Soixante-quatrième
chapitre : Mise en place.
Avertissement : Vous l’aviez compris,
ceci n’est qu’un roman, une fiction, une « pure construction intellectuelle »,
sortie tout droit de l’imaginaire de son auteur.
Toute ressemblance avec des personnages, des lieux, des
actions, des situations ayant existé ou existant par ailleurs dans la voie
lactée (et autres galaxies), y compris sur la planète Terre, y est donc
purement, totalement et parfaitement fortuite !
Fin janvier, la peinture est enfin sèche dans les
nouveaux locaux semi-enterrés, dits « le bunker », du
« petit-bois » en contre-pente de Cabourg et les matériels
informatiques, terminaux et serveurs, sont livrés, montés, câblés et connectés
à l’intranet de la CISA et à un réseau sécurisé via des
« certificats », près pour devenir l’extranet des réseaux à venir des
services « abonnés » pour l’heure inexistants.
Paul « tourne » entre le Kremlin-Bicêtre en
semaine, ses voisines de volupté oubliée de Paris sur berges, et Cabourg en fin
de semaine où il a la bonne idée de se présenter non pas en « boss »
ni même en propriétaire du « Les collines de Cabourg », mais
incognito sous l’identité de Sir Archibald Kingsland où il bluffe tout le monde
avec son accent anglais sur-joué.
Un visiteur régulier qui intrigue le personnel sur
place, qui arrive en moto immatriculée en France dont ne sait où, manifestement
en couple avec « l’habituelle » du second étage, Matilda « la
silencieuse » qui passe ses journées à dormir ou à se promener, empruntant
quelques fois la petite Twingo décatie mise à sa disposition, avec qui il
déjeune parfois et dîne le plus fréquemment.
Qui reçoit également un homme élégant, manifestement un
« patron », lui, à l’autorité naturelle et plus âgé, où ils
s’échangent des « Charlie » et des « Gustave » sur le ton
aimable des « grand secrets », parfois en présence de Matilda et
d’une blondasse « Espelette » assez moche, Nathalie la-rouquine, qu’on
prend volontiers pour la maîtresse du type distingué…
C’est l’occasion pour Paul de suivre la fin des
travaux d’aménagement du futur site technique de la CISA et surtout de faire
connaissance du personnel qui travaille dans la résidence normande de son
grand-père.
Il y a là Alexis, le directeur-concierge de l’activité
hôtelière proprement dite. Un quinqua divorcé qui loge sur place au second
étage sous comble, où niche toujours Matilda et deux des employées du
restaurant. Une tête sympathique, bilingue, au trois-quarts chauve, portant
beau le bouc, en recyclage professionnel après avoir été maître d’hôtel au pied
du Mont-Saint-Michel pendant des décennies et responsable de l’accueil du
« Musée
Mémorial Bataille de Normandie » à Bayeux plus récemment : il connaît son
métier et la région, alors qu’il est natif de Montauban et en a gardé les particularités
de langage, comme la locution spéciale du « avec plaisir » après qu’on l’ait remercié pour un service
rendu ou un renseignement donné, typique du sud-ouest.
C’est lui qui s’occupe aussi de l’entretien des abords
et rend des comptes à Jean-Charles par téléphone et Gustave, l’intouchable, en
direct quand il passe.
Paul découvrira un peu plus tard la femme de chambre
et lingère. Dorothée. La bouche de travers, blonde, qui roule de la hanche, vraisemblablement
quadra et ne manque pas l’occasion de rappeler qu’elle a été Miss de beauté dans
sa jeunesse, en Galice, sa région d’origine.
Naturellement, elle ne concoure plus à rien pour avoir
radicalement changé depuis bien longtemps, s’être largement empâtée, là, là et
là, mais reste toujours souriante et serviable.
Elle loge à Trouville sur les bords de la Dives avec
ses grands-enfants et son mari qui fait serveur dans un des restaurants de
Deauville sur mer…
Quant au restaurant où il prend ses petits-déjeuners
et parfois ses dîners quand il arrive sur le tard, c’est réellement un
établissement de filles !
Mylène n’a pas menti, sauf sur la
« qualité » du personnel qui ne vaut ni une Virginie, ni une Elsa…
Une salle coquette, bien entretenue, Mylène n’a pas
lésinée, et une cuisine pleine de spécialités locales, fruits de mer, viandes
bien saisies ou en sauce, poissons, légumes frais mitonnés ou cuits à la
vapeur, plateau de fromages gigantesque où on trouve même quantité de chèvre et
de brebis, desserts normands, souvent à la crème, délicieux.
Seule la cave à vin reste basique : deux ou trois
blancs secs dont un d’Alsace, un liquoreux, deux bourgognes, un chablis, du vin
de Loire, et quelques bordeaux.
Elle sera à améliorer via les conseils téléphoniques de
Mylène et instructions de Jean-Charles.
La bière est presque meilleure, servie bien fraîche et
sans trop de col…
Le bar est correctement fourni en apéritifs et
digestifs, mais sans plus : d’une part, il ne faut pas demander une Chartreuse
et savoir se contenter d’un Cointreau. Et puis, question cocktail, si les
fondamentaux sont présents au bar, le livre des recettes est souvent utilisé
dès que ça devient inhabituel.
Quant aux viennoiseries matinales, elles croustillent
et sentent vraiment très bon : un bon point.
En revanche, si le capuccino ou les cacaos sont des
réussites, le café laisse parfois à désirer : il y a pourtant un
percolateur tout ce qu’il y a de moderne…
Au début, il ne les a pas toutes croisées, par exemple,
Irène, qui œuvre en cuisine avec une stagiaire, Emmanuelle.
La première se révélera, blonde,
« grassouillette » et « molle » de partout mais fort
aimable, jamais un mot au-dessus de l’autre, même en cas de casse intempestive
et la seconde ne sort heureusement pas de sa cuisine avec son large sourire et
son tchador vissé sur le crâne…
Mais il y en aura d’autres, et pas que piquées des
vers…
En salle, on retrouve la chef de rang qui prend
souvent conseil auprès d’Alexis, Christelle et ses grands carreaux devant les
yeux qui n’améliorent pas sa physionomie, une rousse sombre, longue et souple,
qui fait aussi les courses avec Irène, et sommelière pas très avertie,
charmante mais pas très « sexy ».
Elle loge à Hérouville-Saint-Clair, en banlieue de
Caen, dans un HLM après avoir arrêté sa carrière de cascadeuse, s’être
reconvertie en pizzaïola et essuyé un dépôt de bilan pour avoir été plaquée par
son mec du moment…
Elle est assistée en salle par Nadia, une fausse
blonde, algérienne de naissance, la Cotorep du lot, pas sans charme mais sans
plus, et Rosetta une autre blonde, mais authentique celle-là, au nez busqué et
à l’accent polonais qui persiste à apprendre le français directement sur
place !
Un joli sourire, une fille aux gestes doux malgré sa
carrure un peu masculine. Elles logent toutes les deux au second étage de la
bâtisse principale.
Et Mylène, les a prévenues que « le patron »
n’est personne d’autre que le « six-coups » de la rive gauche de la
Seine : « Méfiez-vous,
mesdames ! »
Ce qui les aurait toutes poussées à accepter leur
poste…
Heureusement qu’il y a Sir Kingsland, parce que Paul
n’a pas trop la tête à ça et aucune ne provoque vraiment des poussées
irrésistibles de libido…
Et souvent, on promène Paul au premier, jamais dans sa
chambre-bureau du second, ou dans les nouveaux bâtiments construits par
Florence : de la sorte, il a l’occasion de visiter presque toutes les
chambres.
Des pièces toutes confortables, fonctionnelles, décorées
avec goût avec accès à internet où Paul peut travailler avec Huyck le
hollandais, exceptionnellement jusqu’à l’aube.
Florence aura réussi le tour de force de les rendre
invisibles depuis l’entrée du parc les nouveaux bâtiments où se situent les
16 chambres : le chemin qui mène à la terrasse d’accueil serpente en effet de
face et ces nouveaux bâtiments sont implantés légèrement de biais, vers
l’intérieur dans un vaste « U » qu’ils forment avec le bâtiment
d’origine.
Et comme ils sont partiellement enterrés, au moins pour
les plus éloignés du fait de la pente naturelle du terrain, il faut vraiment
contourner le bâtiment pour les apercevoir, notamment pour rejoindre le parking
arrière ou les entrées des locaux techniques et celui des
« fournisseurs », près de la cuisine, à gauche.
Ils restent invisibles pour un visiteur passant
seulement par la route, pour ne même pas être plus hauts que le faîte du toit
du bâtiment originel, de type local qui est déjà lui-même en surplomb de la
route.
Une belle réussite architecturale, d’autant qu’à
l’intérieur du « U » se retrouve la piscine ouverte sur le restaurant
qui est transversal, situé sur la droite de l’entrée centrale et son grand
escalier de marbre du meilleur effet.
L’ensemble cache en revanche moins bien le terrain de
tennis et plus tard le potager d’Irène, installé plus haut et plus loin.
De là part un petit chemin rectiligne se dirige vers
le bois, qui se perd sur rien avant d’arriver sur le sommet de la colline en se
heurtant à une clôture barbelée moyennant l’aménagement d’un portillon
verrouillé et vidéo-surveillé…
Intrigant pour tout le monde, le « voisin du fond
du jardin ».
C’est en fait le cheminement enterré des réseaux de câbles
et d’eau courante vers le « bunker » qui se poursuit vers la gauche à
travers les arbres de haute futaie et est desservi par un « trou
d’homme » fermé par une trappe insignifiante mais blindée équipée de
vérins électriques. Il faut avoir la télécommande pour l’ouvrir.
De là, on peut descendre une quinzaine de mètres à la
verticale par des barreaux scellés dans un puisard bétonné ou circulent les
câbles et tuyaux, pour aboutir à un couloir étroit qui part de biais en
descendant légèrement jusqu’à arriver dans le petit bureau qui surplombe la
vaste salle du « bunker » qui s’ouvre elle-même sur la large porte
d’entrée et la route qui descend vers la départementale.
Une large porte non-blindée : si un jour du
matériel entreposé explose, il faut au contraire que le blast s’évacue ainsi
par le sortie offerte et ne cause pas trop de dégât au reste de la structure
bétonnée…
Non-blindée, mais protégée, à l’extérieure par un
décrochement aux abords vidéo-surveillés qui sert aussi de plateforme de
manœuvre aux éventuels semi-remorques des fournisseurs, notamment ceux qui
apporteront les machines de McShiant dans le courant de l’année, qui
aboutissent à un quai de déchargement intérieur, lui-même cloisonné.
Ainsi, impossible de tirer dessus au bazooka, de loin
et sans se faire repérer.
Et à l’intérieur, les accès sont aménagés par une
série de cloisons légères, mais équipées d’alarmes anti-intrusion.
La salle principale elle-même est haute de 12 mètres
sous ferme, équipé au plafond de poutrelles autoportées qui portent les
éclairages, le tout est bétonné hors l’issue vers le quai de chargement,
équipés d’un rack de trois plans de pose d’un côté et « mangé » par
les locaux de service et bureaux installés en mezzanine vers le fond, le long
de la montagne, de l’autre côté.
Elle est équipée d’un treuil lui-même autoporteur
amovible de 13 tonnes de charge sur 4 roues : de quoi voir venir. On
aurait presque pu y installer le « Lisbeth » si ce connard
« d’Ahmed-le-diabolique » ne l’avait pas envoyé au fond de l’océan,
au large du Tage (cf. l’épisode « Parcours
Olympiques » in fine et les chapitres
suivants, des enquêtes de Charlotte, publié aux éditions I3).
Eurydice, pas question…
Derrière le mur supportant la mezzanine, il y a des
locaux techniques sur trois niveaux, les générateurs, la climatisation qui
refoulent vers l’extérieur via des conduits dispersés en surface, les onduleurs
et des issues qui débouchent d’un côté sur la « tour de contrôle »,
située au-dessus de la large porte d’accès, d’une part, avec vue circulaire sur
les collines avoisinantes et la vallée, la route et la clôture en contrebas, et
d’autre part, la coursive d’accès au puisard que Paul emprunte rarement,
préférant venir en moto, pour investir le lieu et qui mène à l’hôtel à travers
les bois.
Sous la dalle de béton de la grande salle et sur toute
la surface, sont situés les locaux informatiques, avec au fond, une
« panic-room », une armurerie sommaire et quelques pièces où sont
installés des terminaux de gestion des serveurs. On y trouve aussi quelques
lits de camps un peu sommaires : un endroit de vie, cuisine-frigo-cambuse,
douches et commodités.
Des lieux à accès contrôlés et assez bien dissimulés
derrière des racks à bouteille (il y en a partout dans les couloirs) et une
porte coulissante formée très naturellement de parpaings montés sur rail, à
télécommande électrique qui dissimule un escalier et un monte-charge suffisant
pour y descendre l’informatique, notamment le gros onduleur.
Là où les personnes non autorisées ne peuvent même pas
imaginer pouvoir y pénétrer, pour ignorer jusqu’à l’existence de ce lieu…
Un endroit reclus, à l’abri de l’extérieur et de la
lumière naturelle.
Parfait pour travailler sans être dérangé, d’autant
que tous les terminaux des alarmes et caméras de surveillance, installés par
Charlotte, la vraie, celle dont le nez bouge quand elle parle, y sont dédoublés
depuis le bureau de la « tour de contrôle », au-dessus.
Détail que la miss ignore, bien entendu…
Et encore plus loin mais en-dessous, le collecteur des
eaux, de pluie, d’infiltration et usées qui sont pompées pour déboucher dans la
fosse septique située en contre-bas qui ruisselle vers le cours d’eau au fond
de la vallée non sans parcourir un bout de la route, selon la pente naturelle.
Très bien conçu, finalement.
Huyck Maartje y viendra d’ailleurs fignoler l’installation
de ses logiciels aidé de Nathalie.
On y verra passer Matilda quand elle veut se rendre
utile et bien sûr, Gustave qui lui passe par le puits d’approche du fond du
bois, de derrière le parc de l’hôtel, pas rebuté par le petit côté « sportif »
du parcours, même quand il pleut et vente.
Bien plus tard, Dimitri mais qui ignorera très longtemps
l’existence de ce lieu… bien qu’il suppose qu’il existe.
Mais c’est tellement bien fait qu’il imaginera d’abord
qu’il est situé dans les caves de l’hôtel. Il faut dire que sous ce bâtiment
originel de celui-ci, sont situés les locaux techniques – laverie, lingerie,
chaufferie, cave à vin, frigos, congélateurs, entrepôt de victuailles – et sous
les nouveaux bâtiments formant les branches du « U » se trouvent de
larges salles de conférence servant parfois de dépotoir à meubles, qui peuvent
servir de salle de danse, de gymnase de musculation, ou de vastes tripots
(c’est d’ailleurs là que Jean-Luc, le pornocrate établi à Caen voulait tourner
ses clips « à décor », quand ce n’étaient pas des
« extérieurs » ou des séquences « en chambre »). Ou plus
simplement être utilisées comme salle de réception, mariage, banquet, etc.
puisque les unes et les autres débouchent aussi sur le niveau zéro, entre les
branches du « U », sur la piscine centrale…
Qui reste sans eau durant la saison froide : un
sacré turbin pour la garder propre et praticable, même en été. Alors à
l’automne et au printemps, n’en parlons même pas…
Après avoir reçu les autorisations idoines, fin
janvier, les fichiers d’identité sont chargés assez facilement : même pas quatre
heures/machine tellement l’installation est puissante.
Reste que parfois, le réseau des communications
filaires est pris en défaut lors des mises à jour quotidiennes : en
Normandie, non seulement le courant délivré par le réseau laisse à désirer avec
ses innombrables microcoupures qu’assument sans broncher les onduleurs
installés, mais c’est parfois le réseau tout-court qui flanche en cas de
tempête. Alors, les câbles aériens de télécom, n’en parlons même pas, même si
c’est exceptionnel et seulement à la mauvaise saison, rien de plus.
Et puis le wifi peut prendre le relai avec le réseau
de mobiles.
En revanche, si « la machine » a
correctement mouliné ces données, l’équipe a eu du plus mal avec les fichiers
de téléphonie, nettement plus gros, notamment durant les remises à niveau
quotidienne à mâtine J + 1.
En France, on compte quatre opérateurs mobile de
réseaux : Bouygues Telecom, Free Mobile, Orange et SFR, mais aussi une
quarantaine d'opérateurs de réseau mobile virtuels, dits MVNO, qui utilisent
les réseaux de trois des quatre opérateurs disposant d'un réseau d'antennes.
Les plus importants sont Virgin Mobile, NRJ Mobile et
La Poste Mobile.
Il faut compter sur plus 74 millions de cartes SIM en
service et souscrites auprès d'opérateurs de réseaux, contre 7,5 millions
auprès des MVNO.
Et on dénombre 15,5 millions de clients de cartes
prépayées pour 68,5 millions de clients ayant souscrit un abonnement.
À titre de comparaison, fin décembre 2008 il y avait
39,3 millions de clients ayant souscrit un abonnement et 18,8 millions de client
ayant souscrit une offre prépayée.
Le cumul des temps de communication en téléphonie
mobile (appels émis) était d’environ 43 milliards de minutes, soit plus que le
temps des appels en téléphonie fixe, pour environ 2 h 40 d’appels émis par mois
et par abonné.
Quant au nombre de SMS émis et acheminés, il faut
compter avec plus de 60 milliards de messages chaque trimestre, soit environ 350
SMS par mois et par abonné !
Là, c’est inchargeable sur un seul site : les
routines de Huyck passent leur temps à écrémer les IP classés « non-suspectés »
après avoir cherché des flots de fortes-eaux de mots-clés et se contentent d’enregistrer
« la crème » où, provisoirement, les nouvelles adresses…
Ce n’est plus un raz-de-marée, mais un tsunami de
données permanent qu’il faut actualiser tous les jours et ça prend une machine
tous les jours qui mouline une bonne partie de la journée.
Rappelons que les prestations de téléphonie mobile
sont soumises aux mêmes lois que les autres prestations de services (code de la
consommation, code des postes et télécommunications, etc.) auxquelles s’ajoutent
des règlements spécifiques, tels que l’arrêté du 1er février 2002
relatif aux factures des services téléphoniques.
L’autorité indépendante chargée de la réglementation
et du règlement des conflits s’appelle l’ARCEP, l’Autorité de régulation des
communications électroniques et des postes. Elle a plusieurs missions, dont la réglementation
des conditions d’accès pour les nouveaux opérateurs mobiles et le suivi de la
couverture et de qualité de service.
Tous ces opérateurs ont l’obligation de garder la
trace de tous les trafics à travers le fichier « Préventel » des
opérateurs mobiles, l’enregistrement ou le script (la durée de conservation des
enregistrements est cependant limité) pendant 10 ans dans la base « archives »
de votre opérateur à des fins de recherche.
Dans la réalité, et depuis 2002, une seule année est
disponible et ça représente déjà des centaines de téraoctets de données…
Huyck a failli en devenir fou, tel qu’à un moment, il
a envisagé de renoncer avant qu’il n’accepte d’écrire ses routines de filtrage.
« Mais à
quoi ça sert, mon ami ? On s’en fout des archives… Ce qu’on cherche, ce
sont des activités suspectes, des échanges cryptés, des accès au blacknet, des
entrées venant hors d’Europe, une toute petite, minuscule proportion de tout ce
trafic ! Non mais tu te rends compte quand il faudra étendre notre bidule
à toute l’Europe ? Moi, je renonce, là… »
Non, en aucun cas maintenant que c’est parti.
« Tu n’as
pas pigé Huyck. On cherche quelques minuscules aiguilles dans des meules de
foin entassées en montagne, juste des « anomalies ». Et si tu veux
devenir l’expert de ces « anomalies » recherchées, il faut que tu
balayes le passé, puisque ça s’est passé et qu’on peut donc en faire des
corrélations non-hasardeuses et vérifiables : il nous faut remonter tous les
« antécédents » disponibles pour mettre au jour les points qui sont
pertinents et ceux qui ne le sont pas. En pariant que « la machine »
saura faire à travers tes logiciels une fois correctement calibrée.
Je ne
vois pas comment on peut faire autrement, désolé. »
Oui, mais l’extension des activités de la machine ?
« Pas notre
problème l’ami : il nous suffira de faire tourner ton logiciel sur des
bases de données stockées, mises en forme à ton format et financées par les
États participant au programme.
Moyennant
licence et un accès, mutualisé et payant, aux requêtes de tout le monde.
Mais pour
ça, il nous faut un système-expert soit capable d’être prédictif à haute
résolution, quitte à moduler les niveaux d’alerte, de rien à alerte noire et
géolocalisée, même globalement, je veux dire sans être précis. Ce sont les IP
qui nous intéressent. Ceux qu’on corrèle avec les ID et nos numéros d’identification
des quidams, eux étant déjà géolocalisés.
Si on ne
fait qu’une seule alerte, une seule seulement, même approximative, ils y
viendront tous et on aura réussi. »
Gustave en dira qu’à 12 K€/an l’abonnement et un
centime la requête, on n’est pas prêt de rentabiliser tout ce travail.
« – Gustave,
vous avez déjà oublié ?
– Quoi donc,
Charlie ?
– On travaille à
titre expérimental et provisoire, enfin voyons…
– Et
alors ? Si on se plante, on aura jeté l’argent par les fenêtres. Je ne
vois pas l’intérêt ! Et si on réussit, je ne vois pas non plus comment on
peut rentabiliser…
– Dans la
première hypothèse, c’est mon argent. Dans la seconde, très simplement :
en décuplant les prix !
– Décupler ? »
s’exclame-t-il ! « Mais ils ne
vont jamais suivre !
« Vous
plaisantez ! » lui rétorque Paul. « Ce n’est même pas le coût d’un seul fonctionnaire dédié. On
multiplierait nos prix par cent qu’ils ne pourraient même plus imaginer de s’en
passer dès lors qu’on aura fait la preuve de la pertinence du
bidule ! »
Il hoche la tête et laisse tomber : « Pas faux. La sécurité publique n’est même
pas politiquement un coût déterminant ! Pas encore… »
Et puis il reprend :
« – Mais
ils pourraient développer leurs propres logiciels. On dit que les gendarmes s’y
essayent.
– Ça existe déjà
effectivement, avec plus ou moins de réussite. Les américains exploitent « Prepol »,
un programme issu de « Promap ». On dit que les anglais s’y collent
aussi, mais ça vise la délinquance classique et n’apporte rien de nouveau. Et
puis, pour l’action anti-terroriste, sans le fichier d’état-civil et des
entrées et sorties de territoire, ça ne vaut rien.
Leur
problème sera comme le nôtre actuellement : reconstituer un « big-data »
et les logiciels d’analyse.
– Si nous, on
peut le faire, n’importe qui peut le refaire !
– Naturellement,
amiral, mais… vous vous souvenez de Louvois, le logiciel de paye des
militaires ?
– Oui… un
désastre !
– Et portant,
tous les logiciels privés du pays savent faire. Et ils ont mis combien de temps
avant de le jeter le leur à la mer ? Pensez-vous qu’ils sont capables de
se passer autant de temps d’un truc qui marche en pleine guerre anti-terroriste
qui de toute façon va durer des décennies ? Soyez sérieux !
D’autant
que nous on va avoir le temps d’affiner notre bidule, de le rendre encore plus
performant, plus réactif, plus complet : on va prendre une avance
technologique qu’il ne s’agira pas de perdre mais d’entretenir ! Et là,
plus personne ne pourra plus suivre.
Un peu
comme Bill Gates et son MS-Dos… »
Il y a eu l’Ios en contre-point.
« Surtout
Android de Google. Là, les équipes de Microsoft se sont laissées dépasser pour
partir en retard. Comme nos futurs et éventuels concurrents.
Vous vous
rendez-compte, Gustave, même le Mossad ou le Sin-Beth, voire le FSB n’ont pas
encore ça : quand ils deviendront nos clients, on aura définitivement
gagné la partie contre toute autre concurrence possible ! »
Jusqu’à l’émergence d’une rupture technologique… mais
inenvisageable avant une bonne décennie.
Vu comme ça…
« Et puis
réfléchissez, si on compte 10 administrations publiques à 120 K€/an
l’abonnement nouveau tarif, on peut compter au minimum 2 à 2.500 requêtes/an
par pays, à 10 centimes soit plus de 10 à 50.000 requêtes/an au total, c’est un
budget minimum d’1,4 millions…
Là, on
équilibre. »
Tout cela sans compter les agences privées. « Là, en doublant, même sans décupler le
tarif, on multiplie par 5 ou 6 notre budget. De quoi financer les mises à jour
et les versions plus performantes… »
Et si on nous vole le logiciel ? Ou seulement la base
de données ?
« La base
de données est déjà fragmentée. C’est son architecture elle-même. Le point-clé
étant le logiciel de numérotation des identifiants. On nous vole celui-là, il
ne sert à rien sans les autres. On nous en vole plusieurs dont le premier,
jamais la mise à jour ne sera complète puisqu’on bloquera l’accès aux logiciels
et à tous les fragments du data. Simple !
Les mecs qui
feraient ça se grilleraient définitivement, comme s’ils se tireraient une balle
dans le pied… Même pas envisageable ! »
C’est une des raisons pour rester provisoirement « soft »
au niveau des prix et conditions d’accès, notamment pour faire vivre les
mises-à-jour et que le coût reste largement marginal par rapport à une
recréation complète… qui elle aussi sera limitée par les autorisations à
requérir et donc limitée à un seul pays à chaque fois.
« Notre
force, c’est de dépasser les frontières et de mutualiser les informations avant
tout le monde. »
Reste l’étape indispensable : réussir au moins un
coup, pour se rendre indispensable…
« Là, il
faut compter sur les djihadistes ! Sans eux, le projet serait déjà mort.
Souvenez-vous : servir ! »
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