Qui apprécie s’il y a infraction ?
Voilà un arrêt
intéressant pour tous les conducteurs « photosensibles », « photophobes »
et autres « luminophobes » (y compris les vampires encore en
vadrouille sur les routes) : Préférez les lunettes de soleil plutôt que le
film noircissant sur les vitres avant de votre « tas-de-boue-à-roulette » !
Et pour cause…
Cour de cassation chambre criminelle
Audience publique du mardi 13 novembre 2018
N° de pourvoi: 18-80944
M. Soulard (président), président
REPUBLIQUE
FRANCAISE
AU NOM DU
PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt
suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- L’officier du ministère public près le tribunal de
police de la Roche-sur-Yon,
contre le jugement de ladite juridiction, en date du
19 janvier 2018, qui a renvoyé M. Eddy X... des fins de la poursuite du chef d’infraction
à la réglementation sur la transparence des vitres de véhicule ;
La COUR, statuant après débats en l’audience publique
du 2 octobre 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l’article
567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Y...,
conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Darcheux ;
Sur le rapport de M. le conseiller Y... et les
conclusions de M. l’avocat général Z... ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la
violation des articles 111-4 du code pénal, R. 316-3 du code de la route et 537
du code de procédure pénale ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation
des articles 111-4 du code pénal, R. 316-3 du code de la route et 537 du code
de procédure pénale ;
Les moyens étant réunis ;
Vu les articles 537 du code de procédure pénale et R.
316-3 du code de la route ;
Attendu que, selon le premier de ces textes, les
procès-verbaux et rapports établis par les officiers ou agents de la police
judiciaire font foi jusqu’à preuve contraire des contraventions qu’ils
constatent ; que la preuve contraire ne peut être rapportée que par écrit ou
par témoins ;
Attendu que, selon le second de ces textes, en premier
lieu, la preuve de l’infraction à la réglementation sur la transparence des
vitres de véhicule est établie par la constatation, par l’agent verbalisateur,
de ce que celle-ci n’est pas suffisante, en second lieu, il est permis au
contrevenant de rapporter la preuve contraire, conformément à l’article 537 du
code de procédure pénale, notamment en établissant que le facteur de
transmission régulière de la lumière est d’au moins 70 % ;
Attendu qu’il résulte du jugement attaqué et des
pièces de procédure que M. X... a fait l’objet, le 27 janvier 2017, d’un
procès-verbal pour mise en circulation d’un véhicule avec une vitre non
homologuée ; qu’ayant été cité de ce chef, le tribunal de police l’a renvoyé
des fins de la poursuite ;
Attendu que, pour relaxer M. X..., le jugement énonce
que l’intéressé n’a pas été prévenu d’avoir commis l’infraction édictée par l’article
R. 316-3-1 du code de la route, qui sanctionne la violation des dispositions de
l'article R. 316-3 dudit code relatives aux conditions de transparence des
vitres par une contravention de quatrième classe, dès lors que, seuls les
articles R. 316-3 du code de la route et 1 de l’arrêté ministériel du 18
octobre 2016 ayant été visés à la prévention, il n’a été poursuivi que pour le
non-respect d’une des autres prescriptions visées à l'article R. 316-3,
sanctionnées par une contravention de troisième classe ; que le juge relève qu’aucun
élément objectif ne résulte de la procédure permettant de caractériser le
pourcentage de facteur de transmission régulière de la lumière, lequel
constitue un élément de l’infraction ; qu’il ajoute que l’apposition de films
sur les vitres d’un véhicule ne constitue une opération illicite que si elle
est susceptible de réduire les caractéristiques de sécurité ou les conditions
de transparence des vitres avant du véhicule, ce que les constatations opérées
n’ont pas caractérisé ;
Mais attendu qu’en prononçant ainsi, alors qu’il
résulte du procès-verbal de contravention, complété par le procès-verbal de
renseignement du 6 mars 2017, que, d’une part, nonobstant le défaut du visa à
la prévention de l’article R. 316-3-1 du code de la route, M. X... a été
poursuivi pour avoir contrevenu aux dispositions énoncées à l'article R. 316-3
relatives aux conditions de transparence des vitres avant d’un véhicule et qu’il
a été mis en mesure de préparer sa défense, d’autre part, l’agent verbalisateur
a relevé que la transparence des vitres n’était pas suffisante dès lors qu’il n’était
pas parvenu à distinguer le conducteur dans son habitacle lors du contrôle routier
dont le prévenu a été l’objet par l’effet de la pose d’un film noir à l'intérieur
des vitres latérales avant lesquelles étaient sur-teintées, le tribunal a
méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus énoncés ;
D’où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, le
jugement du tribunal de police de La Roche-sur-Yon, en date du 19 janvier 2018,
et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant le tribunal de
police de Nantes, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du
conseil ;
ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa
transcription sur les registres du greffe du tribunal de police de La
Roche-sur-Yon et sa mention en marge ou à la suite du jugement annulé…
C’est l’agent
verbalisateur qui apprécie si les vitres teintées d’un véhicule sont
suffisamment transparentes et conformes à la réglementation !
Tant pis s’il
est myope et lui-même doté de verres fumés…
C’est ce qu’aura
appris à ses dépens un automobiliste qui avait apposé un film de couleur noire
sur les vitres latérales avant de sa voiture et s’est retrouvé poursuivi par la
maréchaussée pour infraction à la réglementation sur la transparence des vitres
d’un véhicule : Le pare-brise et les vitres latérales avant doivent en
effet avoir une transparence suffisante et transmettre au moins 70 % de la
lumière.
Le tribunal de
police l’avait relaxé estimant qu’aucun élément objectif ne résultait des
constatations effectuées par la gendarmerie, permettant de caractériser le
pourcentage de lumière transmis.
Mais le
jugement est cassé.
La Cour de
cassation rappelle pour l’occasion que les procès-verbaux des officiers ou
agents de police judiciaire font foi jusqu’à preuve contraire.
(N’omettez pas
de lui demander sa carte de police : On ne sait jamais depuis « Benne-Allah »…)
Elle a ensuite
jugé que la preuve de l’infraction était établie par la seule constatation par
l’agent verbalisateur : Celui-ci n’était en effet pas parvenu à distinguer
le conducteur dans son habitacle lors du contrôle.
Était-il armé
et dangereux ?
On ne saura
pas…
Mais on ne le
voyait pas.
Quant à savoir
si le conducteur voyait la route (et les obstacles), on ne saura pas mieux.
Je me demande
si demain, outre la copie de l’arrêté de nomination d’un gendarme en tenue, on
ne sera pas aussi obligé de lui demander son certificat médical d’aptitude
visuelle…
En attendant,
veillez à ne pas croiser ces gens-d’armes, surtout si vous êtes « trop bronzé ».
Ou alors
habillez-vous avec des vêtements clairs ou mieux… aux couleurs fluo !
Bonne fin de
week-end à toutes et tous !
I3
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