La « garantie d’achèvement »
Ou l’obligation de garantir livraison d’une maison et
ses conséquences inattendues.
Vous achetez sur plan, une bicoque ou un appartement
en copropriété, qui n’est donc pas encore construit (puisqu’il est sur… plan).
En général, ce n’est pas cher quand il s’agit d’appartements,
dans la mesure où le promoteur qui financera les travaux de construction doit
réunir au plus vite (vite c’est mieux que si ça traîne) des « pré-ventes »
et encaisser des acomptes pour faire valoir de la validité de son projet à son
banquier qui va lui délivrer une « garantie d’achèvement » qui
validera la « vente en état futur d’achèvement ».
Vous avez suivi ?
Très bien. Dans le cas contraire, prenez donc un architecte.
La garantie d’achèvement obtenu, l’acquéreur est sûr
et certain qui aura au bout du compte son immeuble construit, compatible au
descriptif de ce qu’on lui a vendu, même si le promoteur fait faillite.
C’est naturellement plus simple quand il ne fait pas
faillite en cours de construction.
Et pour cela, celui-ci fait des appels de fonds au fil
de la construction, qui servent à financer les constructions, les tranches
suivantes de la construction envisagée et promise, déjà pré-vendue, mais
partiellement payée au démarrage.
Le tout pour minimiser les risques de faillite, de « voler »
le futur propriétaire, le déposséder de son épargne et de justifier des
montants prêtés par son propre banquier, quand il y a un besoin d’emprunt…
Pour se faire et dans « les règles de l’art »,
le législateur impose au promoteur de souscrire une garantie de livraison,
notamment quand il s’agit d’une maison individuelle (on peut penser sur terrain
déjà acquis et rendu constructible avant le début de l’opération).
Oui mais quid quand l’ensemble de ce montage juridique
se casse la gueule pour une raison ou une autre et que cette garantie n’est pas
souscrite ?
Cour de cassation, chambre civile 3
Audience publique du jeudi 19 janvier 2017
N° de pourvoi: 15-27906
Non publié au bulletin.
Rejet
M. Chauvin (président), président
SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Didier et Pinet,
avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a
rendu l'arrêt suivant :
Sur les deux moyens, réunis, ci-après annexés :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Toulouse, 10 août
2015), que, le 1er août 2012, Mme X… et la société LPC ont signé un
contrat de construction de maison individuelle ; que, le 18 mars 2013, Mme X… a
emprunté à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Toulouse 31 (le Crédit
agricole) la somme de 125.000 euros ; qu’après avoir notifié la rupture du
contrat de construction pour défaut d’attestation de garantie de remboursement
et de livraison, retard de livraison, défauts et malfaçons constatés par
huissier de justice, Mme X… a assigné la société LPC et le Crédit agricole en
annulation des contrats et paiement de diverses sommes ;
Attendu que le Crédit agricole fait grief à l’arrêt
d'annuler le prêt et de le condamner à payer certaines sommes ;
Mais attendu qu’ayant constaté qu’il était mentionné
au contrat de construction de maison individuelle un financement par un apport
personnel de 70.000 euros et par un emprunt de 120.000 euros et que la garantie
de livraison était inexistante, la cour d’appel en a exactement déduit qu’en
raison de l’interdépendance des deux contrats, l’annulation du contrat de
construction entraînait celle du contrat de prêt et que le déblocage des fonds,
en l’absence de la garantie de livraison, caractérisait une faute de la banque
;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la caisse régionale de Crédit agricole mutuel
de Toulouse 31 aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette
la demande de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Toulouse 31 et
la condamne à payer à Mme X… la somme de 3.000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième
chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du
dix-neuf janvier deux mille dix-sept.
Conclusion, si un contrat de construction de maison
individuelle doit obligatoirement comporter les justifications de la garantie
de livraison apportée par le constructeur, à défaut, le contrat peut être
annulé, ce qui entraîne de facto l’annulation
du contrat de prêt finançant la construction.
Confirmation que l’accessoire suit encore et toujours
le principal.
En l’absence de la garantie de livraison, le déblocage
des fonds par la banque n’aurait jamais dû être réalisé et dans le cas
contraire constitue une faute qui engage sa responsabilité.
Madame X… demandait à bon droit l’annulation du contrat
de construction pour défaut d’attestation de garantie de livraison, retard de
livraison et malfaçons, ainsi que l’annulation du contrat de prêt qui allait
avec, comme si rien ne s’était passé entre son banquier et elle.
Pour la Cour de cassation, lorsque la garantie de
livraison est inexistante, l’annulation du contrat de construction entraîne
celle du contrat de prêt du fait du lien entre les deux contrats.
Dans ce cas, le déblocage des fonds constitue une
faute de la banque qui peut être amenée à restituer les intérêts reçus, les
frais de dossier et à verser des dommages intérêts.
En revanche, Madame X… aura tout de même à rembourser
le principal : Elle ne peut s’enrichir sans cause.
Ou à recommencer l’opération (peut-être avec un autre
banquier).
Personnellement, j’aurai changé d’entrepreneur et au
pire aurait acheté une bonne paire de gants pour terminer l’ouvrage moi-même
avec quelques potes copieusement arrosés.
J’ai bien su creuser de la sorte une piscine dans un
jardin un soir de beuverie chez des amis qui n’avaient rien demandé.
Certes j’étais nombreux et la cave était de
grande qualité : Impossible de conduire pour rentrer…
Bon, leur problème après-coup, ça eu été de reboucher
le trou parce que Madame avait peur pour sa « nichée-à-elle »…
Là, on avait décuité et on n’était plus bon à rien,
faut-il préciser.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire