Plans de
vols
Avertissement : Vous l’aviez compris, ceci n’est qu’un
roman, une fiction, une « pure construction intellectuelle », sortie tout droit
de l’imaginaire de son auteur.
Toute ressemblance avec des personnages, des lieux, des
actions, des situations ayant existé ou existant par ailleurs dans la voie
lactée (et autres galaxies), y compris sur la planète Terre, y est donc
purement, totalement et parfaitement fortuite !
L’amiral poursuit : « Je vais vous
dire. Si nous vous confions la mission, ce n’est pas tant pour complaire aux
américains. Ce qui compte pour nous, ce sont deux choses : Vous aurez libre
cours pour exploiter vos… exploits auprès des chinois et des russes dont on
espère qu’ils vous laisseront jauger leurs appareils de plus près que peuvent
le faire les agents des services de sécurité occidentaux.
Nous en avons un en place en Russie.
Nom de code de notre agent : Dichnikov qui devrait assurer notamment les
liaisons de sécurité.
Et une sino-américaine en Chine aux
ordres de la CIA dont je ne connais pas encore le nom de code.
Mais le second volet, le plus important
de votre mission, c’est de voir se réveiller les réseaux dormants de l’Est et
d’ailleurs qui vont forcément s’intéresser à vos exploits, de les identifier
voire même de les neutraliser si c’est possible : On pille nos technologies
tous les jours dans nos bureaux d’études et sur nos chantiers de construction
navales ! Même chez Renault !
Et tout ça, c’est du ressort de la
DCRI.
Mais comme il paraît que vous n’avez
confiance qu’en la Marine, ce dont je vous remercie vivement, j’ai donc été
sollicité pour vous mettre le pied à l’étrier.
Voilà votre mission… que même si vous
l’acceptez, nous ne sommes au courant de rien, cela va de soi ! »
Elle est bien bonne celle-là !
« Juste une question, Amiral. Je
fais comment pour récupérer mon appareil ? »
Il devra se démerder. « On va vous
faciliter la tâche quand même. Mon collègue, le général Wimereux, je crois que
vous connaissez, m’a recommandé un agent de l’ancien SDECE, Richard Albert de
Ildut comme correspondant et agent de liaison. Vous connaissez ? »
Pas encore.
« Un gars bien. Vous pourrez compter
sur lui : Un ancien gendarme à la retraite, mais il a gardé un carnet
d’adresses utiles. Il prendra contact rapidement. »
Encore cet aspect « non-officiel » en cas de pépin ?
Et s’il échoue dans cette tentative idiote ?
« Eh bien ce ne sera pas très grave
ni pour la Nation ni pour la Marine. Je serai un peu chagriné par votre sort.
Mais j’ai l’habitude, je suis un soldat, moi ! »
Abruti, oui !
Et s’il refuse ?
« On m’a dit que vous connaîtriez un
sort encore plus funeste. Je suis encore plus attristé par cette perspective,
mais parfois la raison d’État commande des sacrifices ! »
Bien cyniques, que de tels propos…
« Laissez-moi y réfléchir » fait
Paul en prenant congé. Il n’a rien demandé de son sort s’il accomplissait toute
sa mission « non-officielle » : Qu’on lui fiche la paix, ce serait déjà pas si
mal !
Et tout ça parce que la Fondation Risle avait coulé et son « boss » tué de
son fait !
Jamais il n’aurait pensé qu’on le ferait descendre en enfer aussi loin sur
cette Terre juste parce que l’autre nabot il a une femme au réa trop profond et
qu’il n’est pas à la hauteur la gorge à investir. Et tout ça pour avoir suivi
la piste du « doigt de Dieu » qui voulait les mettre tous au cimetière !
Pas croyable…
Sitôt de retour sur les pelouses, il n’a en tête que de rentrer se cacher.
C’est sans compter avec l’apparition de Nathalie et Marie-Claire, bras-dessus bras-dessous.
« Je te présente Paul. Mon fiancé du
jour ! Marie-Claire Gouët, ma coloc’ à Paris. »
La rousse, plutôt auburn que rousse d’ailleurs, est tout sourire et a un
œil qui dit merde à l’autre derrière ses lunettes rectangulaires du meilleur
effet : Un très léger strabisme divergent, mais suffisant pour qu’on ne sache
plus avec quel œil elle vous regarde. Il faut naviguer de l’un à l’autre et
comme elle en fait autant, c’est agaçant.
Pour le reste, elle a tout ce qu’il faut là où il faut, en un peu plus «
garçonne » que Nathalie peut-être… Question de posture, semble-t-il.
« Mais je vous connais. Vous
n’habitez pas dans le Vème ? »
Si, mais depuis récemment seulement.
Il s’avérera dans les minutes qui suivent, que Marie-Claire, c’est la « voisine-au-chat
» divaguant qui met en pelote les nerfs de Miho et de Mylène.
« Ouh ! Mais alors on va se revoir !
» fait Nathalie toute frémissante.
Le monde est décidément tout petit, même jusque dans le fin fonds du Gers.
« Jusque-là, on ne s’était pas
croisé. » Sous-entendu qu’il n’y a aucune raison pour que le phénomène
persiste.
« Vous ne rentrez pas tout de suite,
dites : Vous nous raccompagnez au moins ! »
Ce n’est pas dans ses intentions. « Vue
l’heure, ou on part maintenant, ce que je comptais faire, ou je pars à la
recherche d’un hôtel ! »
Dans les deux cas, il lève le camp.
« C’est une invitation pour laquelle
de nous deux ? » te raconte Nathalie qui saute sur l’occasion et la pointe
des pieds.
« Vous êtes toutes les deux charmantes.
Je dirais donc toutes les deux… si vous me trouvez où je vais passer la nuit !
»
Après tout, Paul n’a rien contre les trios sensuels. Alors pourquoi ne pas
tenter sa chance ?
C’est alors que Marie-Claire lui tend une carte de visite d’hôtel : « Il faudra juste se serrer un peu et
rapprocher les lits ! Chambre 12, au fond du couloir. On rentre quand on aura
trouvé un chauffeur. »
Paul n’est pas partageur, dans ce cas-là.
« Ooooh ! Vous sauriez contenter
deux appétits féroces ? »
« Vous tiendrez la distance si je
vous propose un rythme d’une fois toutes les heures jusqu’au petit-matin ?
»
Gloussements de ravissement idiots en réponse.
« Et qui va conduire demain matin ?
»
Elles ont raison, ce n’est décidément pas raisonnable. Et il prend congé
les laissant dépitées, les clés de leur chambre « pendouillantes » à bout de
bras.
De toute façon, il n’a pas du tout, mais alors pas du tout la tête à la
gaudriole avec ce qui vient de lui tomber dessus. Et son projet immédiat est
plutôt de passer à Aubenas chez Isabelle Nivelle : Depuis tant d’années où elle
s’est abstenue de toute relation « intime » avec son « Directeur » pour des
raisons d’éthique, Paul qui n’est désormais plus son salarié, va pouvoir
vérifier si son charme naturel agit toujours et encore sur son nerf honteux à
elle.
C’est à un peu plus de deux heures de route et maintenant
qu’il a une « feuille de route » indiquée par sa nouvelle « hiérarchie », il
lui faut vérifier si elle est à portée de main et de règle à calcul avec son
équipe d’Aubenas, celle qui a bossé sur le « 001 ».
Isabelle explose à l’idée de laisser partir dans un vol hautement risqué
son « dégé-favori ». D’autant qu’elle compte bien le récupérer en tant que tel
dans les mois qui vont venir.
« Tu te rends compte que ton
successeur, Éric Schmouller, c’est vraiment le roi des cons ! À peine arrivé,
c’est tout juste s’il ne voulait pas me sauter sur le poil… »
Elle aurait pu le tester en se laissant faire, au moins !
« Pire que ça, il nous a mis un
pataquès pas croyable avec ses premières mesures : On a une grève du zèle
perlée à gérer depuis qu’il a fait savoir ses exigences en matière de
procédures : Un fou ! »
Et question pognon, ça roule !
« Ne m’en parle pas. Il a doublé son
salaire par rapport à toi, s’est fait voter les pleins pouvoirs pour son
golden-parachute, sa retraite complémentaire, son logement de fonction et a
fermé le siège parisien. Quant à la Mercedes de fonction, c’est carrément le
haut de gamme avec toutes les options que j’en ai vendu ma 607 pour la
remplacer par une Twingo pour bien montrer au personnel que je ne suis pas
d’accord ! »
La « miss » rouler en Twingo ? Même sa fille a une Clio !
Trop drôle.
« Il est urgent que tu reviennes !
Je peux convoquer une AG pour ça ! »
Elle est gentille, mais elle sait pourtant très bien que la boutique est
tenue par les contrats de commandes des « actionnaires » minoritaires.
« Tu ne peux pas faire ça. Tout ce
que tu peux faire, c’est de supprimer le poste de DG à l’organigramme. Mais ça
veut dire que tu vas devoir remettre les mains dans le cambouis. T’en sens-tu
capable ? »
Il le faudra bien si c’est la seule solution.
Et les voilà qui se mettent à bosser tous les deux sur un nouvel
organigramme, répartissant les tâches et responsabilités sur le personnel et
compétences existants !
En fin de soirée, il reste des détails à régler quand Paul aborde enfin la
raison de sa venue dans ses murs.
« Ne me dis pas que c’est pour me
sauter ! »
Non, pas de prime-abord. Quoique, il venait de tourner le dos à deux
nymphettes qui n’attendaient que ça…
« C’est comme je te l’ai dit en
arrivant : Il faut que je fasse un tour du monde avec le 001. C’est important,
pour la boutique, pour moi et pour l’avenir du proto ! »
Il explique son idée : Quitte à tourner au tour de la planète, il faut le
faire sans avoir à redescendre sur terre faire le plein, ni à organiser des
ravitaillements en vol tout autant chronophages et gros consommateurs de
carburant…
Moindre altitude égale grosse consommation !
« D’autant que si j’ai bien vu que
l’avion se comporte relativement bien à haute altitude, dans les couches plus
denses, il devient imprévisible. »
Bref, il faudrait que dès lundi, elle mette une petite équipe sur le
calcul d’un vol optimal, les contraintes engendrées au décollage et une autre
équipe pour résoudre le problème du calculateur du pilote automatique.
« Au nez et à la barbe de Schmouller
? »
Et pourquoi pas ?
« Je te signe un pouvoir, tu nous
convoques une AG qui supprimera le poste et invalidera les conventions qu’il a
signé pour se protéger. Vois ça avec nos avocats et qu’ils n’omettent aucun
détail. Ça c’est histoire d’arrêter ta grève quand le personnel saura deux
choses : Un, que je fais bosser en douce une équipe sur le « double-zéro-un »,
donc je suis dans les parages ; deux que le Schmouller il est déjà sur un siège
éjectable.
Et si lui proteste, tu y vas franco :
Tu lui dis avec ton air le plus garce possible que ce sont des ordres qui
viennent de l’Élysée ! Et tâche d’être convaincante, parce que c’est vrai. S’il
proteste, tu lui rétorques qu’il n’a qu’à vérifier par lui-même. »
Or, il ne pourra pas vérifier plus haut que chez EADS, d’autant mieux qu’à
l’Élysée, personne n’ira raconter que les ordres viennent de Langley : Ils se
heurteront à un mur.
Et Paul aura le « retour » via Beauty et son ZEHST !
Car si « ça » redescend par la voie hiérarchique normale, en moins de 3-4
jours, ils devraient comprendre qu’en excluant Paul du Zehst, alors même que
l’Élysée veut faire voler un hypersonique civil, Beauty a fait vraiment une
très grosse boulette.
Sans causer de la garce du siège et ses tests à la graisse de noix de
couillon !
Et il devrait les voir se manifester, l’un ou l’autre.
« Ok ! Mais voler sur toute la
planète au-dessus de pays pas forcément amicaux à tes essais, n’est-ce pas
prendre le risque de te faire descendre ? »
Descendre un engin qui vole entre Mach 4 et Mach 5, personne n’a encore
jamais fait ça surtout avec des missiles qui affichent tout juste Mach 2 et des
poussières.
« Déjà, les promener au-delà de
60.000 pieds, ça n’a rien d’évident. Regarde ce qu’on aide à fabriquer avec nos
propulseurs à poudre. À 30.000 pieds, si leurs engins montent à 55.000 pieds en
théorie, aucun de nos champions nationaux n’a jamais fait un tir réel à cette
altitude. Ne t’imagine pas que les chinois ou les russes savent mieux faire. À
la limite, il n’y a bien que les américains qui peuvent faire avec leur SM-3,
tous les autres ayant abandonné leur programme. Et à 15 millions de dollars
l’unité, faut pas rêver non plus : Ils ne tireront pas, surtout sur un allié à
qui ils ont commandé le vol ! »
Oui mais quand même…
Les femmes, quand elles deviennent têtues d’inquiétude…
« Tu as peut-être raison. Je
t’explique l’objectif. On ramène le prototype à Orange, c’est prévu comme ça.
Mais il faut que tout le monde le sache. Parce que mon petit tour au-dessus de
la méditerranée fin août dernier, ça les a déjà mis en ébullition un peu partout
dans le monde.
Là, il s’agit de confirmer la
performance sur la durée. Notamment pour les chinois mais aussi pour les
russes. Assez haut, si on peut imaginer de faire la route des deux pôles,
forcément, ils verront tous un scope passer sur leurs radars de veille. Les
européens, les russes, les américains et même les chinois surtout si j’emmène
ma coréenne à bord muni d’une balise ! »
Et puis elle en deviendra une assurance-vie… Quoique, ils n’avaient pas
hésité à la sacrifier lors de son vol au-dessus des mers territoriales de
Corée-du-nord.
« Au-dessus des pôles ? »
Elle fait répéter.
« Mais il n’y a aucun aéroport de
dégagement en cas de problème, notamment dans la route sud au-dessus du
pacifique ! »
Ni aux deux pôles.
« Hasardeux. Mais fais-moi bosser
Claude sur cette hypothèse aussi. Ok ? »
Claude, c’est l’ingénieur-fluide-maison, celui qui conduit les process de
concassage et de brassage des poudres, forcément au fait des équations de
Bernoulli sur le sujet et pilote amateur à l’occasion, qui s’était occupé de
l’aérodynamique du « 001 » avec Paul ainsi que de mettre au point l’ensemble «
mécanique/navigation » des deux premiers vols.
« De toute façon, il faut prendre le
risque. C’est une question à la fois de crédibilité pour la boutique à faire
des drones un jour ou l’autre. Mais c’est aussi une mission qui doit m’ouvrir
les portes des chinois et des russes. Et puis pas que ça ! »
Paul explique à Isabelle Nivelle, que si la DCRI et l’amirauté lui demande
ce « coup de poker », c’est avant tout pour débusquer les « petits-espions »
dormant sous un faux nez.
« Faux-nez que je suis, en parfait
plastron, pour n’être officiellement plus dans ta boutique… »
Compliqués, les hommes de l’ombre pour une femme d’Auvergne-parisienne.
Mais apparemment logique.
« Tu sais, tu n’as rien à perdre à
faire ce qu’ils demandent, au contraire : Je te sais assez fine-mouche pour en
profiter à faire le ménage chez toi et tirer la couverture à toi quand
l’occasion se présentera ! »
D’autant que s’il revient « en grâce » au palais de la rue du
Faubourg-Saint-Honoré, il n’y aura plus d’objection pour qu’il ne redevienne
pas opérationnel à Aubenas.
Oui, mais si, elle a à perdre son meilleur Dégé.
« Tu y tiens tant que ça, depuis
tout ce temps ? »
Bé oui.
Aparté n° 24
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