Le rapport Combrexelle
Il était attendu hier, mais a largement
« fuité » au préalable : C’est pour cette raison que j’ai eu le
temps d’en faire un « petit-billet » à votre attention dans la
journée.
Et j’avoue ma surprise.
Souvenez-vous, il y a tout juste un an tout le monde
s’agitait à la découverte d’un paquet de propositions révolutionnaires émises
par un MEDEF qui sortait son gros bazooka pour dynamiter le code du travail.
SMIC, répartition du temps de travail, retour à des
discussions employeur/salarié moins encombrées de formalisme, tous les
ingrédients étaient réunis pour déclencher une véritable tempête chez les
« syndicaleux » de salariés et au sein d’un gouvernement dont la
doctrine n’a jamais su s’accommoder de la notion d’entrepreneur.
Ces propositions ne furent que lettre-morte, évidemment
suivies d’aucune mise en pratique et la tension redescendit gentiment.
C’est donc avec une relative surprise qu’on apprend,
un an tout juste après ce premier ballon d’essai patronal, que le gouvernement
tendrait à présent une oreille attentive à une charrette de propositions toutes
aussi révolutionnaires du célèbre Think-Tank Terra-Nova.
Terra Nova, c’est cette association à haute densité de
« soces », lucrative sans but pratique qui pond, de temps en temps,
l’une ou l’autre étude richement médiatisée pour prouver que, par exemple,
l’immobilier mérite d’être réformé à coup de trucs innovants comme des taxes et
des contraintes supplémentaires : Nous y reviendrons, car l’immobilier se
meurt.
C’est de ce Think-Tank à penseurs formatés que sont
régulièrement issues les subtiles recommandations économiques d’augmenter les
dépenses et les taxations tous azimuts pour justifier la politique keynésienne qui
ont si aimablement et constamment échoué depuis au moins un quart de
siècle : On a changé d’univers économique depuis la dernière guerre
mondiale et eux ne l’ont pas encore vu.
Désormais, l’économie est « globale »,
mondiale, numérique, dématérialisée dans de plus en plus de secteurs d’activité
et c’est la notion même de travail, de travail salarié surtout qui en est tout
chamboulé.
Il n’y a d’ailleurs aucun doute avec
« l’uberisation » croissance de toute activité (j’espère pouvoir y
revenir une autre fois), qui s’installe dans chaque « niche » fiscale
ou sociale, traversant les frontières en un ou deux clics, tel que demain, nous
n’aurons plus les moyens de financer l’inactivité des ex-laborieux, libérés du
lien de subordination propre au « travail salarié ».
Ça se passe sous le nez de tout le monde et personne
ne veut le voir, ni bien sûr en anticiper quelque peu les conséquences dans une
cécité magnifique.
Je le répète, dans 10 ans, après demain, 7 % des
métiers auront disparu, remplacé par des algorithmes, des robots et des
« big-data » surpuissant.
C’est dire qu’il faudra compter non plus avec 6,5
millions de chômeurs, mais bien avec 10 voire plus…
Et comment donc seront financées les
« inactifs », chômeurs, retraités, malades et autres ?
Pas sur les salaires à verser, en tout cas, ce n’est
« mécaniquement » pas possible.
Et avec trop d’inactifs non-financés, il ne s’agit
plus de compter sur eux pour se payer de la croissance au-delà de l’inflation…
Ce qui est d’ailleurs déjà le cas.
La préparation psychologique du terreau
« soce-dogmatique », à mille lieues de ces préoccupations, a été
réalisé par le travail de « Bébert Bad-inter » et du professeur
d’université en droit du travail « Torino-Lyon-Caen », pas celui du
TGV mais de Nanterre (pas la meilleure non plus, lui non plus malgré son
pedigree), qui remettaient ouvertement en cause un droit du travail devenu
illisible et proposaient même de le réformer en profondeur.
Chiche, qu’on s’est dit entre « juristes de
terrain » !
Le Think Tank s’est donc récemment fendu d’un rapport
rédigé par « Gilbert Sète », un économiste de gôche et théoricien de
la réduction du temps de travail dans la droâte ligne de
« La-roue-tout-roux » et de la flopée de « déclinistes »
qui virevoltent autour, et de Maître « Barre-tel-est-mis », autre « spécialiste »
du droit social.
Première surprise (modérée) : Le nouveau duo confirme
qu’effectivement, le droit du travail gaulois est un tantinet complexe et que
cette complexité pourrait bien avoir des effets négatifs sur le plan
économique.
Ah oui ?
Depuis le temps qu’on le serine jusqu’ici…
Seconde surprise, plus fondamentale celle-ci : Au lieu
de préconiser une bonne volée de taxes, comme à l’habitude du Think Tank, nos
deux rapporteurs tentent de promouvoir « autant
que possible » la négociation collective et l’accord entre partenaires
sociaux.
Insuffisant, mais pourquoi pas ?
C’est-à-dire de faire jouer un principe tout en
nuance, proche de la subsidiarité, qui veut que ce soit les acteurs les plus
proches du problème qui le traitent, ce qui revient en substance à placer le code
du travail comme norme par défaut, aisément remplaçable lorsqu’il le faut au
niveau local entre adultes consentants.
Autrement dit, on fait passer le droit conventionnel
avant la norme de droit règlementaire ou légal.
Je vous demande un peu…
Voilà bien une novation dans la hiérarchie des sources
du droit positif, mais on en a avalé d’autres plus ardues.
D’autant que c’est tellement révolutionnaire, que ça
existe déjà, dès lors que la convention est plus avantageuse que la loi.
Et là, contrairement à ce qui aurait pu être
souhaitable, il n’est pas question de changer le principe.
Alors quoi ? Tout ce foin pour un retour aux
fondamentaux ?
Dans cette vision nouvelle du travail en
« Gauloisie-laborieuse », les partenaires sociaux, dans chaque entreprise
ou chaque branche de métier, seraient considérés comme des gens normaux,
pourvus d’un cerveau pas complètement spongieux ou vérolé aux substances
interdites liposolubles, avec une responsabilité d’adultes consentants pas
totalement annihilée et auraient donc toute latitude, via un accord collectif,
de déroger à la loi et substituer les normes conventionnelles aux normes
réglementaires, d’adapter les normes du Code du travail (seuils sociaux, durée
du travail, niveau des rémunérations) aux besoins locaux.
Alors oui, sur le papier, c’est carrément libéral.
Sauf que ce sera encore et toujours à l’avantage des
salariés, puisque c’est comme ça que ça existe déjà.
Ça l’est même tellement que ça rejoint les travaux
d’un autre think-tank, nettement moins à gauche que le Terra Nova en question,
et qui aboutit globalement aux mêmes conclusions : L’Institut Montaigne, dans une
étude récente, dénonce « la construction
législative, jurisprudentielle et doctrinale du droit du travail (…) historiquement datée ».
Une façon polie de dire qu’il s’est fossilisé…
Et préconise lui aussi que les accords au niveau des
entreprises ou des branches priment sur le Code du travail, ceci permettant de
redonner un peu de marges de manœuvre et de performance au modèle actuel.
Mais à condition de faire sauter le verrou du
« plus avantageux ».
Quid des interprétations futures des tribunaux ?
D’autant qu’il est à noter qu’a contrario de ses élites, le peuple a largement démontré à
plusieurs reprises être bien plus souple que celles-ci en matière de jour
hebdomadaire chômé, tel qu’un sondage montre que près des trois quarts des gaulois
sont prêts à abandonner les 35 heures et les deux tiers à bosser même le
dimanche.
Et là où l’affaire prend un tour vraiment comique,
c’est que ces propositions révolutionnaires seront présentées et discutées avec
exactement la même démarche que celle qui présida pour la belle et grande
réforme « Mc-Rond ».
En effet, dès le départ, la réforme du droit du
travail se place avec un handicap de taille, certainement connu et déjà pris en
compte par l’équipe en place : Un accord de branche ou au sein d’une entreprise
impose une forte syndicalisation des salariés, et, d’une façon ou d’une autre,
que ces syndicats ne s’opposent pas stérilement aux changements proposés.
La belle aubaine, s’il en est !
Or, si d’emblée, cette absence d’opposition paraît
particulièrement difficile à obtenir, l’augmentation de la syndicalisation
semble, elle, totalement inatteignable.
En outre, la moindre négociation concernant le droit
du travail devra se faire en incluant le ministère du Chômage dont la ministre
vient tout juste d’être renouvelée. Et elle a tout ce qu’il faut pour tripoter
le succès fiévreusement : Elle s’y engage même et promet de mettre les doigts
dans le droit !
Il était temps, notez bien.
Autrement dit, rassurez-vous : Tout comme les
propositions initiales de « Mc-Rond » furent copieusement rabotées
pour n’être plus qu’une énième couche de législation dans un maquis franco-gaulois
de règlements touffus parfaitement répulsif, on peut déjà parier que la réforme
du droit du travail dont il est question fera la même trajectoire ridicule : Celui
d’une baudruche pleine d’air chaud, brutalement ouverte en plein air !
Et là, un an après, stupéfaction avec le rapport
susmentionné : On est bien strictement dans ce qui vient d’être
décrit :
– Le fait majoritaire va devoir aussi s’imposer dans
les négociations entre employeurs et syndicats. C’est, sans surprise, une des
propositions du rapport que l’ancien directeur général du Travail, conseiller d’État, la
mesure, qu’il propose de généraliser « à compter de
2017 ».
Il faut dire que « Menuet-Valse » avait
tracé l’axe en le chargeant de réfléchir sur des mesures permettant d’ « élargir la place de l’accord
collectif dans notre droit du travail ». Aucune déception.
S’il ne donne pas toutes les clefs aux entreprises,
comme l’a proposé l’Institut Montaigne, il suggère de réduire singulièrement la
place de la loi dans notre édifice juridique social et de modifier en ce sens
la Constitution « en inscrivant dans son préambule les
principes de la négociation collective ».
Je vous demande un peu…
– Au moins la 26ème de 44 propositions est
la plus osée : Le rapport forme le « projet à moyen terme,
c’est-à-dire dans un délai maximal de
quatre ans, d’une nouvelle architecture du Code du travail faisant
le partage entre les dispositions impératives, le renvoi à la négociation
collective et les dispositions supplétives en l’absence d’accord ».
Ce que nous venons de dire que ça existe déjà.
Là où il y a novation à prévoir, c’est qu’il veut
limiter le caractère impératif de la loi à quelques règles d’ordre public
social : Comme annoncé lundi dernier à la conférence de presse, les 48
heures de durée maximale de travail par semaine, le SMIC en matière de
salaires, la durée légale de 35 heures et les conditions de travail et de
sécurité.
Néanmoins, une bonne partie de l’ordre public serait
renvoyé au niveau des branches, dont il veut accélérer la concentration sur
trois ans.
Il reviendrait aux conventions de définir l’« ordre public conventionnel qui s’applique à l’ensemble des
entreprises du secteur et qui est opposable, sous réserve de l’application du
principe de faveur [d’être plus
avantageux pour les salariés], à l’ensemble des
accords d’entreprises », dont la durée de validité serait limitée à 4 ans.
Le dispositif préconisé serait donc centré sur ces
derniers, qui s’appliqueraient en priorité, sous réserve, certes, de l’ordre
public social législatif et conventionnel, mais dont le champ serait réduit.
Autrement dit, c’est une façon de dire que le
législateur a été finalement incompétent jusqu’à être nul (gras et laid)
à fournir la matière législative dans ces domaines.
Idem des administrations de tutelle.
Mais, mais, mais… une incompétence provisoire,
n’est-ce pas !
– À court terme, soit dès le « courant de l’année 2016 », seraient « cibl[és] les domaines sur lesquels, du point de vue social et économique, il
y a une urgence à développer la négociation
collective et à adapter, en conséquence, les
dispositions du code du travail ».
En l’occurrence, ce qu’il appelle les « quatre piliers de la négociation que
sont le temps de travail, les salaires, l’emploi et les
conditions de travail ».
Et il a raison : Ce sont les piliers de la
compétitivité qu’il ne faudrait pas débrider, des fois que ça remplirait trop
vite les caisses de la « chose pue-blique » et le portemonnaie des
entrepreneurs et de leurs salariés, suppose-je.
Autrement dit aussi, un outil pour le patronat afin de
lui permettre de fermer l’accès aux « nouveaux-venus » face à leurs
entreprises déjà en place sur leur créneau, ayant pignon sur rue et les moyens
de se syndiquer…
Je ne vous dis pas le carnage quand ils s’y mettent
tous ensemble.
– Autre point clef : « Lorsque l’emploi est en
cause et que l’accord vise à le protéger, le maintenir, le préserver
et le développer, l’accord et l’intérêt collectif qu’il incarne priment sur
l’intérêt individuel concrétisé par le contrat de travail. »
Dans le cas où un salarié refuserait
les conséquences de l’accord sur son contrat de travail, il ne propose pas de
revenir sur le fait qu’il bénéficie d’un licenciement pour cause économique,
mais prône des indemnités spécifiques de licenciement « moins attracti[ves] ».
Seraient aussi concernés les accords
de mobilité.
Ou comment déménager en douce ses salariés…
Mais c’est rédigé de telle sorte que ça peut viser
d’autres domaines, telle que l’ancienneté, les conditions de l’avancement
« aux choix » et tant d’autres qui font le bonheur du laborieux,
comme les chèques-vacances ou titres-restaurants, voir le périmètre de la
complémentaire obligatoire…
Bref, disparition programmée de la notion de
consentement au contrat !
Parmi les autres propositions, il en figure des très
diverses.
Côté État, il y a notamment la « limitation du nombre de réformes législatives du
droit du travail en fixant un agenda social annuel et en le respectant » ou encore l'« application du principe selon lequel toute disposition
nouvelle du code du travail doit être gagée par l’abrogation d’une
disposition devenue obsolète du même code ».
Du vent, bien sûr !
Il préconise aussi l’« encadrement dans le temps des conditions de recours
judiciaire contre les accords collectifs avec application de règles inspirées
du contentieux réglementaire » mais également de reconnaître aux
services déconcentrés de l’État la
capacité de « contester les
accords collectifs d’entreprise devant le
tribunal de grande instance ».
Faut savoir : On fait de la place à ces accords,
où on les conteste systématiquement ?
Il suggère encore une « assimilation législative de l’accord de
groupe aux accords d’entreprise ».
Ce qui est déjà le cas dans plusieurs types d’accord.
Et évoque le lancement d’une expérimentation
relative aux accords collectifs concernant les filières et les sous-traitants
dans le cadre de la notion d’« entreprise étendue ».
Je ne vous dis
pas : C’est déjà assez compliqué comme ça dans les accords de chantier et
de sous-traitance.
Enfin
passons : La baudruche est lancée et n’apporte pas grand-chose de nouveau et naturellement n'empiète aucunement sur le droit de la fonction publique, toujours autant protégée alors que l'hospitalière n'en peut plus.
Après rabotage
et passage devant le Parlement, il est probable qu’une fois de plus, on
fossilisera le droit du travail qu’il s’agirait au contraire de revigorer en le
simplifiant vraiment.
C’est assez magnifique :
On aurait pu penser à un
régime unique, on se retrouve avec une myriade de régimes futurs, comme à la
belle époque des 35 heures de « Titine-Eau-Brie », où finalement on
avait à faire à 5 SMIC nationaux…
Il a fallu « Fifi-le-déchu », sous « le
Chi » et « Raf-la-main-sur-le-cœur », pour remettre de l’ordre
dans ce socle social incontournable-là !
Bref, on est reparti pour la même cagade…
La faute à l’autisme des « sachants » et de
leur ministre qui ne savent décidément pas ce qu’est une entreprise.
Et en plus, ils ont l’impression de
« travailler » !
Quel fouillis! Je ne comprends à peu près rien à votre article ...
RépondreSupprimerConséquence : il va falloir que je me coltine le boulot moi-même!
Bon courage alors !
SupprimerCa y est! Je viens de pondre un article ... Et ce n'est pas un oeuf de dinosaure!
SupprimerBien !
RépondreSupprimerA vous lire !
Bonne journée.