Chapitre douzième
Avertissement : Vous l’aviez compris, ceci n’est
qu’un roman, une fiction, une « pure construction intellectuelle », sortie tout
droit de l’imaginaire de son auteur.
Toute
ressemblance avec des personnages, des lieux, des actions, des situations ayant
existé ou existant par ailleurs dans la voie lactée (et autres galaxies), y
compris sur la planète Terre, y est donc purement, totalement et parfaitement
fortuite !
Pendant son absence « Prestige spirits » a bien fonctionné en bouclant la
saison des remises de diplôme, et vient de finir avec bonheur la saison des
« immersions » des bizuts par les « carrés » des facs et
grandes écoles, une nouveauté initiée par Loïc, le gérant. Il fera selon toute
vraisemblance une bonne saison d’hiver qui va se clore dans quelques semaines,
d’autant qu’il espère encore faire une proposition « festive » en
continue avec des bières et alcools du monde pour « refourguer » les
retours invendus, même si « la niche » compte déjà plusieurs
opérateurs très « proactifs ».
« Les collines de Cabourg » aura fait également une bonne saison… d’été
seulement : il y a eu jusqu’à 4 « extras » saisonniers venus
renforcer l’équipe en place, sous le contrôle de Jean-Charles qui a veillé à « rentrer
dans les budgets ». Quant au restaurant « Cuisine de filles »,
sis dans les locaux de l’hôtel, ils commencent à avoir des habitués récurrents
et quelques « touches » dans la presse locale à coup de
« placards » achetés dans les pages desdits laïus. On attend les
premiers mariages, anniversaires, séminaires pour le début de l’année 2017.
Et toujours « dans les budgets »…
Le fonds géré par Anjo Pisuerga persiste à souscrire les emprunts d’État
avec de l’argent « pas à lui » et à faire en plus quelques maigres marges positives.
Quant à la fondation patrimoniale luxembourgeoise « Charlotte & Cie »,
elle s’est en revanche subrepticement enrichie de façon spectaculaire, tel
qu’Anjo fait du prêt interbancaire à vue… pour dépanner ses « potes »
banquiers.
Il sera d’ailleurs le second personnage à faire le détour par les caraïbes
pour rencontrer Paul avant que ce dernier ne recommence à voyager.
Et l’activité « enquête et investigation » de la CISA est surtout le fait
de « Charlotte », la vraie, celle dont le nez bouge de haut en bas quand elle
parle, qui fournira encore un peu quelques missions de sécurité aux équipes de
la « Sphère de sécurité » qui justifie le « S » (pour security) de la boutique.
En effet, la « CISA » n’est plus vraiment la CISA. Et Gustave se perd un
peu dans des explications pour le moins oiseuses. Il redoute surtout la
réaction de son associé très majoritaire soudainement revenu de l’océan indien.
« C’est que… sous la pression, il a
fallu se résigner à concéder notre base de données. »
Quelle pression ?
« Euh… il y a eu les attentats du
mois de juillet. À Nice d’abord, le 14 juillet, pour lequel le logiciel a émis
une alerte « orange » sans plus de précision que deux départements du sud-est
du pays. »
Et alors ? Il a été conçu pour ça, non ?
« Certes, sauf que l’écheveau des
pistes à suivre a saturé un peu les forces de l’ordre. Le préfet de région a
fait une première « alerte vigilance » en étendant l’alerte à toute la zone
PACA et à la Corse alors que l’état d’urgence venait d’être levé. »
Oui, et… ?
« Par ailleurs, les effectifs de
sécurité disponibles ont été surtout disposés de telle sorte que la priorité a
été donnée à la visite privée en Avignon du Président Landau. Il faut les comprendre
puisque l’attentat du mois de novembre 2015 au Stade-de-France à Saint-Denis,
au moins dans leurs esprits, le visait directement. On pense même désormais que
les fusillades sur les boulevards et l’attaque du Bataclan devaient avoir pour
objectif de dégarnir sa garde rapprochée autour du stade afin de faciliter
l’intrusion des commandos-suicides… »
Ce n’est qu’une hypothèse, mais fort probable compte tenu du minutage et
du déroulé de ces attaques simultanées. C’était sans compter sur l’inertie du
dispositif de protection présidentiel.
« Donc, la côte d’azur a été laissée
pour compte. » Et Gustave de décrire par le menu la folle trajectoire du
camion fou, la polémique qui a suivi et les retombées en termes de « choc
psychologique » et politique.
« Or, nous avons été les seuls à
prévenir. Et après l’attentat normand contre prêtre et ses fidèles, même si là
encore le logiciel n’avait pas réellement vu l’arrivée du passage à l’acte… »
Les « zombies » n’étaient pas encore au point ?
« … Non, Dimitri et Huyck
travaillaient dessus. Ça n’a été « opérationnel » qu’ensuite, justement avec
les données collectées à l’occasion de ces deux attaques… »
Bon et alors ? « Je ne
comprends pas de quelle pression il s’agit. « BBR » n’était pas encore
totalement au point, il me semble. »
Oui, mais le ministère souhaitait déjà, et à partir de ce moment-là, avoir
la mainmise sur le système-expert.
« Et ? Vous ne leur avez pas
proposé un accès illimité ? »
Si bien sûr. « Mais j’ai aussi
une hiérarchie. Et celle-là subissait les assauts de l’OTAN pour se nourrir à
la même source. »
Bon. Et puis ?
« Et puis, tout ce que j’ai pu
sauver c’est un accès libre pour nous et nos ministères. »
Sauver de quoi ?
« D’une… concession exclusive
américaine… »
Là, normalement, Paul aurait dû éructer ! Et quel que soit l’endroit d’où
il communiquait, une pluie de Scuds devait s’abattre sur le crâne partiellement
dégarni de l’amiral Gustave dans la seconde qui allait suivre.
Mais Ô divine surprise, rien !
« C’est Pamentir qui a fait la
meilleure offre. Vraisemblablement financée par la CIA ou la NSA. Voire encore
une autre agence américaine. »
« Puis il a fallu négocier avec
le ministère des finances, sur instigation du ministère de la défense et passer
le contrôle du ministère de l’intérieur. »
Pour toute réponse, Gustave entend un : « Je sais. »
Comment ça, il sait ?
« En fait, le décret autorisant
l’opération a été signé très rapidement par le ministre des finances, celui qui
va devenir le Président, et a trouvé là la meilleure façon à la fois de financer sa campagne tout en faisant plaisir
aux décideurs américains qui vont garantir son élection… »
Pardon ?
Là, c’est Morthe-de-l’Argentière qui en reste coi, tétanisé…
« Qui ça ? Les primaires de droite
vont avoir lieu en fin de semaine pour désigner Jupette la semaine suivante.
Landau va se représenter, alors Monkarond, s’il n’avait pas encore décidé en
juillet, il commence tout juste à pointer dans les sondages… Mais à des scores
tels que même « Peluche » pourrait le battre à plat de couture !
Pensez, il n’a aucun appareil partisan
derrière lui, pas un radis, pas de troupe et en plus il est si jeune et
tellement inexpérimenté.
Sauf votre respect, il n’a aucune
chance. »
Mais Paul maintient : « Vous
verrez. D’une part, il a les ronds, c’est vous qui les lui avez fourni avec
cette vente qui ont été eux-mêmes fournis par la NSA depuis les fonds secrets
volés sur le trésor koweïtien en août 1990 : au moins, on en retrouve la
piste ! Et en mai il va se retrouver face à la blondasse bleu-blanc-rouge
et non seulement il va gagner au second tour, mais il va se retrouver avec une
majorité absolue au Parlement en juin. » [1]
Comment ne pas rire de telles élucubrations ?
Et Gustave ne se gêne d’ailleurs pas.
Bien sonore, le rire.
« Ceci dit, personnellement, j’aurai
négocié le prix au double de ce que vous avez obtenu. Leurs moyens sont
illimités. D’autant que je n’étais pas vendeur. » Mais bon : avec
les opérations qu’il va faire dans l’année, ça sera de toute façon largement
suffisant pour financer ses projets. Il n’y a pas à regretter…
Eh, « dites donc, on est parti
de 200 millions de dollars pour arriver un milliard d’euros grâce aussi à Anjo,
net impôts et commissions déduites, c’est déjà bien payé. »
Non, pas assez. Ça valait au moins le double.
« Mais j’ai sauvé un usage
personnel et les intérêts du pays. Et puis, un milliard, qu’auriez-vous fait du
double ? Déjà que… »
« … Que vous avez considéré que
c’était inespéré, je sais tout ça. Un gros tas d’argent, ça vous a fait vite tourner
la tête. »
Mais il était injoignable, porté disparu : « J’ai fait au mieux et sous la pression. »
Il sait : « C’est fait,
c’est fait. On ne va pas revenir dessus. En revanche, je ne sais plus à quoi
vous servez dans notre dispositif… »
Vu comme ça, effectivement…
Il y a toujours l’activité des enquêtes, que justement lundi matin il peut
être prévu une vidéo-conférence pour le présenter à la nouvelle équipe
d’enquêtrices, le groupe « ADN », pour Anaïs, Delphine et Noeline.
« Pas question ! Je ne
veux pas qu’elles me visualisent, ces trois-là ! Même pas à la voix ! »
Ah bon ? Gustave ne saura pas pourquoi il la déformera.
Et celle de la « Sphère-de-protection » des VIP, le groupe
« HLM » pour Henri, Laurent et Marion ?
« On verra si je suis
disponible à ce moment-là… »
Il ne veut pas les « visualiser » non plus.
« Ils vont surtout s’occuper de
la sécurité de mes mômes et de leur mère. Vous me mettez une « sphère de
sécurité » autour d’eux, si ça fonctionne. Et de temps en temps, quand je
vous le dirai, l’un d’entre eux ira se promener avec des faux papiers et une
vraie carte Visa faire quelques dépenses à travers le monde pour brouiller les
« pistards » des services accrochés à mes basques. »
Ah oui ? Lesquels ?
« Les russes, les chinois, les
américains, les anglais, les israéliens, les nôtres plus quelques autres vont
avoir à cœur de savoir ce que je fais et où je gamberge dès l’année prochaine.
Alors autant ne pas leur faciliter le travail. »
Mais lui, il n’a plus besoin de la « sphère de sécurité » ?
« C’est terminé cette
affaire-là en ce qui me concerne. Et même vous, vous n’avez pas à savoir où je
traîne. On fait juste un point hebdomadaire et plus souvent si nécessaire. »
Comme il voudra : c’est lui le « patron » en pense Gustave
presque soulagé de n’avoir ni reçu une pluie de scuds ni son avis de
licenciement…
Pourtant, si on n’est vraiment plus dans la même dimension et que le rôle
de Gustave devient trop chiant… Paul n’a qu’à payer sa part que bloque Anjo et
il dégagera sans faire d’histoire, si telle est la volonté du patron. Il n’en
demandera pas plus.
« Qu’Anjo me contacte par
courriel. Je vais essayer de le rencontrer pour qu’il me fasse son
compte-rendu. »
Gustave reviendra au soir venu sur la folle-prédiction de Paul concernant
l’élection de Makarond, dont il affirme qu’il aurait payé sa campagne. Absurde :
comment un gamin, déniaisé par une cougar qui se la joue pucelle et qui
pourrait être sa mère peut-il devenir président de la République dans quelques
mois ?
C’est totalement impensable !
À ce moment-là, on est en pleine phase finale de la campagne des
primaires. Et les sondages sont en faveur de Jupette qui sera selon toute
vraisemblance opposé à Krasosky. Normalement, les courbes du chômage flirtant
avec le degré zéro de progression après avoir crû indéfiniment durant plus de
cinq ans, Landau tiendra sa promesse et se représentera pour défendre son bilan
très incertain pour autant.
La présidentielle se jouera donc non pas comme une revanche de 2012, mais
comme un duel du premier tour où le vainqueur sera élu contre la peste-blonde.
C’est ce qu’en pense la plupart des citoyens.
Car pour le moment, seule celle-ci est assurée d’arriver au second tour.
Et tous les autres candidats – il est prévu une primaire des verts,
probablement une union PCF/FdG plus quelques farfelus tel Cheminant, « DuViaduc-Planplan »
et quelques autres – ne feront que de la figuration, profitant de l’occasion
pour vendre un peu de leur bouquin-programme…
Même « LeMer » en a fait un, un pavé illisible, d’autant qu’à
l’oral et en direct à la télévision, il s’emmêlera volontiers les pédales dans
les chiffres : un mauvais, pas encore mûr.
Et Jupette ne peut pas rater l’investiture du parti. Les partisans de
Krasosky sont persuadés du contraire (un « jeune » contre un
« vieillard »…), mais plus personne ne veut de leur champion, qui
persiste à polluer le paysage et le discours politique dans l’opinion après son
quinquennat catastrophique de 2007/2012.
Donc, Makarond, il est hors-jeu d’emblée dans cette lutte de titans.
Et pourtant, à la fin du mois de novembre, Jupette s’est effondré, bavant
en direct à la télévision devant des millions de ses futurs
« non-électeurs », avec un score irrattrapable au premier tour des
primaires au profit de Fillette, l’ex-premier ministre de Krasosky.
Le pire des scénarii. À partir de ce moment-là, toutes les semaines,
absolument toutes les semaines, le candidat sorti des primaires aura été la
cible de « nouvelles révélations » sur sa façon de « jouer avec les lignes
jaunes », non pas de la loi, mais de l’éthique, à défaut de la morale la plus
élémentaire.
Et comme il a une défense de nul, de menteur impénitent qu’il se révèle
être au fil du temps, il ira se faire piétiner dans les poubelles de
l’Histoire, relayé en cela par un appareil judiciaire particulièrement célère
pour ouvrir information judiciaire sur information judiciaire et distiller le
cancer de la suspicion sur son honnêteté d’homme public.
Incroyable et, incrédule, il se fera massacrer fin avril dans les urnes de
façon pitoyable.
« Paul, expliquez-moi ? Vous aviez
une boule de cristal ? Vous avez cultivé un don de double-vue pendant vos
vacances ? »
Pas du tout.
Et sa réponse, extorquée à coup de « revenez-y », n’apporte rien de plus :
« J’ai eu l’occasion d’avoir quelques
contacts qui en savent beaucoup plus long sur ce qui se préparait ! »
Frappé, le patron ! Comment croire à un coup à trois bandes et même plus
que ça depuis le mois de juin ?
« Si je vous raconte, vous
allez me prendre pour un cinglé. »
« Dites toujours, commandant
» dixit l’amiral sur le ton impérieux des ordres donnés.
Paul n’est plus sous les ordres de l’amiral. C’est même plutôt l’inverse.
Invariablement, la réponse restera négative.
(1) Cf. « Laudato
sì… », chapitre XV (http://flibustier20260.blogspot.fr/2016/08/laudato-si-xv.html)
publié aux éditions I3
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