique, tout en signifiant, à mots couverts, qu’il ne croit pas non plus
en ce qu’il dit.
Et puis c’est qu’au moment de ces « révélations », il s’en prend à la « déloyauté
» des « Juifs votant démocrate ». Ce qui n’a pas manqué de provoquer la
colère de l’American Jewish Committee (AJC), ayant qualifié cette déclaration
d’« inappropriée, pas bienvenue et véritablement dangereuse » (cf. Le
Huffington Post du 21 août).
Les USA seraient-ils donc en train de lâcher ces traditionnels alliés,
israéliens et saoudiens ? À défaut d’y croire, certains semblent le craindre.
Tel Aviv y survivra. Pour Riyad, c’est déjà moins certain. En attendant,
Téhéran peut se frotter les mains…
Réplique : « Nos armes sont chargées et prêtes à tirer, mais nous
attendons que le royaume nous dise qui, selon eux, est derrière cette attaque
», a réagi, dimanche 15 septembre 2019, le « ricain », comme s’il ne
savait pas déjà, puisque ce sont ses services qui fournissent les photos
satellites.
Du coup, ça crée une certaine confusion entre les États-Unis et l’Iran,
sur fond de tensions accrues dans le Golfe. Dimanche soir, le président
américain a de nouveau menacé les Iraniens de représailles militaires après la
double attaque contre des sites pétroliers saoudiens, sans toutefois nommer
l’Iran explicitement : « Le pétrole saoudien a été attaqué. Nous avons des
raisons de penser que nous connaissons le coupable. Nos armes sont chargées et
prêtes à tirer, mais nous attendons que le royaume nous dise qui, selon eux,
est derrière cette attaque, et dans quelles conditions nous allons procéder.
»
L’Arabie saoudite va inviter pour cela des experts régionaux et des
Nations unies à enquêter, a annoncé lundi le ministère des Affaires étrangères
saoudien.
Et toujours sans en tirer de conclusions explicites, les Américains ont
diffusé des images satellites qui semblent indiquer une implication iranienne
dans ces raids.
D’après ces photos des installations visées par le raid, qui portent 19
points d’impact, les frappes sembleraient venues du nord ou du nord-ouest, donc
plutôt des territoires irakien ou iranien que des zones tenues par les Houthis,
situées au sud-ouest de la péninsule Arabique. Toujours selon Washington, les
frappes auraient impliqué une combinaison d’un grand nombre de drones, mais
aussi de missiles de croisière, dépassant de toutes les façons les capacités
technologiques du mouvement rebelle yéménite.
Le secrétaire d’État américain Mike Pompeo en dit qu’il n’y avait « aucune
preuve que les attaques viennent du Yémen », sans donner plus d’indications
sur l’origine possible du raid. Quant au premier ministre irakien, Adel
Abdel-Mahdi, il a immédiatement téléphoné au chef de la diplomatie américaine
pour l’assurer que l’attaque n’avait pas été lancée depuis l’Irak.
Du coup les intentions américaines restent difficiles à déchiffrer.
Incroyable, leur président s’en remet aux Saoudiens pour décider de la
suite à donner aux attaques : Inédit !
Et lundi matin, le président américain a ajouté encore un peu de confusion
dans un nouveau message où il diminue l’importance de l’approvisionnement en
pétrole pour les États-Unis : « Nous sommes un exportateur net d’énergie, et
maintenant le premier producteur mondial d’énergie dans le monde. Nous n’avons
pas besoin du pétrole et du gaz du Moyen-Orient, avons en fait peu de
pétroliers là-bas, mais allons aider nos alliés »…
Les États-Unis vont « défendre l’ordre international » qui est « sapé
par l’Iran » après « l’attaque sans précédent » en Arabie saoudite,
a assuré le chef du Pentagone, Mark Esper.
Rappelons-nous que la défense de l’ordre international a justifié de jeter
hors du Koweït les irakiens grâce à une coalition quasi-mondiale, mais s’est
arrêtée à l’annexion de la Crimée par la Russie…
Et puis presque simultanément, « McDo-Trompe » a accusé dans un
autre message les médias d’avoir diffusé de fausses nouvelles en indiquant
qu’il était prêt à rencontrer « sans conditions » le président iranien
Rohani en marge de l’Assemblée générale des Nations unies la semaine prochaine
à New York. Or c’est justement la proposition qu’il a publiquement faite à au
moins deux reprises, la dernière fois le 30 juillet dans une conférence de
presse à la Maison-Blanche.
Et cette proposition a été répétée la semaine dernière par plusieurs
membres de son Administration, dont Mike Pompeo et le secrétaire d’État au
Trésor.
Des messages contradictoires qui donnent l’impression d’une certaine
confusion dans le processus de décision américain, qui semble plus obéir aux
impulsions du président que d’une stratégie réfléchie.
Rappelez-vous, le 20 juin dernier, le président américain avait ordonné
des frappes de représailles après qu’un drone de surveillance américain eut été
abattu au-dessus du Golfe par un missile antiaérien iranien. L’opération de
représailles, qui visait des sites de lancement de missiles et des bases iraniennes
sur le Golfe, avait été annulée une dizaine de minutes seulement avant son
déclenchement, alors que les appareils américains avaient déjà pris l’air et
que les bâtiments de l’US Navy étaient prêts à lancer leurs missiles de
croisière.
D’après les médias américains, le secrétaire d’État Mike Pompeo et la
directrice de la CIA Gina Haspel auraient été en faveur de ce raid de
représailles, ainsi que le conseiller à la sécurité nationale, John Bolton,
démis de ses fonctions depuis…
Le Pentagone aurait en revanche mis en garde le président contre des
risques d’escalade incontrôlables dans toute la région. Le départ de John
Bolton, l’un des plus ardents partisans d’une ligne dure vis-à-vis de l’Iran,
aurait pu laisser penser que les tensions avec Téhéran allaient baisser en
intensité.
Et, semble-t-il, elles sont « relancées » par yéménites
interposés.
Et la difficulté à déchiffrer les intentions du président américain fait
courir le risque d’une erreur d’interprétation par différents protagonistes, et
notamment par Téhéran, accroissant le danger d’une escalade militaire.
Manifestement, il y en a qui pense tirer leurs marrons du feu de ce « jeu-là ».
L’éviction de John Bolton, conseiller à la Sécurité nationale, a fait
l’effet d’une bombe. À moins que ce ne soit celui d’un pétard mouillé, l’homme
étant depuis longtemps, pour la diplomatie américaine, devenu plus frein que
moteur.
Ainsi l’homme est-il plus encore faucon que les faucons républicains, même
si, pour couper à la guerre du Vietnam, dont il était pourtant fervent
partisan, il avait jugé plus prudent de s’engager dans la Garde nationale :
chasser les braconniers plutôt que les communistes…
Plus récemment, il entend bombarder l’Iran à titre préventif, envahir le
Venezuela, tout en n’ayant rien contre une guerre avec la Corée du Nord.
Bref, une sorte de docteur Folamour.
L’avantage, avec le fantasque locataire de la Maison-Blanche, est qu’à
force de prétendre tout et son contraire tout en faisant à peu près n’importe
quoi, c’est que, statistiquement, il puisse lui arriver de surprendre, même en
bien. Surtout qu’il refuse, depuis le début de son mandat, de se sentir tenu
par tel ou tel groupe de pression.
Du point de vue sionisme de combat mâtiné de bellicisme néoconservateur,
il faut bien avouer qu’entre le ci-devant John Bolton, Mike Pompeo – le
prochain à virer ? – et Jared Kushner, son gendre, les quotas affichaient
complet.
D’où ce rééquilibrage en interne.
L’autre avantage, avec l’ancien magnat de l’immobilier, demeure son inculture
encyclopédique des affaires du vaste monde : Imperméable aux idéologies du
moment, il préfère creuser le sillon du pragmatisme.
De l’Iran, il n’a pas une vision politico-religieuse, à l’instar de la
galaxie évangéliste, ayant tendance à se comporter, fort de son messianisme,
dans les hautes sphères de l’État-profond américain comme si elle était chez
elle.
Ce qui à ce président permet de menacer, un jour, la Perse de ses foudres,
tout en lui proposant, le lendemain, une rencontre cordiale au sommet, avec le
président Hassan Rohani. Le tout sans la moindre « condition préalable
», foucade qui fait plus que tousser dans une administration habituée à plus de
constance en matière de politique étrangère…
On en a pris l’habitude avec le Coréen « Kim-tout-fou » et même
avec Pékin, un jour des « potes », le lendemain des « petites-bites »
(ou inversement).
John Bolton, donc, tenant de la lutte entre « l’Empire du Bien » (lui) et
« l’Axe du Mal » (les autres), stigmatisait récemment la « troïka de la
tyrannie » – Cuba, Venezuela et Nicaragua – comme si ces trois pays
allaient envahir les USA.
C’est le même qui appelait de ses vœux à un changement de régime à
Téhéran, capitale coupable de « terrorisme », alors que ce sont précisément les
soldats iraniens, leurs supplétifs du Hezbollah libanais et leurs alliés russes
qui ont militairement défait l’État islamique, organisation terroriste s’il en
est, financée par l’Arabie saoudite, le très riche vassal des mêmes USA.
Comme vous le pressentez, tout cela n’est pas très cohérent et ne tient
pas debout.
Même « McDo-Trompe » a fini par s’en rendre compte : Les
situations, même les plus délicates, peuvent aussi se comprendre d’instinct.
Et parfois, mieux vaut un rustaud mal dégrossi qu’un intellectuel pointu
et dogmatique.
C’est ce qu’ont manifestement entendu les autorités iraniennes qui, tout
d’abord désarçonnées par la manière toute personnelle dont « Trompe »
envisageait les relations diplomatiques, semblent aujourd’hui lui accorder une
oreille plus bienveillante. En quelques milliers d’années d’Histoire, la Perse
sait, mieux que d’autres nations plus jeunes, ce que signifient les rapports de
force.
Quant à l’américain, force est d’avouer qu’il apprend vite. Très vite.
Même de l’inimitable façon qui est la sienne.
Ce qui ne répond pas à notre question : Si le tir des drones a été
revendiqué par les rebelles yéménites, chacun sait qu’ils n’ont pas la
technologie indispensable. On est loin des jouets qui se pilotent avec un
smartphone, naturellement.
Et il faut pouvoir déjouer les défenses antiaériennes dans les derniers
kilomètres comme les détections sur des centaines de kilomètres en amont…
De plus, les azimuts de pénétration du territoire de l’Arabie saoudite ne
semblent pas compatibles avec les territoires des rebelles.
Il s’agit donc, une nouvelle fois, comme en juin dernier avec les navires
attaqués, d’une opération « sous fausse bannière », mais revendiquée
cette fois-ci.
Revendication qui peut être le fruit d’une manipulation, naturellement.
On en revient à la question de départ : À qui profite le crime (hors « les
marchés ») ?
Je ne vais pas être long à vous répondre.
À tous ceux qui souhaitent la destruction du régime des Mollahs Chiites
iraniens, bien entendu.
Or, si ce n’est plus les « faux-kons » étasuniens (ils ont
éjecté leur boutefeu en chef, décapité), c’est probablement « l’état-profond »
prosioniste qui gouverne en sous-main.
Forcément les « maîtres du monde », en tout cas ceux qui se
pensent tels, défendant « becs et ongles » l’existence d’Israël (qu’ils
pensent menacée).
Et comme en juin, ils usent de tous les moyens à disposition pour embraser
le Golfe.
Comme par ailleurs, « Trompe », l’idiot-utile du moment, se
verrait bien en guerre pour renouveler son mandat en novembre (le peuple « ricain »
fait corps avec son chef des armées en période de guerre), si ce coup-là n’est
pas le bon, pas suffisant, attendez-vous à de nouvelles attaques dans les
semaines à venir.
Pas de chance pour votre porte-monnaie, figurez-vous !
À suivre, naturellement…
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