Deux arrêts pour le prix d’un !
Nous, on n’en doutait pas trop et le Conseil d’État a enfin
tranché le sort des rémunérations versées aux dirigeants de sociétés au regard
de la taxe sur les salaires.
La position du Conseil d’État était vivement attendue
sur l’assujettissement ou non à la taxe sur les salaires des rémunérations de
dirigeants de sociétés ayant la qualité de mandataires sociaux : Selon
lui, les rémunérations des dirigeants obligatoirement affiliés au régime
général de la Sécurité sociale entrent dans l’assiette de la taxe sur les
salaires, même s’ils ne sont pas des salariés placés dans un lien de
subordination à l’égard de la société.
Il s’agit des gérants minoritaires de SARL, des
présidents du conseil d’administration, des directeurs généraux et directeurs
généraux délégués dans les SA, ainsi que des présidents et dirigeants dans les
SAS.
En revanche, les gérants majoritaires de SARL, les
gérants associés d’EURL, les membres du directoire ou encore les
administrateurs provisoirement délégués de SA, n’étant pas soumis au régime
général mais à celui des travailleurs non-salariés, leurs rémunérations en sont
définitivement exclues.
Conseil d'État
Requête n° 388989
Mentionné dans les tables du recueil Lebon 8ème
et 3ème SSR
Mme Emmanuelle Petitdemange, rapporteur
Mme Nathalie Escaut, rapporteur public
Lecture du jeudi 21 janvier 2016
REPUBLIQUE
FRANCAISE
AU NOM DU
PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une requête, enregistrée le 25 mars 2015 au
secrétariat du contentieux du Conseil d'État, la société Juliane demande au
Conseil d'État :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le paragraphe 40
de l'instruction fiscale publiée le 22 janvier 2014 au bulletin officiel des
impôts sous le n° BOI-TPS-TS-20-10-20140122 ;
2°) de mettre à la charge de l'État le versement de la
somme de 3.000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice
administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des
procédures fiscales ;
- le code de la sécurité sociale ;
- la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Emmanuelle Petitdemange, auditeur,
- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur
public ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article 231 du code
général des impôts : " 1. Les sommes
payées à titre de rémunérations aux salariés, à l'exception de celles
correspondant aux prestations de sécurité sociale versées par l'entremise de
l'employeur, sont soumises à une taxe égale à 4,25 % de leur montant évalué
selon les règles prévues à l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale,
sans qu'il soit toutefois fait application du deuxième alinéa du I et du 6° du
II du même article. Cette taxe est à la charge des entreprises et organismes
qui emploient ces salariés (…) " ; que l'article L. 136-2 du code de
la sécurité sociale dispose : " I.-La
contribution est assise sur le montant brut des traitements, indemnités,
émoluments, salaires, allocations, pensions y compris les majorations et
bonifications pour enfants, des rentes viagères autres que celles visées au 6
de l'article 158 du code général des impôts et des revenus tirés des activités
exercées par les personnes mentionnées aux articles L. 311-2 et L. 311-3. (…)
" ;
2. Considérant qu'aux termes du paragraphe 40 de
l'instruction fiscale publiée le 22 janvier 2014 au bulletin officiel des
impôts sous le n° BOI-TPS-TS-20-10-20140122 : " Entrent également dans l'assiette de la contribution sociale
généralisée et donc de la taxe sur les salaires : (…) - les rémunérations
versées aux dirigeants de sociétés désignés à l'article 80 ter du code général
des impôts " ; que la société Juliane demande l'annulation de ce
paragraphe au motif qu'il élargirait le champ d'application de l'article 231 du
code général des impôts en incluant, dans l'assiette de la taxe sur les
salaires, les rémunérations versées aux dirigeants de sociétés, alors que ces
derniers n'ont pas la qualité de salarié ;
3. Considérant qu'il résulte des travaux
parlementaires de l'article 13 de la loi du 17 décembre 2012 de financement de
la sécurité sociale pour 2013, dont est issu l'article 231 du code général des
impôts, que le législateur a entendu rendre l'assiette de la taxe sur les
salaires identique à celle de la contribution sociale généralisée, sous réserve
des seules exceptions mentionnées à la première phrase du 1 de cet article 231
; qu'en vertu des dispositions combinées de cet article et de l'article L.
131-2 du code de la sécurité sociale, sont inclus dans l'assiette de la taxe
sur les salaires les revenus d'activité des personnes mentionnées à l'article
L. 311-3 du code de la sécurité sociale ; que ce dernier article mentionne
notamment, à ses 11°, 12° et 23°, les gérants minoritaires des sociétés à
responsabilité limitée, les présidents du conseil d'administration, directeurs
généraux et directeurs généraux délégués des sociétés anonymes et les
présidents et dirigeants des sociétés par actions simplifiées ; que,
contrairement à ce que soutient la société Juliane, ces dirigeants, sans avoir
la qualité de salarié au sens du droit du travail, sont au nombre des personnes
dont les rémunérations sont soumises à la taxe sur les salaires en vertu de
l'article 231 du code général des impôts ; que, par suite, le paragraphe 40 de
l'instruction attaquée ne méconnaît pas les dispositions de cet article en tant
qu'il inclut les revenus des dirigeants visés à l'article L. 311-3 du code de
la sécurité sociale ; que toutefois, les dirigeants de sociétés mentionnés à
cet article ne constituent qu'une partie des dirigeants visés par l'article 80
ter du code général des impôts ; que, par suite, le paragraphe 40 de
l'instruction attaquée est illégal en tant qu'il inclut dans l'assiette de la
taxe les rémunérations des dirigeants visés par l'article 80 ter du code
général des impôts mais qui ne sont pas mentionnés à l'article L. 311-3 du code
de la sécurité sociale ; qu'il doit, par suite, être annulé dans cette mesure ;
4. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les
circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la
société Juliane au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de
justice administrative ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le paragraphe 40 de
l'instruction fiscale 2014 publiée le 22 janvier 2014 au bulletin officiel des
impôts sous le n° BOI-TPS-TS-20-10-20140122 est annulé en tant qu'il inclut
dans l'assiette de la taxe sur les salaires les rémunérations des dirigeants
visés par l'article 80 ter du code général des impôts mais qui ne sont pas
mentionnés à l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête
de la société Juliane est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la
société Juliane et au ministre des finances et des comptes publics.
On reprend les mêmes et on continue :
Conseil d'État
Requête n° 388676
Mentionné dans les tables du recueil Lebon ; 8ème
/ 3ème SSR
Mme Emmanuelle Petitdemange, rapporteur
Mme Nathalie Escaut, rapporteur public
SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER, TEXIDOR, avocats
Lecture du jeudi 21 janvier 2016
REPUBLIQUE
FRANCAISE
AU NOM DU
PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
La société par actions simplifiée (SAS) Sovaro a
demandé au tribunal administratif de Toulouse de la décharger des rappels de
taxe sur les salaires mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier
2005 au 31 décembre 2006. Par un jugement n° 0904109 du 8 octobre 2013, le
tribunal administratif a rejeté cette demande.
Par un arrêt n° 13BX03248 du 13 janvier 2015, la cour
administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par la SAS Sovaro
contre ce jugement.
Par un pourvoi, enregistré le 13 mars 2015 au
secrétariat du contentieux du Conseil d'État, la SAS Sovaro demande au Conseil
d'État :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2.000
euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de commerce ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code général des impôts et le livre des
procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Emmanuelle Petitdemange, auditeur,
- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur
public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les
conclusions, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, Texidor, avocat de la SAS
Sovaro ;
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier
soumis aux juges du fond qu'à la suite d'une vérification de comptabilité qui a
porté sur la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2006, étendue au 31
mars 2008 en matière de taxe sur le chiffre d'affaires et de taxe sur la valeur
ajoutée, la SAS Sovaro s'est vu notifier, par envoi du 17 juillet 2008, une
proposition de rectification en matière de taxe sur les salaires au titre des
années 2005 et 2006, qui s'est traduite par un rappel de cette taxe ; qu'après
le rejet de sa réclamation par l'administration, la société a saisi le tribunal
administratif de Toulouse qui, par un jugement du 8 octobre 2013, a rejeté sa
demande tendant à la décharge de ce rappel de taxe ; qu'elle se pourvoit en
cassation contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 13
janvier 2015 qui a confirmé le jugement du tribunal administratif ;
Sur la régularité de l'arrêt attaqué :
2. Considérant que, devant les juridictions
administratives et dans l'intérêt d'une bonne justice, le juge a toujours la
faculté de rouvrir l'instruction, qu'il dirige, lorsqu'il est saisi d'une
production postérieure à la clôture de celle-ci ; qu'il lui appartient, dans
tous les cas, de prendre connaissance de cette production avant de rendre sa
décision et de la viser ; que, s'il décide d'en tenir compte, il rouvre
l'instruction et soumet au débat contradictoire les éléments contenus dans
cette production qu'il doit, en outre, analyser ; que, dans le cas particulier
où cette production contient l'exposé d'une circonstance de fait ou d'un
élément de droit dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire
état avant la clôture de l'instruction et qui est susceptible d'exercer une
influence sur le jugement de l'affaire, le juge doit alors en tenir compte, à
peine d'irrégularité de sa décision ;
3. Considérant que la SAS Sovaro a, dans un mémoire
déposé postérieurement à la clôture de l'instruction devant la cour
administrative d'appel de Bordeaux et visé dans l'arrêt attaqué, soulevé le
moyen tiré de ce que les rémunérations de son président et de son directeur
général devaient être exclues de l'assiette de la taxe sur les salaires dès
lors que les dirigeants de sociétés n'ont pas la qualité de salarié au sens du
droit du travail ; que la société soutient que l'arrêt attaqué est irrégulier,
faute pour la cour d'avoir rouvert l'instruction après le dépôt de ce mémoire ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 231 du code
général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " 1. Les sommes payées à titre de
rémunérations sont soumises à une taxe sur les salaires égale à 4,25 % de leur
montant, évalué selon les règles prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du
livre II du code de la sécurité sociale (…), et à la charge des personnes ou
organismes (...) qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis
à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur
chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement
desdites rémunérations. (…) " ; qu'il résulte des travaux
parlementaires de l'article 10 de la loi du 30 décembre 2000 de finances pour
2001, dont sont issues ces dispositions, qu'en alignant l'assiette de la taxe
sur les salaires sur celle des cotisations de sécurité sociale, le législateur
a entendu y inclure les rémunérations des dirigeants de sociétés visés à
l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale et notamment celles des
présidents et dirigeants des sociétés par actions simplifiées ; que, par suite,
le moyen de la société tiré de ce que les rémunérations de son président et de
son directeur général étaient exclues de l'assiette de la taxe sur les salaires
dès lors que les dirigeants de sociétés n'ont pas la qualité de salarié au sens
du droit du travail n'était, en tout état de cause, pas susceptible d'exercer
une influence sur le jugement de l'affaire ; que, dès lors, en s'abstenant de
rouvrir l'instruction après le dépôt, par la société, d'un nouveau mémoire, la
cour n'a pas entaché son arrêt d'irrégularité ;
Sur le bien-fondé de l'arrêt attaqué :
5. Considérant que le moyen invoqué par la SAS Sovaro
et tiré de ce que les rémunérations de son président et de son directeur
général étaient exclues de l'assiette de la taxe sur les salaires dès lors que
les dirigeants de société n'ont pas la qualité de salarié au sens du droit du
travail a été soulevé devant la cour administrative d'appel de Bordeaux
postérieurement à la clôture de l'instruction ; qu'il n'est pas d'ordre public
; que, par suite, il ne peut être utilement invoqué devant le juge de cassation
; qu'en tout état de cause, il résulte de ce qui a été dit au point 4 qu'il
n'est pas fondé ;
6. Considérant qu'aux termes du paragraphe 33 de la
documentation administrative de base 5 L-1421 mise à jour le 1er juin
1995, relatif aux situations de variation importante d'une année à l'autre du
rapport d'assujettissement d'une entreprise à la taxe sur les salaires : "
L'entreprise peut, au moment de la
régularisation de la taxe, faire état du chiffre d'affaires de l'année du
paiement des rémunérations lorsque à la suite, notamment, d'une modification de
ses conditions d'activité ou de la création de secteurs commerciaux ou
industriels, la référence au rapport existant l'année précédente conduit à une
anomalie manifeste. L'entreprise doit adresser une demande au directeur des
Services fiscaux. Cette demande est instruite comme une réclamation "
; que, pour se prévaloir de l'application de ces énonciations, une entreprise
doit établir le caractère manifestement anormal de la référence au rapport
existant l'année précédente ; que, par suite, en écartant l'application de ces
dispositions à la SAS Sovaro au motif que celle-ci ne justifiait pas de la
survenance d'un événement au cours des années en litige, notamment d'une
modification de ses conditions d'activité ou de la création de nouveaux
secteurs d'activité, la cour administrative d'appel n'a pas entaché son arrêt d'erreur
de droit ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le
pourvoi de la SAS Sovaro doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées
au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de la SAS Sovaro
est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la
SAS Sovaro et au ministre des finances et des comptes publics.
Parce que bon, nous nous avions pris connaissance des
travaux parlementaires de l'article 10 de la loi n° 2000-1352 du 30 décembre
2000 de finances pour 2001, dont sont issues les dispositions de l'article 231
du code général des impôts qui, en alignant l'assiette de la taxe sur les
salaires sur celle des cotisations de sécurité sociale, le législateur a manifestement
entendu y inclure les rémunérations des dirigeants de sociétés visés à
l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale (CSS) et notamment celles des
présidents et dirigeants des sociétés par actions simplifiées.
Mais pas les autres que sont les gérants majoritaires
de SARL, les gérants associés d’EURL, les membres du directoire ou encore les
administrateurs provisoirement délégués de SA, qui reçoivent des rémunérations
qui ne sont pas des salaires et entrent dans la fiscalité des BNC et le régime
social des travailleurs non-salariés (TNS).
Tout le monde sait cela, d'autant que quand un texte prête à confusion, les travaux préparatoires et les débats avant adoption d'un texte de loi deviennent source de droit…
En précisant encore que les jetons de présence sont
considérés comme des Revenus de capitaux mobiliers, partiellement déductibles.
Et encore, ces régimes valent seulement pour les
sociétés dites « commerciales » de capitaux, non-assujetties à la TVA, et qu'il en va différemment
pour les autres types de sociétés et selon leur activité.
C’étaient de « petites précisions »
techniques utiles à tous.
Je sais que ce n'est pas le bon sujet, mais une petite dédicace en passant, Mimi la Connerie à un autre admirateur que vous, et qui lui commence à faire du bruit : http://www.fakirpresse.info/myriam-toi-aussi-tu-vaux-mieux-que-ca - http://www.fakirpresse.info/merci-myriam-episode-5
RépondreSupprimerBien cordialement
Merci pour les liens, anonyme !
SupprimerSympa...
Mais qui n'apporte rien à la cacophonie ambiante !
Sauf à compléter le désarroi gouvernemental qu'il a lui-même provoquer et... ce n'est pas la première fois !
Il n'y a pratiquement eu que ça depuis le début du quinquennat !
Pour Fakir, à suivre, bien entendu !
Bien à vous !
I-Cube