Bienvenue !

Oui, entrez, entrez, dans le « Blog » de « l’Incroyable Ignoble Infreequentable » ! Vous y découvrirez un univers parfaitement irréel, décrit par petites touches quotidiennes d’un nouvel art : le « pointillisme littéraire » sur Internet. Certes, pour être « I-Cube », il écrit dans un style vague, maîtrisant mal l’orthographe et les règles grammaticales. Son vocabulaire y est pauvre et ses pointes « d’esprit » parfaitement quelconques. Ses « convictions » y sont tout autant approximatives, changeantes… et sans intérêt : Il ne concoure à aucun prix littéraire, aucun éloge, aucune reconnaissance ! Soyez sûr que le monde qu’il évoque au fil des jours n’est que purement imaginaire. Les noms de lieu ou de bipède et autres « sobriquets éventuels » ne désignent absolument personne en particulier. Toute ressemblance avec des personnages, des lieux, des actions, des situations ayant existé ou existant par ailleurs dans la voie lactée (et autres galaxies) y est donc purement et totalement fortuite ! En guise d’avertissement à tous « les mauvais esprits » et autres grincheux, on peut affirmer, sans pouvoir se tromper aucunement, que tout rapprochement des personnages qui sont dépeints dans ce « blog », avec tel ou tel personnage réel ou ayant existé sur la planète « Terre », par exemple, ne peut qu’être hasardeux et ne saurait que dénoncer et démontrer la véritable intention de nuire de l’auteur de ce rapprochement ou mise en parallèle ! Ces « grincheux » là seront SEULS à en assumer l’éventuelle responsabilité devant leurs contemporains…

lundi 31 octobre 2016

Eurexit is coming…


Juste un petit post pour votre week-end prolongé…

Votre prochain pont est en effet attendu pour l’ascension 2017 (25 mai), mais vous aurez quelques week-ends prolongés : 11 novembre, 17 avril pour le lundi de pâques, 1er et 8 mai 2017 pour compenser le fait que Noël et le jour de l’an prochain tombent un dimanche…
J’en profite pour relayer quelques nouvelles du front… des sceptiques européens qui m’inquiètent au plus haut point, dans la mesure où ils tirent tous la sonnette d’alarme avec de plus en plus de vigueur, alors que je suis à bord de mon voilier pour finir sa mise en hivernage, comme d’autres rentrent leurs plantes dans l’attente des premières gelées.


Il faut dire que l’année qui se termine aura été « sévère » : Le « Brexit », certes (et on va y revenir), après les contingences imposées aux Grecs, le tout sous couvert de crises internationales monétaires, migratoires, économiques et géopolitiques…
Les guerres, les conflits, on vit décidément dans un monde particulièrement instable voire dangereux, avec sa ribambelle d’attentats et ses flots de réfugiés ininterrompus.
Faut effectivement avoir les nerfs drôlement solides et bien accrochés pour vivre l’âme en paix, à nos époques !
Et encore plus récemment, la « sortie » du gouvernement Wallon reprise mercredi dernier sur ce blog (je ne vous fait pas le lien : C’est encore « tout chaud » et d'ailleurs, ils sont revenus dessus. Nous aussi, mais plus tard).

Pour ma part, je note pour vous, là encore parce que vous n’aurez que peu de relai dans votre quotidien habituel (je dis là encore, parce que pour demain je vous réserve un post sur Snowden que je viens de programmer sur l’espion américain exilé en Russie, où je fais œuvre de relayer ces informations qui ne vous sont pas accessibles depuis la « Gauloisie-gauloisienne » le même motif) que le dernier « coup » nous vient de Hongrie.
Un pays européen qui fêtait sa fête nationale la semaine dernière, le 23 octobre.
Viktor Orbán, son « patron » n’a pas hésité : l’Union européenne, selon lui, est en voie de « soviétisation » !
Rien de moins…

Une caricature ? Non, il sait de quoi il parle, lui : En 1956, la Hongrie est une république « populaire », manière de rappeler qu’elle vit alors dans la sphère d’influence de l’Union soviétique, peu soucieuse de démocratie.
Du 23 octobre au 10 novembre, l’insurrection de Budapest entend mettre fin à la dictature. Les étudiants, premiers à descendre dans la rue, sont rapidement rejoints sur le pavé par une foule de citoyens hostiles au régime.
Budapest est relayée par l’ensemble du pays.
Et le pays en révolte y croit, pensant à tort avoir derrière lui le monde-libre désireux de porter un coup fatidique à l’URSS.
Vous connaissez la suite : La révolution, sur le point d’aboutir, est écrasée.
Et plus tard, dans la même veine, ce sera Prague, en pleine révolutions estudiantines en occident, qui protestent aussi contre les bombardements au Vietnam.
Ils veulent surtout ne « pas faire la guerre », comme tous les peuples qui y ont tout à perdre, y compris leur jeunesse…
Les troupes soviétiques envahissent le pays, reprennent Budapest et étouffent les voix discordantes jusqu’à faire taire toute opposition pendant trente ans. 

Écoutons-le : « Les peuples qui aiment leur liberté doivent sauver Bruxelles de la soviétisation, de gens qui veulent nous expliquer comment nous devons vivre dans nos propres pays. »
Eh oui, l’homme qui a fait ériger un mur à sa frontière (un de plus…) pour éviter l’envahissement par les migrants syriens (qui fuient la paisible administration de « Babar-Chat-elle-a-sale » et les exactions des troupes libératrices russes en lutte contre l’EI terroriste) a également rappelé son opposition à la politique d’accueil mise en place sur le continent, ciblant notamment la Commission européenne qui a fait « le choix du modèle le moins coûteux, le plus dilué, le plus confortable, préférant les immigrés à ses propres enfants, préférant la spéculation au travail »…
La charge, là, en une seule phrase !…
Si ce n’est pas un signal d’alarme bien sonore, qu’est-ce donc d’autres ?

Le Premier ministre hongrois en a profité pour rappeler les héritages ayant mené à la liberté : « En tant qu’héritiers de 1956, nous ne pouvons permettre que l’Europe se coupe des racines qui l’ont grandie et qui nous ont aidés à survivre à la répression soviétique. Il n’y a pas d’Europe libre sans États-nations et sans les milliers d’années de sagesse dues au christianisme. »
J’aurai préféré qu’il parle de « judéo-christianisme » et fasse référence aux démocraties antiques, mais bon…
Pour lui, assurément europhile, il se pose paradoxalement comme l’opposant numéro un à l’Europe dite « de Bruxelles ».
Extraordinaire, non ? 
Et de vous rappeler justement le « Brexit ».

Car « mes sources » confirmaient déjà en début de semaine dernière : Ils cherchent tous des locaux disponibles rapidement, à Paris où Francfort, par dizaine de milliers de mètres-carrés. Et les agences immobilières étaient sur les dents.
C’est fort drôle, finalement : Le peuple a voté la liberté et devinez quoi, les businessmen de la City, qui ont fait la réputation mondialement connue de la place de Londres, votent avec leur pieds !
Vous n’étiez pas nés, moi si, et je me rappelle fort bien qu’à l’inverse, si le « mur de fer » est tombé en Allemagne de l’Est, c’est parce qu’ils étaient des dizaines de milliers à « voter avec leur pieds » en passant par l’Autriche…
Depuis l’Autriche a aussi renâclé à la perspective du CETA et vote pour un président d’extrême-droâte… même qu’ils prennent le risque de remettre ça !

C’est curieux, l’Histoire : Il y a trente ans, le « Big Bang » introduit par « Maggie-la-dame-de-fer » dérégulait la finance et ouvrait une ère dorée.
La crise financière de 2008, puis le « Brexit », remettent radicalement en cause cette domination 30 ans plus tard, une génération, au moins autant que le Hongrois.
Chez un des « potes-de-mon-Boss-à-moi » l’un des associés d’une boutique de gestion de fortune n’y allait pas par quatre chemins : « On prépare nos cartons pour déménager à Paris. Moi, j’avais de toute façon prévu de rentrer pour des raisons personnelles à l’été 2018. Mais avec le Brexit, on va très probablement déplacer toute l’entreprise. »
Avec seulement dix personnes, la structure, qui gère 1,5 milliard d’euros, est très légère et peut facilement se déplacer.
Une décision définitive sera prise probablement début 2017.
Ou à Noël.
Goldman Sachs envisage ainsi de transférer entre 1.000 et 2.000 postes londoniens à Paris ou à Francfort. 
Un autre cadre-dirigeant d’une des plus grosses banques de la planète est tout aussi catégorique : « Nos plans pour déménager sont prêts. On attend que « Théière Mai-juste-n’en-peut-plus », la première ministre, lance officiellement les négociations de retrait de l’Union européenne, ce qu’elle a promis de faire d’ici à mars 2017. Si on n’y voit pas plus clair à ce moment-là, on mettra à exécution nos plans. »
Dans un premier temps, plusieurs centaines d’emplois seront transférés. Destination probable : La « Gauloisie » ou la « Teutonie ».
Figurez-vous que si le choix n’est pas totalement bouclé, ce n’est pas tant une question de foncier disponible : Il y a des bureaux vacants tant à la Défense qu’à Francfort. C’est à cause que les rumeurs persistent sur une scission de la zone euro !
Euromark à Francfort, Euro-tout-court à Paris, Rome n’étant pas aussi bien équipé en infrastructures téléphoniques. Quitte à déménager, autant n’avoir pas à le refaire dans 4 ou 5 ans…
Et vous aurez noté que jamais Bruxelles n’apparaît dans leurs choix…
On se demande bien pourquoi, n’est-ce pas.
Et personnellement de rappeler le risque « Gaulois » de voir le pays politiquement basculer vers un extrême compliqué à gérer à plus ou moins long-terme.
Ce à quoi on me rétorque que je suis un oiseau de mauvais augure et que de toute façon « le marché » n’y croit pas.
Et d’avoir le dernier mot : « Les marchés n’ont pas cru au Brexit non plus… »
Manque d’anticipation, sourds aux fameux « signaux d’alarme » (qui persistent…).

Le directeur général de l’Association des banquiers britanniques, Anthony Browne, cité par The Observer, a signalé que « le débat public et politique actuel nous menait dans la mauvaise direction », annonçant la décision des principales banques britanniques de se relocaliser.
Selon lui, le « Brexit » signifie pour les banques non seulement l’imposition de tarifs supplémentaires sur le commerce, mais également sur d’autres secteurs.
« La trajectoire actuelle menace non seulement le libre-échange, mais le droit légal des banques de fournir des services », a-t-il souligné.
« La plupart des banques internationales ont maintenant des équipes de projet affairées à mettre en branle les opérations nécessaires afin d’assurer une continuité de service auprès de leurs clients, la date à laquelle cela doit se faire, et la meilleure façon de le faire », a-t-il fait savoir.
« Leurs mains tremblent sur le bouton de relocalisation. Plusieurs petites banques prévoient d’engager très rapidement le processus de relocalisation avant Noël, les grandes banques devraient emboîter le pas dès le premier trimestre de l’année prochaine. »
Optimiste, dans le même temps, il a suggéré que Londres et sa City, en tant que centre financier international, pourrait « survivre ».
Combien de temps au juste ?

Qu’est-ce qui est en jeu ? Tout simplement une histoire de passeport financier !
C’est la grande obsession de Londres du moment en ce moment, à tel point que les conseillers de la « Théière Mai-juste-n’en-peut-plus » menaçaient d’abaisser l’impôt sur les sociétés à 10 % (contre 20 % aujourd’hui) si le précieux sésame lui était supprimé, transformant la place londonienne en « paradis-fiscal » mieux que Dublin.
Dublin travaille déjà en Euro, à la différence de la capitale de l’empire britannique.
Francfort est au cœur de l’Europe de l’euro-fort.
Paris aux confluents entre l’Europe du nord et celle du sud.
Rome est trop excentrée géographiquement…

Et pourquoi est-ce si important ? Parce que ce passeport (en réalité, il en existe plusieurs versions : Pour les fonds, pour les banques, pour les assurances, etc…) permet aux établissements de la City de vendre des produits financiers dans l’ensemble de l’UE, tout en n’étant régulés que dans un seul pays.
Donc, donc, pas de passeport, pas de business en Europe, tout simplement.
Combien d’entreprises sont concernées ? Selon le régulateur britannique, elles sont 5.500 à se partager 336.000 passeports financiers, sachant qu’il en faut un pour chacun des pays membres de l’UE.
S’ils venaient à leur être retirés, ce sont entre 4.000 minimum à 35.000 emplois qui pourraient quitter Londres, soit entre 1 % et 8 % de la main-d’œuvre de la City  selon le cabinet Oliver Wyman.
Et autant de CA et de masse salariale en moins jusqu’à proximité de Saint-Paul’ en passant par les docks (reconvertis en quartier « bobo-des-affaires »).

À mon sens, c’est déjà plié : Même si Londres paye, achète le droit d’opérer pour ses banquiers – et au nom de quoi le contribuable devrait y consentir, puisqu’il refuse de payer, ce qui a justifié au moins pour partie le vote du « Brexit » ? – de toute façon, c’est sous réserve d’une réciprocité quant au principe de la « libre circulation des personnes », justement le sujet qui a pu fâcher…
Donc c’est peu probable.
Juste pour rappel et à titre d’exemple, même la Suisse, dont les gestionnaires de fortune, banquiers et financiers sont pourtant loin d’être des nains, s’est vu refuser ce passeport financier, alors que l’Helvétie a pourtant approuvé la libre circulation des personnes !

Ceci dit, je constate avec horreur que la plupart des « concentrés de neurones » parmi les plus affûtés du moment se refusent encore à voir les réalités et entendre les rumeurs de l’opinion.
C’est finalement assez drôlatique : Souvenez-vous, il n’y a même pas deux ou trois ans, tout le monde vous assurait que la zone euro exploserait, ne tiendrait pas le choc des crises !
Ils ont tous oublié leurs « fines analyses », spéculant à tout va contre l’Euro et… et, et finissent par s’y réfugier au moment même où elle n’a jamais été plus fragilisée !
Vraiment incroyable, finalement.

dimanche 30 octobre 2016

Laudato si… (LVII)


Cinquante-septième chapitre : Les difficultés d’Anjo.

Avertissement : Vous l’aviez compris, ceci n’est qu’un roman, une fiction, une « pure construction intellectuelle », sortie tout droit de l’imaginaire de son auteur.
Toute ressemblance avec des personnages, des lieux, des actions, des situations ayant existé ou existant par ailleurs dans la voie lactée (et autres galaxies), y compris sur la planète Terre, y est donc purement, totalement et parfaitement fortuite !

L’objectif est de protéger les activités et avoirs de Paul en se débrouillant pour qu’on ne mette pas trop le nez dedans. Ou, si ça devait arriver, que ce soit rapidement détecté.
Et il a du mal à comprendre, le banquier portugais. Pour lui, il s’agissait seulement d’échapper au fisc-rapace : tous les mêmes !
Et pour ça, il est arrivé sous le soleil d’hiver avec une série de montages juridiques en tête qui dépaysent la totalité des sièges sociaux et ses propres futurs problèmes de gestionnaire du « fric-planqué » du Trésor français qui sert à faire baisser les taux d’emprunt de l’Agence France-Trésor.

Il explique en commençant par ce sujet qui le tient à cœur, avec ses mots à lui que ces actions sur les marchés, se portant acquéreur de la dette nationale où il se sert d’intermédiaires classiques, ont certes portés ses fruits au démarrage. Il continue sous les instructions de Paul. Et pour ce faire, son boulot consiste à recéder ses souscriptions sur le marché, en seconde main, afin de refaire sa trésorerie et se porter candidat aux émissions suivantes.
Seulement voilà, il est question que la BCE fasse le même métier. Ce qui risque de compliquer étrangement son travail.
« Je ne vois pas pourquoi, si c’est le cas ! » s’interroge Paul. « Ce sera même plus simple, non ? »
Non, pas vraiment.
« Non seulement la BCE, banque centrale, parfois dénommée aussi « de dernier recours », donne des tours de vis successifs aux taux qu’elle pratique en vue de fluidifier les marchés obligataires et on envisage désormais qu’elle peut entrer dans des taux d’intérêts négatifs. »
Mais pas seulement : « Il se pourrait, car ses experts en étudient les conséquences, qu’elle lance des QE, à son tour, comme la BoE, la FED et la BoJ. »
Et ça prendra quelle forme ?
« Jusque-là elle avait un programme de « Securities Markets Programme » (SMP), de ceux qui sont réalisés dans le cadre de son programme d'assouplissement quantitatif, depuis 2015. »
Le programme « Securities Markets Programme » (SMP) a été lancé en mai 2010. Il consistait à racheter sur le marché secondaire les obligations souveraines des États de la zone euro faisant face à la défiance des investisseurs, qui exigeaient des primes de risques élevés pour acquérir ces titres. La Banque centrale européenne (BCE) a ainsi procédé au rachat d’obligations du Portugal, de l’Irlande, de l’Italie, de la Grèce et de l’Espagne pour un montant total d'environ 220 milliards d’euros. Ce programme est aujourd’hui arrêté.
« Il a été remplacé en septembre 2012 par le programme « Outright Monetary Transactions » (OMT), qui n’a toutefois pas débouché sur l’acquisition de nouveaux titres par la BCE. »
Ces rachats effectués dans le cadre du programme SMP n’ont pas donné lieu à de la création monétaire. En effet, si la BCE procédait bien à des injections de liquidités lors de ses rachats, elle procédait à la « stérilisation » de ses interventions.
« Cela signifie qu'elle intervenait auprès des banques pour retirer le même montant de liquidités que celui qu’elle leur avait apporté en rachetant les titres de la dette publique. Par exemple, si la BCE rachetait sur le marché secondaire de la dette publique des titres d’une contrevaleur de 5 milliards d’euros, elle allait dans le même temps procéder à une reprise de liquidités pour un montant global de 5 milliards d'euros également. »
Opération blanche et ainsi autofinancée.
La reprise de liquidité de la BCE dans le cadre d’opérations « de stérilisation » correspond à un emprunt auprès des banques. Cet emprunt (désigné sous le terme de « reprise de liquidité en blanc ») prend la forme d’une facilité de dépôts rémunérés. Les banques ont la possibilité de placer leurs excédents de liquidité, à concurrence du montant fixé par la BCE et selon une procédure d’appel d'offre, dans un compte ouvert auprès de la BCE.
Ces montants sont rémunérés, contrairement à ceux qui sont placés en excès du montant des réserves obligatoires. Mais le taux de rémunération de ces dépôts est inférieur au taux de refinancement principal de la BCE.
« Or, la BCE a annoncé le 22 janvier dernier (2015) le lancement d’un programme d’assouplissement quantitatif (« quantitative easing » en anglais), portant sur le rachat sur le marché secondaire de titres obligataires souverains et privés d’un montant de 1.140 milliards d’euros échelonnés entre mars 2015 et septembre 2016 à raison de 60 milliards par mois. »
Tout le monde sait ça…

« Comme pour les rachats opérés dans le cadre du SMP, ceux-ci seront financés par la BCE par des injections de liquidités dans le système financier. Toutefois, ils s’en distinguent par le fait que cette injection de monnaie n’est pas stérilisée, ce qui implique que le montant de la masse monétaire de la zone euro s’accroît pour autant que les euros nouvellement émis viennent se déverser dans l’économie réelle par le biais de la distribution de crédit par les banques ou par l’achat des nouvelles émissions obligataires des États de la zone euro. »
Ok, c’est l’effet recherché, non ?
Mais jusque-là, ça ne s’est passé comme ça. Car, les investisseurs qui ont reçu les liquidités de la BCE en échange de leurs titres obligataires ont souvent décidé de les réinvestir dans d’autres actifs financiers, comme les actions, y compris hors zone euro (obligations américaines par exemple).
Les investisseurs ont pu aussi décider de conserver ces liquidités. « C’est le cas, en particulier, des banques de la zone euro qui détiennent un stock important de titres de la dette obligataire des États membres de la zone euro. »
Les banques ont pu aussi apporter une partie des titres qu’elles détiennent à la BCE mais utiliser les liquidités obtenues pour se désendetter ou les placer dans leurs comptes de réserves à la banque centrale plutôt que de les utiliser pour octroyer davantage de crédits aux entreprises ou aux ménages.
Par conséquent les euros qui sont injectés dans le système financier par la BCE lors de ses rachats d’obligations souveraines ou privées se traduisent bien par une augmentation de la masse monétaire de la zone euro, mais sans provoquer un assouplissement d’obtention des crédits pour les entreprises et les ménages.
« Ce qui revient à dire que la création monétaire opérée par la BCE dans le cadre de son programme d’assouplissement quantitatif est indirecte, dans le sens où elle ne peut transiter que par le canal de la distribution de crédit par les banques commerciales de la zone euro ou via le réinvestissement des liquidités dans les nouvelles émissions obligataires des États de la zone euro et s’est montrée assez peu efficace sur la distribution de crédit par les banques, qui dépend surtout de la demande des entreprises et donc des perspectives de croissance ! »
Et, ces perspectives ne sont toujours pas bonnes.
« Mes petits collègues ont des stratégies de réinvestissement qui les empêchent de vendre leurs titres à la BCE, et notamment du réemploi des liquidités obtenues de celle-ci dans l’achat de titres des nouvelles émissions obligataires des pays membres de la zone euro. Comme nous. »
Anjo est donc en concurrence féroce avec nettement plus gros que lui…
Ils servent de garanties dans le cadre des critères de Bâle et comptent dans les « stress-tests »…
Jusque-là, Paul suit la démonstration, et ne voit pas du tout en quoi ça complique le travail d’Anjo.
Mais ce dernier poursuit dans ses considérations de macro-économie-financière…

C’est que la situation est différente pour la FED et la BoE. À l’inverse de la BCE, elles ont le droit d'acheter directement des titres de la dette publique sur le marché des émissions primaires. « Elles peuvent donc directement financer une partie du déficit public américain et anglais. Ce faisant, elles « monétisent » la partie du déficit public qu’elles financent, ce qui revient à créditer le compte du Trésor en monnaie nouvellement créée qui a son tour viendra gonfler la masse monétaire via les utilisations qu'en fera le Trésor (traitement des fonctionnaires, paiements des fournisseurs, achats, investissements publics). »
Par ailleurs, en se portant acquéreurs d’obligations émises par le Trésor, la FED et la Banque d’Angleterre pèsent directement sur la demande de titres de la dette publique et donc sur la détermination des taux d'intérêt, ce qui est l’objectif principal de ces interventions.
« Le fait de pouvoir souscrire aux émissions primaires de la dette publique confère donc deux avantages pour des économies confrontées à des conjonctures économiques difficiles : stimuler automatiquement le gonflement de la masse monétaire et donc injecter des liquidités dans l’économie et peser directement sur la formation des taux d’intérêt lors des émissions primaires des titres obligataires publics. »
Cependant que le même résultat (baisse des taux d’intérêt à long terme sur les emprunts d'État) a pu être obtenu par la BCE en intervenant sur le marché secondaire de ces titres.
Or, les pays de la zone euro étant très endettés, les dettes d’État abondent. Il en existe 7.000 milliards d’euros en circulation. Pour un stock d’émission évalué autour de 12.000 milliards.
« La BCE ne peut racheter que des titres biens notés par les agences de notations. Ce qui exclut a priori les titres grecs et chypriotes et se porte sur les titres des Pays-Bas, allemands, belges, français, italiens mais dans des proportions égales au poids économique desdits pays concernés ».
La BCE peut acheter elle-même les titres, et les garder sur son bilan, ce qui fait partager les risques financiers à l’ensemble des États membres de la zone euro ou partager la tâche avec les banques centrales de chaque pays.
Or depuis, l’inflation est à un niveau jugé « extrêmement bas » par le président de la Banque centrale européenne. « On s’attend à ce que les prix dans la zone euro recule de 0,2 % en ce mois de décembre, pour un niveau sur l’ensemble de l’année à + 0,2 % ».
Et selon son mandat, l’institution financière doit certes maintenir le taux de l’inflation sous les 2 % « mais pas à un niveau trop éloigné de ce seuil maximal ».
Cette tendance de fond fait craindre à la plupart des pays de la zone euro, à l’exception de l’Allemagne, que l’Europe s’installe dans la déflation, « c’est-à-dire la « diminution générale et durable des prix », selon la définition commune. Le risque c’est que la baisse des prix se transmette aux salaires, et affaiblisse encore la croissance. »
Et la déflation, c’est grave. « Au moins aussi grave que l’inflation, et plus difficile à combattre. La déflation, c’est le cauchemar des banques centrales, car il est très difficile d’en sortir, si ce n’est en recourant massivement à la planche à billets… »
Et ce fléau économique sévit depuis deux décennies au Japon malgré toutes les mesures adoptées au fil du temps !
« Certes, les prix reculent surtout en raison de la chute des prix du pétrole, considérée comme une bonne nouvelle pour la zone euro. Mais le danger guette, notamment dans le sud de la zone euro où les prix reculent depuis plusieurs mois. Et c’est pour éviter de tomber dans le piège, que la BCE veut agir. Avant qu’il ne soit trop tard. »
Bon et alors ?

« Eh bien, depuis cet automne les banques centrales rachètent déjà de la dette privée, à savoir des obligations sécurisées et les ABS, des titres adossés à des crédits : j’ai du mal à en trouver dans l’attente des échéances des émissions suivantes. Et ça va devenir de pire en pire si je dois rester sur de l’Euro ».
On ne trouve plus de candidats à la vente de leurs titres. « Les obligations allemandes par exemple, valeur refuge, seront tellement prisées que même avec des taux négatifs, personne ne voudra les céder ne serait-ce que pour maintenir son assise financière. Et les banques centrales hors d’Europe, autre source potentielle, ne sont généralement pas vendeuses, car elles utilisent ces titres comme réserves de change. »
Conséquences ?
« Il est probable que ces QE de la BCE vont s’orienter tôt ou tard vers les obligations émises par les grandes entreprises européennes, voire parapubliques et éventuellement se prolonger au-delà des échéances prévues. Peut-être même s’accélérer. Je ne sais pas.
Qu’est-ce qu’il faut que je fasse ? Je peux, oui ou non, me porter sur des marchés étrangers ? »
Non ! C’est de l’argent du contribuable français, pas question de l’utiliser pour financer les déficits étrangers ou des entreprises étrangères.
« Vous me dites que tôt ou tard, les rachats de la BCE sur le marché secondaire vont s’orienter sur les entreprises émettrices de papier. Eh bien, si votre anticipation est la bonne, anticipez donc et allez-y vous aussi… »
Ou alors qu’il conserve le papier souscrit auprès de l’AFT…
« Mais on va manquer de moyens ! C’est qu’il est gourmand en émission d’OAT, le trésor français. Plus de 180 milliards prévu l’année prochaine. On ne va pas pouvoir suivre. »
Qu’il se porte alors sur les émissions à vue ou très court terme et garde un peu de réserve pour peser sur le très long-terme à éventuellement refourguer…
« Ok, mais ça va diminuer nos marges sur le business intermédiaire ! »
Et alors ? « On n’est pas payé pour ça. C’est juste du bonus. »
Qu’il en a l’air tout dépité…

« Ne vous en faites pas : pour compenser, vous allez devenir gérant de mes avoirs personnels au-delà de ce que vous avez déjà en compte. »
Comment ça ?
Là, à ce moment et au fil de l’exposé qui suit, Anjo se pose sérieusement la question de savoir si son vis-à-vis a abusé ou non du mojito local ou s’il l’a mélangé avec un planteur ou un daïquiri…
C’est que ça porte sur le bulbe, le rhum des tropiques, surtout avec des glaçons !
Mais non.
En effet, Paul lui explique qu’il va disparaître, devenir « invisible » et extrêmement mobile, pour des tas de raisons inavouables : « Les femmes… Vous comprenez, les femmes, il me faut en changer tous les jours, désormais… »
Qu’est-ce donc cette histoire-là ?
« Eh bien c’est simple à comprendre : je suis escagassé par les maris cocus, toute une troupe qui s’est liguée pour me faire la peau. Alors, je vais devoir disparaître. »
N’importe quoi, là !
« Mais non, mais non. Je suis très sérieux. Je vais vous dire, ce n’est pas la première fois qu’un mari jaloux me tire dessus. Et parfois ça prend des proportions démentes. Tenez, la première fois, c’était des talibans au-dessus des montagnes afghanes. Plus tard, c’étaient des coréens-du-nord et les mêmes encore récemment… »
Là, c’est sûr, il déconne complètement…

« On m’a tiré dessus à Paris à deux reprise et jusqu’en Ardèche. J’ai été victime d’hidalgos ibériques à Barcelone furieux ne qui voulaient me faire la peau. J’ai eu droit à cette cinglée, ma belle-sœur, qui voulait m'arracher le foie pour le greffer à son père et récupérer ma bite pour sen faire un sex-toy.  J’ai même reçu une balle dans le dos entre les omoplates au large de la Corse : résultat, trois semaines de coma.
Y’en a même eu un qui a fait faire un tir au pigeon par des ukrainiens alors qu’il me croyait à bord du MH 17 ! »
Là, c’est sûr : il débloque totalement !
« Mais si, souvenez-vous de ma première fausse identité pour gérer les fonds de la République laissés à vos bons soins. On a dû en changer, n’est-ce pas ?
Parce qu’officiellement je suis mort dans cet accident-là.
Et encore, plus sérieusement, on vient de m’envoyer un tueur à gage de réputation mondiale jusqu’en Normandie. Je ne suis plus en sécurité nulle part et il convient non seulement que je prenne l’habitude de déménager fréquemment mais aussi d’utiliser plusieurs identités à la fois, tout en poursuivant mes activités. Notamment les récentes.
Mais je vais vous expliquer : il s’agit aussi de protéger ces activités et mon patrimoine qui y est attaché. J’ai deux gamins, qui pour l’heure sont à l’abri, mais ça peut ne pas durer et ils vont avoir besoin de fonds au moins autant que moi pour survivre à cette situation-là que je leur léguerai tôt ou tard, et dans des conditions à peu-près normales et acceptables.
Vous me suivez ou vous rêvez ? »
Anjo, le banquier, là, il a vraiment du mal.
Est-ce du lard ou du cochon ?

« Bon, grosso modo, j’ai fait mon premier million de dollars, et c’était des francs, à la sortie de l’adolescence en faisant une opération de promotion immobilière autour de l’hôtel particulier de mon grand-oncle où j’habitais. Ce n’était pas à moi à l’origine et j’ai enrichi ma grand-tante et mes petites cousines. Et puis j’ai seulement pris mes plus-values au titre de mes commissions.
Globalement, j’ai tout claqué pour payer mes études, et ai investi une bonne partie dans un hôtel à Kotor en association avec un pote de promotion de sup-aéro. Et le reste l'a été dans mon premier voilier, le Lisbeth, coulé par un connard de djihadiste au large du Tage. C’est à ce moment-là qu’on s’est d’ailleurs croisé la première fois.
Ledit hôtel est en SA locale et je suis titulaire de 50 % des actions.
Par la suite, j’ai un peu merdé en faisant salarié-mercenaire pour une belle-veuve, mais ça m’a permis de mettre quelques ronds de côté pour m’offrir un petit-loft à Paris, quai de Seine en face de Notre-Dame, pas mal mais parfois trop étroit et reprendre mes locaux d’abord loués, au Kremlin-Bicêtre, dit « le siège ».
Quoiqu’à la même époque, j’ai créé, mais c’était pour rendre service, l’activité de « Prestige Spirit ». Là, au départ, c’était « en nom propre », j’ai fait un maximum de tunes en un seul coup et me suis fait rincer par le fisc-national. Depuis, c’est une SARL dont j’ai les deux tiers des parts sociales qui a du mal à retrouver l’étiage initial : 7 méga-euros hors droits, hors TVA et hors vignettes de cotisations, avec finalement assez peu de frais !
J’en suis encore le gérant, mais c’est dirigé par son directeur-associé depuis peu, un dénommé Loïc et il veut déménager à Dublin pour optimiser les impôts à venir.
Que je vous dise, derrière, il y a ma secrétaire générale et Jean-Charles qui assurent le back-ground avec compétence « au siège ». C’est un truc qui doit fonctionner tout seul et dégager à terme entre un demi-million et un million de dividende par an sans rien faire, si on y arrive : assez pour avoir de quoi vivre pas trop chichement.
Avec les fonds dégagés de la première saison qui était exceptionnelle, d’autant que j’ai fait du portage de part de mon fournisseur pendant un temps, ce qui a rendu un peu de jus, j’ai pu aussi financer les murs de « Château-sur-Cher » de ma pote Mylène. Je suis titulaire de 100 % du capital social de la SCI à l’exception de 2, qui porte les murs. Elle ne paye pas ses loyers, mais ce n’est pas l’objectif. »
Paul s’arrête quelques instants pour vider son verre.

samedi 29 octobre 2016

Laudato si… (LVI)


Cinquante-sixième chapitre : Cap sur les caraïbes.

Avertissement : Vous l’aviez compris, ceci n’est qu’un roman, une fiction, une « pure construction intellectuelle », sortie tout droit de l’imaginaire de son auteur.
Toute ressemblance avec des personnages, des lieux, des actions, des situations ayant existé ou existant par ailleurs dans la voie lactée (et autres galaxies), y compris sur la planète Terre, y est donc purement, totalement et parfaitement fortuite !

Les financements, ce n’est pas encore un problème depuis le coup réalisé grâce à George, son MIB, sur les BKR-A, que même Anjo en est resté tout retourné.
Ça devait être pour développer le « 003 », mais là, il va prendre du retard…
« En revanche, je verrai bien le matériel informatique enterré sous le hangar que vous allez faire bâtir de l’autre côté du petit-bois (et de la colline). Quitte à ce que Nathalie, qui ne voudra pas venir vivre jusqu’ici, puisse piloter la machine depuis une tête de pont dans l’immeuble du siège des « Prestige Spirits » au Kremlin-Bicêtre. Là-bas, la sécurité des matériels n’est pas forcément assurée, c’est bien trop dense en racailles diverses et pas forcément bien intentionnée, et toujours à la merci d’un coup de sang des autorités, comme on l’a vécu avec le « Comité Libecciu » (cf. épisode « Mains invisible », publié aux éditions I-Cube) »
Gustave acquiesce : « Il faudra simplement prévoir une bonne liaison à très haut débit. »
Plusieurs même, de la fibre optique : une devant, et une passant par l’hôtel, « Les collines de Cabourg », à travers les bois…
« – De toute façon, j’aimerai qu’on pense à avoir une alimentation EDF classique, mais aussi une de secours qui passe par l’hôtel en plus d’un groupe de secours et d’un onduleur qui lui sera indispensable pour une alimentation de qualité : le réseau du pays est bourré de microcoupures. D’ailleurs, et tant qu’à faire, une petite arrivée d’eau, un recyclage des eaux-usées et un petit passage discret jusqu’à l’hôtel me permettrait de vivre en autarcie prolongée sans avoir à me mettre à découvert. À prévoir, si ce n’est pas trop cher et ne défigure pas les bosquets ! 
– Peut-être, mais je ne comprends pas : de toute façon on va vous repérer, dans le coin. Le voisinage va bien voir nos travaux, non ? Et se poser des questions.
– Pas de souci. C’est administrativement un abri anti-aérien, officiellement un site de recherche, d’où la partie enterrée, officieusement un laboratoire de l’armée à entrée interdite, ce qui justifiera la présence de clôtures sécurisées un peu inhabituelle dans le bocage. Et n’apparaîtront en surface que le bulbe végétalisé de l’entrée du hangar qui rattrapera la pente originelle, d’après les plans laissés par Florence, la guitoune de contrôle et des petits bureaux au-dessus.
Pas question de montrer les installations invisibles derrière ledit hangar, ni ce qu’il y aura en-dessous : ça n’existe même pas !
Mais le reste, on pourra faire visiter aux plus curieux, ou aux plus anxieux en toute quiétude. »
Pas idiot…

D’autant qu’effectivement, les plans sont prêts et les contrats d’entreprise, le terrassement, le béton et le gros-œuvre, sur le point d’être signé.
Avec toutefois une difficulté pas encore tout-à-fait réglée : Paul veut un cuvelage et un drainage sous et autour des installations, ce que la nappe phréatique n’impose pas, mais aussi une particularité assez spéciale que les gens du cru ne savent pas proposer. Il s’agit d’utiliser de la ferraille à béton, destinée à donner un peu de « souplesse » aux efforts de flexion à supporter par le béton, en acier inoxydable, traité antirouille et enduit d’une étanchéité en néoprène.
Une façon de parer et prévenir le « cancer du béton » : l’humidité du béton au moment de son coulage, mais aussi les microfissures propres à ce matériau et sa relative porosité par micro-capillarité finissent par attaquer l’acier des fers. Se faisant, ceux-ci rouillent et en rouillant, ils gonflent. Or, quand ils changent de volume, ils exercent une pression qui finit par fendiller le béton ce qui accélère le phénomène de destruction de l’ouvrage.
Or, la solution existe, mais, elle est coûteuse, elle ralentira le chantier qui dès lors ne peut être réalisé que par une entreprise au fait de ces techniques : il ne s’agit pas d’un vulgaire « bétonneur » avec sa toupie qui espère que le retrait hydraulique se fasse tout seul.
« Là, il faut faire comme en Sibérie : chauffer le béton pour le renforcer et accélérer les réactions chimiques des ciments. »
Ce qui pose quelques difficultés aux entreprises du cru.
Morthe-de-l’Argentière n’aura plus qu’à surveiller le plus étroitement possible.
Justement.

« Dites donc, mon cher, tout cela est bien beau venant d’un subalterne comme vous, mais je deviens votre maître-d’ouvrage délégué avec des missions bien plus étendues que prévu… »
Que ça vaut bien quelques compensations financières.
« Bien sûr, Amiral. C’est également prévu. D’autant que si votre emploi-du-temps le permet, il va falloir que vous vous amarriez aussi à Barbara et son assistante pour recruter les premiers équipages de « nos voitures », que vous leur donniez en plus, avec Nathalie, un minimum de formation et qu’à mon retour on ait une équipe à tester en terme de « protection-volante ».
C’est quoi encore, ce nouveau mystère ?
« À l’occasion, on va pousser le dispositif jusqu’à ses limites par tests successifs dès qu’il sera près. »
Et il voit ça comment, le « chef » ?
« Oh, très facilement. J’ai trois équipes qui tournent bruyamment sur tous les campus universitaires d’Europe pour vendre « mes petits-flacons » en deux saisons. Il suffit de tester nos propres équipes de recherche de renseignement sur ces « anonymes-là » en les prenant pour cible.
Et puis, je vais même vous dire, comme vos équipes n’ont pas besoin de me connaître et que je dispose de deux identités de couverture, on peut jouer comme ça indéfiniment.
Mieux, à l’occasion, on peut même inventer un avatar de moi-même en faisant circuler une carte bancaire et un téléphone portable à travers toute l’Europe pour dérouter n’importe qui : ceux qui ne me veulent pas que du bien, et vos détectives à affuter.
Qu’en pensez-vous, amiral ? »
Que ce n’est pas idiot non plus, mais va demander un peu de temps et des fonds.
« Ma protection personnelle d’abord, incognito, mais attention, des gusses aussi capables de mener de vraies enquêtes en profondeur à la pêche des renseignements manquants de Nathalie et de sa base de données sur les menaces pesant sur nos « cibles-virtuelles ».
Notez qu’en plus, toutes ces équipes ne me croisent jamais. Sauf sous couverture et ignore mon rôle dans toutes ces affaires : au mieux, je n’existe pas, au pire, je suis un client assidu et chiant ! »
Ça va être charmant tout ce micmac…
« C’est mon ultime protection : je reste une ombre, un fantôme en qualité de de Bréveuil, au moins tant que les menaces qui planent autour de moi ne sont pas levées. Et quand bien même, il y en aura d’autres qui vont probablement naître : un patron invisible, ça intriguera forcément… »
Il ne serait pas plus simple de s’enterrer quelle que part sur une île déserte ?
« On en a déjà causé : je ne peux pas ! »

Et puis il y a deux raisons tactiques qui viennent à l’esprit de Paul :
« Premièrement, je n’ai pas du tout envie de finir paranoïaque comme tous ces milliardaires que j’ai pu croiser qui se promènent avec une armée privée.
Qui d’ailleurs ne sert à rien face à des gens décidés, juste à leur compliquer les choses. Alors certes, je vais en avoir besoin, mais comme on en a dit, si la mise de fonds je l’assume, en revanche j’écrase les coûts de fonctionnement en partageant les dispositifs, parce que ma tirelire n’est pas infinie. Alors ils ont d’autant plus intérêt à être performants. »
Logique, c’est le format originel de la CISA.
« – Deuxièmement, dans une situation de grand-danger, la vie m’aura appris et confirmé que celui qui ne bouge pas, dans cette lutte du glaive contre le scutum, le bouclier des légionnaires romains, il est toujours le perdant.
Et dans mon cas, c’est ma peau que je risque.
Je l’ai déjà assez mise en jeu par le passé, pour désormais en prendre soin. Faut pas croire que le SIS ou le SIV feront éternellement barrage avec leurs moyens, et je ne compte même pas sur nos effectifs nationaux : ils n’ont pensé qu’à augmenter la densité des patrouilles de gendarmerie dans le coin et pour quelques temps, mais rien à Paris ou au Kremlin-Bicêtre. Et alors, l’examen des menaces, ça leur est complètement passé par-dessus le képi !
Pourtant, on en a fait, tous les deux, pour la sécurité d’autrui, que ce soit à Paris ou en Afghanistan.
Alors, il me faut prendre le relai. Et là, je compte sur vous pour mettre tout ça en place en mon absence. Puis-je ?
– Naturellement, c’est même passionnant, mais ça ne répond pas à ma question…
– Avec ou sans les ticket-restaurant ? »
Rappel d’un fou-rire passé chez Maxim’s…
En fait, Gustave finira par être associé, exactement usufruitier des parts de la société à créer, sa fille naturelle se portant ainsi associée-nue-propriétaire, lui assurant une succession future, hors droits à payer, qui pourrait la laisser avec en héritage de son père naturel un outil de travail qu’elle aura elle-même monté et qu’elle saura donc utiliser.
« Elle ne porte pas le même nom que le mien et ça pourrait nuire à mes futures démarches auprès des autorités… »
S’il veut, après tout…

« – Eh bien, je vous remercie, ça va plus qu’arrondir mes fins de mois de pensionné des armées. Mais nos sécurités à nous, à moi, à ma famille, à toutes les équipes à recruter et à leurs familles ?
– Mais ils sont inclus tous dans le même dispositif de la sphère de « couverture de sécurité ». En priorité permanente, bien sûr… »
Voilà qui est rassurant : tout le monde a intérêt à être performant.
« Mieux que ça ! Quelle crédibilité aurions-nous dans ce projet, s’il y avait le moindre pépin à déplorer ? »
Ceci dit, les grands axes ayant été plus qu’ébauchés, il convient d’adapter le second-œuvre des locaux à creuser à ce cahier des charges et finir de solliciter les autorisations, voire la collaboration des autorités, qu’elles soient françaises, anglaises, vaticanes ou autres.
Tout comme il faut embaucher du monde. Des chauffeurs, certes, mais des gars un peu baraqués et sportifs pour faire illusion.
Barbara s’en occupera, aidée d’Élodie, sa nouvelle assistante, de Gustave et de sa fille Nathalie pour la recherche des antécédents des impétrants.
Quant à Paul, il s’occupe de l’équipage pour sa traversée de l’atlantique alors que Mylène va venir à la rescousse pour faire tourner son restaurant refait « à son goût » et plus tard baptisé « Cuisine de filles »…
Une idée à elle.

Sur ces entrefaites, « beau-papa » et « belle-maman » font le détour à l’improviste chez Paul, qui les recevra dans sa cuisine, le chantier de rénovation envahissant de gravats les locaux, avec un prétexte gros comme ça d’une envie subite de découvrir le « Mémorial pour la paix » de Caen : il faut dire qu’il ferme en janvier, en général, pour permettre des petits travaux d’entretien et de remise en état.
Une idée qui a germée dans l’esprit du maire de Caen, Jean-Marie Girault en 1969, lui qui a vécu la bataille de Normandie en jeune adolescent qu’il était et a assisté, impuissant à la destruction totale de son cadre de vie et de sa ville en 1944.
Le 10 septembre 1986, les 13 premières pierres du bâtiment sont posées sur l’emplacement du poste de commandement du général Richter, commandant la 716ème division d’infanterie allemande pendant le Débarquement et la Bataille de Normandie. Le bâtiment est inauguré le 6 juin 1988 par le président de la République nouvellement réélu en présence des chefs d'État ou de gouvernement de onze autre pays impliqués dans la Bataille de Normandie.
Depuis, tous les « D-Day », c’est l’occasion de festivités autour du souvenir de la bataille de Normandie gagnée par les alliés, avec visite d’officiels au cimetière militaire américain de Colleville-sur-Mer : plus de 400.000 visiteurs/an et la famille « Rantanplan » n’y seraient jamais passés ?

Très embarrassés « beau-papa-belle-maman »…
Viennent-ils annoncer l’imminence du mariage de leur unique fille ?
Pas du tout, pas du tout ! Ils veulent comprendre pourquoi Paul n’a pas « régularisé » ni avant la naissance d’Annabelle ni après celle de Louis.
« Écoutez, on aurait « régularisé », comme vous dites, ça n’aurait rien changé. Elle est tombée sur un bellâtre archi-multimilliardaire et même si elle devra partager sa fortune avec sa première épouse à lui, il en restera assez pour que je ne sois plus dans la course, là. Faut la comprendre… »
Il est en train de leur expliquer calmement que leur fille est vénale, comparable à une bagasse ou une gourgandine à pluri-milliards et ils ne réagissent même pas : curieux, non ?
Pas une once d’indignation…
« Et puis, imaginez la situation si nous avions dû divorcer ? Elle aurait inventé n’importe quelle histoire pour en justifier et vous aurait demandé d’apporter votre témoignage contre moi pour je ne sais quelle turpitude à imaginer. Vous auriez fait ça, vous les grands-parents des petiots à l’encontre de leur père ? Non mais imaginez un peu la suite, les affaires de garde, les droits de visite et tout le toutim…
Là au moins, c’est plus simple. »
Sidérés !
Il approuve alors ?
« Non pas du tout, pensez bien ! D’abord parce qu’on n’a rien réglé des problèmes autour des enfants, mais qu’en plus l’autre con ne sait pas encore à quelle sauce il va être mangé pas la mère de ses propres gosses.
Je ne suis pas contre les familles recomposées, mais là, à mon sens, ça va être saignant avant qu’ils trouvent un accord. »
Et de rajouter que comme emmerdeuse, il semble qu’elle se pose là : il a failli en goûter, d’ailleurs… qu’elle était partie pour une « nuit de compensation » dans les bras de Paul, cocu pour cocu, à laquelle aurait bien participé la veuve toute-neuve de n° 4, la belle-marâtre !
Cocasse, quand on y songe…
« Votre fille n’a pas fini d’en baver ! Mais pire que ça, Junior, je le connais et j’étais un ami de son père. Or, son père vient d’être assassiné pour des raisons de pognons. Une affaire pas très claire, mais qui porte sur des dizaines de milliards de dollar disparus…
Alors bon, je serai Florence, tel père, tel fils, moi, je me méfierai. Je dis ça, je n’ai rien dis ! »
Beau-papa est le premier à avoir une réplique, pendant que « belle-maman », toujours aussi décolorée, rumine du neurone en mâchouillant nerveusement son chewing-gum :
« – On m’a dit que vous-même, tout n’étiez pas très clair… L’attentat ici même. Florence nous a raconté… vos… vos aventures…
– Mes aventures, comme vous dites, c’était avant la conception d’Annabelle. Quant aux… incidents ici-même, c’était juste un racketeur qui cherchait à m’acheter la boutique pour pas cher. Il a envoyé des « casseurs » et ça a mal tourné pour eux parce qu’ils ont cru malin de venir avec des kalachnikovs. Ce n’est pas pareil. »
Une façon comme une autre de voir les choses et de couper court à toute autre explication…
« – Et ils ne sont pas près de revenir. Vous avez vu les flics dehors ? Vous avez croisé, la « roussette » envoyé par Elizabeth II et le cureton que le Vatican m’a envoyé en protection ?…
– Le Vatican ?
– Bé oui ! Vous vous souvenez tout de même de votre passage à Londres, chez la Reine Elizabeth, où j’ai reçu l’ordre de je ne sais plus quoi pour services rendus à la couronne. Le GCVO ou « Chevalier Grand-croix » (cf. épisode « Mains invisibles », chapitre XXII, des enquêtes de Charlotte publiées aux éditions I3), je crois. Bé le Vatican en a rajouté, figurez-vous et pour les mêmes raisons. Mais votre fille n’y est pas allée.
– Ah bon ? Des mains du Pape ?
– Et de qui d’autre ? Tout ça pour vous dire qu’entre des voyous qui s’étripent sur les bords d’un océan lointain pour des dizaines de milliards volés et mes petites frappes-locales, compte tenu des appuis et protections dont je dispose, je ne suis pas bien sûr que Florence ait fait le meilleur choix, question sécurité.
Enfin tant pis. Moi, si je m’inquiète c’est pour mes enfants, c’est tout… »
Ils sont repartis … « secoués », c’est le minimum qu’on puisse dire.
Même si Paul sait très bien qu’objectivement et pour l’heure, elle est finalement plus en sécurité là où elle est sous la protection du FBI, plutôt qu’à se terrer ici auprès de lui, puisqu’il n’a pas d’autres solutions à lui proposer.

En attendant, Paul fignole son départ sur Phillipsburg. Il s’agit d’armer Eurydice et de finir de recruter l’équipage. Shirley sera de la partie, mais ce serait bien d’avoir deux gars robustes pour les manœuvres de pont et les quarts.
Deux « tatoués » repérés sur les docks du Havre et qui sont partants non pas pour la solde, mais parce qu’ils peuvent embarquer leur minette…
Ce qu’on ne rencontre plus vraiment dans la marchande, hors les officiers.
Dans le tas, Éric le moins costaud mais le plus « civilisé », semble accroché par l’idée de faire du cabotage dans les caraïbes. Reste qu’il n’a aucun diplôme de « chef-de-bord ».
Quant à leur « poulettes », ce n’est pas de la première qualité : l’une rentre aux îles avec ses formes agressivement rondelettes et cuisine les acras et le « colombo » avec passion, l’autre n’est pas trop tatouée, mais ne sait pas ce que c’est qu’un rasoir : c’est « nature », avec des touffes qui sortent de partout… Faut aimer.
En exagérant à peine, Chubaka ferait presque imberbe, à côté…

Ils lèvent l’ancre avec la marée descendante du matin, l’aube à peine naissante pour trois petites semaines sans histoire.
Malgré la température qui pince, la goélette est vraiment ravie de gonfler ses voiles, d’enfiler la petite houle presque en se vautrant de plaisir dans l’écume d’étrave.
Naturellement, la traversée du golfe de Gascogne est un peu plus agitée, Paul mettant cap sur le Finistère ibérique tout en évitant tant faire ce peut la route des cargos qui remontent d’Afrique vers le rail d’Ouessant.
Puis, d’une méridienne à une autre, vers la hauteur de Madère, ils enfilent les alizées qui les mènent tout droit sur Saint-Martin.
Qui n’a rien d’extraordinaire même en hiver et même à Noël.
Bon d’accord, le climat est doux quand il fait beau, on sent quand même un peu la densité de fric, les gens n’ont pas l’air malheureux, mais c’est moche.
Une ville qui s’étend sur un bras de lagune, une grande plage et 3 avenues, une multitude de rues sur quelques kilomètres, la mer devant, la lagune derrière, Phillipsburg n’a d’intérêt que son port de commerce et ses sièges sociaux.
En revanche, côté français, la façade nord-est, c’est déjà nettement plus sympathique.
Enfin, question de goût et d’appétence. Mais au moins il y a du relief à se mettre sous la rétine.
De l’autre côté aussi faut-il noter, mais ça n’a pas le même cachet.
Et puis la lagune y est là plus énorme, avec juste un étroit goulet qui rejoint la haute-mer. Au fond y est installé l’aéroport de Juliana-Princess, là en bord de plage : impressionnant de voir les jumbos vous passer au ras de la casquette…

Au nord, Anguilla, plus à l’ouest, les îles vierges britanniques et dans leur sud les mêmes mais américaines, au sud Saint Barth, nettement plus touristique et plein de charmes.
Saint-Barthélemy, c’est une île française des Petites Antilles et une collectivité d’outre-mer (COM) au sens de l'article 74 de la Constitution depuis le 15 juillet 2007.
Avant cette date, à laquelle le changement de statut a pris effet lors de la première réunion du conseil territorial nouvellement élu, elle était une commune et un arrondissement, dépendant du département d’outre-mer de la Guadeloupe.
Assez magnifique, mais de droit fiscal tricolore, sa TVA à taux îlien qui regorge à toutes les étiquettes des magasins de luxe, en font une vraie attraction… touristique.
Plus loin Saint-Kitts et Nevis, Antigua, Montserrat, la Guadeloupe, Dominique, la Martinique, Sainte-Lucie, Saint-Vincent et les Grenadines, la Barbade et Grenade, avant de déboucher sur Trinidad et Tobago tout proche du continent sud-américain. Un grand domaine à explorer.
Que des noms à faire rêver étalés sur seulement quelques centaines de mille-nautiques : un paradis pour des croisières de rêves sur un yacht de caractère !

Mais Paul n’est pas venu pour faire du tourisme, seulement confier son voilier à un tour-opérateur un peu plus sérieux que d’autres, ravi de disposer d’une telle unité, et pour « l’intendance » à réaliser avec Anjo qui débarque avec plein d’idées plein sa tablette.
Tel que l’organigramme de l’ensemble des activités va sérieusement se compliquer, mais il ne sera pas le seul à y mettre son grain de poivre.