La
vie dure des utopies…
L’autre fois, à propos de
monnaie, je tentais d’expliquer que la première qualité de cette « unité
de compte » dans tous les échanges entre hommes, devait être sa
durabilité.
Et que ça lui a toujours été absolument indispensable, pour
traverser le temps…
Quelle que soit la monnaie utilisée et quelle que soit le
pays et l’époque concernée.
Parce que seule la monnaie permettait de « capitaliser » et
du coup d’emprunter/rembourser, de prêter/se faire rembourser sans perdre trop
de valeur en vieillissant.
On peut être contre le « système capitaliste » ou
de « capitalisation », nous en avons la preuve tous les jours et les
plus braillards sur le sujet sont ceux qui sont les plus ignorants…
Car sans « capitalisation », plus personne ne peut investir
dans des choses « qui durent », plus rien ne peut durer vraiment.
Et pourquoi est-ce si important « d’investir »
dans des choses « qui durent » ?
Eh bien c’est tout simple, mais si ce jour-là, personne
parmi « mes » commentateurs ou contradicteurs habituels n’a posé la
question…
Je l’attendais pour « rebondir » et elle n’est pas
venue.
Déçu.
On « investit » pour produire. Mieux ou plus, ou
les deux…
On produit pour satisfaire des besoins, des attentes.
Sans production, idoine et calibrée, il y aurait pénurie de
biens et de services.
Qui dit « pénurie » dit rareté d’une part et donc « inflation »
qui ruine la valeur d’une monnaie, quelle qu’elle soit et, d’autre part, dit « disette ».
La disette se transforme rapidement en famine, ce qui
provoque des conflits, des guerres pour se nourrir, pour boire, pour vivre.
Qui dit guerre dit destructions, de vies d’abord, d’investissements
ensuite, donc de monnaie qu’il faut alors recréer une fois la paix retrouvée…
C’est immanquable et vous pouvez refaire toute l’Histoire de
l’humanité depuis l’homme de Cro-Magnon sans vous tromper avec ce filtre-là de
lecture !
Autrement dit, en caricaturant à peine, toute personne qui s’oppose à ce « système »
devient finalement faiseur de misère et, au stade ultime, de guerre et de
destruction.
Mais en passant par toutes les étapes de l’appauvrissement
des masses qui n’ont rien demandé…
C’est vous dire si je ne suis logiquement pas vraiment un « collectiviste »
qui, arbitrairement spolie « les autres » de leurs avoirs pour leur
plus grand bonheur.
De toute façon, le collectivisme, ce n’est jamais qu’une
forme de « capitalisme » d’autorité : Il ne sort pas du « système »,
il devient seulement « étatique ».
Et de toute façon, même quand il ne s’agit pas de spolier, de
nationaliser, de réquisitionner, les formes « violentes », tout
impôt, toute taxe participe de près ou de loin à la même forme de « tuerie ».
C’est plus « soft », j’en conviens, c’est moins
évident, c’est parfois consenti, c’est très souvent fait pour des tas de bonnes
raisons qu’on met des plombes et des plombes à vous expliquer, mais c’est
exactement le même mécanisme.
Rien de plus rien de moins.
Et tous les débats tournent seulement autour des « dosages »
et des raisons dans nos sociétés-post-modernes.
Ceci étant acté et pour en revenir au fond du sujet que nous
avons déjà abordé à plusieurs reprises et autres
aspects, notez que la révolution informatique a le même effet que celui
qu’a pu avoir en son temps la révolution industrielle. Dans le secteur
agricole, la mécanisation a eu partout un effet spectaculaire sur l’emploi,
sans que l’on ne songe jamais à mettre en œuvre une taxe spéciale pour
pénaliser l’usage des moissonneuses-batteuses ou des machines à traire !
À l’heure actuelle, le prix d’une Dacia est inférieur à un
salaire égal au smic mensuel. Il y a un demi-siècle, il fallait plusieurs
salaires mensuels pour pouvoir acheter une 4 CV ou une Renault Dauphine – et le
smic n’existait pas ! Sans compter que la Dacia moderne est infiniment plus
sûre, confortable et performante. Baisse spectaculaire des prix (ou
augmentation du pouvoir d’achat) et amélioration conjointe du produit sont tous
les deux à mettre au crédit du progrès technique et maintenant de la
robotisation (dans les usines japonaises d’automobiles particulièrement,
l’emploi a massivement diminué).
Il en résulte que, contrairement à ce qu’une pensée
naïvement simpliste voudrait faire croire, la robotisation, même si elle se
traduit directement par des pertes d’emploi n’a pas pour finalité de permettre
aux patrons ou aux actionnaires de « s’en mettre plein les poches » mais bien
de fournir à tout moment des produits moins chers et plus performants, et
d’améliorer leur compétitivité dans un contexte de concurrence mondiale dont il
serait vain de prétendre se dégager.
À moins de construire une vaste enceinte infranchissable le
long des frontières, creuser de large fossé derrière, fermer ports et aéroports
et encore, ça n’empêcherait pas les ondes, les oiseaux et les polluants de
passer…
Il en résulte donc aussi qu’augmenter le coût de production
en instituant une taxe robot ne serait envisageable que si le consommateur
acceptait d’en payer le prix du fait de la moindre productivité qui
s’ensuivrait. Autrement dit, cette taxe aboutirait seulement à transférer au
consommateur les conséquences des pertes d’emploi et à retarder la réalisation
des améliorations techniques.
Est-ce vraiment cela que vous voulez ?
D’autant qu’il est finalement impossible de distinguer
significativement entre les investissements robotiques censés être vertueux et
ceux qui ne le seraient pas, et de faire dépendre la fiscalité de cette
distinction.
Instituer une taxe robot indifférenciée serait revenir à
l’ancienne taxe professionnelle, qualifiée d’impôt idiot déjà par « Mythe-errant »
et supprimée par « Bling-bling » au motif qu’elle pénalisait l’emploi
pour la partie assise sur les salaires et l’investissement pour la partie
assise sur les immobilisations.
Les données économiques n’ont pas changé depuis, surtout
dans un pays dont les entreprises souffrent particulièrement de la surcharge
d’impôts sur la production, en comparaison de la structure de la fiscalité
existant dans les autres pays.
S’il fallait imposer davantage les entreprises, ce serait au
niveau de ses résultats. Mais l’imposition est déjà si forte …
Ainsi « Deux-Noix-Âme-mont » a fait part dans le
cadre de son programme de l’intention de taxer les robots, rendus responsables
de la chute des emplois. Plus précisément, à l’heure où les charges sociales
pèsent essentiellement sur les revenus du travail, il n’estime pas juste que
l’usage des robots, qui ont pour résultat de remplacer l’emploi en créant du
chômage, ne participe pas à la couverture des dépenses engendrées par cette
diminution de l’emploi. Toutefois, bien conscient de la nécessité pour les
entreprises de ne pas entraver la modernisation de l’outil de production, il
veut comme par hasard introduire une distinction entre les investissements
vertueux et ceux qui ne le seraient pas…
Vaste fumisterie.
Outre la difficulté « technique », cette
distinction n’a pas de sens économique. De plus elle aboutirait à tenter de
définir une règle « molle » en matière de fiscalité, ce qui serait
radicalement contraire aux principes constitutionnels les plus élémentaires.
Enfin, le raisonnement du candidat repose sur une incompréhension sur l’effet
macroéconomique de la robotisation, comme celui en général de la mécanisation :
Ce n’est pas par l’augmentation des bénéfices qu’elles se traduisent, mais,
comme toute l’histoire économique l’a montré, par la baisse des prix de
production dans un contexte général de recherche de la compétitivité. En
conséquence, vouloir taxer les investissements au titre d’une prétendue
prédation des bénéfices par les actionnaires est dès lors dépourvu de sens et
terriblement contre-productif.
Par conséquent, il ne voudrait donc faire payer la taxe
qu’aux entreprises dont l’utilisation des robots entraîne des réductions
d’emploi. « L’idée c’est de faire en
sorte qu’on ne pénalise pas les entreprises dont l’équipement robotique ou en
intelligence artificielle augmente la production globale, l’emploi et la
capacité de redistribution aux salariés », précise un député européen
en charge de la coordination du projet de l’équipe du candidat « soce ».
Erreur fondamentale : Croire possible de distinguer
entre les recours vertueux à la robotisation et ceux qui ne le sont pas !
Si l’on reprend les critères retenus ci-dessus, tous les
équipements en robotique et intelligence artificielle tendent à augmenter la
production globale et la productivité (autrement ils ne seraient pas réalisés),
et aucun ne saurait être dépourvu d’effet sur l’emploi dans l’entreprise où ils
sont installés. Ce qui ne veut pas dire que ces investissements se révèlent
nécessairement être une réussite, c’est le risque que prend l’entrepreneur, notion
que la gôche a toujours beaucoup de difficulté à intégrer.
Mais il faut du temps pour juger, ce qui signifie qu’au
moment où les équipements sont acquis, il est impossible d’en déterminer
l’effet économique et de les qualifier de « vertueux » ou non.
Ce qui ne veut pas dire non plus que l’effet sur l’emploi
global soit déterminable, parce qu’il est impossible de savoir dans quelle
mesure les emplois détruits ne sont pas remplacés par les nouveaux emplois
induits par le phénomène schumpétérien de « destruction créatrice »
dont on n’a encore jamais établi l’inexistence malgré les critiques qu’il
suscite à l’heure actuelle.
Enfin, quant à la « redistribution aux salariés », il faut
reconnaître que plus les salariés seront qualifiés, mieux ils seront rémunérés,
même si leur nombre diminue…
De toute façon, la part de la valeur ajoutée revenant aux
salariés est parfaitement constante en « Gauloisie-du-progrès »
depuis trente ans (autour de 67 %).
Parler de redistribution devrait-il évoquer une notion autre
comme la participation dans les bénéfices (ce qui existe déjà depuis De Gaulle dans la plupart des grandes entreprises et jusqu’aux ETI) ?
Dans ce cas il s’agit de l’utilisation de la valeur ajoutée
restant après celle revenant aux salariés, charges comprises, et les bénéfices
entrent en concurrence avec la formation de capital fixe (les investissements),
et plus l’entreprise investit moins l’entreprise peut distribuer de bénéfices…
Là encore c’est une notion dépourvue de sens économique.
Quant à chercher à tracer les emplois perdus – ou gagnés –
avec l’investissement dans l’automatisation, c’est peine perdue.
L’autiste européen explique pourtant vouloir se reposer sur
une concertation avec les partenaires sociaux au niveau des branches, voire
avec les collectivités locales, pour évaluer les répercussions sur l’emploi et
donc de déterminer quels sont les investissements taxables et ceux qui ne le
sont pas…
Et c’est une « règle molle » introduite dans la
fiscalité, dans le sens où la taxe s’appliquerait au cas par cas « évaluée »
coup par coup par consensus politique local. D’autant que les branches
n’auraient aucune compétence, au sens pratique au sens juridique, pour
déterminer a priori si une entreprise
relevant de son secteur réalise des investissements taxables ou non selon leur
caractère vertueux ou non.
Au contraire, ce serait un « barrage » de plus aux
« entrants » sur un marché qui, n’ayant pas les moyens de s’adapter,
taxeraient celui qui les a et leur fait concurrence…
Pourtant, une telle taxe aurait son utilité, d’après Robert
Shiller, prix Nobel d'économie, professeur à Yale !
Soulignant que les robots pourraient accroître les
inégalités, il y a lieu « d’envisager
la nécessité de définir des exigences de notification de la part des
entreprises sur l’étendue et la part de la contribution de la robotique et de l’intelligence
artificielle à leurs résultats financiers, à des fins de fiscalité et de calcul
des cotisations de sécurité sociale ».
Même Bill Gates soutient cette position, lui qui a fait
sa fortune personnelle sur l’évolution informatique des logiciels, l’IA.
L’année dernière nous avons assisté à la prolifération d’appareils
comme les assistants vocaux Google Home ou Amazon Echo Dot (Alexa) qui
remplissent de multiples fonctions et peuvent gérer l’électronique domestique,
se substituant ainsi à une intervention humaine.
De la même manière, à Singapour les services de taxi sans
chauffeur Delphi et nuTonomy commencent à remplacer les chauffeurs de taxi. Et
la société de livraison de repas à domicile Doordash teste des robots autonomes
à six roues de Starship Technologies qui pourraient remplacer les coursiers.
Quant à Elon Musk, il envisage de greffer directement dans
le cerveau des humains un implant qui permettrait d’accélérer le transfert de
données avec une machine, un robot…
Un impôt sur les robots, espèrent ses partisans, pourrait
ralentir au moins momentanément le processus et apporter le financement
nécessaire à l’adaptation à la nouvelle situation, par exemple la reconversion
professionnelle des travailleurs qui perdent leur emploi.
Edmund S. Phelps insiste sur toute l’importance d’avoir une « place dans la société – un métier ».
Quand beaucoup de gens ne peuvent plus trouver un emploi pour nourrir leur
famille, les conséquences sont graves : « C’est le fonctionnement de toute la société qui peut en pâtir.
Autrement dit, il y a des facteurs externes à la robotisation qui peuvent
justifier l’intervention de l'État. »
Il faut comprendre que tous les impôts, sauf une taxe
forfaitaire identique pour tous, créent une distorsion dans l’économie. Mais un
impôt qui ne tienne pas compte des revenus et des dépenses de chaque
contribuable serait quasiment impossible à mettre en œuvre parce qu’il pèserait
beaucoup plus lourdement sur les petits revenus et écraserait les pauvres dans
l’incapacité de le payer. On a compris depuis le moyen-âge que l’impôt doit
donc être lié à une activité ou une autre qui indique notre capacité à payer un
impôt.
Frank Ramsey en 1927 défendait l’idée que pour limiter les
distorsions introduites par la fiscalité, il faut taxer toutes les activités et
tous les biens de consommation et il proposait une manière de fixer les taux de
prélèvements. Sa théorie n’est pas une recette pratique pour fixer ces taux,
mais elle constitue un argument de poids contre l’idée qu'il ne faudrait taxer
que quelques activités et quelques biens, ou alors que le même taux devrait s’appliquer
à tout.
Ainsi, les produits susceptibles d’avoir des effets négatifs
pourraient être imposés plus lourdement. Par exemple les taxes sur les boissons
alcoolisées sont très répandues. Entre 1920 et 1930 les USA ont tenté d’intervenir
plus brutalement sur le marché de l’alcool par sa prohibition. Mais il s’est
avéré impossible de supprimer la consommation d’alcool. La taxe sur l’alcool
qui a accompagné la fin de la prohibition était une incitation plus douce à
moins consommer.
Notez que dès le Consulat, les « Gauloisiens »
avaient déjà rétabli les taxes sur les alcools, vins, spiritueux, poirés, pommés,
vins et tabacs.
Depuis, on fume surtout des taxes enroulées dans un peu de
papier qui contient quelques traces de tabac…
Idem pour les alcools et le carburant de vos « tas-de-boue-à-roulettes ».
Rappelons que quand on augmente l’impôt sur les hauts
revenus, en général en temps de guerre, ce n’est que temporaire. La plupart des
gens estiment que taxer ceux qui réussissent au bénéfice de ceux qui pataugent
est dégradant pour ces derniers. Les dirigeants politiques le savent et logiquement,
ils ne font pas campagne sur la proposition de prendre aux hauts revenus pour
aider les petits revenus, sauf en « Gauloisie-ruinée ».
Mais c’est une exception culturelle que le monde entier vous
envie…
En réalité, il faudrait repenser la fiscalité pour combattre
les inégalités de revenus liées à la robotisation. Sur le plan politique il est
peut-être plus acceptable et donc plus facilement réalisable à long terme de
taxer les robots plutôt que les hauts revenus en disent ses concepteurs. Et
contrairement à l’impôt sur le revenu, il ne s’agirait pas d'un impôt sur le « succès
humain ».
Or, quoiqu’on en dise, il conduirait pourtant d’une manière
ou d’une autre à augmenter les impôts des hauts revenus dans la mesure où ils
proviennent d’activités dans lesquels les robots remplacent les hommes.
Dès lors, un impôt modéré sur les robots, même une taxe
temporaire pour ralentir l’adoption de technologies susceptibles d’entraîner
des troubles sociaux, paraît un élément naturel dans une politique qui vise à
combattre la hausse des inégalités.
Les sommes récoltées pourraient servir à garantir un revenu
minimum aux personnes qui ont perdu leur emploi en raison de la robotisation et
se trouvent en reconversion professionnelle. Ce qui serait « conforme »
à notre sens de la justice et du coup pourrait être une solution durable.
C’est en tout cas et de très loin le concept le plus
intelligent que j’ai trouvé sur le sujet, très loin des braillards,
autistes-trisomiques et dogmatiques, qui pullulent depuis peu dans le paysage
politique du pays.
Pour ma part, je pense que s’il s’agit de réformer la
fiscalité (le vieux serpent-des-mers du pays), il s’agirait de simplifier, d’innover
à la marge quand c’est possible, de rééquilibrer entre impôts directs et taxes
indirectes (ces dernières étant actuellement les plus lourdes parce que les
plus « invisibles ») et de « libérer » les initiatives
économiques (autre monstre du Loch-Ness de la politique).
L’initiative économique est à la source des créations de
richesses, des richesses qui se redistribuent par diverses voies, et notamment
la création de nouveaux emplois.
Rappelons qu’un chômeur de moins, c’est un allocataire de
moins à financer et, cerise sur le gâteau, c’est un cotisant de plus.
Mais en « Gauloisie-frénétique », il semble qu’on préfère
taxer toujours plus, quitte à créer des pôvres, pour mieux pouvoir les
subventionner.
Si encore les recettes accrues équilibraient les dépenses
accrues, mais même pas…
C’est là qu’est la trisomie-politique dont il faudra bien se
défaire un jour où l’autre.
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