Cour
administrative d’appel de Paris, 29 septembre 2015, n° 14PA05384
Il est un principe constant du droit fiscal-gaulois qui
reste immuable : Les contribuables ne sont jamais obligés de maximiser
leurs profits !
Autrement dit et bien heureusement, on ne taxe que ce qui a
été réalisé durant la période annuelle de référence et jamais ce qui aurait pu seulement
être réalisé.
C’est d’ailleurs une gigantesque porte ouverte à l’optimisation
fiscale légale : On décale parfois des profits latents, pour mieux étaler
la charge fiscale sur deux ou plusieurs exercices.
Du moment que c’est légal, pourquoi s’en priver ?
Même les schémas faisant intervenir deux structures aux
impôts différents, l’une à l’IR et l’autre à l’IS fonctionnent très bien avec
plusieurs limites quand le « décideur » est seul à en décider.
Car il faut rappeler qu’une charge est normalement
déductible à l’IS (comptabilité d’engagements), quand bien même son paiement
est différé.
Et quand elle n’est pas encaissée à l’IR (mais je vous
le dis avec des limites relatives à différentes catégories de revenu et de
circonstances), elle n’est pas imposable (comptabilité d’encaissements/décaissements).
De même, une recette qui n’est pas encaissée, ou le
produit d’une plus-value en suspend, voire « amoindrie », n’est pas
imposable.
Pour la plus-value, personne n’est obligé de les
maximiser : On peut alors en répartir le fruit sur quelques intermédiaires
« choisis », tant que ce n’est pas frauduleux et reste imposable
(mais pas forcément imposée) chez autrui bénéficiaire de cette « répartition ».
Pour une recette, elle peut prendre la forme d’une
remise, d’une ristourne ou d’un abandon définitif (émission d'un avoir), voire de son extinction, ou
carrément d’une absence de facturation.
Peu importe le motif et surtout la contrepartie réelle
(parce que jamais rien n’est gratuit), dès lors qu’elle échappe à toute
publicité « écrite ».
Combien de fois ai-je vu s’échanger quelques « cadeaux »
entre partenaires, de la boîte de chocolat aux services d’une « hôtesse d’accueil »
encourageante, en passant par de la marchandise gratuite, des échantillons, des
bons d’essence, des entrées dans des concerts ou des stades ?
J’ai même vu un professeur de droit fiscal vouloir se
faire rémunérer pour ses consultations, en billets d’avion… échangeables !
Passons : C’est de la corruption active des plus
courantes, qui entretiennent les « bons rapports commerciaux ».
Problème pour au moins une profession réglementée :
Les notaires !
Et je vous propose aujourd’hui un arrêt d’appel de la cour
administrative de Paris, après un arrêt de cassation du Conseil d’État d’une
première décision de la même cour, qui fait quelques distinctions
intéressantes entre ce qui est permis et interdit en matière fiscale :
CAA de PARIS 10ème
chambre N° 14PA05384
Inédit au recueil Lebon
M. KRULIC, président
Mme Anne MIELNIK-MEDDAH, rapporteur
M. OUARDES, rapporteur public
SCP PIWNICA-MOLINIE, avocat
Lecture du mardi 29 septembre 2015
REPUBLIQUE
FRANCAISE
AU NOM DU
PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B...a demandé au Tribunal administratif de
Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le
revenu, ainsi que des pénalités y afférentes, auxquelles il a été assujetti au
titre des années 1996 à 1998.
Par un jugement n° 0306735/2 du 7 juillet 2008, le
Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 08PA04867 du 19 mai 2011, la Cour
administrative d'appel de Paris, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à
concurrence de 67 euros sur les conclusions relatives aux pénalités afférentes
au complément d'impôt sur le revenu établi au titre de l'année 1998, a réformé
le jugement du Tribunal administratif de Paris et déchargé l'intéressé des
cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités
correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre des années 1996 à 1998.
Par une décision n° 350511 du 23 décembre 2013, le
Conseil d'État, statuant au contentieux sur le pourvoi du ministre du budget,
des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, a
annulé l'arrêt n° 08PA04867 du 19 mai 2011 de la Cour administrative d'appel de
Paris en tant qu'il a déchargé M. B...des compléments d'impôt sur le revenu et
des pénalités correspondantes auxquels il a été assujetti au titre des années
1996 à 1998 et, dans la limite de la cassation ainsi prononcée, a renvoyé cette
affaire devant la même Cour.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 24 septembre 2008 sous
le n° 08PA04867, et des mémoires complémentaires, enregistrés le 12 mai 2009,
30 juillet 2012 et les 21 avril et 28 août 2015, M. B..., représenté en dernier
lieu par la SCP Piwnica-Molinié, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0306735/2 du 7 juillet
2008 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge des impositions en litige
;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3.000
euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les notaires ont l'obligation de respecter le plan
comptable et d'inscrire les remises consenties au débit du compte de produits ;
- en matière de bénéfices non commerciaux et en
application de l'article 93 du code général des impôts, seules les recettes
encaissées peuvent être imposées ;
- la théorie de l'acte anormal de gestion ne s'applique
pas en matière de bénéfices non commerciaux pour ce qui concerne les recettes ;
- la circonstance que les notaires doivent substituer
une comptabilité d'engagement à une comptabilité de caisse n'a pas d'incidence
sur ces principes ;
- l'option pour une comptabilité de caisse n'autorise
pas la comptabilisation d'une créance qui ne doit pas être encaissée ;
- les officiers ministériels, comme toutes les
professions libérales, ne sont pas dans l'obligation de réaliser des profits, à
la différence des commerçants ;
- il est usuel que les notaires consentent des remises
dans l'intérêt de leur étude, généralement pour conserver leur clientèle ;
- si, contrairement à ce que soutient le ministre, le
notaire peut établir que les remises consenties peuvent être regardées comme
relevant de l'exercice normal de sa profession ou qu'elles sont justifiées par
un autre motif légitime, l'administration n'est plus réputée avoir apporté la
preuve du bien-fondé de la rectification, alors même que ces remises seraient
dépourvues de contrepartie équivalente ;
- en application de l'article 2 du décret n° 78-262 du
8 mars 1978 les notaires peuvent consentir la remise de la totalité des
émoluments afférents soit à un acte déterminé, soit à l'ensemble des actes
reçus à l'occasion d'une même affaire, librement, sans que soit nécessaire
l'autorisation de la chambre dont ils dépendent ;
- ces remises, prévues par la loi, ne peuvent être
regardées que comme relevant de l'exercice normal de la profession ;
contrairement à ce que soutient le ministre, les
remises totales d'émoluments accordées au personnel des clients habituels et
institutionnels de l'étude et que l'administration fiscale a réintégrées au
résultat de celle-ci comportaient une contrepartie équivalente et en tout état
de cause relevaient de l'exercice normal de la profession dès lors qu'elles
étaient totales ;
- les remises consenties relevant de l'exercice normal
de la profession de notaire, l'administration ne peut être réputée avoir
apporté la preuve du bien-fondé de ses rectifications ;
Par un mémoire en défense et les mémoires
complémentaires, enregistrés le 26 février 2009 et les 14 avril et le 28 mai 2015,
le ministre des finances et des comptes publics demande à la Cour de décider
qu'il n'y a pas lieu de statuer à concurrence du dégrèvement de 437 francs,
soit 67 euros, des pénalités afférentes à l'année 1998 et de rejeter le surplus
de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B...ne sont
pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n°78-262 du 8 mars 1978 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures
fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de
l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mielnik-Meddah,
- les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,
- et les observations de Me Molinié, avocat de M.B....
1. Considérant qu'à la suite d'une vérification de
comptabilité de la société civile professionnelle notariale Uguen et B..., dont
M. B...détient la moitié des parts, l'administration a, dans le cadre de la
procédure de redressement contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des
procédures fiscales, réintégré au résultat de cette société, imposable dans la
catégorie des bénéfices non commerciaux entre les mains des associés au prorata
de leurs participations, une partie des remises sur émoluments consenties au
titre des années 1996 à 1998 au personnel des clients habituels et
institutionnels de l'étude, telles des banques et compagnies d'assurances, à
des personnes présentées comme des apporteurs d'affaires ou à divers clients au
motif que ces remises s'analysaient comme des renonciations à recettes ne
relevant pas de l'exercice normal de la profession ; que M. B...a relevé appel
du jugement n° 0306735/2 du 7 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif
de Paris a rejeté sa demande de décharge des compléments d'impôt sur le revenu
ainsi que des pénalités y afférentes ainsi mis à sa charge au titre des années
1996 à 1998 ; que le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction
publique et de la réforme de l'État s'étant pourvu en cassation contre l'arrêt
n° 08PA04867 du 19 mai 2011 en tant que, par cet arrêt, la Cour administrative
d'appel de Paris, faisant droit à la requête de M.B..., a annulé le jugement n°
0306735/2 du 7 juillet 2008 du Tribunal administratif de Paris et déchargé l'intéressé
des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités
correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre des années 1996 à 1998,
le Conseil d'État, par une décision n° 350511 du 23 décembre 2013, a considéré
que la Cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit en
s'abstenant de rechercher, alors même que l'administration avait utilisé
improprement l'expression d'acte anormal de gestion, si les remises en cause
étaient justifiées par une contrepartie équivalente pour le contribuable, si
elles étaient conformes aux règles ou usages de sa profession de notaire ou si
elles étaient justifiées par tout autre motif légitime ; qu'il a en conséquence
annulé l'arrêt n° 08PA04867 du 19 mai 2011 de la Cour administrative d'appel de
Paris en tant qu'il a déchargé M. B...des compléments d'impôt sur le revenu et
des pénalités correspondantes auxquels il a été assujetti au titre des années
1996 à 1998 et, dans la limite de la cassation ainsi prononcée, a renvoyé cette
affaire à la Cour ;
Sur l'étendue du litige :
2. Considérant que par une décision du 26 février 2009,
postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux a
prononcé un dégrèvement de 67 euros sur les pénalités afférentes au complément
d'impôt sur le revenu établi au titre de l'année 1998 ; qu'à concurrence de
cette somme, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de
M. B... ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 12 du code
général des impôts : « L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices
ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même
année » ; qu'aux termes du 1 de l'article 92 de ce code : « Sont
considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou
comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des
professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la
qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et
sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou
de revenus » ; qu'aux termes du 1 de l'article 93 du même code : « Le
bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par
l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de
la profession (...) » ; qu'il résulte de ces dispositions que le montant
des recettes à retenir pour la détermination du bénéfice imposable des
contribuables titulaires de bénéfices non commerciaux est le montant total des
recettes que ceux-ci ont perçues du fait de leur activité professionnelle ou de
l'occupation ou exploitation lucrative ou de la source de profits dont ils
tirent parti ; que si ces contribuables sont, en principe, sous réserve en ce
qui concerne les professions libérales et les professions réglementées du
contrôle qu'exercent les instances de supervision spécialement instituées à cet
effet, seuls juges de l'opportunité des décisions qu'ils prennent,
l'administration est cependant fondée à réintégrer dans leur résultat imposable
le montant des recettes non déclarées qu'ils n'auraient normalement pas dû
renoncer à percevoir ; que tel est le cas lorsque la renonciation en cause est dépourvue
de contrepartie équivalente pour ces contribuables, qu'elle ne peut être
regardée comme relevant de l'exercice normal de leur profession ou d'une
pratique normale dans le cadre de leur occupation ou exploitation lucrative ou
de l'utilisation de la source de profit dont ils tirent parti ou qu'elle n'est
justifiée par aucun autre motif légitime ;
4. Considérant que, dans l'hypothèse où
l'administration a mis en évidence la renonciation d'un contribuable titulaire
de bénéfices non commerciaux à percevoir des recettes, elle est réputée,
lorsque la charge de la preuve du bien-fondé de la rectification lui incombe en
raison de la procédure d'imposition suivie, apporter cette preuve si le
contribuable n'est pas en mesure de justifier que la renonciation à percevoir
des recettes comportait une contrepartie équivalente pour lui ou reposait sur
l'un des motifs mentionnés au point 2 ; qu'en l'espèce, dès lors que la
commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre
d'affaires a été saisie du litige, l'administration supporte la charge de la
preuve en application de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret
du 8 mars 1978 susvisé :
« (...) Les notaires peuvent faire remise de la
totalité des émoluments afférents à un acte déterminé ou aux différents actes
reçus à l'occasion d'une même affaire ; sous réserve des dispositions des
articles 3, 11 et 12, ils ne peuvent accorder ni remise partielle sur un acte
déterminé, ni remise partielle ou totale sur l'un des actes reçus à l'occasion
d'une même affaire qu'avec l'autorisation de la chambre dont ils dépendent »
; qu'en application de l'article 3 du même décret, dans le cas où le montant
des émoluments afférents à un acte déterminé serait supérieur à 80.000 euros,
le notaire et son client peuvent convenir d'une réduction d'émoluments pour la
partie de la rémunération dépassant le seuil ainsi fixé ; qu'en application des
articles 11 et 12 dudit décret, le notaire peut, lorsqu'il y a négociation ou
transaction ouvrant droit à un émolument, accorder une réduction partielle de
cet émolument sans l'autorisation de la chambre de discipline ;
6. Considérant qu'il est constant que les montants des
remises sur émoluments restant en litige et contestées pour la société civile
professionnelle notariale Uguen et B...s'élèvent à 155.305 francs, 269.632
francs et 72.535 francs respectivement au titre des années 1996, 1997 et 1998 ;
que l'administration ayant admis que les remises consenties aux clients
institutionnels étaient justifiées au regard de l'intérêt commercial de la
société civile professionnelle, ces sommes restant en litige ne correspondent
plus qu'à des remises sur émoluments, totales ou partielles, qui ont été
consenties aux membres du personnel de sociétés clientes de l'étude et à des
confrères, amis ou connaissances présentés comme des apporteurs d'affaires et
que l'administration a regardées comme des renonciations à recettes ne relevant
pas de l'exercice normal de la profession ;
7. Considérant que si M. B...a fait valoir devant les
premiers juges que les remises sur émoluments restant en litige ont été
consenties de façon ciblée en vue d'accroître le chiffre d'affaires de son
étude, de s'assurer de la fidélité de sa clientèle et de cultiver l'image de
son cabinet, il n'apporte aucune pièce justificative au soutien de ses
allégations ; que, dans ces conditions, faute d'établir l'influence des
bénéficiaires de ces remises sur l'activité de l'étude notariale et l'intérêt
pour celle-ci de consentir de telles remises, M. B...ne justifie pas que la
renonciation à percevoir les recettes correspondant à ces remises comportait
pour l'étude notariale une contrepartie équivalente ; que, toutefois, M.
B...fait valoir que ces remises ont été accordées conformément à l'article 2
précité du décret du 8 mars 1978 autorisant les notaires à accorder la remise
totale des émoluments afférents à un acte déterminé ou aux différents actes
reçus à l'occasion d'une même affaire et, sur autorisation de la chambre dont
ils dépendent, soit la remise partielle sur un acte déterminé, soit la remise
partielle ou totale sur l'un des actes reçus à l'occasion d'une même affaire ;
qu'il résulte également de ces dispositions que, contrairement à ce que
soutient l'administration fiscale, la possibilité de consentir des remises
n'est pas ouverte aux notaires à titre exceptionnel ; qu'ainsi, le contribuable
justifie que la renonciation à percevoir les recettes correspondant aux remises
totales qui ont été accordées par l'étude notariale sur les émoluments
afférents à un acte déterminé ou aux différents actes reçus à l'occasion d'une
même affaire, dès lors qu'elle repose sur cette faculté offerte aux notaires
par voie réglementaire sans autre condition ou réserve, relève de l'exercice
normal de sa profession alors même qu'elle serait dépourvue de contrepartie
équivalente ; que, toutefois, le contribuable qui ne se prévaut ni
d'autorisations de la chambre des notaires dont il aurait bénéficié, ni des
réserves prévues aux articles 3, 11 et 12 du décret du 8 mars 1978 précité, et
qui par ailleurs ne fait valoir aucun autre motif légitime, apporte cette
justification exclusivement en ce qui concerne les remises totales qui ont été
accordées par l'étude sur les émoluments afférents à un acte déterminé ou aux
différents actes reçus à l'occasion d'une même affaire ; qu'ainsi,
l'administration fiscale est réputée établir le bien-fondé des rectifications
auxquelles elle a procédé en tant qu'elles se rapportent soit à une remise partielle
d'émoluments afférents à un acte déterminé, soit à une remise partielle ou
totale opérée sur l'un des actes reçus à l'occasion d'une même affaire ;
8. Considérant qu'il résulte de l'instruction, en
particulier des notifications de redressement du 20 décembre 1999 et 19 juillet
2000 alors adressées à la SCP notariale Uguen et B..., que les remises sur
émoluments en litige qui ont été accordées en 1996 et 1998 par cette étude sont
exclusivement des remises totales qui doivent être regardées, au regard de ce
qui a été dit au point 7, comme conformes à la réglementation et comme
relevant, dès lors, de l'exercice normal de la profession de notaire ; que
l'administration fiscale justifie seulement du bien-fondé des rectifications
afférentes aux remises sur émoluments partielles, et partielles ou totales au
sens de l'article 2 du décret du 8 mars 1978, qui ont été accordées par l'étude
notariale au titre de l'année 1997 à hauteur de 5.152 francs à la SCI du Bois
et de 124.704 francs à la société Flims, soit un total de 129.856 francs, sur
le montant total des remises restant en litige de 269.632 francs au titre de la
même année ; qu'ainsi, en l'absence de tout autre motif légitime comme cela a
été dit au point 7, M. B... est seulement fondé, en tant qu'ils procèdent de la
remise en cause des remises totales accordées par l'étude notariale, à demander
la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et des pénalités
correspondantes auxquels il a été assujetti au titre des années 1996 et 1998, à
concurrence des montants en base contestés en première instance, soit respectivement
155 305 francs (23.676 euros) et 72.535 francs (11.058 euros) et au prorata de
sa participation au sein de la SCP notariale Uguen et B..., ainsi que la
réduction en base, à concurrence de 139.776 francs, soit 21.309 euros, et au
prorata de sa participation au sein de ladite SCP, des compléments d'impôt sur
le revenu et des pénalités correspondantes auxquels il a été assujetti au titre
de l'année 1997 ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que
M. B...est seulement fondé à demander la réformation du jugement attaqué qu'en
tant qu'il n'a pas fait droit à ses conclusions tendant à la décharge des
compléments d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes auxquels il a
été assujetti au titre des années 1996 et 1998 à concurrence des montants en
base contestés en première instance, soit respectivement 155.305 francs (23.676
euros) et 72.535 francs (11.058 euros) et au prorata de sa participation au
sein de la SCP notariale Uguen et B..., ainsi, à concurrence d'une somme en
base de 139.776 francs, soit 21.309 euros, et au prorata de sa participation au
sein de ladite SCP, des compléments d'impôt sur le revenu et des pénalités
correspondantes auxquels il a été assujetti au titre de l'année 1997 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances
de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du
code de justice administrative et de mettre à la charge de l'État le versement
à M. B...d'une somme de 1.500 euros au titre des frais exposés par lui et non
compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : À concurrence de la somme de
67 euros, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions relatives aux
pénalités afférentes au complément d'impôt sur le revenu mis à la charge de M.
B...au titre de l'année 1998.
Article 2 : La base des cotisations d'impôt sur le
revenu mises à la charge de M. B...au titre de l'année 1997 est réduite d'une
somme de 139.776 francs, soit 21.309 euros, au prorata de sa participation au
sein de la SCP notariale Uguen et B....
Article 3 : M. B...est déchargé des cotisations
supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondant à la
réduction de la base d'imposition définie à l'article 2 ci-dessus ainsi que des
cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités
correspondantes auxquels il a été assujetti au titre des années 1996 et 1998 à
concurrence des montants en base contestés en première instance, soit
respectivement 155.305 francs (23.676 euros) et 72.535 francs (11.058 euros) et
au prorata de sa participation au sein de la SCP notariale Uguen et B....
Article 4 : Le jugement du Tribunal administratif de
Paris du 7 juillet 2008 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent
arrêt.
Article 5 : L'État versera une somme de 1.500 euros à
M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions présentées par
M. B...est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M.
A...B...et au ministre des finances et comptes publics. Copie en sera adressée
à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du
département de Paris (direction nationale des vérifications de situations
fiscales).
Délibéré après l'audience du 15 septembre 2015, où
siégeaient :
M. Krulic, président de chambre,
M. Auvray, président assesseur,
Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 29 septembre 2015.
Le rapporteur, MIELNIK-MEDDAH
Le président, J. KRULIC,
Le greffier, C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre des finances
et des comptes publics en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à
ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties
privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Vous avez eu du mal à suivre ?
Je résume : Les remises sur émoluments peuvent
être déduites du résultat lorsqu’elles sont consenties conformément à la
réglementation notariale.
Et de préciser tout d’abord que selon le Conseil
d’État, un titulaire de bénéfices non commerciaux (BNC) peut renoncer à
percevoir des recettes lorsqu’il justifie que cette renonciation a une
contrepartie équivalente, qu’elle peut être regardée comme relevant de
l’exercice normal de la profession ou qu’elle est justifiée par tout autre
motif légitime. À défaut, l’administration fiscale peut réintégrer au résultat
imposable du professionnel les recettes non déclarées auxquelles il n’aurait
normalement pas dû renoncer.
Dans cette affaire la société civile professionnelle
(SCP) de notaires avait consenti des remises sur émoluments, totales ou
partielles, aux membres du personnel de sociétés clientes de l’étude ainsi qu’à
des confrères, amis et connaissances présentés comme des apporteurs d’affaires.
Remises qui ont été réintégrées au résultat par l’administration au motif
qu’elles ne relevaient pas de l’exercice normal de la profession.
Cette position administrative a été partiellement
invalidée par les juges. En effet, ils ont estimé que les remises consenties
par la SCP conformément à la réglementation notariale revêtaient bien un
caractère normal et étaient donc déductibles du résultat. En revanche,
certaines remises qui avaient été accordées sans avoir requis l’accord
préalable de la chambre des notaires pourtant exigé par les textes
réglementaires devaient, quant à elles, être réintégrées au résultat de la
société.
Précision : En l’espèce, une distinction a été opérée
entre les remises totales et les remises partielles. Les remises qui ont été validées
par les juges correspondaient aux remises totales, autorisées par le décret
portant fixation des tarifs des notaires.
À l’inverse, les remises partielles n’ont pas été
confirmées car elles nécessitaient, selon ce décret, soit l’accord de la
chambre notariale, soit d’entrer dans l’un des cas de réserve (émolument de
négociation, émolument de transaction…). Par ailleurs, le contribuable ne
justifiait pas d’une contrepartie équivalente ou de tout autre motif légitime.
Vous avez dit « exercice d’une profession libérale » ?
Une liberté que le fisc, en votre nom à toutes et tous, apprécie
donc avec bien des libertés qui lui sont propres.
L’acte anormal de gestion n’existant pas en matière de
BNC, il se rattrape comme il peut aux branches à portée de main : C’est un
des effets du principe du « réalisme du droit fiscal » que certains
confondent avec son « autonomie » (qui n’existe juridiquement pas).
Bien à vous toutes et tous !
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