Les contours se dessinent
Compte tenu de mon « âge avancé » qui semble
vouloir se prolonger au-delà du raisonnable jusqu’à en devenir « canonique »,
je me renseigne sur divers points du droit « positif-gauloisien » à l’occasion
de mes lectures des « bulletins ».
Il y en a de pas trop mal en matière fiscale – que je
vous rapporterai peut-être seulement tellement c’est « archi-cuit » –,
et d’autres qui me touchent.
Souvenez-vous : C’était
avant mes vacances.
Mais elles ont été tellement… perturbées cette année,
que je ne sais même plus où j’en suis : Bien la preuve que je dégénère au
fil du temps qui s’enfuit et qu’il faut que je m’en inquiète.
Cass. crim., 11 juill. 2017, n° 17-80.421, Publié au
bulletin.
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu
l’arrêt suivant :
Numéro(s) de pourvoi : 17-80421
Président : M. Guérin (président)
Décision attaquée : Cour d’appel de Caen, 12 décembre
2016
Dispositif : Cassation
Statuant sur le pourvoi formé par :
Le procureur général près la cour d’appel de Caen,
contre l’arrêt de ladite cour d’appel, chambre
correctionnelle, en date du 12 décembre 2016, qui a renvoyé M. Gérard X… des
fins de la poursuite du chef d’abus de faiblesse ;
La COUR, statuant après débats en l’audience publique
du 21 juin 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l’article
567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Béghin,
conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Bray ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire BÉGHIN
et les conclusions de M. l’avocat général SALOMON ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la
violation de l’article 223-15-2 du code pénal ;
Vu ledit article ;
Attendu que ce texte incrimine l’abus frauduleux de
l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse, notamment, d’une personne
dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, est apparente ou connue de
son auteur, pour la conduire à un acte ou à une abstention qui lui sont
gravement préjudiciables ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces
de procédure qu’il est reproché à M. X… d’avoir abusé de la faiblesse d’une
personne âgée de 82 ans pour lui faire signer plusieurs chèques représentant un
montant global de 46.500 euros ; qu’il a été poursuivi devant le tribunal
correctionnel du chef d’infraction à l’article 223-15-2 du code pénal ; que
pour le déclarer coupable de ce délit, le tribunal a notamment retenu que la
vulnérabilité de la victime était établie par une expertise psychiatrique qui a
mis en évidence l’affaiblissement de ses défenses psychiques, lié à son âge et
à son caractère impressionnable ;
Attendu que, pour infirmer le jugement, l’arrêt énonce
qu’il ne résulte ni de l’expertise psychiatrique, ni du témoignage du fils de
la victime, que celle-ci souffrait d’une détérioration mentale au moment des
faits ;
Mais attendu qu’en exigeant la preuve d’une altération
des facultés mentales de la victime, la cour d’appel a méconnu l’article
susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D’où il suit que la cassation est encourue de ce
chef ;
Par ces motifs, et sans qu’il soit besoin d’examiner
le second moyen de cassation proposé :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt
susvisé de la cour d’appel de Caen, en date du 12 décembre 2016, et pour qu’il
soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel
de Rouen, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa
transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Caen et sa
mention en marge ou à la suite de l’arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre
criminelle, et prononcé par le président le onze juillet deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le
président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Mais quel soulagement mes ami(e)s…
Je me souviens encore parfaitement de ma grand-mère – celle de
mon cimetière-personnel – dont le chauffe-eau tombe en panne et qui
se fait escroquer de façon éhontée par un dépanneur indélicat qui lui vend et
lui installe un appareil hors de prix qui ne fonctionnait pas.
Que je lui ai remué les méninges (et le reste) de
telle sorte qu’il rembourse son intervention sans même récupérer son « bidule »
(qu’il a fallu retirer de toute façon pour le coller sur le trottoir).
Il avait vu arriver de loin la petite-vieille naïve et
désolée de se laver et de faire sa vaisselle à l’eau froide…
Depuis, le Code pénal a heureusement évolué : L’entourage
des « Bête-en-cour » ont pu « en tâter »…
En effet, l’abus de faiblesse est désormais (depuis un
bout de temps) caractérisé lorsqu’une personne particulièrement vulnérable en
raison de son âge a été amenée à réaliser un acte qui lui est gravement
préjudiciable. Et il en est ainsi même en l’absence d'’altération de ses
facultés mentales.
Je vous la fais courte : Un aigrefin profite de
la naïveté d’une personne de 82 ans pour lui faire signer plusieurs chèques, d’un
montant total de 46.500 €, comme il est rapporté ci-dessus.
Il est poursuivi et condamné par le tribunal
correctionnel pour abus de faiblesse. Tribunal qui retient que la vulnérabilité
de la victime est établie par une expertise psychiatrique attestant l’affaiblissement
de ses défenses psychiques, lié à son âge et à son caractère impressionnable…
Dont acte.
Le quidam a le culot de se pourvoir en appel et les
juges du second degré estiment quant à eux qu’il convient de relaxer le prévenu
au motif que l’expertise et le témoignage du fils de la victime n’ont pas
apporté la preuve que celle-ci souffrait d’une détérioration mentale au moment
des faits.
Oui, la preuve en matière délictuelle est d’interprétation
stricte : Protection des droits de l’Homme oblige.
Les droits des victimes, hein.
Et puis on est en (ex-basse) Normandie, pays réputé
pour ses boissons fortes à base de pomme…
Bing : Cassation !
Et pour quelle raison ?
Mais enfin, que dit donc l’article 223-15-2 du code
pénal ?
« Est puni de trois ans d'emprisonnement et de 375.000
euros d’amende l’abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de la situation de
faiblesse soit d’un mineur, soit d’une personne dont la particulière
vulnérabilité, due à son âge, à une
maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état
de grossesse, est apparente ou connue de son auteur, soit d’une
personne en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l’exercice
de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son
jugement, pour conduire ce mineur ou cette personne à un acte ou à
une abstention qui lui sont gravement
préjudiciables. »
Autrement dit aucune preuve n’est nécessaire : La
loi pose une présomption… légale !
On peut même dire que le seul fait de l’existence d’un
« acte gravement préjudiciable » suffit à constituer le délit.
La Cour ne sait pas lire. Et se goure en « exigeant la
preuve d’une altération des facultés mentales de la victime ».
Même si la présomption n’est pas encore
« irréfragable » (qui ne supporte pas la preuve contraire), on s’en
approche…
Personnellement, ce qui m’interpelle le plus, c’est le
rôle joué par le fiston-légitime.
Qu’est-ce qui a bien pu lui passer par l’esprit à
témoigner contre sa mère estimant qu’elle ne souffrait d’aucune détérioration
mentale au moment des faits ?
D’autant que les témoignages au sein d’une même
famille sont présumés suspects et ne sont pas retenus en matière pénale.
Je comprends que l’amour-filiale ait pu le pousser à
considérer sa mère comme saine d’esprit en tout temps et tout lieu, mais
puisque ce n’était pas la question ?
Ce gars-là, je te le déshériterais – dans les limites
permises par la loi – fissa au profit de « bonnes-œuvres » qui font,
parmi d’autres, tout le charme de la région (paysages & crustacés ;
liqueurs & jolies-filles ; etc.).
Enfin passons : Me voilà rassuré.
En cas de déshérence de « dedans mon
unique-neurone » qui fonctionne encore vaille-que-vaille (celui du nerf
honteux), je resterai protégé par la loi.
La « Gauloisienne ». Je ne suis pas certain
de la loi britannique…
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