Sauf opposition pour motif tenant à une situation
particulière…
En tout cas, c’est ce que vous raconte la loi.
Le problème c’est qu’on ne sait pas trop ce que
recouvre la « notion d’intérêt légitime tenant à une situation
particulière » qui conditionne le droit d’une personne à s’opposer à ce
que ses données personnelles soient traitées.
Dans l’arrêt ci-dessous reproduit, Le Conseil d’État
nous explique même que ce droit est « subordonné
à l’existence de raisons légitimes tenant de manière prépondérante à sa
situation particulière ».
En conséquence, une mère de famille inquiète pour « sa
nichée » de ce que ces « fichages » pouvait devenir, se bornant
à invoquer des craintes d’ordre général concernant notamment la sécurité du
fonctionnement d’une base de données de l’Éducation nationale, sans faire état
de considérations qui lui seraient propres ou seraient propres à ses enfants,
ne justifiant d’aucun « motifs légitimes » de nature à justifier
l’opposition au traitement des données de ses enfants est allé se faire torcher
proprement…
Conseil d’État, 10ème – 9ème ch.
réunies, décision du 18 mars 2019
Mme B. / l’État
(La procédure :)
Mme B. a demandé au tribunal administratif de Paris
d’annuler pour excès de pouvoir la décision du 26 novembre 2010 par laquelle
l’inspecteur d’académie, directeur des services départementaux de l’éducation
nationale, a rejeté son opposition à l’enregistrement et la conservation des
données personnelles relatives à ses enfants dans la « Base élèves premier degré » (BE1D) et
la « base nationale identifiant élève » (BNIE), ainsi que la décision du
25 mars 2011 rejetant son recours hiérarchique.
Par un jugement n° 1121985 du 12 juillet 2013, le
tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 13PA03582 du 16 juin 2015, la cour
administrative d’appel de Paris a, sur appel de Mme B., annulé ce jugement
ainsi que la décision du 24 novembre 2010 portant rejet de l’opposition de Mme B.
à l’enregistrement et la conservation des données personnelles relatives à ses
enfants dans la « Base élèves premier degré » (BE1D) et la « base nationale identifiant élève »
(BNIE) et enjoint à la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement
supérieur et de la recherche de statuer sur les oppositions formées le 18
octobre 2010 par Mme B., sous réserve que celles-ci n’aient pas perdu leur
objet, dans un délai de trois mois à compter de la notification de son arrêt.
Par une décision n°392145 du 27 juin 2016, le Conseil
d’État, statuant au contentieux a annulé cet arrêt de la cour administrative
d’appel de Paris et lui renvoyé l’affaire.
Par un nouvel arrêt n°16PA02163 du 25 octobre 2016, la
cour administrative d’appel de Paris a, d’une part, prononcé un non-lieu à statuer
sur les conclusions de Mme B. tendant à l’annulation des décisions du 26
novembre 2010 et du 25 mars 2011 en tant qu’elles ont rejeté son opposition à
voir enregistrer et conserver les données personnelles relatives à ses enfants
dans la « Base élèves premier degré » (BE1D) et à l’annulation du jugement
du 12 juillet 2013 du tribunal administratif de Paris dans cette mesure et,
d’autre part, annulé ce jugement en tant qu’il a rejeté les conclusions tendant
à l’annulation des mêmes décisions rejetant l’opposition concernant la « base
nationale identifiant élève » (BNIE) mais, statuant par la voie de l’évocation,
rejeté ces conclusions.
Procédure devant le Conseil d’État :
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire,
enregistrés les 26 décembre 2016 et 24 mars 2017 au secrétariat du contentieux
du Conseil d’État, Mme A. demande au Conseil d’État :
1°) d’annuler cet arrêt ;
2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à son
appel ;
3°) de mettre à la charge de l’État la somme de 3 500
euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
– la Constitution, notamment son Préambule ;
– la convention européenne de sauvegarde des droits de
l’homme et des libertés fondamentales ;
– la convention internationale relative aux droits de
l’enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;
– la charte des droits fondamentaux de l’Union
européenne ;
– la directive n° 95/46/CE du Parlement européen et du
Conseil du 24 octobre 1995 ;
– le code de l’éducation ;
– la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;
– la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
– le décret n° 2005-1309 du 20 octobre 2005 ;
– l’arrêté du 20 octobre 2008 portant création d’un
traitement automatisé de données à caractère personnel relatif au pilotage et à
la gestion des élèves de l’enseignement du premier degré ;
– le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de Mme Isabelle Lemesle, conseiller d’État,
– les conclusions de Mme Aurélie Bretonneau, rapporteur
public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les
conclusions, à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de Mme B.;
Considérant ce qui suit :
(Les
faits :)
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du
fond que Mme B. s’est opposée le 18 octobre 2010, sur le fondement de l’article
38 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux
libertés, à la collecte et au traitement dans la « base élèves premier degré » (BE1D) et
la « base nationale identifiant élève » (BNIE) de données relatives à ses
enfants scolarisés dans une école primaire du 18ème arrondissement
de Paris. Sa demande a été rejetée par une décision du 24 novembre 2010 de
l’inspecteur d’académie, directeur des services départementaux de l’éducation nationale
en charge du premier degré, confirmée par une décision du 25 mars 2011 prise
par la même autorité en réponse à un recours hiérarchique adressé au recteur de
l’académie de Paris. Mme B. se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 25
octobre 2016 par lequel la cour administrative d’appel de Paris a, d’une part,
jugé qu’il n’y avait plus lieu de statuer sur ses conclusions tendant à
l’annulation de ces deux décisions en tant qu’elles concernent la « Base
élèves premier degré » et, d’autre part, après avoir annulé pour irrégularité
le jugement du 12 juillet 2013 du tribunal administratif de Paris rejetant sa
demande d’annulation de ces deux décisions en tant qu’elles concernent la « base
nationale identifiant élève » , a rejeté les conclusions tendant à
l’annulation dans cette mesure de ces décisions.
(La
leçon de droit :)
2. L’article 6 de la loi du 6 janvier 1978 relative à
l’informatique, aux fichiers et aux libertés dispose, dans sa rédaction
applicable au litige, que : « Un traitement ne peut porter que sur des
données à caractère personnel qui satisfont aux conditions suivantes : / 1° Les
données sont collectées et traitées de manière loyale et licite ; / 2° Elles
sont collectées pour des finalités déterminées, explicites et légitimes et ne
sont pas traitées ultérieurement de manière incompatible avec ces finalités (…)
; / 3° Elles sont adéquates, pertinentes et non excessives au regard des
finalités pour lesquelles elles sont collectées et de leurs traitements
ultérieurs ; (…) 5° Elles sont conservées sous une forme permettant
l’identification des personnes concernées pendant une durée qui n’excède pas la
durée nécessaire aux finalités pour lesquelles elles sont collectées et
traitées » .
L’article 38 de la même loi dispose : « Toute personne physique a le droit de s’opposer,
pour des motifs légitimes, à ce que des données à caractère personnel la
concernant fassent l’objet d’un traitement. / Elle a le droit de s’opposer,
sans frais, à ce que les données la concernant soient utilisées à des fins de
prospection, notamment commerciale, par le responsable actuel du traitement ou
celui d’un traitement ultérieur. /Les dispositions du premier alinéa ne
s’appliquent pas lorsque le traitement répond à une obligation légale ou
lorsque l’application de ces dispositions a été écartée par une disposition
expresse de l’acte autorisant le traitement ».
L’article 97 du décret du 20 octobre 2005 pris pour
l’application de cette loi précise que « le responsable du traitement auprès duquel le droit d’opposition a été
exercé informe sans délai de cette opposition tout autre responsable de
traitement qu’il a rendu destinataire des données à caractère personnel qui
font l’objet de l’opposition ».
(La
discussion :)
Sur les conclusions dirigées contre l’arrêt en tant
qu’il concerne la « Base élèves premier degré » :
3. En vertu de l’article 5 de l’arrêté du 20 octobre
2008 qui a créé le traitement automatisé de données à caractère personnel,
dénommé « Base élèves premier degré »,
dans sa version applicable au litige, « Les données à caractère personnel
recueillies seront conservées suivant les dispositions suivantes : / 1. Pour ce
qui concerne les données relatives aux autorisations, aux assurances scolaires
et aux activités périscolaires, leur conservation n’excédera pas l’année
scolaire en cours ; / 2. Pour ce qui concerne les autres données appartenant
aux catégories visées aux I à III de l’article 3, seule sera conservée la
dernière mise à jour de chaque année scolaire ; / 3. Pour ce qui concerne les
autres données visées au IV de l’article 3, les mises à jour successives de
chaque année scolaire seront conservées. / La durée maximum de conservation des
données dans Base élèves premier degré n’excédera pas le terme de l’année
civile au cours de laquelle l’élève n’est plus scolarisé dans le premier degré
».
4. Il résulte de ces dispositions que la durée de conservation
des données dans la « Base élèves
premier degré » ne peut, en tout état de cause, excéder la fin de l’année
civile au cours de laquelle l’élève a cessé d’être scolarisé dans le premier
degré. La circonstance que les données concernant un élève ont cessé d’être
conservées dans le traitement prive d’objet les conclusions à fin d’annulation
pour excès de pouvoir de la décision qui avait refusé de faire droit à
l’opposition à ce traitement, demandée sur le fondement de l’article 38 de la
loi du 6 janvier 1978, sans qu’ait d’incidence le fait que les données en cause
aient pu être transférées vers d’autres traitements vis-à-vis desquels s’exerce
le droit d’opposition.
5. Il s’ensuit qu’en jugeant qu’il n’y avait plus lieu
de statuer sur les conclusions tendant à l’annulation pour excès de pouvoir des
décisions attaquées en tant qu’elles rejetaient l’opposition de Mme B. à
l’enregistrement et à la conservation des données personnelles relatives à ses
enfants dans la « Base élèves premier degré » , au motif qu’il
ressortait des pièces du dossier qui lui était soumis que, postérieurement à
l’introduction de la requête, ces données avaient été effacées de ce traitement
en application des dispositions citées au point 3, la cour administrative
d’appel, qui n’avait pas à rechercher si ces données avaient été transférées
vers d’autres traitements, n’a pas méconnu son office ni entaché son arrêt
d’erreur de droit.
6. La cour administrative d’appel, alors que le dossier
qui lui était soumis comprenait notamment des certificats de scolarité produits
par la requérante, n’a pas davantage méconnu son office en prescrivant une
mesure d’instruction aux fins de vérifier s’il y avait toujours lieu de statuer
sur la requête d’appel, quand bien même aucune partie n’avait conclu au
non-lieu à statuer. En faisant application de l’article 5 de l’arrêté du 20
octobre 2008 en vertu duquel la durée maximale de conservation des données dans
le traitement en cause n’excède pas le terme de l’année civile au cours de
laquelle l’élève n’est plus scolarisé dans le premier degré, sans répondre au
moyen inopérant tiré de ce que la modification de cette durée de conservation
aurait dû faire l’objet d’une déclaration à la Commission nationale de
l’informatique et des libertés, la cour administrative d’appel n’a entaché son
arrêt ni d’insuffisance de motivation ni d’erreur de droit.
7. Enfin, le prononcé d’un non-lieu alors que la
requête est devenue sans objet n’a nullement pour effet de priver le requérant
de l’exercice du droit à un recours effectif. Il résulte de ce qui a été dit
précédemment que la requête de Mme B., en tant qu’elle tendait à l’opposition
au traitement des données personnelles de ses enfants dans la « Base élèves premier degré »,
avait perdu son objet dès lors que ces données avaient été effacées du
traitement en cause. Le moyen tiré de ce que l’arrêt attaqué porterait atteinte
au droit à exercer un recours effectif garanti par l’article 16 de la
Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ou par la convention européenne
de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ne peut, dès
lors, qu’être écarté.
(L’ergotage supplétif
:)
Sur les conclusions dirigées contre l’arrêt en tant
qu’il concerne la « Base nationale
identifiant élève » :
8. En premier lieu, la circonstance que le signataire
d’un mémoire en défense tendant seulement au rejet d’un recours pour excès de
pouvoir n’aurait pas disposé d’une délégation régulière de signature est sans
incidence sur l’issue du litige. Il en résulte que le moyen soulevé par Mme B.
devant la cour administrative d’appel, mettant en cause la régularité de la
délégation de signature dont était titulaire le signataire des mémoires en
défense produits devant le tribunal administratif, était inopérant. Il ne
saurait, dès lors, être utilement reproché à la cour d’avoir insuffisamment
motivé sa décision en écartant ce moyen. La cour n’a pas davantage entaché son
arrêt d’irrégularité en écartant le moyen tiré de ce que la décision du 25 mars
2011 était entachée d’incompétence sans répondre à l’argument tiré de ce que
l’inspecteur d’académie, auteur de la décision initiale, n’était pas compétent
pour rejeter le recours hiérarchique adressé au recteur d’académie.
9. En deuxième lieu, l’article 4 de la loi du 12 avril
2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec
l’administration, alors applicable, dispose que : « Toute décision prise par l’une des autorités administratives
mentionnées à l’article 1er comporte, outre la signature de son
auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité
de celui-ci ». La seule circonstance que la copie d’une décision ne
comporte pas la signature de son auteur n’est pas de nature à établir que la
décision elle-même n’aurait pas satisfait aux exigences résultant de l’article
4 de la loi du 12 avril 2000. La cour administrative d’appel n’a, dès lors, pas
commis d’erreur de droit en jugeant que la circonstance que la copie de la
décision du 24 novembre 2010 ne comportait pas la signature de son auteur était
dépourvue d’incidence sur la légalité de la décision.
(Le fond enfin :)
10. En troisième lieu, il résulte des dispositions de
l’article 38 de la loi du 6 janvier 1978, citées au point 2, que le droit
qu’elles ouvrent à toute personne physique de s’opposer pour des motifs
légitimes à ce que des données à caractère personnel la concernant fassent
l’objet d’un traitement est subordonné à l’existence de raisons légitimes
tenant de manière prépondérante à sa situation particulière. En relevant,
sans se méprendre sur la portée des écritures de la requérante, que, pour faire
opposition au traitement des données concernant ses enfants, Mme B. se bornait
à invoquer des craintes d’ordre général concernant notamment la sécurité du
fonctionnement de la base, sans faire état de considérations qui lui
seraient propres ou seraient propres à ses enfants, pour en déduire qu’elle ne
justifiait pas de motifs légitimes de nature à justifier cette opposition, en
application de l’article 38 de la loi du 6 janvier 1978, la cour administrative
d’appel n’a pas entaché son arrêt d’erreur de droit.
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B. n’est
pas fondée à demander l’annulation de l’arrêt qu’elle attaque.
12. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de
justice administrative font, par suite, obstacle à ce qu’une somme soit mise,
au titre des frais exposés par Mme A. et non compris dans les dépens, à la
charge de l’État qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance.
DÉCISION
Article 1er : Le pourvoi de Mme B. est
rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme B.
et au ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
En effet, l’article 38 de la loi Informatique et libertés,
dans son ancienne version, prévoit que toute personne a le droit de s’opposer, « pour
des motifs légitimes », au traitement des données la concernant.
Quant à l’article 21 du RGPD relatif à ce droit
prévoit, quant à lui, que « la personne
concernée a le droit de s’opposer à tout moment, pour des raisons tenant à
sa situation particulière, à un traitement des données à caractère
personnel la concernant ».
Autrement dit une vraie restriction au principe
général ci-avant énoncé !
Du « motif légitime », on parle désormais de « situation
particulière », sans même en donner la consistance…
D’autant que là, rien n’est excipé par Madame B. quant
aux propriétés spécifiques de ses chérubins…
Va donc te rhabiller !
En bref, le citoyen qui s’inquiète plus que d’autres
quant aux traitements de ses données personnelles par le « Big-Data »,
c’est un névropathe, au mieux simple psychotique, au pire totalement et
dangereusement paranoïaque…
Puisqu’on vous le dit.
La loi est faite pour « protéger » et rien d’autre,
en vue de votre bonheur-absolu, pondue par des « sachants » qui n’ont
que cette idée en tête, tout le monde sait ça !
Et en douter, pourrait bien vous conduire en « soins
intensifs ».
Moâ, j’aime bien l’idée : Comment les chères
têtes-blondes pourraient passer leur bac (et autre formations diplômantes) sans
« exister » dans les fichiers scolaires ?
Hein, dites-moi…
Puisqu’on vous dit que les fichiers sont détruits… ils
ne peuvent même pas passer leur bac le moment venu, c’est bien connu !
Et encore, là on n’est que dans le « système-scolaire »,
mais quand il s’agit de l’état-civil, des impôts ou de la sécurité-sociale, je
ne vous dis même pas comment vous êtes pistés dans les moindres détails !
Allez, bonne journée tout de même à toutes et à tous !
I3
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