Pour changer…
Vous ne le savez pas, mais beaucoup des expressions
que nous utilisons tous les jours ont leur origine, plus ou moins lointaine,
dans l’univers judiciaire.
Le langage juridique peut apparaître parfois difficile aux profanes.
Pourtant nombre d’expressions courantes, utilisé par tout un chacun, viennent tout droit de la pratique du droit à travers les siècles.
Et il ne s’agit pas que de termes latins, même si notre droit est parfois directement issu du droit Romain.
Par exemple, les Ordalies, ces épreuves douloureuses,
voire mortelles, que devait traverser un suspect pour se soumettre au «
jugement de Dieu », au Moyen-Âge, ont fourni une kyrielle de locutions, comme l’évident
« mettre sa main au feu ». D’autres expressions en revanche sont plus
mystérieuses, notamment celles qui remontent à l’Antiquité.
Petite sélection pour vous ouvrir sur cette belle journée « chômée ».
Amende honorable : Qui fait « amende honorable »,
reconnaît son erreur.
Sous l’Ancien Régime, l’amende honorable était une peine simple pour des délits légers, ou complémentaire pour les crimes.
En chemise et pieds nus, à genoux, un cierge à la main, le condamné devait reconnaître en place publique (généralement le porche de l’église locale) sa faute et « en demander pardon à Dieu, à la société et aux hommes ».
Le coup de grâce : Qui reçoit « le coup de grâce
» s’apprête à périr, ou, au sens figuré, à échouer complètement.
Au XVIIIème siècle, pour mettre fin aux souffrances du condamné, le bourreau le frappait dans l’estomac et enfin en pleine poitrine pour l’achever.
Ce dernier coup, mortel mais libérateur, était appelé « coup de grâce ».
Gémonies et pilori : Triste sort que d’être «
voué aux gémonies », c'est-à-dire accablé d’opprobre.
L’expression vient du latin gemo (« se plaindre, gémir ») qui, à l’époque romaine, désignait les escaliers où étaient exposés, après strangulation, les corps des condamnés.
Certains suppliciés laissés pour morts ne l’étaient pas et y agonisaient lentement.
Puis ils étaient jetés dans le Tibre.
Dans la même catégorie, mais plus tardivement, l’expression « clouer au pilori » ou « mettre au pilori » renvoie au poteau sur lequel étaient enchaînés et exhibés en place publique les condamnés, du Moyen-Âge au XIXème siècle.
Gibier de potence : Légèrement surannée, l’appellation
« gibier de potence » désigne les malfrats qui mériteraient condamnation.
Au XVIIème siècle, le mot gibier caractérisait le « champ de compétence » d’un juge.
« Ce n’est pas votre gibier » équivalait ainsi au moderne « Ce n’est pas de votre ressort ».
Par extension, l’individu mal intentionné et qui était traduit en justice était du gibier de juge et pouvait être condamné à la potence.
Mettre sa main au feu : L’ordalie, ou « jugement
de Dieu », recèle une mine d’expressions populaires.
Très pratiquée en occident au Moyen-Âge, elle est aussi évoquée dans le code d’Hammurabi (1730 av. J.-C.).
Rappelons le principe : Le suspect était soumis à certaines épreuves plus ou moins pénibles, voire mortelles, pour décider de son sort.
S’il était innocent, Dieu, qui le savait, l’aidait à surmonter l’épreuve.
D’ailleurs, c’est un peu comme ça que la « Sainte-Inquisition » traquait les sorcières et renégats de la Très Sainte-Bible, agents de Satan le Malin.
Tu infligeais une épreuve mortelle au suspect, genre, enfermé dans une cage en osier et plongé dans un fleuve.
Si le suspect sortait de l’épreuve vivant, c’était diabolique et il fallait le brûler.
S’il en ressortait mort, c’est qu’il était innocent et Dieu l’aura recueilli dans son paradis…
J’adore le concept !
À l’inverse, cette forme de justice n’était pas mise
en œuvre par les autorités religieuses, mais par des juges qui décidaient du
type d’ordalie à appliquer.
Donc, l’expression « mettre sa main au feu » vient de l’ordalie par le fer rouge : L’accusé devait porter une barre de fer ou marcher sur des socs de charrue chauffés à blanc pendant neuf pas.
La main ou les pieds étaient ensuite bandés dans un sac scellé par le juge.
Trois jours après, l’accusé retournait devant le tribunal pour monter ses plaies.
Si celles-ci étaient cicatrisées, cela prouvait son innocence.
À l’inverse, une vilaine plaie signifiait sa culpabilité.
Double peine, quoi…
Même principe pour l’expression « rester en travers de
la gorge » : L’épreuve consistait à être gavé de pain (ou d’hostie).
Si le suspect s'étouffait, il était forcément coupable.
Quant à la locution « baisser les bras », elle découle
de l’ordalie de la croix, instituée par Charlemagne : Deux personnes en conflit
étaient ligotées ensemble les bras levés (en forme de croix) et attachées à un
poteau.
La première à baisser les bras abandonnait ses prétentions.
Œil pour œil : Sans doute la plus connue des
expressions judiciaires, puisqu’elle est issue de la loi du Talion écrite dans
le code d’Hammurabi : À une faute doit répondre un châtiment équivalent.
On trouve également trace du principe dans le livre de l’Exode : « Quand des hommes se disputent une femme enceinte, si le fœtus sort et que la femme survit, une amende sera exigée selon ce que demandera le mari de la femme, et le coupable paiera au taux usuel.
Mais si la femme meurt, tu paieras œil pour œil, dent
pour dent, main pour main, pied pour pied, brûlure pour brûlure, blessure pour
blessure, plaie pour plaie. »
Sur la sellette : Être « sur la sellette » n’est
généralement très pas confortable.
On doit alors faire face au jugement scrutateur des autres.
Jusqu’à la Révolution, lors des procès, on faisait s’asseoir l’accusé sur une sorte de petit siège à trois pieds, sans dossier, appelé sellette.
Très inconfortable et très basse, la sellette était censée placer l’accusé en position humiliante face au tribunal en surplomb. Son utilisation fut abolie en 1789, le même jour que l’usage de la torture.
Tirer l’oreille : Qui se fait tirer l’oreille n'a
généralement pas très envie de faire ce qu’on lui demande…
Comme les mauvais payeurs.
La coutume est née dans la Rome antique.
Lorsqu’un témoin cité par un plaignant se montrait récalcitrant à comparaître – c’était souvent le cas des mauvais payeurs – il était physiquement traîné par les oreilles devant le tribunal.
Sa déambulation dans l’espace public exposait au grand jour son incivilité.
Vider son sac : « L'affaire est dans le sac », «
avoir plus d’un tour dans son sac », « vider son sac ».
De quel sac parle-t-on ?
Avant la Révolution, les pièces juridiques (dépositions, requêtes…) nécessaires au procès étaient rassemblées dans un sac en toile de jute, de chanvre ou plus rarement de cuir.
À l’ouverture du procès, « on vidait le sac », afin d’étaler les pièces à conviction lors de l’audience.
L’avocat (ou le procureur malin) avait pris soin d’y accumuler les preuves nécessaires à sa démonstration et « avait plus d’un tour dans son sac ».
Quand l’audience était close, les pièces retournaient dans le sac et l’affaire « était dans le sac ».
Celui-ci était ensuite suspendu à un crochet afin d’éviter que le papier ne soit attaqué par les insectes ou les rongeurs.
Naturellement, il y en a d’autres, mais, hé, on est un
premier mai (la fête du travail : Pas une idée de Corsu, ça que de fêter
le travail…) sauf qu’au lieu d’en faire encore plus, on s’arrête de bosser… (ça,
c’est au moins une idée de Corsu…)
(Non, là, ce sont des âneries de ma part, vous le savez bien).
Que donc je ne vais pas vous en faire des tonnes aujourd’hui : Excusez du peu et tant qu’à vous intéresser et en rire, autant faire un peu de « culture Générale » !
Bonne fin de journée à toutes et à tous !
I3
Le langage juridique peut apparaître parfois difficile aux profanes.
Pourtant nombre d’expressions courantes, utilisé par tout un chacun, viennent tout droit de la pratique du droit à travers les siècles.
Et il ne s’agit pas que de termes latins, même si notre droit est parfois directement issu du droit Romain.
Petite sélection pour vous ouvrir sur cette belle journée « chômée ».
Sous l’Ancien Régime, l’amende honorable était une peine simple pour des délits légers, ou complémentaire pour les crimes.
En chemise et pieds nus, à genoux, un cierge à la main, le condamné devait reconnaître en place publique (généralement le porche de l’église locale) sa faute et « en demander pardon à Dieu, à la société et aux hommes ».
Au XVIIIème siècle, pour mettre fin aux souffrances du condamné, le bourreau le frappait dans l’estomac et enfin en pleine poitrine pour l’achever.
Ce dernier coup, mortel mais libérateur, était appelé « coup de grâce ».
L’expression vient du latin gemo (« se plaindre, gémir ») qui, à l’époque romaine, désignait les escaliers où étaient exposés, après strangulation, les corps des condamnés.
Certains suppliciés laissés pour morts ne l’étaient pas et y agonisaient lentement.
Puis ils étaient jetés dans le Tibre.
Dans la même catégorie, mais plus tardivement, l’expression « clouer au pilori » ou « mettre au pilori » renvoie au poteau sur lequel étaient enchaînés et exhibés en place publique les condamnés, du Moyen-Âge au XIXème siècle.
Au XVIIème siècle, le mot gibier caractérisait le « champ de compétence » d’un juge.
« Ce n’est pas votre gibier » équivalait ainsi au moderne « Ce n’est pas de votre ressort ».
Par extension, l’individu mal intentionné et qui était traduit en justice était du gibier de juge et pouvait être condamné à la potence.
Très pratiquée en occident au Moyen-Âge, elle est aussi évoquée dans le code d’Hammurabi (1730 av. J.-C.).
Rappelons le principe : Le suspect était soumis à certaines épreuves plus ou moins pénibles, voire mortelles, pour décider de son sort.
S’il était innocent, Dieu, qui le savait, l’aidait à surmonter l’épreuve.
D’ailleurs, c’est un peu comme ça que la « Sainte-Inquisition » traquait les sorcières et renégats de la Très Sainte-Bible, agents de Satan le Malin.
Tu infligeais une épreuve mortelle au suspect, genre, enfermé dans une cage en osier et plongé dans un fleuve.
Si le suspect sortait de l’épreuve vivant, c’était diabolique et il fallait le brûler.
S’il en ressortait mort, c’est qu’il était innocent et Dieu l’aura recueilli dans son paradis…
J’adore le concept !
Donc, l’expression « mettre sa main au feu » vient de l’ordalie par le fer rouge : L’accusé devait porter une barre de fer ou marcher sur des socs de charrue chauffés à blanc pendant neuf pas.
La main ou les pieds étaient ensuite bandés dans un sac scellé par le juge.
Trois jours après, l’accusé retournait devant le tribunal pour monter ses plaies.
Si celles-ci étaient cicatrisées, cela prouvait son innocence.
À l’inverse, une vilaine plaie signifiait sa culpabilité.
Double peine, quoi…
Si le suspect s'étouffait, il était forcément coupable.
La première à baisser les bras abandonnait ses prétentions.
On trouve également trace du principe dans le livre de l’Exode : « Quand des hommes se disputent une femme enceinte, si le fœtus sort et que la femme survit, une amende sera exigée selon ce que demandera le mari de la femme, et le coupable paiera au taux usuel.
On doit alors faire face au jugement scrutateur des autres.
Jusqu’à la Révolution, lors des procès, on faisait s’asseoir l’accusé sur une sorte de petit siège à trois pieds, sans dossier, appelé sellette.
Très inconfortable et très basse, la sellette était censée placer l’accusé en position humiliante face au tribunal en surplomb. Son utilisation fut abolie en 1789, le même jour que l’usage de la torture.
Comme les mauvais payeurs.
La coutume est née dans la Rome antique.
Lorsqu’un témoin cité par un plaignant se montrait récalcitrant à comparaître – c’était souvent le cas des mauvais payeurs – il était physiquement traîné par les oreilles devant le tribunal.
Sa déambulation dans l’espace public exposait au grand jour son incivilité.
De quel sac parle-t-on ?
Avant la Révolution, les pièces juridiques (dépositions, requêtes…) nécessaires au procès étaient rassemblées dans un sac en toile de jute, de chanvre ou plus rarement de cuir.
À l’ouverture du procès, « on vidait le sac », afin d’étaler les pièces à conviction lors de l’audience.
L’avocat (ou le procureur malin) avait pris soin d’y accumuler les preuves nécessaires à sa démonstration et « avait plus d’un tour dans son sac ».
Quand l’audience était close, les pièces retournaient dans le sac et l’affaire « était dans le sac ».
Celui-ci était ensuite suspendu à un crochet afin d’éviter que le papier ne soit attaqué par les insectes ou les rongeurs.
(Non, là, ce sont des âneries de ma part, vous le savez bien).
Que donc je ne vais pas vous en faire des tonnes aujourd’hui : Excusez du peu et tant qu’à vous intéresser et en rire, autant faire un peu de « culture Générale » !
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