Chapitre vingt-et-unième
Avertissement : Vous l’aviez compris, ceci n’est
qu’un roman, une fiction, une « pure construction intellectuelle », sortie tout
droit de l’imaginaire de son auteur.
Toute
ressemblance avec des personnages, des lieux, des actions, des situations ayant
existé ou existant par ailleurs dans la voie lactée (et autres galaxies), y
compris sur la planète Terre, y est donc purement, totalement et parfaitement
fortuite !
La primaire de droite est pliée. Landau aura annoncé son renoncement, ouvrant
la fenêtre d’une primaire au « socialisme-de-progrès humaniste ». La
déferlante des « affaires-Fillette » commencera avec ses
« ratés » du début après la « trêve des confiseurs », avant
de vraiment démarrer en janvier suivant avec le « Pénélope-Gate »,
trop tard pour le fat d’envisager une solution de repli : de toute façon,
il fait tout pour foutre le feu à ses navires et supporters, tel qu’il n’y aura
jamais de « solution B » pour ne pas perdre une élection
« imperdable ».
C’est alors que démarre le second cas « KK ».
Ça devient un rituel quasi-invariable : un début de semaine un peu
comme tous les autres, quand l’équipe « ADN » se réunit au rythme d’une fois
tous les quinze jours – exclusivement les semaines paires – au « siège » du
Kremlin-Bicêtre, seulement si ses membres ne sont pas en mission aux extrémités
de la planète.
.« ADN » pour Anaïs, Delphine et Noeline.
Les séances du lundi des semaines impaires seraient en principe réservées
à l’équipe « HLM » (Henri, Laurent et Marion). Mais ni l’une ni l’autre ne se connaissent
pour ne s’être jamais croisées : c’est seulement une supposition logique
apparue au cours d’une de leurs nombreuses discussions.
C’est que tout fonctionne au sein de la CISA avec des abréviations. Il y a
« BCG » où les filles auront compris qu’il s’agit de Barbara qui s’en va avant
Noël, Charlie ou Charlotte ou les deux et Gustave. « MSN » (bientôt amputé du
« M ») dont elles entendent parler mais sans savoir qui est-ce hormis
le « N » de Nathalie, leur « patronne opérationnelle » en relai de Gustave,
leur « boss », et « DHJ » (également bientôt amputé du « J ») qui
représente vraisemblablement Dimitri qu’elles croisent, probablement le
hollandais qui passe de temps à autre pour le « H », et un autre
qu’elles n’auront jamais vu…
En réalité, le père José-Gabriel, du SIV, faisait seulement la liaison entre le
Vatican et Matilda autour des activités de Paul, au moins un temps, jusqu’à ce
que leur hiérarchie y mette un « holà », ce qui aura arraché à Paul
un « je vais te regretter, Matilda ».
Elle aussi, mais elle ne sait pas que ce n’est que provisoire…
Perdre le « M » de MSN et le « J » de
« DHJ », c’est un peu un « arrachement ».
Anaïs, la petite blonde-vénitienne à « magie-mèches » et queue
de cheval du trio vient habituellement à ces réunions de travail en Twingo
après avoir posé sa fille à l’école, Amandine. Une tradition familiale chez
elle : son père se prénomme Alain, sa mère Alexandra, etc. de génération en
génération au moins côté maternel, puisque son oncle s’appelle André, ses
cousins Adeline et Armand, tous ont un prénom qui commence par « A ».
Delphine, la grande blonde aux cheveux raides, très longs et souples, au
visage carré, arrive toujours en taxi et repart avec Anaïs qui la pilote.
Alors que Noeline, la « boulotte » qui cache bien son jeu d’hyper-athlète
du combat à mains-nues, châtain-clair, cheveux courts, parfois teints en blond
ou en blond-vénitien, vient en moto et en tenue de cuir intégrale qui moule ses
formes de façon provoquante.
Un rendez-vous avec Gustave, le CEO de la CISA, Chief Executive Officer,
le DG opérationnel, un grand-vieux-sec et mince aux cheveux argentés et «
l’actionnaire », « Charlie », le « Big-boss », qu’elles n’ont jamais croisé, où
elles sont accueillies par Barbara la Secrétaire-Générale dont tout le monde
sait qu’elle va partir pour être démissionnaire, une grande-maigre un peu rêche,
sèche et sans menton, qui les conduit au second étage : pas question qu’elles
restent seules à vadrouiller dans les vastes locaux de la bâtisse qui s’étalent
sur plusieurs niveaux en suivant la pente naturelle du coteau où elle est
plantée.
Quitte à poireauter une poignée de minutes, assises dans « le sas »
sécurisé de l’entrée après avoir notifié leur présence à l’interphone.
Quand elles ont été embauchées par Nathalie, Barbara et Gustave (« NBG »
?), on leur a expliqué sommairement que l’immeuble, « le siège », accueillait
plusieurs activités de « Charlie-l’actionnaire » et qu’elles n’avaient pas
en savoir plus pour des raisons de sécurité et de confidentialité.
Une démarche un peu suspecte au premier abord, et elles ont pu croiser
entre-elles plusieurs informations qui les ont rassurées : rien d’illégal !
L’immeuble abrite effectivement des opérations commerciales de ventes
d’alcool, dirigées par un dénommé Loïc, le-beau-gosse, gérant de « Prestige
spirits » qui parcoure les campus universitaires européens avec sa petite
équipe, Bertrand et Claire qu’elles croisent parfois et qui a son siège social
à Dublin, mais son principal entrepôt ici-même. Ils occupent effectivement les
rez-de-chaussée et l’arrière du bâtiment en contre-bas où ils reçoivent et
expédient des cartons de bouteilles, par périodes… deux à trois fois dans
l’année moment où ils se font assister par quantité d’étudiants en
stage-entreprise qui passent et repassent sans arrêt et sans contrainte «
sécuritaire », eux.
Au premier étage se situent les bureaux ouvrant sur le patio intérieur
clos d’une grande verrière qui illumine l’ensemble : « le bocal » en, jargon
interne.
En façade sur rue, Barbara pilote encore son monde en compagnie d’un
dénommé Jean-Charles lui aussi démissionnaire, un peu comptable, un peu
secrétaire, un peu « grand-organisateur », un peu bourru, qui ne manque jamais
une œillade déplacée, et leur assistante qu’est Élodie, une petite-menue parfois
avec de grandes lunettes qui lui mangent tout le visage qu’elle a par ailleurs
fort gracieux, toujours illuminé d’un sourire charmeur et béat. Et Nathalie, la
« cheftaine », rousse, moche, pleine de taches de rousseur sur le visage et les
bras, qui les avait si rudement, impitoyablement sélectionnées et ensuite
entraînées dans des exercices commandos invraisemblables en des lieux
improbables.
Parfois, elles croisent un dénommé Dimitri, le « D » de « DHJ », qui
occupe aussi le premier étage, mais sur les côtés du patio central : c’est
l’informaticien qui dirige lui aussi une petite équipe et s’enferme dans ses
locaux tapissés d’écrans d’ordinateur, bourrés de câbles de toute nature, avec,
de temps en temps, un homme qui surgit à l’improviste de ses cavernes, le « H »
de « DHJ », la barbe-fleurie, les cheveux toujours en pétard, un hollandais
d’après son accent, rotant des relents de bière-forte dès le début de la
matinée, qui a un rire qui perfore véritablement les cloisons à les faire
trembler : un jour, elles exploseront ou tomberont en mille pièces, n’en
pouvant plus, c’est absolument certain !
Ceux-là aussi travaillent pour la CISA, comme elles. Ils ont mis au point
et font évoluer un logiciel d’espionnage électronique anti-terroriste surnommé
en interne par le sigle « BBR » (encore un !) que le monde entier s’est arraché
et qui justifie d’une part de la présence d’une fourgonnette de protection de
gendarmes, de CRS ou de militaires stationnée la plupart du temps devant la
porte sur l’aire de déchargement des cartons d’alcool de Loïc, ou de l’autre
côté de la chaussée, à cheval sur le trottoir et, d’autre part, des quelques
allers-et-venues « d’officiels » gouvernementaux, français ou étrangers,
parfois prestigieux semble-t-il, vues les escortes de motards qui les
accompagnent, mais qui repartent la plupart du temps, tendus ou déçus.
Toutes ces personnes connaissent « l’actionnaire-Charlie », mais pas
elles…
Et ça les fait vraiment fantasmer à chaque fois qu’elles passent la porte
d’entrée : se montrera-t-il cette fois-ci ?
La seule chose qu’elles connaissent, c’est sa voix, un peu nasillarde pour
être également assez déformée, mais qu’importe.
Il faut s’habituer, et à l’occasion de ces rendez-vous bihebdomadaires,
les participants sont en relation avec « Charlie-l’actionnaire ». Lui les voit
à travers une série de webcams disposées tout autour de la pièce, elles non.
Rarement s’affiche sur le grand écran accroché entre les deux fenêtres, un
paysage marin, vraisemblablement tropical, avec une mer bleue-turquoise des
îles des mers du sud en premier plan, une plage de sable blanc dans le fond,
des palmiers et des cocotiers sur lequel se lève le soleil. Parfois les
haut-parleurs laissent tomber le bruit d’oiseaux marins, pour compléter le
tableau : c’est à ces occasions que l’on se rend compte que les sons sont
réellement déformés.
C’est du « direct » : parfois les mêmes mouettes traversent l’écran, un
chat également, avec sa queue dressée en point d’interrogation, le museau d’un
chien, et quand il se fait plus tard dans la journée, l’esquisse d’une
silhouette féminine en général en maillot de bain … « étriqué » !
Pas assez longtemps et toujours mal cadrée pour permettre une
identification sérieuse.
Le reste du temps, cet écran sert à afficher des documents ou photos,
voire le sigle de la CISA, blanc ourlé d’or sur fond bleu-roi, pour bien
rappeler où se situe cette salle de réunion, à proximité du bureau de Gustave.
De quoi en déduire que l’émetteur de cette liaison se situe dans les
caraïbes : cinq heures de décalage, entre 10 et 11 heures du matin à Paris (pas
assez pour le pacifique où il fait nuit), ça doit donner ça et les levés de
soleil sont presque toujours magnifiques quand elles en sont gratifiées
quelques courts instants.
Quand la liaison est établie, ça commence toujours par un joyeux « Bonjour les filles ! En forme ? » auquel
elles répondent joyeusement et en chœur « Bonjour
Charlie ! ».
« Bonjour Gustave ! »
Salut auquel il répond « Bonjour
Charlie. »
Alors quoi de neuf ce matin ?
Immuable.
Une affaire urgente : « C’est
quoi cette « affaire-urgente », amiral ?
C’est extraordinaire ! « Ça
commence par un K, un double K, comme Kim Kardashian. Vous vous souvenez ?
Les hasards de la vie, tout de même… »
Où en est-on avec cette première ?
« Charlotte a mis la police sur
la piste que le logiciel « BBR » nous a indiqué. On devrait voir des
développements dans quelques jours. En attendant, le garde-du-corps a été
blanchi. »
Et cette fois-ci il s’agit de qui ?
« De Kurjey Khromaktuthang ! »
Ah oui, c’est bien vrai, ça : « Kurjey comment ? »
Kurjey signifie « l’empreinte du Corporelle » en dzongkha …
« En quoi ? » demande
une des filles du groupe ADN.
« En dzongkha. La langue
officielle du Bhoutan, » répond Paul alias « Charlie »
depuis les haut-parleurs posés le long du mur, encadrant l’écran qui y est
accroché toujours « muet ».
« Khromak-truc-Tchang, je
croyais que c’est aussi une marque de pellicule photo ou de shampoing… »
Mais non, « Charlie » n’y est pas du tout !
« Khromaktuthang ! C’est le nom
d’un de leurs généraux que j’ai eu sous mes ordres en instruction il y a
quelques années de ça », en dit Gustave.
Racontez-nous !
« Avant-hier, j’ai envoyé un texto
pour lui souhaiter un bon anniversaire. »
Ah oui ! Vous êtes restés intimes !
« Je fais ça à tous mes
officiers. »
Paul note qu’il n’a pas de souvenir similaire…
« Oui mais vous, c’est
particulier. D’abord j’ai oublié votre date de naissance et ensuite, je vous ai
déjà mis aux fers. Donc vous êtes hors de mes fréquentations habituelles… »
C’est qu’il a l’air sérieux, quand il dit ce genre de choses, l’amiral
Morthe-de-l’Argentière : les filles en restent médusées…
Elles sont impatientes d’en savoir plus, désormais.
« Il a remercié par retour. Ça
me permet de savoir qu’il est toujours vivant et également de lui faire savoir
que je suis encore de ce monde… »
Charmante attention, s’il en est ! C’est à celui qui restera le premier
sans réponse…
« Mais hier, il m’a appelé
directement sur mon portable en retour. Sa fille a été enlevée à Budapest jeudi
dernier. »
Budapest ou « Bouddha-Pecht » ? « Quelle
drôle d’idée ! »
Les filles du groupe « ADN » ont du mal à suivre la conversation, marquant
quelques signes d’impatience, tout en la trouvant finalement assez drôle et
instructive…
« Il est marié avec une française
depuis plus de 20 ans, une soprano en représentation en Hongrie. Ils ont eu une
fille, Kurjey… »
La bien-nommée … « Empreinte Corporelle »…
« … et elle a été enlevée à son
hôtel dans la nuit du 29 au 30. Je lui ai proposé notre aide, sachant qu’il est
solvable puisqu’il est apparenté à la famille royale du Bhoutan. »
Réaction de « Charlie » : « Bonne initiative, Gustave : ça évitera d’avoir à gérer une guerre
Hongrie/Bhoutan ! »
… un blanc…
« Mais dites-moi, ils ont une
armée, dans ce pays-là ? »
Et alors ? « Bien sûr qu’est-ce
que vous croyez ! 18.000 hommes sous les drapeaux formés par l’Inde. Leur
budget annuel doit tourner autour de 13,7 millions de dollars, soit un peu plus
d’1,8 % du PIB du pays. »
Presque mieux que la plupart des pays de l’OTAN.
« Attendez, Gustave, si je me
souviens bien, c’est un pays de montagne, ça, le Bhoutan. Ils n’ont pas de
débouchés sur la mer et pas de marine. Et je ne crois pas que le réchauffement
climatique ait pu faire monter le niveau marin jusque-là : on me l’aurait
fait savoir, tout de même… Alors qu’est-ce que venait faire votre
élève-officier princier sous nos tropiques-marins ? »
Ils n’ont pas plus d’armée de l’air et pourtant le général est pilote et
venait voir les jolis navires de guerre de la « Royale » évoluer dans
leur élément naturel.
« Non mais, qu’est-ce que vous
croyez « Charlie » ? Ce n’est pas parce qu’on porte un uniforme qu’on a
forcément les idées courtes ! »
On imagine que l’ambassade locale et la Stasi polonaise…
« … Hongroise… »
… sont sur les dents. « Oui,
hongroise. »
Nouveaux rires discrets du groupe « ADN ».
Parfois, « Charlie » décoiffe vraiment.
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