Chapitre quarantième-troisième
Avertissement : Vous l’aviez compris, ceci n’est
qu’un roman, une fiction, une « pure construction intellectuelle », sortie tout
droit de l’imaginaire de son auteur.
Toute
ressemblance avec des personnages, des lieux, des actions, des situations ayant
existé ou existant par ailleurs dans la voie lactée (et autres galaxies), y
compris sur la planète Terre, y est donc purement, totalement et parfaitement
fortuite !
Pas très difficile à comprendre, pourtant : « Votre raisonnement est le bon. C’est la rage
qui a martyrisé le pauvre « Krist-björn Kirk-jubé » jusqu’à lui ôter
la vie. De le voir ainsi empêché de résister à une soudaine bouffée vengeresse
pour toutes les turpitudes et autres saloperies, humiliations et vexations qui
devaient être connues par son meurtrier.
Un crime de femme trompée, bafouée. Qui
devait savoir qu’il avait mis enceinte une secrétaire alors que, suprême
indignité de jalouse, elle n’avait pas eu l’occasion d’en faire autant. Donc,
si on exclut un « mari-cocu », l’éventuel amant de Kára, mais ça ne
tient pas debout – il s’en serait pris à celle-là, pas à l’homme, même en
croyant à un viol et je crois savoir que ce genre de chose se règle rapidement
dans votre pays devant les tribunaux – c’est donc forcément l’épouse. »
Oui mais l’existence de son alibi ?
« Justement, son alibi !
Vous la croyez assez folle pour commettre un crime sans savoir pouvoir fournir
un alibi, mêùe pas très glorieux ? Moi pas… »
Il n’y aurait pas eu l’alibi de la fête de famille où tout le monde était
torché, il n’y aurait pas eu de meurtre. Elle le leur avait suggéré dès le
début.
« Maintenant reste une question
non résolue : avait-elle prémédité son crime en allant chercher des
chaussures qui n’aurait pas manqué à son inventaire avec l’idée d’aller les
poser chez Kára après coup, ou a-t-elle imaginer de désigner une coupable
qu’elle pensait au moins en partie responsable de son malheur, après avoir
commis son forfait ?
Je crois savoir qu’elle s’est exilée… »
C’est probablement la deuxième hypothèse qui est la bonne, puisque ce sont
ses chaussures à elle et non pas celles de Kára qui ont servi au crime.
« Il faudrait entendre sa
version pour confirmer définitivement… »
On peut toujours lancer un avis de recherche international…
« Et moyennant finances, je
peux toujours lancer mes limiers sur sa trace pour vous aider dans cette tâche…
Elle aura eu le temps de se refaire une identité et une situation au soleil
avec l’argent qu’elle a encaissé de notre ami Huyck Maartje. Et j’ai des moyens
techniques et humains que vous n’avez pas au-delà de vos procédés juridiques
habituels ».
Ça, là, il ne sait pas… Ce n’est pas dans leurs habitudes procédurales.
Quant au budget…
« Ceci dit, je n’ai pas encore
fait d’offre de service. Moi, je suis mandatée pour blanchir l’associé de mon
client afin que vous décoinciez l’aspect judiciaire de la reprise des actifs et
activités de la société de Krist-björn Kirk-jubé. »
Son client ? Le prince-curé du Vatican ?
L’entretien a beau avoir lieu en français dans le texte – un effort de la
part du juge que Charlotte et Aurélie ont en face d’elles – elle croit avoir
mal entendu.
« Le curé ? Quel
curé ? Ah vous voulez parler de Paul de Bréveuil ! Mais vous ne savez
pas, il n’est pas curé ni prince du Vatican. C’est un ancien pilote de chasse
de l’aéronavale française, officier supérieur, qui a rendu d’immenses services
à tout plein d’autorités diverses, de notre pays d’abord, des USA, du
Royaume-Uni et accessoirement du Vatican. C’est pour cette raison qu’il a sa
ribambelle de passeports. »
Ah…
« Mon client, donc, a trop
perdu de temps avec cette société et son personnel. J’ai cru comprendre que
notre ami Huyck Maartje les tient à bout de bras, mais ça ne peut pas durer
comme ça éternellement. Il va se lasser et aller à la pêche sous d’autres
latitudes et sous peu. On a besoin d’un feu-vert pour débloquer la situation
juridique et commencer à investir, ici à Reykjavik. »
Convaincante, puisque la semaine suivante, Huyck aura ses rendez-vous avec
les banquiers, l’administrateur provisoire de la société en perdition,
orpheline de ses dirigeants, et « les équipes ».
« Beau travail ! »
félicitera un peu plus tard Paul tenu au courant. « Je n’en attendais pas moins ni plus de toi. Merci. Tu peux facturer… »
Avec tous les frais ?
« Ah non. Si tu as pensé à me
ramener un petit-souvenir, je ne le rembourse pas : ça ne serait pas un
vrai cadeau. »
Mais ok pour tout le reste…
Françoise, l’ex-secrétaire de Paul à la MAPEA n’est pas disponible tant
que son préavis n’est pas terminé chez son actuel employeur (qui d’ailleurs ne
veut pas la lâcher tant qu’elle n’aura pas trouvé sa remplaçante), du coup si la
comptable, Christine, sa copine, arrivera plus tôt pour reprendre rapidement le
boxon laissé par Jean-Charles, on n’a pas encore ni la contrôleuse de gestion,
ni la future secrétaire générale...
Et en plus, Anjo trouvera, fin janvier, le moyen de se faire pirater
quelques « Ether », une des crypto-monnaies achetées pour le compte
de Paul. Pas grand-chose, mais Paul va pouvoir l’engueuler à vouloir faire de
l’abattage sans prendre de précaution avec les mots de passe et ses libellés de
compte : un avertissement quasiment sans frais mais salvateur pour la
suite…
Par ailleurs, Jacques le frère aîné de Paul, se lance dans le rachat des
parts de son cabinet avec un « coup d’accordéon » (Paul souscrit à
une augmentation du capital social, les associés ricains dégagent avec de
l’argent frais et Paul se retrouve minoritaire à hauteur d’un tiers) en
février. De son côté Mylène récupérera
sa fille Ève aux urgences de Chartre, complètement défoncée. Une première
alerte. La gamine trépassera d’une overdose suivante – pudiquement rebaptisé
« arrêt cardiaque » – en fin d’année, la cure de désintoxication
manifestement pas efficace : pas encore 40 ans, c’est vraiment moche.
Elle aura bouffé la vie par tous les orifices, épuisant la machine avant
l’heure.
Et « Château-sur-Cher » enchaînera les déconvenues. C’était
prévu.
Dans le cycle des mauvaises nouvelles, Martine, la nouvelle
« contrôleuse de gestion », un beau brin de fille brune et souple qui
contraste avec Christine (la comptable), qui a des boutons d’acné lui ravageant
le visage, arrivées toutes les deux en début d’été, subira un « coup du
sort » à l’identique : son mari, même âge, un sportif adepte des
« anabolisants » de sa conception, coupés à de la dope pas très
propre, sera emporté quelques jours après son arrivée à son poste…
Même cause même effet, mais là, la version « officielle » c’est
un cancer foudroyant de l’estomac…
Si Mylène n’est pas grand-mère, en revanche Martine a trois gosses à
assumer « en élevage ».
Terrible la drogue.
Les seules bonnes nouvelles viennent d’Angleterre et d’Écosse durant le
premier trimestre 2017. Lady Margareth aura envoyé des esquisses convaincantes
pour débloquer les premiers appels de fonds et Lady Joan – qui avait averti de
son côté sur la légèreté du travail d’amateur d’Anjo sur les crypto-monnaies en
portefeuille – s’apprête à reprendre la fondation luxembourgeoise, embauchant
une personne supplémentaire en son cabinet. Et elle a enfin pris les RDV
nécessaires pour faire avancer l’affaire du bail sur les îles Chagos.
Mais Paul complique un peu les choses : il ne contente pas de
rencontrer le « gérant » des Mountbatten – encore un collègue des Lloyds
de Joan – et veut également voir ses correspondants au ministère pour faciliter
les choses (Sir Oliver John du MI5 et Wilson KingWater du MI6), ce
qu’organisera parfaitement Shirley qui les tient au courant des activités de
Paul toutes les semaines.
Il a ainsi l’occasion de préciser un peu les esquisses et calculs de sa
« fronde-spatiale », ce qui lui aura demandé quelques semaines de
boulot « au calme ».
Pour monter un engin en orbite d’environ 10 tonnes à quelques 450 km,
l’altitude visée pour « travailler » confortablement, parce que ça
s’ajuste, il faudra globalement 280 TW d’énergie accumulée dans « la
fronde ». Avec un « mini-réacteur » de 30 MW de sortie
électrique, en comptant que des rendements de l’ordre de 60 %, il faudra 68
tours complets du circuit, soit environ 30 minutes de « lancement »
Un parcours de plus de 6.100 km, impossible à développer en mode
« linéaire », et une accélération de l’ordre de 4 G supplémentaires
aux effets de la force centrifuge.
Naturellement, ce sera d’autant plus long que les masses à enlever de la
sorte seront importantes ou… nombreuses en cas de tir multiple.
Comme « la cible » en altitude, le point de rendez-vous des
chargements, repassent toutes les 90 à 100 minutes au-dessus de la tête (ça va
dépendre de l’altitude du moment qui va varier en fonction de sa chute
infinitésimale au fil de son parcours en orbite, ralenti par les rares molécules
d’air rencontrées), ça laissera une heure entre deux tirs pour préparer le
suivant. 17 au maximum à 12 en mode « nominal » dans la journée à
prévoir à ce rythme-là. Soit la possibilité de réunir 120 tonnes en un même
lieu orbital en une journée, 4.380 en un an !
Un engin qui dépasse décidément largement toutes les possibilités
techniques mondiales existantes en la matière et de « très, très loin
devant »…
Évidemment, les explications données par Paul passent à des années-lumière
des cerveaux des personnes présentes à qui il fait son exposé agrémenté de
quelques schémas et croquis projetés depuis son ordinateur sur un écran, via un
« Barco » prêté pour l’occasion…
Même lady Joan est scotchée.
« J’ai un peu peur qu’ils
n’aient rien pigé, » lui fait-il sur le trottoir sur le chemin du
retour vers le cabinet de lady Joan.
Elle ne peut pas retenir un éclat de rire : « Ah ça, tu peux en être certain ! »
Néanmoins, Shirley rapportera plusieurs choses : Ce qu’aura compris
le représentant des Mountbatten, c’est qu’ils ont un nouveau locataire
solvable.
Et si le gouvernement de sa Majesté ne voit aucun inconvénient à une
installation pareille au milieu de l’océan indien, l’affaire se fera.
Les deux directeurs du ministère eux en restent dubitatifs : ce
qu’ils ont vu est totalement révolutionnaire, « disruptif » comme on
dit…
Et d’une part Lord Paul de Bréveuil est considéré comme
« sérieux » : jusque-là, il a plutôt rendu d’immenses services
au royaume.
En revanche et d’autre part, laisser s’installer un dispositif si « sensible »
au milieu de rien, mais à proximité de la base US de San Diego, des alliés,
certes, mais tout de même, ça pourrait les contrarier s’ils avaient voulu
rapatrier la machine dans un de leur désert. Et puis, il faudra assurer une
sécurité conjointe si on ne veut pas mobiliser une grosse partie de la
« home-fleet »…
« Oui mais il nous fait une
offre qui ne se refuse pas… Et à titre gratuit en plus. Ne passerions-nous pas
à côté d’une telle opportunité s’il choisissait finalement un atoll du
pacifique sous contrôle américain, ou un pays d’Afrique ou du continent
d’Amérique du sud avec tous les risques de dérapages politiques possibles ? »
C’est une machine qui dépassera tout ce qui existe en matière de
« guerre des étoiles » à venir, tout de même…
Et Sir Paul n’avait pas expliqué son attachement aux Chagos, hors le fait
que les bâtiments du Milton Institute of Ocean Research devaient rester sous
contrôle.
« Ce contrôle-là, on peut
l’assumer sous couvert de recherches scientifiques… »
Oui, mais avec tout autant le soutien des bâtiments de la
« home-fleet », par… épisodes seulement.
Tout cela est assez nébuleux pour devoir en référer au cabinet : soit
laisser faire et surveiller, soit y mettre un veto sur un motif absurde, et
résumé tel quel, le choix est vite fait selon la formule habituelle du
« wait and see ».
Après avoir discrètement vérifié que la CIA est au courant du projet
(grâce aux réseaux formés par Junior n° 5 et de Gates, impatient l’un et
l’autre « d’en être »), l’autorisation sera délivrée en catimini par
le 10 Downing-street, non sans avoir vérifié l’inexistence d’une opposition de
la rue de Varenne, ce qui mettra les autorités françaises en alerte…
Une telle machine pourrait être si facilement transformée en arme de
guerre !
Ce qui vaudra à Paul quelques « attentions particulières » des
services concernés.
Dans la même eau, le « cousin Lev » se sera pointé à
l’improviste au bras de la voisine parisienne aux yeux myosotis et au léger
strabisme divergent, Nathalie Lévy jusqu’en Normandie au « Collines de Cabourg »,
l’hôtel-résidence, alors que Paul arrivait de son côté.
« Ah bé, quelle surprise :
Vous aviez réservé une chambre ? »
Alexis, le maître d’hôtel étant en course, c’est Dorothée, la concierge,
qui leur explique qu’à cette époque, les réservations ne se bousculent pas.
« Alors deux chambres ! »
s’empresse de préciser Nathalie, le regard déjà allumé par la présence de Paul…
Déception dans le regard de celui de son chauffeur, l’agent du Mossad.
« J’imagine que vous ne venez
pas par hasard. Vos… autorités veulent savoir quoi au juste ? On ne va pas
tourner autour du pot pendant des siècles… »
Ce qu’il y a dans le bunker et sur quoi travaille Paul.
Direct.
« Oh alors là, ce n’est pas
compliqué : tout le monde sait qu’est enterrée là la machine de sir
McShiant. Mais je vous préviens tout de suite, vous allez être déçus, parce
qu’elle ne fonctionne pas : je ne parviens pas à la régler. »
Ils pourraient juste…vérifier ?
« Installez-vous, je me pose et
nous y allons d’ici 10 minutes. »
On ne peut pas plus franc… Même s’il s’agit de la jouer fine.
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