Qu’on se le dise…
Un mariage célébré à Las Vegas peut ne pas
avoir de valeur en « gauloisie-impériale », mais à certaines
conditions…
Il n’y a pas de mariage sans consentement.
C'est ce que la Cour de cassation vient de rappeler dans une décision du 19
septembre dernier.
Un couple se marie à Las Vegas en 1985 :
Félicitations à la dame d’avoir trouvé « un pigeon » et tous nos vœux
de bonheur à l’heureux « élu » !
Sauf que sans pour autant divorcer au
préalable, Madame se marie une nouvelle fois en « Gauloisie-impériale »
en 1995 avec un autre homme…
Une croqueuse insatiable…
Son époux découvre finalement par hasard l’existence
de cette première cérémonie de mariage à Las Vegas avec un autre que lui-même :
Floué !
Il engage d’abord une procédure de divorce
puis, finalement, intente un procès contre son épouse pour demander la nullité
de leur propre mariage.
Et la Cour de cassation est finalement amenée
à trancher le litige.
Cour de cassation, première chambre civile
Audience publique du jeudi 19 septembre 2019
N° de pourvoi :18-19665
Mme Batut, président,
SCP Lyon-Caen et Thiriez, SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer
et associés, avocat(s).
REPUBLIQUE
FRANCAISE
AU NOM DU
PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu
l’arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 22
décembre 2017), que M. P… et Mme J…, de nationalité française, se sont mariés
le 21 juin 1995 à Paris ; qu’en octobre 2009 et janvier 2010, les époux ont
tous deux déposé une requête en divorce ; que, soutenant avoir découvert l’existence
d’un précédent mariage de Mme J…, célébré avec M. L… à Las Vegas le 8 avril
1981, M. P… l’a assignée en nullité de leur mariage le 3 avril 2012 ; que M. L…
a été appelé en intervention forcée ;
Attendu que M. P… fait grief à l’arrêt de rejeter sa
demande en annulation de son mariage avec Mme J… et sa demande de
dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que la recevabilité d’une action en nullité du
mariage pour absence de consentement se prescrit par trente ans à compter du
jour de la célébration du mariage ; qu’en matière d’état des personnes, les
fins de non-recevoir ont un caractère d’ordre public ; qu’après avoir constaté
que, « par acte d’huissier, délivré le 3 avril 2012, M. P… a fait assigner Mme
J… devant le tribunal de grande instance de Paris afin de voir annuler leur
mariage célébré le 21 juin 1995 à la mairie de Paris 2ème arrondissement
compte tenu de l’existence d’un premier mariage contracté par Mme J… avec M. L…,
le 8 avril 1981 à Las Vegas (Etats-Unis) », la cour d’appel, qui a prononcé la
nullité du mariage célébré le 8 avril 1981, soit plus de trente après sa
célébration, sans relever d’office la fin de non-recevoir tirée de la
prescription de l’action en nullité, a violé les articles 146 et 184 du code
civil, ensemble les articles 122 et 125, alinéa 1, du code de procédure civile
;
2°/ que le mariage est nul lorsque les époux ne se
sont prêtés à la cérémonie qu’en vue d’atteindre un but étranger à l’union
matrimoniale, lequel doit être exclusif de toute intention conjugale ; qu’en se
bornant à énoncer que les époux ne se sont prêtés à la cérémonie du mariage «
qu’en vue manifestement d’atteindre un résultat étranger à l’union matrimoniale
», sans préciser quel but étranger au mariage avait pu être recherché par les
époux, la cour d’appel a privé sa décision de base légale des articles 146 et
184 du code civil ;
3°/ qu’en se bornant à énoncer que « les circonstances
tant préalables que postérieures à l’événement célébré à Las Vegas, démontrent
que leur consentement à mariage faisait défaut », sans rechercher quelle était
l’intention des époux au moment de la célébration du mariage, la cour d’appel a
de nouveau privé sa décision de base légale au regard des articles 146 et 184
du code civil ;
Mais attendu, d’abord, qu’aux termes de l'article 2247
du code civil, les juges ne peuvent suppléer d’office le moyen résultant de la
prescription ; que cette règle s’applique même lorsque la prescription est d’ordre
public ; qu’il en résulte que les juges du fond ne pouvaient relever d’office
la prescription trentenaire de l’action en nullité du mariage célébré le 8
avril 1981, prévue à l’article 184 du code civil ;
Attendu, ensuite, que la cour d’appel a relevé que Mme
J… avait présenté la cérémonie à Las Vegas à ses amis comme un rite sans
conséquences, que le voyage n’avait pas eu pour but ce mariage puisque les bans
n’avaient pas été publiés, que Mme J… et M. L… n’avaient entrepris aucune
démarche en vue de sa transcription à leur retour en France, qu’ils n'avaient
pas conféré à leur enfant le statut d'enfant « légitime » puisqu’ils l'avaient
reconnu, sans aucune allusion à leur mariage dans l’acte de naissance, et qu’ils
avaient tous deux contracté des unions en France après ce mariage ; qu’elle en
a souverainement déduit que le consentement à mariage faisait défaut, de sorte
que, l’union célébrée le 8 avril 1981 étant inopposable, la demande d’annulation
du mariage du 21 juin 1995 devait être rejetée ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. P… aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette
sa demande et le condamne à payer à M. L… la somme de 3.000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première
chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf
septembre deux mille dix-neuf et signé par lui et par Mme Randouin, greffier de
chambre, qui a assisté au prononcé de l’arrêt.
En voilà un qui va devoir casquer pour
pouvoir divorcer…
Car, avec cet arrêt, la Cour de cassation
considère que l’annulation judiciaire du mariage est impossible : En
effet, l’absence de consentement à mariage rend l’union célébrée à Las Vegas
inopposable, c’est-à-dire inexistante.
Et on ne peut pas annuler ce qui n’existe
pas.
Question de logique…
Et, dans cette affaire de bigamie-avortée, pour
caractériser l’absence de consentement à mariage, les juges du fond relèvent à
travers un faisceau d’indices l’absence de souhait de s’engager réellement dans
les liens du mariage du couple s’étant livré à « ce rituel » (barbare,
sectaire ?) d’un autre âge à Las Vegas.
Les juges constatent d’abord que le voyage du
couple aux États-Unis n’avait pas pour objectif le mariage puisque le couple n’avait
pas préalablement publié les bans.
À leur retour en « Gauloisie-impériale »,
le couple n’avait pas fait retranscrire le mariage dans l’état civil national.
De plus, à la naissance de leur enfant (parce
qu’ils ont copulé de façon fertile…), le couple l’a déclaré comme enfant
naturel et non comme enfant né du mariage.
Enfin, malgré la cérémonie à Las Vegas,
chacun des membres de ce couple s’était finalement marié avec une autre
personne sans demander l’avis de personne.
L’histoire ne dit pas si ces autres mariages
ont été aussi féconds que le précédent « coïtage ».
Peu importe me direz-vous.
Il n’empêche que voilà peut-être bien une
histoire de PMA déguisée : Elle veut un gamin, elle trouve un inséminateur,
l’emmène à Vegas faire la fête et son enfant devient « naturel ».
Elle lui cherche un père et se marie pour de
bon quelques années plus tard.
Mais voilà, « femme folle
à la messe », ils se mettent d’accord pour divorcer et tout
d’un coup le « futur-ex » se rappelle qu’elle a déjà été mariée par
ailleurs : Une vieille histoire dont il ne veut pas assumer la paternité probablement
légitime sinon légale…
Le gamin de Madame a alors presque 13 ans
quand il épouse la mère et probablement 27 ans – majeur et vacciné – au moment
du divorce…
Que voulez-vous que fasse le juge ?
Il n’allait tout de même pas provoquer un « désordre
public » en validant une bigamie et une polyandrie en même temps !
Qui de toute façon n’existent pas en droit
pour être nulle de nulle existence…
Bé justement, il préfère décider que ça n’a
jamais existé !
Retour à la case divorce.
D’autant qu’il avait sous les yeux tous les
éléments pour se le permettre.
Il n’empêche qu’il est des femmes qui restent
redoutables à toujours obtenir ce qu’elles veulent…
Bonne fin de journée à toutes et à tous !
I3
Prescription de trente ans... Ça laisse un peu de temps... ��
RépondreSupprimerPas tout-à-fait 30 ans, justement !
SupprimerEt puis un mariage ne se prescrit pas mais se défait, par décès ou par divorce (ou par es voies naturelles).
Il n'empêche qu'il y en a un qui avait quand même du cambouis dans les yeux, ou alors madame savait faire "des trucs" qui auront emporté son jugement…
Mais là encore, ça n'aura duré que quelques temps…
Bien à vous !
I-Cube