Les héritiers politiques...
Je poursuis cette reprise en trois épisodes originels.
On reprend la suite de l'autre jour… en ce énième
anniversaire de l’appel du 18 juin, mais en rétropédalant, justement !
Le gaullisme a commencé pendant la dernière guerre,
comme d’un mouvement uniquement patriotique.
Il a rassemblé alors autour du général de Gaulle (deux
étoiles « bas de gamme »), les hommes de toutes tendances politiques qui
voulaient lui apporter leur appui pour continuer le combat contre Hitler et le
fascisme aux cotés des Alliés et rejeter l’armistice conclu par le maréchal « Pétain-aux-pleins-pouvoirs
» d’une politique de centre-gauche molle de ses échecs et de ses impuissances.
À partir de juillet et d’octobre 1940, De Gaulle a
rejeté en outre les lois inconstitutionnelles, répressives et racistes
instituées par Pétain, mais s’est érigé, tout seul, en défenseur de la légalité
républicaine.
Fallait du culot, lui qui était condamné à mort par
les Pétainistes…
Les gaullistes qui le pouvaient ont alors rejoint les
territoires britanniques pour s’engager dans les Forces Françaises Libres et
combattre aux coté des Alliés, ou bien ils ont déclenché les mouvements de
ralliement de diverses colonies françaises qui sont rentrées en guerre sous l’autorité
de De Gaulle.
Les autres gaullistes, ceux qui ne pouvaient le rejoindre
(c’est-à-dire la majorité) sont restés dans les territoires dirigés par Vichy,
où certains d’entre eux ont pu constituer des réseaux de propagande, de
renseignements ou de sabotage contre l’occupant.
Finalement toutes ces organisations de résistance, y
compris communiste, ont été rassemblées par Jean Moulin, au sein du Conseil
national de la Résistance (CNR), sous les ordres du général De Gaulle qui a
transformé son mouvement de France libre en France combattante, pour y
rassembler les résistants de l’extérieur et de l’intérieur.
Mais De Gaulle ne s’était pas contenté de maintenir
une partie des Français dans la lutte contre l’occupant nazi : Il a aussi tout
fait pour reconquérir la souveraineté française dans le camp allié, contre
certaines pressions des gouvernants anglais et surtout américains qui ont
longtemps joué contre lui la carte vichyste (salopard de Roosevelt !).
D’où une certaine méfiance à l’égard des alliés US,
ressentie également par la population pendant les raids aériens pratiqués « à l’aveugle
» (alors que, si nombre de français n’ont pas accepté Mers-El-Kabîr et la
destruction de la flotte, les raids aériens nocturnes [RAF] étaient nettement
mieux ciblés).
Lors de la Libération, la Résistance française a
multiplié ses actions et paralysé les tentatives de riposte allemande au
débarquement. Quant à la population française, elle a heureusement accueilli De
Gaulle en triomphateur, forçant ainsi Roosevelt à reconnaître enfin pleinement
le gouvernement provisoire installé en France par le Général.
Et De Gaulle, après avoir atteint son but de guerre et
restauré la démocratie, a critiqué le régime des partis qui avait été selon lui
pour la France, avant la guerre, une source de faiblesse, et préconisé l’instauration
d’un système cumulant une démocratie souveraine avec un exécutif fort (Discours
de Bayeux en 1946, première sous-préfecture libérée en « Gauloisie »
métropolitaine… après celle de Bastia).
Hélas, au lieu de comprendre le message, les partis
politiques, objets de ses critiques, se sont défendus et il s’est considéré, ne
pouvant appliquer son programme, comme contraint à la démission.
D’où la IVème république, restaurant et
augmentant le rôle des partis dans un régime dit « de partis ».
C’est à ce moment-là que le « gaullisme » a alors pris
une autre signification : Il a cessé d’être un mouvement de résistance et de
rétablissement de la démocratie.
Le gaullisme est devenu un mouvement politique décidé
à soutenir les idées de Charles de Gaulle sur la nécessité d’un pouvoir
démocratique fort, auquel on avait ajouté un volet social : La volonté d’associer
le capital et le travail.
Certains anciens vichystes se sont ralliés au
gaullisme comme d’anciens cadres communistes, tandis que certains de ses
compagnons de lutte de la France libre et de la résistance qui avaient pris
position à gauche, ont combattu son Rassemblement du peuple français (RPF).
Comme la Quatrième République a rapidement évolué dans
le sens d’un régime de prépondérance de l’Assemblée, avec des gouvernements de
coalitions éphémères ne parvenant pas à prendre de décisions, les gaullistes l’ont
évidemment combattu sans merci associant parfois leurs voix au Parlement à
celles des communistes.
Le régime de la IVème République, affaibli
par l’incapacité de ses gouvernements de coalition à résoudre les problèmes
sociaux et économiques malgré l’extraordinaire Pinay, des Schuman et tant d’autres
acharnés à créer la CEE, a échoué lamentablement pour résoudre celui de la
décolonisation.
Après un sursaut sous la présidence du Conseil de
Pierre Mendès France (ancien aviateur de la France Libre, puis ministre de De
Gaulle au Comité d’Alger [CFLN] et au gouvernement provisoire), qui a réussi à
mettre fin pour la France à la guerre d’Indochine et à décoloniser la Tunisie,
la IVème République a sombré à nouveau dans l’immobilisme politique.
L’insurrection algérienne a entrainé une répression
militaire féroce et indigne, puis un divorce de la métropole, non seulement
avec les « indigènes », mais aussi avec les Français d’Algérie, jusqu’à la
tentative de coup d'État du 13 mai 1958 fomenté à Alger, par des activistes de
droite, d’extrême droite et de l’armée, encouragés par la population
métropolitaine locale.
Le gouvernement central a été incapable de riposter à
ce mouvement et a affecté de le prendre sous son égide en nommant le commandant
en chef Salan rallié aux rebelles comme son représentant en Algérie.
De Gaulle, avec son statut d’ancien libérateur, a paru
alors à un très grand nombre comme le seul recours possible pour rétablir la
République menacée et le Président de la République René Coty l’a appelé à
prendre la Présidence du Conseil.
Il a pris les commandes du pays, avec plus ou moins de
bonheur, s’est taillé une Constitution sortie en droite ligne du Discours de
Bayeux prononcé 12 ans plus tôt, a profondément modifié la fiscalité et l’organisation
des services publics, sans heurt ni violence, dès l’année suivante.
Puis il a fait modifier la constitution toute neuve
pour renforcer la légitimité du Chef de l’État par un vote au suffrage
universel à deux tours : Les Présidentielles, transformant les institutions
exécutives en une sorte d’hydre à deux têtes !
C’était bien vu, puisque ce fonctionnement a survécu à
trois cohabitations, c’est dire tout le « génie » de cette astuce-là !
Les successeurs de Charles de Gaulle – Georges
Pompidou, Jacques Chirac,… – ont toutefois normalisé le programme gaulliste
en l’alignant sur celui des droites européennes (capitalisme libéral,
atlantisme, Europe supranationale, etc.).
On parle alors parfois de « néo-gaullisme » et non
plus de gaullisme. Ainsi, le néo-gaullisme moderne n’a gardé du gaullisme que l’idée
d’une France forte au sein d’une Europe indépendante.
Pour virer leur cuti une fois remisés dans l’opposition.
La mutation fondamentale est intervenue sous les
présidences de Georges Pompidou et de « Giskard à la barre », nettement plus
atlantistes que le « niet » gaulliste aux Anglais, et s’est poursuivie dans la
première moitié des années 1980 sous l’ère « Mythe-errant ».
On sait aujourd’hui que l'amitié « Giskard/Gérald Ford
» était bien plus poussée qu’il n’y en avait l'air. Nos chercheurs atomistes
ont gagné de précieuses années de recherche pour rendre la « bombe » atomique
nationale beaucoup plus opérationnelle qu’elle ne l'était au tout début : On
parlait même de « bombe propre », dite bombe à neutron, me souvins-je.
Mais, la rapide diffusion à travers le monde des idées
du libéralisme économique sur les modèles britannique (1979) et américain
(1980), la mise en place du « protocole de Washington » dans le sillage de l’école
de Chicago, parallèlement à l’affrontement idéologique avec les gouvernements
socialistes de la présidence de « Mythe-errant » (après 1981), ont entraîné la
conversion de la majorité du RPR au libéralisme économique, tournant le dos au
« tiercérisme gaulliste ».
Les mesures du gouvernement Jacques Chirac de 1986 –
1988 (première cohabitation) en sont la parfaite illustration.
La seconde grande mutation intervient avec la
conversion officielle du RPR à l’idée européenne, suite au revirement total de
Jacques Chirac sur cette question (en sens inverse de l’appel de Cochin), avec
en particulier la campagne menée par lui, contre une minorité menée par Charles
Pasqua et Philippe « Sait-gain », en faveur du traité de Maastricht.
Le RPR regroupait alors trois tendances : Une aile
libérale (Édouard Balladur, Nicolas Sarkozy) dont les idées libérales,
européennes et atlantistes ne se différenciaient plus de celles de la droite
libérale classique incarnée par une partie de l’UDF.
Une aile gaulliste classique (Charles Pasqua, Philippe
Sait-gain), à la fois plus sociale et plus nationaliste (presque «
souverainiste »), et proche du gaullisme historique des années 1950-1960.
Enfin un « centre » incarné par Jacques Chirac, qui
oscille entre le libéralisme et un humanisme hérité du radicalisme ou du
gaullisme (et sa fameuse « fracture sociale »).
Cependant, la puissance de l’influence libérale sur l’ensemble
des mouvements politiques de droite (et aussi de gauche) à travers le monde,
mais aussi la difficulté, 20 ou 30 ans après la mort du Général, à imaginer ce
qu’aurait été la politique de De Gaulle, ont conduit le RPR à se banaliser au
sein des droites européennes.
La conséquence logique en a été la fusion avec l’UDF
et la création du Nouveau Centre plus récente et du Modem comme autant d’avatars.
Après l’élection présidentielle de 2002, le mouvement
« gaulliste » Rassemblement pour la République (RPR) se dissous dans un grand
parti de droite : L’Union pour un mouvement populaire (UMP), d’abord baptisé
Union pour une Majorité Présidentielle : Un outil efficace de propagande.
Notons que depuis la disparition du RPR, des mouvements
revendiquent le maintien de la doctrine gaulliste.
Certains sont associés ou proches de l’UMP comme le
Mouvement Initiative et Liberté, le cercle Nation et République, les comités
Notre République, le club Nouveau Siècle, l’Union des démocrates pour le
progrès (UDP), ou Le Chêne (créé par Michèle Alliot-Marie en 2006).
De son côté, Debout la République, fondé en 1999 par « Nicolas
Du-Pont-Gnangnan », a été un mouvement associé à l’UMP jusqu’au départ de
celui-ci dans le but de défendre ses idées indépendamment.
D’autres ont convergé avec des personnes ou des
mouvements héritiers de la gauche jacobine (Jean-Pierre Chevènement) autour de
valeurs communes souverainistes et sociales.
Les partisans d’une ligne indépendante se sont eux
regroupés en de multiples associations et clubs de réflexion, tels que
Initiative Gaulliste, l’Union gaulliste, l’Union gaulliste pour une France
républicaine, l’Action pour le renouveau du gaullisme et de ses objectifs
sociaux, le Cercle Jeune France ou l’Académie du Gaullisme, que l’Union du
peuple français a réunifié pour partie d’entre eux.
La transformation du RPR en UMP, parti dominant dans
la droite française avec un programme nettement libéral et pro-européen
(impulsé par « Bling-bling ») pose, dans les premières années du XXIème
siècle la question de la pérennité du gaullisme dans la vie politique
française.
Le remplacement de Jacques Chirac par Nicolas Sarkozy
à la présidence de la République en 2007 marque pour beaucoup la fin du
gaullisme : La CIA aura finalement eu sa peau !
Mais les idées demeurent et seront restaurées un jour
ou l’autre, sous une forme ou une autre, malgré l’émiettement des courants
gaullistes.
Notamment, ce discours télévisuel du début d'année [2009]
de « Bling-bling » sur le partage de la « valeur ajoutée » en trois tiers, est
nettement gaulliste dans la lettre.
Malheureusement, cet homme-là ne comprend strictement
rien à l’esprit du « tercérisme », est fâché avec les « chiffres » et même avec
la « lettre » du droit et de la loi !
Il manque de hauteur, il manque de « vision » et se
perd dans une « soif de réformes inétanchable » qui non seulement donne le
tournis, mais également donne l’impression d’un « grand désordre dans sa tête
», happé qu’il est par la « l'événementocratie » et les sunlights des médias !
C’est tout juste un « pipol » qui compense sa faible
taille physique et son nanisme intellectuel par un besoin de reconnaissance
démesuré : Très, très loin de ce qu’est un « gaulliste ».
Presque son « image négative » comme d’une photo sur
pellicule argentique…
Dommage !
Un, parce qu’il a donné le change durant toute sa
campagne électorale, qui a été longue : Presque un « sans faute » ;
Deux, parce que justement, après les années d’immobilisme
chiraquien face à la « montée des périls », on avait tous envisagé avec
bonheur, une refonte du monde politique et de ses institutions.
Or, pour l’heure, et 25 mois après son élection, force
est constater que « les réformes » n’ont jamais abouti qu’à des « pets de lapin
» sans grande influence sur le quotidien des gaulois, en « claquant du pognon
qu’on n’a pas » en plus, et en tuant toute opposition politique digne (pour
faire le bonheur de mouvement internationalistes « alter-quelque-chose » propre
à décomposer l’idée centrale du gaullisme qu’est la Nation) : La synthèse de l’exact
inverse du gaullisme en somme !
Nous en reparlerons.
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