Pendant que vous aviez fêté une victoire,
Je voulais vous dire que quelques « partrioti »
(des vrais, pas des « populistes »), commémoraient, non pas le
massacre de Sétif, mais une bataille oubliée.
Je ne vais pas vous dire que j’y étais, ce serait vous
mentir ou mentir aux « Services » qui persistent à me filocher, mais
c’était le 249ème anniversaire d’une bataille perdue contre les
troupes du Roy-des-Gauloisiens.
L’année prochaine, ce sera son quart de millénaire…
La fraîcheur et la pluie auront sans doute eu raison de la
détermination des spectateurs qui ont fait le choix de rester chez eux. Les
commémorations de la bataille de Ponte-Novu (8 mai 1769) n’ont pas attiré
autant de monde cette année que l’année passée : Il suffisait, pour s’en
convaincre d’observer le nombre de voitures en stationnement.
En revanche, du côté des politiques et des « figures »
locales, il n’y a eu aucun absent. Les visages les plus connus étaient bien là,
les plus attendus aussi.
En fin d’après-midi, la messe donnée par l’abbé
Mondoloni et les diacres Franceschi et Arrighi s’est tenue sous un crachin
régulier et face à une assemblée clairsemée, la plupart des gens préférant
rester debout pour pouvoir rapidement fuir au cas où le ciel décide
soudainement de s’ouvrir.
Comme l’année dernière, l’abbé Mondoloni a su mettre
son sens de la formule et son audace totale en la matière, au service d’un
propos bien senti. Après avoir prévenu les fidèles (« Il ne faudra pas vous étonner parce que parfois, je perds les pédales.
Mais avec les restes, on essayera de faire la messe »), il s’est lancé
dans une analyse de la situation que la Corse traverse actuellement.
Selon lui, « nous
avons toujours les mêmes problèmes que nous n’arrivons pas à résoudre et que
nous avons même du mal à poser. Le développement humain ne peut pas être
envisagé sans un retour au sujet. Récupérer son identité, culturelle entre
autres, est la condition pour créer un monde plus humain et une interdépendance
librement choisie. »
Puis le discours s’est durci et le propos s’est fait
plus incisif. Avant d’admettre qu’un prêtre « n’est pas censé parler comme ça », l’abbé Mondoloni a fait
preuve de la franchise qui a fait sa réputation, s’en prenant directement à l’État
: « On ne peut pas débarquer dans un
pays qui n’est pas le sien comme si on était chez soi. Quand on arrive en
Corse, on est chez les Corses. »
« Mes
enfants », a-t-il conclu, « on
va s’en remettre au Seigneur et on va lui dire qu’on est un peu dans la panade. »
De longs applaudissements ont suivi.
Puis les commémorations ont repris leur cours. Les
enfants et les Naziunali ont marché en cortège jusqu’au Golu, où les premiers
ont jeté des fleurs pendant que les seconds tiraient au canon. Des gerbes ont
été lancées depuis l’ancien pont détruit et la mémoire des soldats tombés a été
saluée par le « Dio vi
salvi Regina ».
De toute façon, moâ, je chiale à grosses larmes dès la
première mesure.
C’est comme ça et c’est valable pour « la Marseillaise »,
pour Patricia quand elle chante « pour ceux qui n’ont rien » et pour
les vaches des « flamants-roses ».
On ne se refait pas.
« Si j'étais
maître du tonnerre, je m’en servirais pour défendre la liberté de ma patrie.
Mais je persiste toujours dans le désir de la combiner et de l’assurer sous la
protection de Sa Majesté Très Chrétienne ».
Ainsi soit-il.
En 1769 (c’est comme si j’y étais, mais je vous
mentirez en l’affirmant comme ce serait mentir aux « Services » qui
persistent à me filocher), Pascal Paoli est prêt à admettre des négociations
avec le Roy des Gauloisiens.
Cela fait 15 ans que la « Corsica-Bella-Tchi-Tchi »
a acquis son indépendance, sous l’égide du « Babbu di a Patria », Pascal Paoli. Mais il est convaincu de la
nécessité de trouver une issue politique au conflit dans lequel s’engluent la
nation corse et le royaume. Exit Gênes : La République en signant le
traité de Versailles s’est défaite de sa possession insulaire au profit de
Louis XV.
Le généralissime de Morosaglia oriente alors le débat
vers le maintien de la nationalité corse. La préoccupation est assortie d’une perspective
à écarter. À jamais : Celle d’un éventuel retour de Gênes qui a laissé de
très mauvais souvenirq dans l’île.
Mais le Roy et ses ministres ignorent les solutions de
Paoli et rejettent sa volonté de dialogue. Sans même un effet de manche et avec
un souverain mépris.
Le seul chemin qui mène à la Corse est celui de la
guerre déclarée avec désinvolture, entre deux bals à la Cour.
Une missive improvisée, libellée sans même une adresse
et portée par une femme suffira à formaliser les intentions belliqueuses. Paoli
prend acte. Mais sa lucidité n’est pas résignation. Le faiseur de paix
redevient chef de guerre.
Dans la foulée, dès le mois de mars, la cunsulta
réunie au couvent San Francescu di Casinca lance une vaste campagne de
conscription. Tous les hommes de 16 à 60 ans sont appelés à prendre les armes.
Les semaines suivantes, la Corse selon le général de la Nation – il tient son
quartier général à Murato – est traversée par trois lignes de défense : La
crête de Tenda, le Golo de Ponte-Leccia au lago Benedetto, le Vecchio. L’armée des
« Gauloisiens » croit aussi à l’intérêt stratégique de Tenda. Elle
est placée sous le commandement du marquis de Vaux, installé à Oletta et
accompagné de Marbeuf qui se prend une déculottée dans le Nebiu.
Le 4 mai 1769 ce fut le début de ce nouveau conflit
franco-corse, ce jour où Marbeuf fit de fausses manœuvres pour tromper les
nationaux de Paoli.
Le 5 mai les « Gauloisiens » attaquèrent la
ligne de défense avec 5.000 hommes au front et 7.500 en réserve. Les corses
résistèrent mais leur point de faiblesse fut porté à la connaissance des
soldats du Roy par 250 traîtres menés par Boccheciampe d’Oletta.
Je n’aime pas ceux d’Oletta.
Ce point de faiblesse était un passage entre Rapale et
Piève qui n’était protégé que par 50 combattants, 2.000 soldats du Roy
attaquèrent ce passage et percèrent ainsi la ligne de défense corse.
De Vaux, débarquée à Saint-Florent, attaque Paoli à
Muratu, le contraignant à se replier vers
Merusaglia. Marbeuf s’avança alors vers Borgu avec 2.700 hommes. 450
nationaux défendent Borgu mais en vain.
Cette prise Gauloisienne crée le risque pour Pasquale
et son frère Clemente d’être pris en étau. Décision fut alors prise de redéployer les troupes : Les
habitants et soldats du Nebbiu reçurent l’ordre d’évacuer les villages et de se
repositionner en trois point stratégique, Ponte-Novu, Ponte-Leccia et Petralba.
Le 6 et 7 mai les Gauloisiens gagnent Lentu, les cols
de Tenda et San Ghjacumu. Les renforts levés dans toutes les pièves de l’île à
la demande de Paoli furent interceptés par les troupes du Roy massées à de
nombreux point de passage.
Gaffori avait pour ordre de défendre le col de Lentu,
pourtant le 8 mai pour des raisons indéterminées il n’exécuta pas sa mission.
Giocante Grimaldi aurait dû défendre Canavaghja, lui aussi sera infidèle à sa
mission.
Il est 14 heures en ce 8 mai lorsque la bataille commence.
Le combat semblait perdu d’avance, 5.000 « Gauloisiens » s’opposent à
environ 2.000 corses. Pourtant les corses sont impatients et les troupes du Roy,
majoritairement des mercenaires étrangers, sont apeurés. Paoli donne l’ordre
d’attaquer San Ciprianu où les troupes d’élite du comte de Vaux étaient
positionnées. Les nationaux prirent rapidement le dessus. De Vaux demande
l’envoi de renfort à San Ciprianu et d’autres vers Canavaggia et Costa pour
couper une éventuelle retraite corse.
Très vite les gauloisiens sont mis en déroute et
poursuivis par les habitants de la piève de Costera et de Casaconi ainsi que
par les troupes venues de Casinca.
Mais des forces royalistes considérables descendirent
de Lentu et de Canavaghja, les corses poursuivants se retrouvèrent alors poursuivit
et pris entre deux feux. D’une part les fuyards qui voyant arriver les renforts
se retournèrent et de l’autre les troupes venus de la montagne déboulent.
Seule solution pour les soldats corses : Le
regroupement sur la rive droite du pont de Ponte-Novu. Problème, les hauteurs
ouest du pont sont occupées par des troupes du Roy, bien sereines, alors
qu’elles auraient dut être mis à mal par des renforts corses venus depuis le
col de Tenda.
C’est donc 1.900 Gauloisiens qui attaquèrent les
corses de front tandis que 1.200 se ruèrent sur leur flan.
Les corses tentèrent de repasser sur le pont, mais ce
dernier était gardé par des miliciens prussiens sous les ordres de Paoli. Ils
avaient ordre de tirer sur tous ceux qui tenteraient de passer le pont… ordre
qu’ils appliquèrent à la lettre, assassinant les valeureux corses sur le pont,
incapables qu’ils étaient de comprendre les contre-ordres donnés dans une
langue inconnue. C’est l’une des hypothèse retenue par certains historiens, d’autres
parlent d’un mur que Paoli aurait demandé de réaliser sur le pont afin de
rétrécir le passage, mur qui aurait fait perdre du temps au nationaux lors de
leur repositionnement laissant ainsi le temps aux royalistes de faire feux et d’infliger
de lourdes pertes aux patriotes de Paoli.
Pourtant, le militaire royaliste se donne les moyens
de la conquête. Sa force tient à la mobilisation de 45 bataillons de 500 hommes
chacun, à quatre régiments de cavalerie. Il a acheminé dans l’île des soldats
et des armes innovantes à l’image de canons d’une portée de 1.200 mètres. Les
boulets projetés pèsent jusqu’à 6 kg. Une boîte à mitraille dont les balles
atteignent une cible située à 400 mètres, complète l’arsenal. Le modèle est
celui de la modernité performante. Les préparatifs se métamorphosent en
affrontement dès le 3 mai.
Le fond de l’air est poussiéreux et chaud, ce jour-là,
et les Gauloisiens s’emparent de Borgu, butent sur les berges du Golo avant de
se replier sur Ortale. Le 4 et le 5 mai, ils prendront le contrôle de Rapale et
délogeront Paoli de Murato.
La supériorité numérique et technique des gauloisiens
a donné le ton. La fin de partie a semble-t-il sonné entre les adversaires.
Pourtant, le 6 mai, le combat tourne à l’avantage des Corsi armés de mousquets.
Cinq assauts sont contenus. Les Corsi n’ont pas le temps de savourer leur
exploit. Le lendemain, la première ligne de défense de Paoli cède. Les
nationaux refusent de déposer les armes. La fougue, les rêves de liberté
tenaces font surgir des intentions extrêmes. Alors, on se battra jusqu’au
dernier homme. Tant pis si les renforts escomptés manquent à l’appel !
Sur les chemins qui mènent au nord de l’île, De Vaux
et ses généraux ont pris soin d’intercepter les villageois en ordre de
bataille, tandis que le front se déplace le long du Golo. Le 8 mai, dès le
début de l’après-midi, l’armée nationale marche sur Lento. Elle sera accueillie
par les tirs de l’artillerie Gauloisienne. 5.000 Gauloisiens attendent 2.000
Corsi. Le moment décisif intervient lorsque des régiments du Roy
supplémentaires débouleront de la montagne. Sous le feu ennemi, les insulaires
entrevoient une solution : Rejoindre la rive droite du pont de Ponte-Novu. Puis
franchir le Golo en crue.
Le chaos ambiant sera porteur de bravoures
extraordinaires.
Au-delà de la supériorité numérique de l’adversaire,
la chronique du drame fait appel à une erreur tactique manifeste. La négligence
des généraux de Paoli pèsera lourd.
Dans le feu de l’action, ils ont oublié d’investir les
collines en surplomb du pont. La vacance du territoire n’échappe pas aux troupes
du Roy. Ils prennent aussitôt position et tirent comme sur des lapins les Corses
en contrebas. La défaite se nichera aussi dans le malentendu. L’épisode met en
scène un contingent de miliciens prussiens, sous les ordres de Gentili, et dont
la mission consistait, on vient de le préciser, à abattre tous ceux qui tenteraient de franchir le pont.
Les Prussiens obéissants s’exécutèrent sans faillir, sans se laisser distraire
par les contre-ordres proférés dans une langue qu’ils ne comprenaient pas. Leur
constance décime les rangs insulaires. Elle cause un effroi supplémentaire.
Quant à Gaffori, il arrivera avec les siens à Ponte-Novu
après la bataille. Le général a mal évalué les distances et le temps de trajet.
Il assiste aux étapes ultimes : La fuite dans le
maquis, l’agonie des blessés.
S’il baisse les yeux vers la rivière, c’est une eau
rouge qu’il observe : Le Golo s’est changé en miroir sanglant.
Toutefois, s’il est un exemple de défaite au caractère
fondateur, c’est bien la bataille qui se livra sur les bords du Golo en 1769.
Voltaire précisera, dans « Le Précis du Siècle de Louis XV » que : « L’arme principale des Corses était leur
courage. Ce courage fut si grand que dans un de ces combats, vers une rivière
nommée Golo, ils se firent un rempart de leurs morts pour avoir le temps de
recharger derrière eux avant de faire une retraite nécessaire ; leurs blessés
se mêlèrent parmi les morts pour affermir le rempart. On trouve partout de la
valeur, mais on ne voit de telles actions que chez les peuples libres. »
Libertà.
Moâ je retiens la légende du « petit-curé »
(je crois avoir retenu qu’il était de Sermano, mais ce n’est pas certain),
retrouvé le lendemain matin mort de ses blessures, une bible dans une main, un
fusil dans l’autre.
Vous direz ce que vous voudrez, mais de toute façon,
les « Corsi » n’ont aucune leçon de patriotisme (l’amour de sa
patrie, de sa Terre, de son pays) à recevoir de quiconque.
Même pas de « Jupiter » et ils l’ont encore
montré une nouvelle lors de la seconde guerre mondiale quand ils ont jeté les
troupes de l’axe avec leurs faibles moyens.
C’est pourquoi je pleure toujours dès la première mesure
du Dio Vi Salvi Régina et de La Marseillaise.
C’est comme ça…
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